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 [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers

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Kaahl Paiberym
~ Sorcier ~ Niveau VI ~

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◈ Parchemins usagés : 4085
◈ YinYanisé(e) le : 25/06/2015
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Kaahl Paiberym
Jeu 10 Mar 2022, 21:43



Que l'Ombre dévore


« Qu’est-ce que tu fous ? » La question était sortie après une minute de silence. Avais-je respiré durant tout ce temps ? Je n’en savais rien. Je m’étais figé, simplement figé. Que faisait-il ? Comment me considérait-il maintenant ? Comme un ami ? Je grimaçai. Je n’aimais pas cette idée. Je n’étais pas son ami. Bordel, je n’étais pas son ami ! Je ne l’aidais pas pour obtenir son amitié. Je ne l’aidais pas non plus pour avoir sa reconnaissance. Ce n’était pas ça. Je le savais et je n’étais pas le seul à le savoir. Mon père avait lu ce que l’égarement m’avait fait écrire. Mes rêves revenaient toujours, inlassablement, à ce que j’espérais obtenir de lui. Et ce n’était pas sa putain d’amitié ! L’entendre me remercier me faisait mal. Le sentir contre moi me torturait. Il ne comprenait rien. C’était un Réprouvé. Comment aurait-il pu comprendre ? Ils étaient tous aussi bêtes que leurs pieds. Alors quoi ? Bientôt il m’imposerait des accolades et me proposerait de boire en sa compagnie en me parlant des femelles de son entourage ? J'allais le buter.

Ma main remonta vers sa gorge et s’enroula autour de son cou, en une pression ferme mais supportable. « Qu’est-ce que tu fous ? » répétai-je. Je savais que j’avais exécuté le même geste, plus tôt, celui de le serrer contre moi. Je me savais aussi stupide que lui. Seulement, j’avais cette impression d’instabilité. Je voulais plus. Je voulais plus et ça me faisait peur, parce que je savais que ce n’était pas son cas, parce que je savais que ce n’était pas possible. J’aurais pu me défendre s’il avait été une fille. J’aurais argumenté que j’avais voulu essayer de baiser avec elle, dans le seul but de constater à quel point les Bipolaires étaient dégueulasses. J’étais un homme, j’avais le droit. Mais le fait qu’il fût à la fois mâle et Réprouvé ne me laissaient aucune marge de manœuvre. Je n’aurais aucune excuse. Jamais. « Lâche-moi et va dormir avant que je change d’avis. On n’est pas amis, toi et moi. Ne l’oublie jamais. »


Mon regard resta un instant planté sur le pelage dru du loup. Je le quittai pourtant des yeux pour faire face à l’Aile d’Acier. Elle n’était pas mauvaise dans son nouveau rôle. Douée, même. Le fait qu’elle me donnât la réplique me plaisait au-delà de ce que j’aurais cru. Nous ferions un couple d’escrocs sensationnel. « Qui a parlé de retirer ça ? » la questionnai-je à mon tour, en baissant légèrement la tête sans la perdre de vue. J’aurais pu sourire mais mon expression resta fermée. Elias n’avait pas pour habitude de jubiler d’une situation. Pourtant, je devais avouer que, malgré moi, malgré mes émotions, je ressentais une forme de satisfaction à la savoir soumise à mes moindres désirs. Je savais le sentiment vain. Je ne désirais pas d’une esclave en épouse. Néanmoins, le peu de mesquinerie qui m’habitait ressortait, par pure vengeance. Je pouvais lui demander ce que je désirais, lui donner des ordres : assise, couchée, debout, au pied, sois sage. « Hum. » fis-je, d’un ton très peu intéressé par ses questionnements. Je pris d’ailleurs un parchemin et commençai à rédiger une lettre, comme si sa présence n’était qu’anecdotique. « Taisez-vous. » finis-je par trancher. « Et ne bougez pas. » ajoutai-je, par mesure de précaution, avant de continuer ma tâche. Elle aurait été capable de s’approcher et de frapper ma table sous le coup de la colère. Il m’aurait alors fallu la frapper elle.

Le temps passa, si bien que la pile de documents qui se trouvait sur la partie gauche de mon bureau se déplaça progressivement à droite. J’apposai ma signature sur une feuille, rebouchai mon stylo et croisai de nouveau mes mains sur la surface lisse. « Il s’agissait d’une question rhétorique. » lui dis-je, avec tout le sérieux du monde.

Je me levai et fis le tour de mon bureau. Je passai derrière elle, la regardai et me positionnai de façon à lui faire face. Ma magie léchait son corps avec avidité. Mon index se plaça sous son menton et je levai son visage vers le mien. « Pourquoi tant d’interrogations ? L’ignorance est parfois plus confortable que la connaissance. » susurrai-je. J’approchai mes lèvres de son oreille. « Vous deviez bien vous douter qu’en refusant de m’épouser, vous finiriez par avoir des ennuis. Mais il semble que vous les aimez, les ennuis. Sinon pourquoi essayer de tuer les Chanceliers des Ténèbres et, pire, l’Empereur Noir ? » Je la fixai après m’être reculé. Personne ne le disait encore. Pourtant, ça ne saurait tarder. Le Procureur ne la ménagerait pas. Il désirerait faire un exemple, qui qu’il fût. « C’est ce que tout le monde dit et ce sera à votre avocat de démontrer le contraire. Une bien lourde tâche. » Je fixai Priam. « Si votre frère reste un animal et si vous demeurez sans époux entre temps, nous vous trouverons un maître. Il n’y aura pas de procès dans ce cas. Vous dépendrez du bon vouloir de celui qui vous possèdera et, croyez-moi, certains payent très cher pour voir les esclaves se faire violer et torturer. » Je ne faisais qu’énoncer une vérité. Les esclaves n’avaient plus aucun droit une fois le contrat avec les Mayfair signé. « Vous avez de la chance d’être encore une chose inappropriée. Surtout, vous avez de la chance d’être la compagne d’un Marquis. Il fera sans aucun doute barrage aux tentatives d’appropriation qui ne manqueront pas d’affluer dans les jours à venir. » Je baissai mon visage vers le sien. « Cependant, il se pourrait que je demande à être votre maître. Il me serait aisé de convaincre les Mayfair, en souvenir de la Coupe des Nations. » Si je prenais goût à lui murmurer des horreurs, il  n'en restait pas moins qu'elle devait comprendre que mon entreprise était plus qu'hasardeuse. Je n'avais pas la main sur tout. Je pouvais influer. Pas contrôler à cent pour cent. Elle devait déjà être heureuse d'être en vie. « Marquis est un titre élevé mais n’oubliez pas que certains Ducs pourraient être tentés de vous posséder. Il est donc crucial que votre procès se déroule rapidement. » Je marquai une pause et me mis à marcher en direction du loup. « Je tiens à la paix. C’est en son nom que je vous reçois actuellement mais ne vous croyez pas sauvée pour autant. Une femme ne décide jamais de rien et vous devriez vous préoccuper de vous au lieu de songer à vos frères. » Je me tournai vers elle. « Oh, j’oubliais : vous pouvez parler. » Alors, était-elle toujours douée pour jouer un rôle ? Je voulais qu'elle vînt, de l'autre côté du miroir, avec moi, entre les bras des illusions et des faux-semblants. Une fois qu'elle y serait alors peut-être comprendrait-elle. Comprendre qu'il était possible d'aimer et de haïr une personne à la fois, possible de lui promettre la torture et de vouloir admirer son visage se déformer sous la jouissance d'un même temps. Elle n'avait pas idée.

1060 mots
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Priam & Freyja
~ Ange ~ Niveau III ~

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Priam & Freyja
Ven 11 Mar 2022, 12:41




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



La première fois, Dastan n’entendit pas, ou fit semblant de ne pas entendre. Quoi qu’il fît, Érasme protestait toujours. Il finissait toujours par ronchonner, trépigner, grogner et s’insurger. Il jouait les rois tragiques, outrés, dépassés, énervés. C’était toujours comme ça et finalement, puisque c’était toujours comme ça, ce n’était pas grave. Rien n’était grave, ce jour-là. Plus rien ne pouvait être grave, après ça. Pas même la perspective d’être étranglé. Le Réprouvé riva son regard à celui du Sorcier. Il s’y accrocha, pour ne pas perdre pied, pour ne pas tomber, pour ne pas s’effondrer. Dedans, il y avait une lumière qui pouvait le guider, une lumière qu’il pouvait suivre Il ne répondit pas. Il savait très bien ce qu’il foutait, à moins d’être un handicapé social doublé d’un aveugle et d’un abruti. Il avait fait la même chose, quelques minutes plus tôt. Exactement la même chose. Le roux n’avait pas su lui rendre son étreinte : il le faisait maintenant. Il le faisait maintenant, et ça avait un goût de réalité parfaitement grisant. C’était comme plonger les deux pieds joints dans les eaux glacées d’un lac, du haut d’une falaise. C’était comme courir sur des braises brûlantes, le vent dans les cheveux et des ailes sous les pieds. Le cœur qui détale, l’adrénaline qui grimpe, le froid qui enrobe, le feu qui brûle. Ça atténuait la douleur de la bataille et l’inertie du traumatisme ; ça les effaçait presque. Il y avait cette étreinte, et puis le reste. Il était un Réprouvé : il connaissait les bénéfices des contacts physiques. À Lumnaar’Yuvon, les mains passaient sur les peaux et les vêtements à longueur de temps. On se touchait pour communiquer, autant pour se haïr que pour s’aimer. On reconnaissait l’existence de l’autre par la tactilité. Le contact occupait une place cruciale. Alors il savait, pour les étreintes. Il savait, pourtant, celle-là avait une saveur différente des autres. C’était comme une lueur au cœur de la nuit. Il ne le lâcha pas, parce que tout à coup, il eut peur de retomber dans les ténèbres. « Je sais. » répondit-il. « Et demain, on recommencera à se détester et à s’insulter. Mais aujourd’hui, c’est pas pareil. » Rien n’était pareil, et rien ne serait plus pareil. Il était trop tard pour faire marche arrière. Il répéta, les yeux dans le vague : « C’est pas pareil. Sinon, tu m’aurais tué. » Il se fit violence et finalement, parvint à relâcher la silhouette du Prince Noir. Ses mains tremblaient. Ses doigts brisés avaient bleui et le faisaient souffrir, comme le reste de son enveloppe corporelle. Il recula d’un pas, puis tourna le dos au brun. Il boita jusqu’à la porte et, devant celle-ci, se retourna à moitié, les sourcils froncés de réflexion. Il planta son regard dans celui de l’adolescent. « On est quoi, maintenant, Érasme ? » Parce que rien n’était plus pareil. Ils ne pouvaient plus être de parfaits ennemis – s’ils l’avaient été un jour.


Le premier ordre lui trancha les cordes vocales ; le second lui coupa les jambes. Les deux frappèrent son cœur d’un élan d’ire. Elle voulut lutter contre le carcan de magie qui rompait sa volonté, mais un long pic douloureux lui perça la nuque et elle eut l’impression que sa tête allait exploser. Elle grimaça. C’était lui, qu’elle allait exploser. Ses yeux verts lançaient des éclairs et ses mains tremblaient de colère. Mille malédictions tamponnaient le visage du Sorcier, si concentré sur sa paperasse de malheur. Elle voulait bien porter un masque et jouer. Elle le voulait bien, pour ne pas le compromettre, et pour ne pas se condamner. Elle était allée si loin que désormais, s’il chutait, elle le suivrait. Ce n’était plus qu’une question de protection : c’était une question de survie. Néanmoins, l’Aile d’Acier ne voulait jouer que sur un semblant de pied d’égalité. Comme nombre d’enfants de Réprouvés, elle exécrait la soumission. Elle détestait se savoir à la merci de quelqu’un, incapable de riposter. Toutes ses révoltes pouvaient être étouffées par seulement quelques mots. C’était un massacre. C’était pénible, long et insupportable, et il s’en amusait. S’il n’avait pas été Elias, elle était certaine qu’il aurait souri. Autour d’elle, sa magie s’énervait. Pourtant, elle n’agissait pas. Elle se contentait de rayonner et de souffler des filaments nacrés dont la forme et le mouvement des arabesques contaient l’état de l’Ange. Celle-ci avait conscience que, si elle l’utilisait, elle aggraverait son cas. Kaahl serait agacé, et Elias devrait la punir. Buter contre les probables conséquences de ses volontés avait un goût âpre. Derrière elle, elle entendait le loup gronder sourdement. Même lui n’osait plus japper ou grogner trop fort. Il n’était pas stupide, et certainement moins impulsif qu’elle – comme Priam l’était d’habitude. Elle se demanda ce qu’il aurait dit, s’il avait pu parler. Elle eut le temps de se demander beaucoup de choses, et de réfléchir deux fois plus.

Quand il reprit la parole, elle le fusilla du regard. Grâce à ses petits plaisirs narquois, tout n’était pas que masques et mensonges, au moins. En elle, ses émotions battaient des tambours de guerre. Il aurait suffi d’un rien pour que leur torrent ne se déchaînât. Elle était ainsi, elle l’avait toujours été : incontrôlable, émotionnelle, chaotique. Si la plupart de ses proches relations avaient toujours porté l’empreinte de l’ambivalence, celle qui l’unissait au Sorcier s’épanouissait à un degré plus élevé encore d’équivoque. Elle se tordait autour de son point névralgique, comme si la magie noire du Vautour agissait directement sur elle. Elle rendait l’Ange folle, de bien des manières et pas nécessairement des meilleures. Les dents serrées, elle subit l’assaut de son aura magique sans déployer la sienne. Néanmoins, elle s’agitait contre sa peau, à la fois curieuse et désireuse de détruire cet antagonisme imposé. Ses iris verts heurtèrent violemment les prunelles glacées de l’ex-Empereur. Elle avait envie de lui crier de ne pas la toucher. Sa vulnérabilité l’avait toujours accablée ; dans cette position-là, c’était pire. Il aurait pu ordonner n’importe quoi : elle se serait exécutée. Il pouvait faire tout ce qu’il désirait, et elle n’ignorait pas que ses désirs puisaient leur essence dans des contrées malsaines. Il était ce qu’il était : un Sorcier.

Son souffle contre son oreille fit descendre dans son dos un long frisson – rébellion épidermique contre ses assauts. Son cœur s’accéléra : son accusation était un mensonge. Pourtant, aucune surprise ne peignit son visage. Elle se doutait qu’ils ne la jugeraient pas sur des faits avérés. Ils réinterpréteraient son geste comme bon leur semblait, de sorte à en tirer le plus beau des spectacles. Ils se repaîtraient de ses déboires et les accentueraient autant qu’ils le pourraient. Elle était une Ange descendante de Manichéens, elle était liée à un Magicien, elle avait fait partie de l’armée de son peuple, elle avait refusé d’épouser l’Empereur Noir, elle avait soutenu les Réprouvés, elle avait essayé de tuer les Archimages et leur Monarque. Rien ne jouait en sa faveur et elle le savait parfaitement. Une vague d’appréhension la traversa, comme si elle mesurait seulement enfin toute l’ampleur problématique de sa situation. Elle savait que son action n’était pas sans risque. Elle n’avait jamais envisagé d’être ramenée au rang d’esclave. Pas une seconde elle ne s’était imaginée être ainsi jetée en pâture à la noblesse sorcière. Elle se sentait comme une biche poussée dans l’enclos des lions. Cette impression excitait d’autant plus ses énergies combattives. Elle ne faisait pas partie de ceux qui abandonnent.

Malgré la parole retrouvée, elle demeura silencieuse quelques instants. Dans son dos, elle entendait son frère, dont la fourrure était sans doute à nouveau hérissée. Acculé dans le coin de la cage opposé à Elias, il grognait, aussi menaçant que possible. Les iris verts de l’Aile d’Acier se figuraient sans peine le visage du Mage. Ils le découpaient méthodiquement. « Peut-être que vous devriez m’épouser. » Elle se tut. « Vous répareriez le tort que je vous ai causé lors de la Coupe des Nations, et moi j’amoindrirais mon risque de finir brûlée vive en place publique. » Un rictus narquois courba ses lèvres. Ce n’était pas ce qui se passerait : en ce qui concernait la punition et la souffrance, les Mages Noirs possédaient bien plus d’imagination qu’elle. « Vous ne me garderiez pas en tant qu’esclave, ce serait trop déshonorant pour vous. Je me sentirais libérée de ce fardeau-là, même si je resterais sous votre autorité. » poursuivit-elle. « Vos Sorciers se sentiraient un minimum obligés de me ménager, donc je me sortirais sans doute de ce procès sans trop de dommage. » Peut-être qu’elle se trompait, mais elle les imaginait mal massacrer la femme de leur ancien Empereur Noir, qui semblait encore tirer toutes les ficelles. « Et vous assouviriez tous vos petits fantasmes répugnants en pensant m’avoir sous votre coupe. » L’idée la dégoûtait. « Jusqu’à ce que je trouve un moyen de vous tuer et de partir d’ici. » Elle ferma brièvement les yeux. « Qu’est-ce que vous en pensez ? » Nouveau silence. « Moi, je crois que je préfère prier pour que mon frère redevienne humain et pour que le procès se tienne rapidement. » Autrement dit : plutôt mourir que de vous accueillir entre mes cuisses. « On devrait pouvoir s’entendre sur une date et sur le sort à réserver à mes frères. » Elle n’en démordrait pas. « Je tiens aussi à la paix, vous voyez. » ajouta-t-elle, moqueuse. « On devrait essayer d’y travailler conjointement, sans chercher à s’écraser à tour de rôle. » Elle hésita, puis glissa : « J’ai dit aux Réprouvés que vous seriez prêt à trouver un terrain d’entente pour éviter la guerre. Ils n’ont pas voulu m’écouter. Je serais peinée que vous me déceviez, vous aussi. »



Message IX – 1627 mots

Oui voilà, sans commentaire <3




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Kaahl Paiberym
Sam 12 Mar 2022, 19:49



Que l'Ombre dévore


Mes dents se serrèrent. Ma gorge était déjà nouée depuis quelques secondes. J’enfonçai mes yeux dans les siens. « On n’est rien. On ne sera jamais rien. » articulai-je sèchement. Ma voix était pourtant plus profonde qu’elle n’aurait dû l’être, comme si ma langue refusait de prononcer ces mots. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine. Je mentais. Je savais que je mentais. Mais il n’y avait que ça à faire. Il n’y avait aucun salut sur les graviers d’un autre chemin. Il me ferait tomber, ils m’écorcheraient. Nous n’étions rien. Rien.

Je tournai les talons, m’installai à mon bureau et pris un soin particulier à ne plus ni le voir ni l’écouter. Pourtant, lorsque je me remis à travailler, les formules qui parcouraient mes livres et mes cahiers n’étaient qu’un brouillard dénué de signifiant. Il n’y avait que lui dans mon esprit. Lui et son regard dans le mien. Lui et ses blessures. Lui qui boîtait. Son odeur, son toucher, le son de sa voix. Le papier me paraissait dépourvu du moindre intérêt. J’avais beau lire et relire les mêmes phrases, je n’arrivais plus à comprendre quoi que ce fût. Mes pensées se perdaient vers d’autres contrées à peine dix secondes après avoir commencé. Et mon égarement dura longtemps, si longtemps que lorsque le sort qui m’empêchait de sortir de ma tour fut défait pour permettre à la domestique d’entrer me servir mon repas, je ne l’entendis d’abord pas. Je sursautai soudainement et la fixai avec haine, avant de sentir une once de peur s’infiltrer dans ma poitrine. Et si elle le voyait ? « Vous devez être peiné de ne pouvoir fêter la victoire. Malheureusement, votre père n’a pas changé ses ordres. » La victoire… « Vous allez bien ? » me demanda-t-elle. C’était une Sorcière tempérée, de celles que l’on surveillait, tant le risque de basculement vers le bien était grand. Elle était pourtant particulièrement compétente. « Oui. Je veux être seul. » Elle hocha la tête et, après avoir déposé mon repas, se dirigea vers la porte. Elle s’arrêta et se retourna. « Vous savez, je pense qu’une fois que vous aurez vos diplômes, votre père sera moins dur avec vous. » Je baissai les yeux vers ma table, en l’ignorant. Pour qui se prenait-elle, à tenter de m’approcher, de me parler ? Pourquoi faisait-elle des théories sur mon père ? Que voulait-elle ? Que croyait-elle ? Que j’étais un enfant martyr d’un père trop cruel ? Que je cherchais l’approbation de mon paternel ? J’allais le tuer. Avant, je devais juste faire en sorte qu’il ne me tuât pas le premier.

Mes pas étaient feutrés. Je m’approchai de mon lit. Dastan y dormait. Mon corps s’immobilisa. Je ne pouvais pas dormir là, avec lui. C’était impossible.

Je ne cessais de me tourner et me retourner sur le canapé. À un moment, mon avant-bras vint se placer devant mes yeux, comme pour empêcher toutes les images qui me hantaient de passer devant eux. Ça n’arrangea rien. Je tremblais, tantôt de peur, tantôt de désir, tantôt de colère. Plus je songeais à la situation, plus je la trouvais désespérée. Quelqu’un finirait par savoir qu’il était là. Je ne pourrais pas le cacher à jamais. Je ne pouvais pas non plus le dénoncer. C’était trop tard. Beaucoup trop tard. Mes mains vinrent entourer mon visage. Il était dans mon lit. Bordel, il était dans mon lit. J’avais envie de mourir tant les minutes semblaient être des éternités de torture. Je n’arrivais pas à dormir. J’en étais incapable. J’étais simplement étendu là, à ne savoir quoi faire ni de mes pensées ni de mon corps. « On n’est rien. » répétai-je, tout haut, comme pour mieux me convaincre.


Je laissai un silence planer, longtemps. J’avais déjà envisagé de l’épouser en tant que Roi. Sa démonstration n’était pas dénuée d’intérêt en réalité, bien que poussée par l’idée de me défier. En faire ma femme me permettrait de la sortir de ses tourments actuels. Pourtant, ce ne serait pas raisonnable. Une tactique de dernier recours. Une carte maîtresse à ne sortir qu’à la dernière minute.

Quand je jugeai le moment opportun, je rompis le silence. « Nous ne jouons pas à nous écraser l’un l’autre et vous êtes bien orgueilleuse de penser que nous sommes sur un pied d’égalité. » Je me déplaçai dans la pièce, lentement. « Croyez-moi, si j’avais voulu vous écraser, ce serait déjà fait. Tout comme ce fameux mariage. » Mon index se posa sur la tranche d’un livre. « Je peux, bien sûr, et comme je viens de le faire, vous laisser entendre que vous m’avez outragé en refusant ma main. C’est un récit intéressant, héroïque : la belle Ange guerrière qui éconduit le vieil Empereur Noir, une femme qui n’est presque rien mais brave les volontés d’un Roi et se retrouve esclave après avoir tenté d’assassiner à elle seule le gouvernement sorcier. Cette légende se répandra immanquablement. Les journalistes feront de vous une égérie, une muse. Et je les laisserai faire car, encore une fois, nous ne jouons pas à nous écraser l’un l’autre. » Cette fois, je laissai un vague sourire flotter sur mes lèvres. C’était rare. Mon regard rejoignit son visage. « Je me sers de vous, à desseins. Vous le comprendrez le moment venu. » Je m’approchai d’elle et posai mes doigts sur l’os de sa mâchoire. Ils remontèrent doucement jusqu’à son menton. Je susurrai. « Un Roi n’épouse pas une esclave. » L’ire et l’insolence lui allaient à la perfection. Je me pris à penser, plongé dans mon rôle, qu’il était bien dommage qu’elle fût une Ange et non une Sorcière. « Vous êtes bien trop vieille pour moi, au demeurant. » Oh non. Elle était parfaite.

Je me détachai d’elle. « Bien. Je vais demander que votre procès ait lieu dans deux jours. Les organes de la procédure seront nommés à la hâte mais il me semble que ce temps sera amplement suffisant pour l’élaboration de l’accusation et de la défense. J’ai l’intention de clôturer ce chapitre rapidement. Contrairement aux Réprouvés qui semblent ne penser qu’à des choses primaires, il y a bien d’autres considérations que la guerre qui demandent mon attention. » Je la regardai. « C’était un plaisir de vous voir, comme toujours. » dis-je, en me dirigeant vers la porte. Je l’ouvris après avoir désactivé les protections. Des Mages Noirs se trouvaient dans le couloir. « Accompagnez la prisonnière chez le Marquis Paiberym. Le loup reste avec moi. » leur ordonnai-je. Je me tournai ensuite vers elle. « C’est une faveur que je vous fais, de vous ôter pour quelques jours de l’effervescence d’Amestris et, surtout, de l'humidité de votre cachot. J’espère que vous vous tiendrez correctement chez la famille de votre compagnon. Si tel n’est pas le cas, croyez-moi : vous ne reverrez plus jamais vos frères. »

Lorsque le calme fut revenu, je me réinstallai à mon bureau. « Ne vous inquiétez pas, je n’ai pas pour habitude de chasser les loups. » dis-je, avant de me remettre à travailler.

1157 mots
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Priam & Freyja
Lun 14 Mar 2022, 14:18




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



Le regard chaud de Dastan scruta les traits d’Érasme, avant de se fixer dans le bleu glacé de ses yeux. Il le laissa se détourner sans rien dire. Il n’y avait rien à dire. La réponse était claire. Il sortit de la pièce. De retour dans la chambre, il demeura un instant immobile, à observer les meubles sur lesquels se reflétait l’or éclatant de la lumière de la fin de journée. Il pivota vers l’une des fenêtres. Dehors, c’était un autre monde. À l’intérieur de la tour, il existait à peine. À l’intérieur de Dastan, il étouffait sous les coups de la dissociation. Il était trop insupportable pour être vrai. Ce n’était pas arrivé. Ce n’était jamais arrivé. Avec lenteur, le Réprouvé se dirigea vers le lit. Sans prendre la peine de se déshabiller, il s’y glissa. L’odeur d’Érasme, déjà présente sur les vêtements, l’assaillit d’autant plus. Il fronça le nez et frissonna. Aucune position n’était confortable. Son corps tout entier le faisait souffrir. Il avait sans doute besoin de soins. Il grimaça. Il aurait aimé que Freyja fût là et pût poser ses mains sur ses plaies. Sa magie les aurait soignées presque instantanément. Si elle l’avait déployée avec force, il aurait sans doute fini par s’endormir paisiblement. Où était-elle ? Et Priam ? Leur mère ? Draegr ? Hazaan ? Raguel ? Tul ? Tout le monde ? Il imagina leurs corps déchiquetés par les défenses des éléphants et réduits en miette par les sortilèges noirs. Des larmes brûlantes roulèrent sur ses joues. Il rabattit violemment la couette sur son visage. Ils allaient bien. Tout allait bien. Rien ne leur était arrivé. Rien ne s’était passé. C’était impossible.


Elle fronça les sourcils, et son regard devint plus défiant, plus perçant encore, lorsque les doigts d’Elias revinrent toucher son visage, comme s’ils ne pouvaient s’en empêcher, comme si sa peau exerçait sur la sienne l’attraction du métal sur l’aimant. Elle scruta ses yeux bleus, à la recherche d’une étincelle à haïr ou à aimer, à la recherche de l’homme qu’elle connaissait, à la recherche de ses intentions. Quels desseins ? Ceux de qui ? Elias ou Kaahl ? Les deux ? Un autre ? « Ce n’est pas ce que disent vos mains. » rétorqua-t-elle, assez bas. Lorsqu’il s’écarta, elle ne le quitta pas des yeux. Elle détailla sa haute silhouette, en réfléchissant au temps qui lui était accordé pour s’organiser. Deux jours. C’était à la fois court et infiniment long. Elle regarda Priam. Le loup était assis et les observait. Il fallait impérativement qu’il reprît forme humaine avant. Le plus tôt possible, en réalité. Son regard dut traduire cette urgence, parce que l’animal s’avança dans sa direction en émettant un petit bruit, quelque chose de doux comme une tentative d’apaisement. Le cliquetis de l’armure des gardes résonna à son oreille. Sans leur prêter d’attention, elle pivota vers Elias. Même s’il n’était pas juste l’ancien Empereur Noir, elle n’aimait pas du tout l’idée de devoir laisser son frère sous sa garde. Dastan non plus. Elle aurait préféré pouvoir les avoir près d’elle, chez Kaahl, tout en sachant pertinemment que c’eût été trop demander. Elle regarda le canidé, puis reporta à nouveau son attention sur le Sorcier. Considérant l’animosité qui régnait entre Kaahl et le reste de sa famille, elle n’était pas certaine que ce soit tout à fait une faveur. Au fond de son cachot, personne ne la menaçait, à part ses imbéciles d’espions. Dans la gueule de la famille Paiberym, elle risquait sans doute bien plus de sévices. S’ils apercevaient la marque qui ornait son bras, qui sait quelle idée leur viendrait ? Peut-être voudraient-ils en faire leur esclave, pour narguer ce frère jugé trop bon ? À quoi la réduiraient-ils ? Kaahl pourrait-il intervenir comme bon lui semblerait ? Et assez vite, si les choses devaient vraiment dégénérer ? En temps normal, elle se serait défendue seule. Contrainte par la marque des Mayfair, elle ne valait plus grand-chose, et c’était cette idée d’impuissance qui lui faisait ressentir la vraie peur. « Je crois qu’il convient plus de s’inquiéter de leur comportement que du mien. » dit-elle en passant près de lui, escortée des deux gardes. Derrière, le loup couinait doucement.

Quelques minutes plus tard, ils se faisaient annoncer à l’entrée du domaine Paiberym. Freyja observa la façade de la bâtisse, curieuse malgré l’appréhension. C’était la première fois qu’elle venait là où il avait grandi.



Priam se rassit, puis s’allongea, ses pattes croisées devant lui. Il posa son museau dessus et se mit à fixer le Mage Noir, silencieux. Si ses yeux jaunes avaient été pourvus de crocs, ils auraient déchiquetés son visage. Il se contentait de l’observer, dans l’attente de la suite. Plus le temps passait, plus ses paupières étaient lourdes. Le canidé avait du mal à rester éveillé. L’épuisement de la bataille le gagnait lentement. Peu à peu, il s’endormit, jusqu’à sombrer tout à fait dans les bras du sommeil.



Message X – 824 mots

Non, ce serait dommage ; on perdrait au change à coup sûr [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 1628




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Kaahl Paiberym
Lun 14 Mar 2022, 19:17



Que l'Ombre dévore


Un petit sourire narquois se dessina sur mes lèvres. Mes yeux contemplaient ma signature et le sceau royal sur la feuille au sein de laquelle j’avais au préalable écrit sous la dictée de l’ancien Empereur Noir. Elias marchait lentement devant mon bureau, les mains derrière le dos, dans une posture droite et noble. Je levai le regard vers lui, attendant la suite avec une impatience qui me rongeait littéralement. Nous avions convenu qu’en usant de mes prérogatives, je demandasse à remplacer le juge lors du procès de la Belegad puis que je le mandatasse afin qu’il me remplaçât le jour venu. « Je, soussigné, Cyrius Windsor… » Il s’interrompit et me regarda. Ses prunelles firent un aller-retour entre mon visage et la feuille vierge devant moi. « Cyrius. » Je ne pus empêcher un léger ricanement de sortir d’entre mes lèvres. Ses traits se crispèrent. Il se positionna en face de moi et disposa ses paumes sur la table. Il se pencha légèrement. Je le regardai. « Écris. » « Ce n’est pas une façon de parler à son Roi. » articulai-je, d’un air joueur qui, pourtant, ne l’était pas tant que ça. Il était hors de question que je fisse ce qu’il m’avait demandé. Pourquoi ? Pour qu’il sauvât cette Ange ? Non. Quelqu’un devait le débarrasser d’elle. « Écris. » Sa magie ricocha sur la mienne. Un son disharmonieux s’invita entre nous deux. Je me mis à rire et posai mon menton dans le creux de ma main avant de pencher la tête, pour le fixer d’en bas. Je sentais sa musique interne bouillonner. Rien ne se voyait, ou presque, sur son visage. Je n’avais pourtant pas besoin de m’accaparer son expression pour connaître le fond de ses pensées. Je le connaissais par cœur. Il était à moi. « Je vais juger l’Ange pour toi. » dis-je, en me levant pour imiter en tout point sa position. Il n’y avait pas qu’elle qui me perturbait. Il y avait tous les petits détails que j’avais remarqués. Sa mélodie intérieure avait changé et ce n’était pas à cause de la Couronne qu’il avait sur la tête. C’était plus profond, plus profond et éprouvant pour moi. Je savais. « Je vais te sauver de toi-même. » murmurai-je pour répondre à sa colère. Les instruments qui composaient son être jouaient un air ravageur, vif et puissant. J’aimais ça. « Cyrius. » Je lui souris, encore. Nous étions à un point où les solutions étaient inexistantes. Il avait conscience que je ne lâcherais rien et que s’il désirait obtenir de moi ce qu’il voulait, les choses iraient bien trop loin pour qu’il pût le supporter. « Ârès. » Mes doigts coururent sur le bureau et s’emparèrent d’un coupe-papier. Lentement, je le fis caresser la peau de mon cou avant de l’enfoncer assez pour créer une entaille. Le sang perla. Dans son regard, je vis l’envie. J’émis un bruit de fouine, trop heureux de constater, encore une fois, à quel point il était dépendant. « Rejoins-moi. » soufflai-je, pour l’inviter à venir se repaître à-même mon épiderme.


« Vous pouvez disposer. » Je souris à l’Ailée après que le domestique se fût retiré. Les gardes étaient également retournés au palais ou, du moins, tel avait été leur discours. Je savais d’expérience qu’il valait mieux ne jamais croire ce qui sortait de la bouche d’un Sorcier. Mes yeux se posèrent sur Laëth Belegad, sans pour autant s'y attarder. « Je suis Kaalh Paiberym. Enchanté de faire votre connaissance. » Je l’invitai à s’asseoir sur le canapé avec un air engageant. Je ne pouvais pas me présenter auprès d’elle comme étant le Talleb de Valera Morguis. Le territoire était secret, ce qui m’obligeait à taire mes fonctions. Notre famille y était notamment connue pour ses prouesses en matière de conditionnement. En plus de gérer l’endroit, j’étais moi-même un éminent scientifique. J’avais écrit beaucoup d’articles sur mes expériences.

À côté d'elle, je n’avais pas l’intention de lui faire peur. La peur était intéressante mais uniquement chez les cobayes, ceux qui ne pouvaient pas se débattre, pas m’échapper. Elle était belle à admirer, jouissive. L’Ange aussi, était belle à admirer. Elle le serait d’autant plus lorsqu’elle mangerait dans ma main. « Souhaitez-vous quelque chose à manger ? » demandai-je. L’intérieur du manoir était riche en décorations, presque étouffant tant les bibelots succédaient à d’autres bibelots. Le piano de Veronika se trouvait dans la pièce où nous nous situions. « Mon frère ne nous a pas prévenu de sa venue, ce qui n’est guère étonnant. Avez-vous plus d’informations ? » continuai-je, avec cet air avenant qui me caractérisait depuis que j’avais repris ma vie en main. Je tenais à avoir une certaine classe, ce qui n’était pas le cas de Khaal. Son immonde masse était basée de l’autre côté de la pièce, dans une fauteuil sur-mesure. Il jouait aux échecs seul, en usant de télékinésie. Il ne pouvait se déplacer que par magie. Sa peau était boursoufflée et grasse, écœurante. Néanmoins, il ne fallait jamais douter de ses facultés intellectuelles. Il pouvait paraître inoffensif, tant sa condition l’handicapait, mais il ne manquait pas de sbires avides d’accaparer ses faveurs. Sa voix finit par traverser la pièce. « Qu’est-ce qu’elle a sur le bras ? » demanda-t-il. Ni bonjour, ni enchanté. Je souris à Laëth, comme gêné par un tel comportement indigne. « Veuillez l’excuser. Sa condition le rend… difficile. » Depuis que j’avais appris qu’elle demeurerait ici pendant deux jours, mon esprit travaillait à la meilleure manière de faire souffrir mon frère, en me servant d’elle. « Peut-être avez-vous besoin de soins ? » la questionnai-je. Elle était dans un état lamentable.

934 mots
Je suis sûr que Laëth est déjà fan de sa belle-famille  [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 943930617
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Priam & Freyja
Mar 15 Mar 2022, 17:14




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



Dès qu’elle pénétra dans la pièce, Freyja analysa son environnement. Malgré sa taille impressionnante, la salle croulait tant sous les meubles et les objets qu’elle en devenait oppressante. La teinte sombre des murs n’atténuait en rien cette impression. Le damier en marbre noir et blanc plaqué au sol impliquait l’idée de se trouver au cœur d’une partie d’échecs : ici, on n’avait pas le droit à l’erreur. Chacune rapprochait d’un terrible et final échec et mat. Les deux frères de Kaahl étaient présents. Le plus gros déplaçait ses pions sans se soucier d’elle. L’autre la considéra aussitôt. Il portait un costume soigneusement taillé et son visage affichait une expression affable. Elle s’en méfia immédiatement. Le baron ne lui avait pas souvent parlé d’eux, cependant, elle les savait redoutables, chacun à leur manière. « Ravie de faire la vôtre. » mentit-elle. Derrière lui, au-dessus de la cheminée, un immense portrait trônait. Un grand homme brun au nez chaussé de petites lunettes qui lui conféraient un air plus sérieux encore que son regard acéré semblait dévisager l’Ange. En bas du cadre aux moulures d’or, on pouvait lire son nom : Zachary Paiberym. Comme son hôte l’y invitait, elle se déplaça jusqu’au canapé et s’y assit, sans quitter des yeux le portrait du patriarche. « Non merci. » La faim viendrait, elle le savait. Bientôt, son corps réclamerait toute l’énergie qu’elle avait dépensée. Toutefois, si elle pouvait éviter de manger tout met proposé par la fratrie, elle le ferait. Elle tourna la tête vers Khaal. Bien que le piano à queue noir entravât une partie de son champ de vision, elle distinguait parfaitement son énorme masse, engoncée dans un fauteuil qui serait bientôt trop petit pour lui.

L’Aile d’Acier détourna le regard. Face à elle, un grand miroir reflétait la myriade de décorations qui étouffait les meubles, dans son dos. Cette pièce s’apparentait à un grenier. Des vases, des statuettes de cavaliers, quelques portraits, des bibelots en tous genre ; on y collectionnait tout un bric-à-brac agencé avec soin. « Non. » Elle posa à nouveau ses yeux verts sur son interlocuteur. La ressemblance avec Kaahl existait, sans être aussi frappante que ce que l’on aurait pu espérer, venant de triplés. Lorsque leur autre frère éleva enfin la voix, elle tenta de demeurer de marbre, mais son cœur se glaça. Il ne fallait surtout pas qu’ils sussent qu’ils pouvaient la forcer à obéir à toutes leurs volontés. « Non merci. Je me soigne seule. » répondit-elle, avant de faire courir sa main sur l’os de sa mâchoire, où l’un des espions avait laissé une large marque bleue. La magie blanche crépita au bout de ses doigts, et l’hématome disparut. Pivotant à demi vers Khaal, elle expliqua succinctement : « J’ai été blessée pendant la bataille. » Le sang qui maculait sa peau masquait aussi la marque des Mayfair. Elle espérait qu’ils n’essaieraient pas de gratter à la surface de son mensonge. « Avez-vous combattu ? » demanda-t-elle à ses deux interlocuteurs, pour détourner l’attention de sa personne.

Leur réponse lui permit d’avoir un court temps de réflexion, au bout duquel elle reprit la parole. « Je n’ai pas besoin de soins particuliers ; en revanche, j’aimerais pouvoir me laver. Avez-vous une salle de bains que je puisse utiliser ? Et des vêtements propres, éventuellement ? » Il lui semblait qu’ils n’étaient pas mariés, mais elle croyait se souvenir que Kaahl avait une tante. Elle était certainement plus petite que Freyja, mais elle pouvait toujours essayer de se glisser dans l’une de ses robes. « Ou peut-être qu’un domestique pourrait s’en procurer ? » L’idée d’avoir des gens à son service la mettait mal à l’aise. Elle s’était toujours débrouillée seule, moyennant l’aide ponctuelle de ses proches. Le baron Paiberym avait aussi des employés, mais ils étaient autrement traités qu’ici. Elle y avait toujours plus songé comme à des amis ou à des membres de la famille que comme à des serviteurs. « Sinon, ce n’est pas grave, je rentre dans les vêtements du baron. Il doit bien en avoir laissé ici. » ne put-elle s’empêcher d’ajouter, en feignant pourtant de ne pas voir le problème. Elle avait parfaitement conscience que chez les Mages Noirs, les femmes étaient tenues de mettre des robes. Se travestir en homme devait être puni par l’une de leurs lois tordues. Cependant, elle ne sortirait pas d’ici avant deux jours, et la voir dans une armure devait déjà hérisser tout le mépris des disciples d’Ethelba. Elle avait promis de se tenir correctement, pas de se comporter en parfaite petite Sorcière.



Message XI – 761 mots

Elle les adore, elle a déjà rédigé les invitations pour le mariage <3




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Kaahl Paiberym
Mar 15 Mar 2022, 21:46



Que l'Ombre dévore


Mon rire résonna dans la pièce, à la question de l’Ange. Ma respiration était un souffle moite permanent, bruyant, difficile. Enfoncé dans mon fauteuil, je la fixais depuis l’autre bout de la pièce, pendant que Kaalh tentait de passer pour plus aimable qu’il ne l’était. Je le connaissais assez pour savoir qu’il rêvait probablement de la mettre à quatre pattes et de la faire prendre par un porc. Il n’y avait aucune limite à sa folie. Il aimait jouer avec les femmes et les animaux, séparément ou ensemble. Ses expériences sur le conditionnement prouvaient à quel point l’esprit est facile à manipuler. La dépendance, l’emprise, la soumission, l’état agentique. Tous ces concepts n’avaient aucun secret pour lui et sa position de Talleb lui permettait de réaliser tous les désirs pervers et malsains qui lui passaient par la tête. Au nom de la science, ses droits étaient illimités. Quant à moi, je ne tirais aucune excitation à contempler une catin droguée hurler de plaisir sous les assauts d’un étalon la déchirant de toute part. Ma vie sexuelle était inexistante. J’aimais simplement voir les corps devenir aussi laids que le mien, une petite vengeance permanente qui m’aidait à supporter le fardeau de mon obésité morbide. La beauté m’horripilait, qu’elle fût féminine ou masculine. Dans un coin de mon esprit, je songeais d’ailleurs de plus en plus à jeter de l’acide sur le visage trop lisse de Kaalh. « Cette femme a un humour particulier. » crachai-je. Vu mon état, la réponse semblait évidente. « Non. Nous n’avons pas combattu. L’Empereur Noir n’a pas jugé nécessaire de faire déplacer la noblesse au-delà du strict nécessaire. » rectifia mon frère, d’une voix douce, en ignorant ma remarque. À ses yeux, je n’étais que le gros, celui qui apportait une forme de déshonneur, par son apparence physique négligée. Un bon Sorcier était un Sorcier mince, entretenu, élégant, pas une masse immonde et pullulante. Le gras de ma peau s’irritait au moindre mouvement. Les plis succédaient aux plis, enfermant la crasse et la puanteur. Une vieille odeur de transpiration un peu rance ne me quittait jamais. Mes dents étaient jaunies, sales. Mes lèvres étaient gercées, craquelées.

« Je vais appeler l’une de nos esclaves. Elle vous guidera jusqu’à la chambre de Kaahl pour que vous puissiez vous laver. Cependant, nous allons vous prêter des vêtements qui conviendront à votre condition de femme. Il serait très mal vu que vous vous habilliez comme un homme. » Les muscles qu’elle possédait me dégoûtaient. Une femme devait être frêle, frêle comme l’esclave qui ne tarda pas à arriver. Un hématome couvrait son œil droit et elle boîtait. Cette abrutie avait renversé mon repas sur moi, en me donnant la bequeté. J’avais dû la punir. Le spectacle avait été merveilleux. « Prenez le temps qu’il vous faudra. » articula Kaalh.

Lorsqu’elle fut partie, je le fixai. « Je te déconseille de jouer avec elle. » lui dis-je. Il me fit un petit sourire innocent en préambule. Il avait envie de la voir nue. Ça l’excitait déjà. Je le sentais. Je le savais. « Elle ne dira rien. Comme toutes ces connes, elle aura trop honte pour ouvrir sa gueule. »

____________________

Karl Hugo - Endless First Kiss

« L’Archimage Ashiril est au Temple de Lyre. Je peux vous proposer un rendez-vous pour la semaine prochaine, Baron Paiberym. » « Je n’ai pas le temps d’attendre. » répondis-je sèchement. Ça surprit mon interlocutrice. « Ma compagne est retenue chez les Sorciers. » précisai-je. « Vous en êtes sûr ? » « Certain. » Je ne lui fis pas l’affront de l’interroger sur ses connaissances vis-à-vis de la guerre qui s’était déroulée à Amestris. Pourtant, son incompétence frôlait l’insolence et peut-être n'était-elle pas encore au fait de la situation. « Elle loge actuellement chez mes frères, en attente de son procès. » ajoutai-je, pour sous-entendre que ces derniers m’avaient prévenu. Aucun des deux ne l’aurait fait. Plus les secondes s’écoulaient et plus les risques étaient grands. Néanmoins, Khaal et Kaalh ne savaient pas qu’elle portait la marque des Mayfair. En prison, la sûreté de l’Ange n’aurait tenu à rien. Avec mes frères, elle pourrait au moins se défendre. De plus, tous les deux avaient conscience que la toucher ne demeurerait pas impuni, en théorie. En pratique, rien n'était moins certain. Ce serait eux contre moi. Deux Sorciers contre un Magicien, certes Marquis mais Magicien quand même. « Je comprends votre empressement. Cependant, le Temple de Lyre est un lieu particulier. Le seul moyen de joindre la Chancelière est de vous y rendre et de lui demander un entretien. Au demeurant, Laëth Belegad est une Ange. Son cas n’entre pas dans les compétences de l'Ashiril. » « Elle est une Ange mais elle porte mon enfant. » dis-je, avec une voix convaincue. « Et c’est peut-être un Mage. » Son expression changea. L’empathie marquait son regard. Pourtant, je lus, avant qu’elle ne le formulât, qu’elle n’était pas en mesure de m’aider.  « … Encore une fois, je vous prie de bien vouloir vous rendre au Temple de Lyre. »

Devant le Temple, j’inspirai doucement. Cet endroit était ma hantise et, ce, depuis mon adolescence, depuis que j’avais commencé à espionner pour le compte de la Couronne Noire. J’expirai et fermai les yeux. Tout devrait s’enchaîner à la perfection durant les jours à venir. Il n’y avait pas d’autres solutions. Cyrius avait désigné Val’Aimé en tant que Procureur en utilisant son hégémonie royale. Stratégiquement parlant, cette nomination avait été une erreur monumentale. Le Chef des Armées, bien que connaissant les bases du droit, était très loin d’être un fin théoricien. Néanmoins, il chargerait Laëth autant qu’il le pourrait et se montrerait intraitable durant le procès. J’avais, quant à moi, jugé préférable d’assurer la défense de l’Ange. Deux jours seraient suffisants. J’avais écrit aux plus grands conseils juridiques afin qu’ils me fissent livrer au palais tous les textes, les jurisprudences et les exceptions familiales existants. Des milliers de livres, de parchemins, de rouleaux et parfois même de tablettes. J’avais également contacté un faussaire, afin de me fabriquer de toutes pièces un diplôme d’avocat. La chose n’étonnerait personne. Les Mages puissants avaient généralement plus d’une corde à leur arc.

Dans la boîte, il ne restait plus que huit sphères.

Ma magie dansait autour de ma silhouette et imprimait mes yeux d'un éclat céruléen. Cependant, le calme en moi n'était pas présent, contrairement à toutes les autres fois. Je sentais l'empressement. Je me livrais à une course contre la montre, un combat contre moi-même. J'étais pressé, parce que j'avais la certitude que si je tardais trop, je ne pourrais plus jamais caresser son visage. J'entrai dans le Temple de Lyre, armé de mes béquilles et de mes certitudes. L'aura autour de moi se teinta de bleu.

1048 mots
Parfait, ils l'adorent aussi et ils ont hâte d'y être [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 943930617
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Priam & Freyja
Mer 16 Mar 2022, 08:16




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



Freyja regarda l’esclave. À la vue de ses blessures, un long frisson courut dans son dos. Sans empressement, elle se releva. « Merci. » La servante gardait les yeux baissés. « Veuillez me suivre, madame. Je vais vous conduire jusqu’à la chambre du Marquis. » Elle se détourna et l’Ange lui emboîta le pas. Elles passèrent devant le frère obèse, que l’Aile d’Acier ignora superbement, puis gravirent les escaliers. La boiterie de sa guide lui brûlait le ventre. Elle la mettait en colère et elle lui faisait peur ; peur pour cette femme qui vivait ici, avec ces deux monstres qui n’hésiteraient jamais à la tourmenter. Elles empruntèrent un long couloir, puis l’esclave poussa la porte et la lui tint afin qu’elle pénétrât dans la pièce. Pour la première fois, la brune la vit de près. Elle lui parut très jeune. Ses grands yeux noirs rétrécissaient sous l’emprise des ténèbres qui la gouvernaient malgré elle. Sur son bras, la marque des Mayfair trônait. Sa poitrine se compressa à l’idée qu’elle eût pu se trouver à sa place, si la fratrie avait remarqué ce petit détail capable de faire basculer une vie. « Merci. » Elle entra dans la chambre. De hautes bibliothèques marquetaient les murs. Au centre de cet écrin érudit, le lit reposait. Face à l’entrée, une haute porte-fenêtre offrait une vue dégagée sur l’extérieur. Le balcon circulaire épousait les courbes de la terre. Devant, une table soutenait deux cadres. Freyja s’approcha, curieuse. L’un d’eux contenait son diplôme de Basphel, qui attestait de sa réussite au sein du département de l’Acier. L’autre était une peinture. Assise, une femme vêtue de rouge tenait un enfant sur ses genoux. Le petit garçon souriait de toutes ses dents. Derrière eux, les murs sombres du manoir semblaient vouloir les écraser. Seule une tache claire les repoussait : dans un coin, un bouquet de roses blanches s’épanouissait au creux d’un vase. L’Immaculée serra les dents, puis tendit doucement la main vers le tableau. Elle réprima l’envie de toucher la peinture et fit simplement courir ses doigts sur le cadre. « Je vais vous chercher des vêtements et une serviette, madame. » Sans se retourner, elle répondit vaguement : « Très bien, merci. » Lorsque le son du pas claudiquant de l’esclave s’estompa, elle releva la tête et embrassa le paysage du regard. Sur le balcon, plusieurs jardinières accueillaient des roses blanches, dont la brise faisait chanter les pétales. Elle regarda à nouveau le portrait, et son palpitant vibra de mélancolie.

Lorsqu’elle entendit l’esclave revenir, elle pivota vers elle. Celle-ci s’avança et posa le linge sur le lit. « La salle de bains est là-bas. » indiqua la jeune fille. « Merci. » Elle s’inclina et se redressa, prête à faire demi-tour. « Attends. » Elle s’immobilisa et regarda l’Ange. « Viens. » Docilement, quoi qu’avec une once de crainte, elle approcha. Freyja leva la main : la blessée recula. « Je ne vais pas te faire de mal. Je veux te soigner. » Elle secoua vigoureusement la tête. La brune fronça les sourcils. « Pourquoi ? » - « Ils vont se fâcher. » L’Ailée ferma le poing et baissa le bras. Durant quelques secondes, elle considéra son interlocutrice. « Laisse-moi au moins soigner la boiterie, et tout ce qui ne se voit pas. Je ne toucherai pas au cocard. » Son Sanctuaire d’Ahena diffusait des ondes de sérénité. Peu à peu, elle vit que l’esclave se calmait. « Le Marquis Paiberym devrait bientôt arriver. Dans la journée, je pense. » appuya-t-elle. « Je suis certaine qu’il ne laissera pas passer ça. » Comme elle la sentait céder, elle libéra sa magie. La jeune fille tressaillit mais demeura immobile, tandis que les volutes blanches s’enroulaient autour d’elle comme autant de bras venus l’enlacer. Lorsqu’elles retombèrent, elle bredouilla un « merci » à mi-chemin entre la reconnaissance et la peur, puis elle tourna les talons et s’éclipsa rapidement. Freyja la suivit des yeux un instant, avant de se diriger vers le lit pour prendre les affaires qu’on lui prêtait. Elle déplia le vêtement. C’était évidemment une robe, sombre et austère avec son col montant et ses longues manches.

Parvenue dans la salle de bains, l’Aile d’Acier se regarda dans le miroir. Elle ne faisait pas confiance aux frères de Kaahl. Elle réfléchit une seconde, puis sourit. Peu à peu, son physique muta. Son corps grandit, ses cheveux raccourcirent, sa peau blanchit. Sa féminité quitta son entrejambe. Lorsqu’elle se déshabilla, ce fut une toute autre apparence qui se révéla aux yeux du monde. C’en était une que les habitants du manoir connaissaient bien.



Message XII – 767 mots

Trop bien <3 Promis, le jour du mariage, elle ne les embêtera pas en changeant d'apparence. Et là j'arrive pas à me décider sur celle qu'elle a prise parce que plusieurs possibilités me font rire. Donc je te laisse choisir : soit elle a pris l'apparence (en tout cas le visage, pour le reste c'est de l'impro /sbam) de Val'Aimé ou d'Elias, soit elle a pris celle de Zachary (le frère a raison, elle a un humour particulier) xDD (j'avais aussi pensé à ce qu'elle prenne l'apparence de Kaahl, ou celle de Kaalh mais dans ce dernier cas, le foutage de gueule irait peut-être trop loin... et le troisième c'est pas possible vu qu'il rentre pas dans la douche /sbam).
*part en ricanant et en se disant que Laëth Sorcière, ce sera terrible [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 1628 *




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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Mer 16 Mar 2022, 20:13



Que l'Ombre dévore


Je plissai les yeux. Ma main s’était arrêtée au beau milieu de mon pentacle. À l’entrée, à l’arrêt, le Baron Paiberym se tenait. Le reconnaître m’était aisé et ce n’était pas son identité qui avait fait naître mon trouble. « Baron Paiberym. Vous pouvez approcher. » lui dis-je, pour lui signifier que sa présence ne risquait pas de perturber ma magie ou de créer un effet indésirable. Jamais je n’aurais cru qu’il pénétrerait le Temple de Lyre. Si son nom avait été inscrit par l’Archimage Nylmord sur le registre des individus à convoquer au sein de l’endroit, je n’avais pas attendu le signalement de mon confrère pour être suspicieuse à son égard. Je le pensais Sorcier, avant. Personne ne pouvait tricher entre les murs du Temple, à l’exception du Mage détenant mon poste. Aucun artifice ne pouvait tromper le lieu ou, du moins, ces derniers étaient particulièrement rares et ma formation m’avait appris à les détecter. J’émis un petit rire, incrédule. Comment avais-je pu me fourvoyer à ce point à son sujet ? Je ne connaissais que trop bien les espions formés à Amestris. Niklaus Salvatore avait eu, durant son règne, une politique particulièrement prolifique en ce domaine. Il avait formé de jeunes gens, à peine adolescents, à imiter le comportement des Magiciens et à utiliser leur magie. « Vous vouliez me voir ? » le questionnai-je, en le regardant se déplacer difficilement vers moi. Il faisait semblant. Il s’était soigné depuis son accident. Pourquoi continuer à simuler alors ? Je souris, sentant mon intérêt s’éveiller petit à petit. Je l’avais cru espion à la solde des Sorciers mais peut-être était-il le contraire ? Un espion Magicien ? « Oui. » Ses prunelles comportaient d’infimes traces de bleu, perdues dans le marron ambiant. « Rien de grave j’espère. » Comme tout le monde, j’avais eu vent des rumeurs qui lui prêtaient une relation « extra-conjugale » avec Adam Pendragon. D’autres éléments, à ma disposition, étaient ignorés du grand public. Il usait actuellement de magie pour maintenir son apparence. Pourquoi ? Je le sondai et ma magie percuta la sienne. S’il remarqua mon action, son visage ne trahit rien. Il était plus puissant que moi. Peu l’étaient. Il me fixa et amena son point. « Ma compagne est actuellement détenue par les Sorciers, consécutivement à la guerre qui s’est tenue aux portes d’Amestris. » « Et vous avez dans l’idée que je puisse intervenir en sa faveur ? » « Exactement. » « Elle n'est pas Magicienne. » « Elle est enceinte de mon enfant. » Il mentait. Il mentait mais il s’agissait d’une tactique payante. Personne ne demanderait la preuve de la grossesse de Laëth Belegad et la réputation du Baron parlait pour lui. Quant à moi, je n’avais aucun intérêt à lui révéler mon savoir. Dans le cas où il n’arriverait pas à voir se réaliser ses prétentions, une fausse couche était toujours envisageable comme argument. Au regard de la douleur de la perte, nul n’oserait l’interroger. Malin, donc. J’acquiesçai. « Quelles sont les charges ? » « Je l’ignore. » Il mentait encore. Il savait exactement quelles étaient les charges. « Bien. Nous allons nous rendre à Amestris. Je ne vous garantis pas de pouvoir faire quoi que ce soit de significatif mais au nom de l’alliance Magiciens-Sorciers, ces derniers seront sans doute prêts à faire des concessions. Vous faites partie de la noblesse, en plus de ça. » « Mais nous ne sommes pas mariés. » « C’est, en effet, un problème. L’enfant à venir donne néanmoins de bonnes perspectives puisque, étant le vôtre, il a des chances d’être Magicien… ou Sorcier étant donné votre lignée. »  


Assis dans mon fauteuil, à jouer aux échecs, j’entendis du bruit en provenance de la cage d’escalier. Inutile de me déplacer pour comprendre que quelqu’un venait d’atterrir en bas des marches. Le silence revint, avant que les pas de Kaalh ne résonnassent. Je levai les yeux vers lui et un sourire difforme vint étirer mes lèvres. Des pustules recouvraient son visage contrarié. Contrarié, il l’était déjà de base du fait de l’évacuation soudaine de Valera Morguis. Le degré d’agacement venait d’augmenter considérablement. « Alors ? Elle te plaît ? » raillai-je. « Ferme ta grosse gueule ! » cracha-t-il, en postillonnant son venin sur le tapis. Ses traits habituellement si doux s’étaient ternis sous la violence de sa colère et du sang perlait de sa tempe, prouvant sa chute. « Je ne sais pas à quoi tu t’attendais. Notre frère ne laisse jamais ses affaires sans surveillance. » Il me fixa comme si j’étais un traitre, comme s’il jugeait qu’il aurait été bon que je le prévinsse. Il était un Sorcier, comme moi. Il savait donc que cet espoir était délirant. La seule raison pour laquelle je n’avais jamais essayé de le tuer tenait en un mot : gémellité. « Kaahl a un humour déplacé. » Le silence naquit. « Ah ? » Je n'aimais pas lorsqu’il formulait une affirmation sans s’expliquer. Le relancer, à chaque fois, me coûtait ma patience. « Le peu que j’ai vu m’a montré le corps du Chancelier Elzagan. » « Hum. » Je pris une expression indéfinissable, entre la réflexion, la lassitude et le dégoût. « Es-tu sûr que ce n’est pas de son fait, à elle ? » « C’est une femelle. Elle n'aurait jamais ce genre d’idées. » « Et ensuite ? » « Ensuite… T’as vu l’état de mon visage ? » s’insurgea-t-il soudainement, comme si ma question était stupide. Le plus stupide, ici, était devant moi. Comment un si brillant scientifique pouvait-il être si dénué d’instinct de survie et de sens commun ? « Finalement, tu vas peut-être devoir renoncer à lui insérer tes jouets dans le corps. » dis-je, d’un ton doucereux. J’aimais lorsqu’il échouait lamentablement. « Elle finira par avoir faim. » répondit-il, pour toute explication de sa réussite future. « Et il finira sans doute par arriver. »

977 mots
Val'Aimé. S'il en a vent, il viendra lui en toucher deux mots  [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 2289842337
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Priam & Freyja
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Jeu 17 Mar 2022, 08:00




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



Au grand fracas qui retentit, elle releva vivement la tête. Le bruit apaisant de l’eau cessa, elle se tourna vers la porte fermée, et elle tendit l’oreille. Il n’y eut rien d’autre. Les sourcils froncés, l’Ange se demanda quelle était la source de ce son éclatant. Cela ressemblait à la chute d’une personne dans des escaliers. Elle songea à la jeune esclave et la peur lui serra le cœur. Venait-elle de tomber ? Kaalh l’avait-il poussée pour rétablir sa boiterie ? Non. Elle aurait crié. Ou il l’aurait frappée jusqu’à ce qu’elle ne crie, peut-être. Elle passa une main sur son épaule, puis baissa les yeux dessus. Elle s’était entraînée à modifier son apparence, néanmoins, elle n’avait jamais pris sa douche dans le corps d’un autre. Elle avait beau ressentir chacun des passages de ses doigts sur sa peau, elle se sentait étrangère à elle-même. C’était une sensation inédite, et assez désagréable. L’Ailée se savonna, puis réactiva le sort qui faisait couler l’eau et plongea son visage dessous. Ses phalanges s’enfoncèrent dans l’épaisse tignasse de Val’Aimé. Elle demeura ainsi quelques longues secondes, puis souffla, détacha ses mains de son crâne et éteignit l’eau. Après avoir attrapé la serviette, elle la jeta sur ses épaules et sortit de la douche.

Face au miroir, elle observa le reflet à peine flouté par la buée. Un frisson écœuré griffa son échine. Consciente de l’effet déplaisant que ce corps ne manquerait pas de produire sur les frères de Kaahl, elle en avait presque oublié sa propre répulsion. Pourtant, si elle avait croisé le Chancelier Elzagan, elle aurait eu envie de le tuer. Elle s’approcha du lavabo et appuya ses mains sur le rebord du meuble, avant de se pencher en avant. Elle aurait eu envie de lui faire payer le massacre qu’il avait perpétré, à peine quelques heures plus tôt. Les muscles de ses bras se tendirent. Son petit jeu avec Elias et la fratrie Paiberym avait presque occulté les images de la bataille. Elles étaient pourtant là, tapies sous ses accents rebelles et ses penchants insolents. Elles étaient juste là, dans les yeux glacés de Val’Aimé. L’Ange baissa la tête et ferma les yeux. Elle ne regrettait pas d’avoir essayé quelque chose pour les Réprouvés ; mais elle regrettait d’avoir été trop bête pour attendre un autre moment, une autre occasion, une autre méthode. Elle avait cru prendre les précautions nécessaires pour éviter le plus grave ; elle n’avait commis qu’une orgueilleuse erreur. Elle aurait dû en périr ; et si elle pouvait encore respirer, c’était simplement parce qu’Elias l’aimait comme Kaahl l’aimait. Elle vivait à crédit. Le procès n’était qu’une façon de retarder les choses. Même s’il était puissant, il n’était plus Roi. Même si les chefs d’accusation étaient faux, ils seraient la vérité du peuple sorcier. Rien ne garantissait qu’elle survivrait. Ni elle, ni Priam, ni Dastan. Elias ne sacrifierait pas ses ambitions en son nom, et au fond d’elle, elle le savait. Il bataillerait sans doute autant qu’il le pourrait, et puis, au bout d’un moment, il rendrait les armes. Elle renifla et passa une main sous son nez. Elle regrettait de l’avoir mis dans cette position-là, lui aussi. Risquer sa vie était une chose ; jeter aux flammes celles de ceux que l’on aimait en était une autre, et c’était toujours celle qui la ramenait à la raison. Elle releva la tête et rouvrit les paupières : son regard se planta dans celui du Chancelier. Il était monstrueux. C’était un fait aussi indéniable que le cycle des jours ou des saisons. Mais la vérité, c’était qu’elle avait aussi ses démons et ses parts d’ombre. Même là où la lumière rayonnait, les ténèbres grouillaient.

Redevenue elle-même, l’Aile d’Acier demeura un moment dans la chambre, allongée sur le lit, tantôt à fixer le plafond, tantôt à observer la danse des roses, à l’extérieur. Elle ne pleura pas. Son corps lui paraissait vide de tout. Au bout de longues minutes, elle se leva. Elle avait si peu l’habitude de porter des vêtements autour de son cou qu’il lui semblait que le col montant de la robe noire cherchait à l’étouffer. Elle avait au moins le mérite de masquer son bras. Elle inspira, puis sortit. Après un coup d’œil en contrebas, elle décida de demeurer encore un peu à l’étage. Les couloirs s’apparentaient à une galerie d’art. Des tableaux peignaient chaque mur. Là où il n’y en avait pas, des statues, de hauts meubles ou des bibelots se succédaient. Elle aurait pu déambuler longtemps, si elle n’avait pas craint d’éveiller le courroux de ses hôtes – et bien qu’elle n’eût plus l’esprit aussi joueur qu’à son arrivée, elle était curieuse de savoir s’ils avaient tenté de l’espionner. C’était peut-être ça, la chute dans les escaliers ? Sidéré de voir Val’Aimé Taiji, Kaalh serait tombé à la renverse. Cette idée esquissa sur ses lèvres l’ombre d’un sourire. Elle retourna dans la chambre de son fiancé, choisit un livre, puis descendit. Seul le joueur d’échecs était encore là. Suspicieuse mais silencieuse, elle reprit place dans le canapé, croisa les jambes et débuta sa lecture. La concentration lui faisait défaut. Ses sens étaient à l’affût du moindre danger qui pût émaner de l’un des Paiberym. Le fait que Kaalh ne fût pas là ne lui plaisait pas. Bien qu’il dût effectivement être celui qui avait chuté dans les escaliers, elle aurait préféré pouvoir le voir. Elle se demandait ce qui l’avait conduit à tomber. Elle songea que les relations de Kaahl avec ses jumeaux étaient si mauvaises qu’il était possible que s’ils essayaient d’entrer dans ses appartements, ils se heurtassent à des protections. Elle réfléchit à d’autres choses ; au procès, à Priam enfermé dans sa cage, à Dastan égaré dans Amestris, à sa mère morte ou vivante, à la façon dont il conviendrait qu’elle réagît lorsque Kaahl arriverait, à son père et à sa petite sœur, demeurés à Lumnaar’Yuvon, à la retraite des Réprouvés, aux dangers de Nementa Corum, à l’état des navires, à l’histoire de son livre.

Le temps fila, et puis enfin, la porte d’entrée s’ouvrit. L’Immaculée leva le visage. Avec toute l’honnêteté du monde, son cœur bondit dans sa poitrine. Elle ferma le livre, le posa sur la table basse, se leva et se précipita jusqu’à Kaahl. Elle se jeta contre lui et entoura son cou de ses bras, en prenant garde à ne pas déstabiliser l’équilibre menteur de ses béquilles. Elle pensa à Adam. Elle n’y pensa plus. Elle ne savait pas ; mais il fallait faire comme si.



Message XIII – 1087 mots

Elle a hâte de lui expliquer qu'il est le fantasme secret de Kaalh et Khaal [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 2289842337




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Jeu 17 Mar 2022, 22:02



Que l'Ombre dévore


L’une de mes mains lâcha sa prise pour couler dans le dos de l’Ange. Mes lèvres cherchèrent les siennes et finirent par les trouver, après la caresse de ma joue contre la sienne. Un frisson de plaisir me parcourut. Les choses étaient différentes, plus tangibles, plus évidentes. Mes doigts se posèrent dans son cou. « Je suis heureux de te voir. » Et c’était vrai. S’il y avait bien une personne ici que j’étais content de retrouver, c’était elle. En réalité, elle était la seule chose que j’appréciais dans ce manoir. L’empilement d’objets en tout genre dans les différentes pièces et couloirs me rendait irritable. Le ménage était fait minutieusement mais le trop plein me perturbait au point qu’il m’était déjà arrivé de me gratter jusqu’au sang. Enfin, l’hygiène de Khaal était plus que discutable. Il puait et ne s’arrangeait pas avec le temps. À peine avais-je pensé à l’intéressé qu’il déplaça son fauteuil dans la pièce pour venir me saluer. Il me fixa. Son visage bouffi dissimulait en partie son mécontentement. Il termina son analyse de ma personne et me fit part d’un verdict inutile. « Hum… Tu as changé. » articula-t-il. Ses yeux étaient suspicieux. Il réfléchissait. Jamais je n’avais eu une telle aura de Magie Bleue auparavant. « Côtoyer cette femme ne te réussit pas. » cracha-t-il, sans aucune gêne. Laëth avait beau être présente, elle ne représentait rien à ses yeux, qu’une étrangère qui serait sans doute bien plus attirante une fois démembrée. Il ne ressentait aucune culpabilité à la critiquer devant elle. Depuis le début, il ne lui avait d’ailleurs jamais adressé la parole directement. Il parlait d’elle à la troisième personne. Je ne répondis pas et tournai les yeux vers l’Ange. « Tu ne trouves pas que ça pue ici ? » Puéril mais efficace. Un petit sourire malin apparut sur mon visage et mon regard se fit différent, plus centré sur elle, plus brûlant. Et, comme si mon frère n’existait pas, juste pour le faire enrager, je finis par murmurer. « J'ai très envie de te faire visiter ma chambre. » Je nous téléportai.

Nous arrivâmes debout, sur mon lit. L’une de mes jambes balaya celles de l’Ange et mon corps vint rejoindre le sien sur le matelas. Mes avant-bras de chaque côté de son visage, je décalai doucement ses cheveux avant d’admirer son cou, enfermé dans le col de sa robe. Je ne savais qu’en penser. J’avais surtout envie de la lui enlever. Ce n’était pourtant pas le moment. « Je suis désolé de t’avoir imposé la compagnie de ces deux connards mais le cachot aurait été pire. L’Empereur Noir ne t’aime pas. » fis-je, mon index courant sur sa mâchoire. « Je pensais pouvoir être le juge à ton procès mais Cyrius a refusé de me mandater. Il prononcera le verdict. » Ce n’était pas une bonne nouvelle. « Et il a nommé Val’Aimé en représentant de la société sorcière. » Je n’avais jamais remarqué auparavant combien le fait de le cacher rendait le corps mille fois plus désirable, comme si l’interdit éveillait l’imagination. En fait, je n’avais jamais ressenti ça pour aucune Sorcière. Ce qui était valable pour elle ne l’était pas pour les autres. Je souris, conscient de mes désirs déplacés. La situation était presque désespérée. Peut-être était-ce ça, aussi. Peut-être que, sans me l’avouer, je craignais réellement de perdre ce procès, de ne plus pouvoir la serrer contre moi. Je fermai les yeux et posai mon front contre son épaule. « Les deux ont largement le pouvoir d’acheter ton avocat et c’est la raison pour laquelle je dois convaincre ton frère de me nommer à cette fonction, ce qui me semble déjà une épreuve en soi. L’autre consistera à me former davantage en droit en une journée. » Je ris et descendis ma tête pour poser ma joue entre ses seins. J'étais fatigué. « J’ai dit à l’Archimage Ashiril que tu étais enceinte. Tu devrais donc avoir droit à son aide, si elle réussit à convaincre Lhéasse du bien-fondé de sa prétention. Rien ne l’y oblige et, s’il va dans son sens, il devra convaincre à son tour la Cour, soit le Roi. » Les choses, dites à voix haute, me paraissaient d’un risible sans bornes. Il n’y avait pourtant qu’un unique problème : Cyrius. Cyrius détenait toutes les cartes entre ses doigts. Il pouvait choisir d’abonder en mon sens ou tout l’inverse. C’était lui que je devais combattre et renverser. Je devais le forcer à me suivre. Restait qu’il était têtu, et qu’il voyait l’Ange comme une menace, pour lui, pour moi, pour nous. L’aspect juridique du procès n’était qu’une illusion, l’illusion que les journalistes diffuseraient à l’attention du peuple. Pourtant, cette illusion devrait paraître réaliste. Ma défense devrait tenir la route et être à la fois puissante et pertinente. Ma seule option était de gagner. Il n'y avait pas que l'Ange en jeu, bien qu'elle représentât quatre-vingt-dix-neuf pourcent de mon intérêt. Si je l'emportais, Elias apparaîtrait comme d’autant plus modéré pour l’extérieur, ce qui l’avantagerait. En renforçant la confiance des autres peuples, il me serait ensuite aisé d’améliorer le niveau de vie de tous les Sorciers, même des classes basses, et d’unir les Mages. Je relevai la tête. « Tu as pensé à ton testament ? » fis-je, avec un sourire étrangement taquin sur le visage. Si je perdais ce procès, je la ferais évader. Et je raserais la prison s’il le fallait. Encore une fois, j'étais fatigué. « J’aimerais que tu me lègues ton frère. » plaisantai-je, en oubliant totalement les effets de la marque des Mayfair. Trop d'états se succédaient en moi : l'excitation, la peur, la fatigue, la révolte, le désespoir. Tout ceci me rendait instable et, curieusement, ma langue s'activait à dédramatiser la situation et mon cerveau fuyait certaines réalités, comme le fait que j'étais actuellement allongé contre le corps d'une esclave.

881 mots
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Ven 18 Mar 2022, 07:58




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



« Alors, où est ta petite protégée ? » Adriel leva le nez de l’arme qu’il était en train de polir. Devant lui, Thadrias affichait un sourire à mi-chemin entre la raillerie et le mépris. « Il paraît qu’elle a quitté l’armée. » Le blond le scruta. Au bout d’un moment de silence, il prononça : « Oui. Elle a préféré poser sa démission. » Son interlocuteur attrapa une pierre à polir et s’assit sur le banc en face du sien. La lumière naturelle éclairait nettement la salle des armes de la caserne. « C’est sans doute pour le mieux. » lâcha Thadrias, comme une simple constatation. Le Namênor ne réagit pas, le regard désormais fixé sur son épée. Laëth et Thadrias ne s’appréciaient pas. Ils ne s’étaient jamais appréciés. Le brun avait une éthique et une morale trop strictes et trop brutales pour une enfant de Réprouvés. La Tempérance était sans aucun doute la Vertu qui l’étreignait le moins. Lors des explorations, il avait fait partie des détracteurs de la jeune femme, que l’on avait crue enceinte. Depuis, elle avait accumulé les frasques, et il n’avait cessé de la critiquer. Sa vision de l’angélisme était si épurée qu’il manifestait parfois une intransigeance insupportable. « J’ai pensé qu’elle allait bientôt partir, lorsque j’ai appris que son Protégé était un Déchu. Adam Pendragon… » Il n’ajouta rien, mais dans sa bouche, ce nom révélait toute son horreur. Adriel serra ses doigts autour de sa pierre à polir. La nouvelle avait été difficile à digérer. Il appréciait toujours autant la Belegad, mais son Lien avec l’Aile Noire réveillait immanquablement son trouble. Il y avait peut-être une once de rancœur ou de jalousie, aussi. Lorsqu’ils avaient parlé de la vie de Gardien, jamais il n’avait imaginé qu’elle s’attacherait à cet homme. Elle n’aurait pas dû… Ou plutôt, elle aurait dû faire plus attention. Et quand il y songeait, il repensait à son propre rôle, et c’était une pointe de culpabilité qui venait transpercer tous ses autres ressentis. Hena lui avait demandé d’entraîner sa Recrue à la magie. Ce Lien sonnait comme un échec ; et cet échec comme une trahison à l’encontre de ces deux femmes. « De toute façon, avec toutes les casseroles qu’elle traînait, elle aurait eu du mal à monter dans la hiérarchie. Ce n’est pas pour rien qu’elle est restée une Recrue si longtemps. » - « Dois-je te rappeler que sa mentor est morte ? » Thadrias releva la tête. « Isiode Yüerell était largement assez compétent pour l’amener à son meilleur niveau. Dommage, parce que je reconnais qu’elle est dotée de quelques qualités de guerrière, cette Aile d’Acier. » - « Hum. » - « Mais elle est juste trop peu fiable pour qu’on lui accorde des responsabilités. » Adriel serra les dents et se redressa à son tour. Ses yeux bleus plongèrent dans ceux du brun. « Elle est fiable pour qui sait s’y fier. Tu conviendras que ce n’est pas en se méfiant de quelqu’un que l’on en obtient grand-chose. » Thadrias le regarda, puis sourit.

Il y eut un instant de silence, avant qu’il ne reprît : « Elle t’a dit pourquoi elle quittait l’armée ? » L’Ange blond inspira et baissa la tête. Sa décision l’avait peiné. Il avait essayé de la convaincre de rester. Peu importait ses erreurs, ses fautes et ses incompétences : elle avait du potentiel. Il était certain qu’elle aurait pu exprimer ce talent au sein de l’armée angélique, mais elle en avait décidé autrement. Il l’avait regardée plier son uniforme avec l’impuissance qu’elle lui faisait si souvent ressentir. « Les rumeurs sur son Baron et son Humain l’affectent trop ? » Il s’humecta les lèvres, puis passa ses dents dessus. « Grâce à certaines personnes, les rumeurs ne l’affectent plus vraiment. » Le bruit de la pierre contre la lame avait quelque chose d’apaisant, pourtant, son cœur crépitait. « Je pense que c’est un ensemble de choses. Le Lien, sans doute, et tout ce qu’elle a pu faire et qu’on a pu lui reprocher. La guerre entre les Réprouvés et les Sorciers, aussi. Elle voulait aider. Je ne pense pas qu’on l’aurait laissée partir – ou en tout cas revenir – sans aucune conséquence. » Il y avait aussi autre chose, une histoire de place qu’elle ne trouvait pas, et qui touchait des tourments plus profonds. Il n’avait pas réussi à en savoir plus. Thadrias acquiesça, puis dit : « Elle a choisi son peuple. » - « Elle se soucie toujours des Anges. » - « Pourtant, elle a quitté notre armée pour se lancer dans une bataille perdue d’avance. Son cœur est là-bas. Il l’a toujours été. » jugea-t-il, avec dans la voix une suffisance qui hérissa le blond. « Pourquoi est-ce que tu es venu me parler de ça ? » Il haussa les épaules, concentré sur sa tâche. « Je viens d’entendre dire que le Baron Paiberym est parti pour Amestris parce qu’elle y est retenue. Je crois qu’il va y avoir un procès ? Elle aurait essayé de tuer l’Empereur et les Archimages, pendant la bataille. Bref, j’y ai repensé en te voyant. » Les yeux écarquillés, Adriel le scrutait. « Tu mens. » Le brun se redressa. Ses iris sondèrent son interlocuteur. « Non. Je pensais que tu savais. » Un silence tendu s’installa entre les deux hommes. « Je devrais y aller. » - « Pardon ? » Il se leva et posa son arme. « Et son frère ? Il n’a pas monté une unité diplomatique pour aller la chercher ? » - « Je n’en sais rien. » - « Et les autres ? Est-ce que quelqu’un est en train de faire quelque chose, au moins ? » - « Elle vient de démissionner de l’armée et elle y est allée de son propre chef. Je ne vois pas très bien ce qu’on pourrait faire, ni où se situerait notre grande perte si nous ne faisions rien. » - « Je t’interdis de dire ça ! » Le silence tomba entre eux comme une nuée de flèches. Ils se dévisagèrent, chacun surpris par la véhémence soudaine du Namênor. « Tu l’aimes ? » Adriel se redressa et se renfrogna. Thadrias haussa les sourcils, pinça les lèvres et fit courir sa langue dessus, en clignant des yeux. Puis, un rire monta dans sa gorge. D’abord, tout doucement, et ensuite il enfla, jusqu’à éclater. Le soldat serra les poings, la mâchoire tendue et le corps gainé. « C’est tragique. » conclut l’autre.


Le cœur de Freyja se contracta. Son regard déchiré flotta dans les yeux de Kaahl. Ni Cyrius ni Val’Aimé ne chercherait à l’épargner, au contraire. Elle le savait. Elle le comprenait d’autant plus maintenant. L’attachement de l’Empereur à Elias Salvatore était une évidence que chacun soulignait avec un sourire narquois, mais toutes ces moqueries s’évanouissaient dans le gouffre de l’ignorance. Ce n’était pas juste Elias, c’étaient tous ceux qu’il était, c’était lui. Elle repensa au concert, sur Lagherta, et à la proximité des deux hommes. C’était pour cette raison qu’il ne l’aimait pas, pour cette lueur qui brillait dans ses yeux quand il le regardait. Pour ce qu’elle était, elle aussi, avec ses deux grandes ailes blanches. Il les lui arracherait. Quant à Val’Aimé, il incarnait à lui seul toute la violence de la société sorcière. Il voudrait la faire souffrir, puis la tuer. Ses paupières se fermèrent. Elle glissa ses doigts dans les cheveux de Kaahl, caressa doucement ses oreilles, descendit sur sa nuque. Au son de son rire, sa poitrine se brisa. L’une de ses mains effleura sa joue, s’y attarda, remonta sur son front. Plus il parlait, plus le désespoir de sa situation la saisissait. « Mais c’est un mensonge… » souffla-t-elle. Elle ne s’énerva pas, elle n’ajouta rien. Son esprit peinait à réaliser ce que son maigre instinct de survie lui soufflait : elle avait plus de chances de périr que de vivre. Elle n’était pas certaine qu’une défense menée par Elias arrangerait les choses. En revanche, elle fragiliserait sans doute son rôle. Comment expliquer que le Monarque prît la défense d’une Ange qui avait refusé sa main et essayé d’assassiner ses confrères ? La politique ne justifiait pas tout. Il ne pouvait pas aller à contre-courant des désirs de son peuple et prétendre qu’il avait œuvré ainsi pour la paix – parce que c’était certainement ce qu’il ferait. La surface si lisse de son mensonge finirait par se fissurer. Sa magie chantait des notes bleues. N’importe qui s’en serait rendu compte, surtout si elle entourait Elias. Il pourrait peut-être mettre l’un de ses artefacts raciaux, mais combien de temps la supercherie tiendrait-elle ? On finirait par comprendre que l’ex-Empereur éconduit n’était autre que le Baron tant aimé. Et tout ça, en grande partie par sa faute.

L’Ailée rouvrit les paupières et ses iris rejoignirent son visage au sourire amusé. Elle pinça les lèvres. Elle savait ce que c’était : l’humour au secours de l’impossible. La tête reposée sur le matelas, elle scruta le plafond, avant de ressentir une vive douleur dans le bras gauche. Un souffle douloureux s’échappa de son nez et elle attrapa son avant-bras. Elle l’avait presque oubliée, elle aussi. « Il ne m’appartient pas. » se sentit-elle obligée de répondre. Elle haïssait cette sensation. Elle la haïssait du plus profond d’elle-même. Elle se serait arraché le bras si cela avait pu la faire cesser. « On peut me la retirer, maintenant, s’il te plaît ? Je ne veux pas mourir en tant qu’esclave. » Un vague sourire dessina sa bouche. C’était trop irréel. C’était impossible. Elle n’allait pas mourir, pas comme ça. Elle avait encore tant de choses à vivre ! Son existence n’en était qu’à ses balbutiements. C’était comme si le monde lui tendait les bras et qu’elle venait de lui tourner le dos. « Je suis désolée. » chuchota-t-elle. L’Ange se redressa sur ses coudes pour pouvoir le regarder dans les yeux. Elle répéta : « Je suis désolée. » Ça ne servait à rien, ça ne servait à rien du tout parce que ça ne changeait rien, ça ne faisait rien avancer. Son buste se releva complètement et, assise, elle se rapprocha du Magicien. Elle l’enlaça et noua ses jambes autour de lui. « Je t’aime et je suis désolée. » Elle le serra contre elle. « Je ne voulais pas te mettre dans cette position. Je voulais juste… C’était insupportable. » termina-t-elle dans un murmure. Son nez se nicha dans son cou, où elle huma son parfum. Et si elle ne pouvait plus jamais le sentir ? Et si elle ne pouvait plus jamais le serrer contre elle ? Les deux pieds au bord de la mort, elle se rendait compte que malgré tout, malgré Adam, malgré ses mensonges, elle l’aimait toujours autant. Différemment, mais toujours autant. Peut-être même encore plus. « Je ne pensais pas que ça aurait de telles conséquences. » Elle n’avait pensé à rien. Elle avait vu la détresse des Réprouvés, elle avait ressenti leur souffrance et elle avait agi. Elle n’avait pas pensé. « Kaahl. » Freyja se redressa et plongea son regard dans le sien. « Tu crois que je vais mourir ? » La peur lui brûlait l’estomac. « Je ne veux pas être dramatique, mais si je dois mourir, je ne veux pas que tu me défendes. Ce serait stupide. Tu ferais tout ça pour rien. » Et c’était sans compter sur Priam. Il n’était pas parfaitement impossible qu’il acceptât l’aide d’Elias, mais les chances restaient maigres. « Si je dois mourir, je veux juste que mes frères soient relâchés, sans dommages. » Elle retourna se blottir contre lui, la bouche contre la peau de son cou. Sous ses côtes, son cœur battait un rythme lourd et profond. Elle ne voulait pas le lâcher, jamais. « Et si je dois vivre… » Parce qu’elle ne voulait pas mourir. Elle voulait vivre et elle voulait croire que c’était possible. L’Espérance l’avait toujours portée vers l’avant. Il était hors de question qu’elle l’abandonnât dans ces instants-là. C’était maintenant qu’elle avait le plus besoin d’elle. « Si je dois vivre, je veux t’épouser. Je veux passer plus de temps avec toi. » Elle déposa un baiser sous sa mâchoire. Ses mains dansaient contre le dos du Mage, à la recherche de la vie. Le toucher la faisait se sentir vivante et, considérant les circonstances, la sensation était grisante. « Je crois que je voudrais des enfants. » Elle sourit et souffla un rire. « Tu crois que ça me sauverait vraiment la vie, d’être enceinte ? » C’était idiot. À la place des Sorciers, elle y verrait une raison supplémentaire de la tuer. Cependant, là où l’esprit bute, il trouve toujours des alternatives, aussi saugrenues soient-elles. L’Aile d’Acier bascula en arrière en entraînant Kaahl dans sa chute. Elle prit son visage entre ses mains. Plonger ses iris verts dans ses yeux noisette aviva d’autant plus le feu qui la consumerait jusqu’au bout. « Fais-moi l’amour. Mais complètement, cette fois, s’il te plaît. » Elle sourit, comme si rien n’était grave. Rien n’était grave.



Message XIV – 2188 mots

Bien sûr, c'est d'ailleurs pour ça que Dastan en rêve toutes les nuits [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 1628




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Sam 19 Mar 2022, 22:37



Que l'Ombre dévore


« C’est vrai. » m’entendis-je lui répondre. Mon sourire s’était peut-être légèrement tari. C’était une esclave, et tant qu’elle le resterait, elle obéirait à mes commandements. Si Priam lui avait appartenu, elle me l’aurait légué sans possibilité de refus. Je déglutis mais continuai à souhaiter me montrer confiant malgré tout. Je n’avais pas d’autres choix. Tous les chemins de ma stratégie menaient à des catastrophes depuis que Cyrius m’avait refusé le mandat. Je lui en voulais. Je lui en voulais, parce que je mesurais mon impuissance face à lui. Je sentais la marque de sa morsure, les effets de son venin. Et malgré tout, j’étais incapable de le haïr, parce que sa musique coulait en moi, parce qu’il s’était engouffré dans mon esprit. Petit à petit, il avait resserré son emprise sur mon cœur. J’en étais conscient mais j’étais incapable de lutter. Dès qu’il ouvrait sa peau, dès que son sang coulait pour que je m’abreuvasse ou dès qu’il menaçait de le faire couler pour se tuer parce qu’il trouvait que je m’éloignais trop de lui à son goût, je ne pouvais faire autrement que de le rejoindre. Ce n’était pas de l’amour, pas vraiment, pas au sens traditionnel. C’était différent, différent et intense, une vague question de vie ou de mort. Il semblait être le plus dépendant mais ce n’était pas le cas.

« Je ne peux pas. » murmurai-je. Rien ne le justifierait, rien ne l’expliquerait. Plus j’y songeais, plus les ramifications se rétrécissaient. Devais-je l’aider à s’enfuir ? La téléporter en ma compagnie chez les Humains, malgré le fait que ma magie sauterait à Utopia ? Malgré le fait que, depuis ma Mue, ma silhouette était celle d’Elias ? Et quel avenir aurait-elle, à part celui de rester prisonnière des murs d’une cité, hors de la portée des Sorciers ? Tout ceci n’avait aucun sens. Que faire ? Avouer mon amour pour elle en tant qu’Elias Salvatore ? Ce serait stupide, stupide et peu crédible. Convaincre Cyrius ? Comment ? Il demanderait une contrepartie et je la connaissais déjà. Il me sommerait de ne plus la côtoyer, jamais. Peut-être était-ce la solution ? La solution du moindre mal. En tant que Magicien, je n’avais aucun poids ou presque. Laisser l’Ashiril faire me coûtait énormément, malgré sa compétence. En tant que Sorcier, j’avais également beaucoup à perdre. Je serais en mesure de sauver les meubles face au peuple si je la défendais mais si Cyrius allait à l’encontre de ma défense ou jugeait ma présence irrecevable, alors il ferait office de figure de pouvoir pour de bon. Par sa fin de non-recevoir, il briserait d’un coup l’image de marionnette à mon service que tous imaginaient. J’avais perdu le contrôle et le peu de temps à ma disposition rendait ma reprise difficile. Comment contrer le Grand Chaos ? En lui faisant du chantage ? En menaçant à mon tour de me suicider ? En le faisant ? En faisant disparaître le Palais de Justice ? En tuant le Roi ? Il n’y avait rien. La fuite serait illusoire. L’attaque était incertaine. L’immobilisme ne contrerait pas l’écoulement des minutes. « Ne le sois pas. » Être désolée ne changeait rien. J’avais commis une erreur de calcul. J’aurais dû lui interdire le champ de bataille dès le début, purement et simplement, quitte à contrôler sa vie, quitte à ce qu’elle me haït. Je n’aurais pas dû lui faire apposer cette marque. Mais j’avais voulu qu’elle comprît. La bonne décision aurait été de la faire téléporter loin d’Amestris, pas de la propulser entre ses murs. Ça avait été petit. Ça avait été un mauvais jugement, un coup porté par la certitude orgueilleuse de pouvoir la sortir de là. Je le voyais maintenant et je me haïssais pour ça. Tout aurait pu se dérouler à la perfection si Cyrius ne m’avait pas trahi. Parce qu’il s’agissait de ça, de trahison.

« Non. » répondis-je à sa question, avec toute la peine du monde à maintenir ma voix stable. Je n’en savais rien, je ne voulais pas savoir. Mais je savais malgré moi que ses chances de survie étaient minces. Peut-être qu’elle allait mourir mais il m’était impossible de lui avouer, de me l’avouer. Je préférais rire et ne pas y penser. Pourtant, mon esprit ne cessait de rejouer chaque seconde de ce qu’il s’était passé en boucles, en essayant de trouver les failles. Il ne faisait que me montrer et démontrer les miennes. Et si je prenais sa place, au procès ? En devenant un Ange ? En imitant son apparence ? Non. La meilleure solution consistait à la défendre face à Val’Aimé et Cyrius, à respecter les procédures et à tenter de gagner face à une Justice qui n'était pas juste et ne le serait jamais. Mais restait que Priam devrait m'accepter en tant qu'avocat, après être redevenu un homme, s'il le redevenait à temps. Et si l’opération serait bien vue de l’extérieur des territoires sorciers, il me faudrait trouver une stratégie pour justifier mon office et, surtout, ma détermination à aligner des arguments allant dans le sens d’une Ange que la majorité des Mages Noirs voulaient voir exécuter. J’y arriverais, mais affaire après affaire, coup après coup, mes arguments faibliraient, surtout si j’aidais toujours les non-Mages au détriment de ces derniers. Mes politiques répressives à l’intérieur du territoire parlaient pour moi. Comment justifier que ce ne fût pas le cas pour l’extérieur ? La victoire face aux Réprouvés m’avantageait mais elle serait vite oubliée au profit de mes travers. Chaque étape de mon plan principal n’était qu’une succession d’hypothèses sans certitudes. Aucune fondation solide n’y existait et tout menaçait de s’écrouler au moindre souffle. Tout reposait sur Cyrius.

Je l’écoutais mais n’étais jamais d’accord avec elle. Si elle mourait sans que je ne la défendisse… comment pourrais-je vivre ? Je savais pour le Cycle. Je savais. Mais je ne pouvais pas me résoudre à ne plus pouvoir ni la voir ni la toucher. Elle demeurerait, quelque part, comme Constantine. Ce n’était pourtant pas pareil. Il était hors de question que Cyrius la tuât. J’avais envie de lui hurler d’arrêter de parler avec des « si je dois mourir ». Je restais pourtant silencieux, à laisser son corps imprimer le mien, à écouter la suite, sans que la joie ne me saisît plus, même du fait du déni. C’était étrange, de faire des projets d’avenir avec une presque morte. C’était comme si elle me disait que, nous deux, nous aurions pu nous marier et avoir des enfants mais que ça n’arriverait pas, parce qu’elle était une Ange impulsive et que j’étais, ou avais été, l’Empereur Noir. Il y avait comme une incompatibilité, comme une tragédie dans tout ça. Que devais-je faire ? Aller confronter Cyrius sous mon apparence magicienne ? Lui mettre mon poing dans la gueule pour lui faire comprendre ma douleur ? L’obliger à courber l’échine ? Faire se confronter nos magies ? Détruire sa putain de tour et tous ses instruments ? Le détruire, lui ? Lui infliger la honte de sa vie ?

Mon esprit, perdu dans ces considérations, avait tué mon envie d’elle, si bien que lorsqu’elle me fit basculer sur le dos et me demanda de lui faire l’amour, j’eu du mal à saisir ses mots, comme s’ils étaient incompatibles avec une quelconque stratégie, comme s’ils n’entraient dans aucun plan possible. Je plissai les yeux, la regardai un moment et l’amenai contre moi. Mes bras la serrèrent et mes lèvres effleurèrent ses cheveux. Je déglutis. « Je ne veux pas que tu meures. » J’avais juste envie de pleurer, maintenant.  

1236 mots
Franchement, ça ne m'étonne pas  [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 1628

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Dim 20 Mar 2022, 09:44




Que la Lumière rayonne
et que l’Ombre dévore

En duo | Kaahl & co



Rien n’était grave, sinon la voix brisée de Kaahl. La tristesse la harponna. Elle pouvait tout supporter, ériger des murailles de déni et se retrancher derrière. Elle pouvait. C’était le plus simple. Se penser morte lui était impossible. Elle n’était pas différente des autres êtres vivants ; elle aspirait à la vie comme les poumons s’imprègnent d’air. Mais les notes cassées qui résonnaient dans la gorge du Mage, celles-là, elle ne pouvait pas les ignorer. L’écho qu’elles propageaient dans sa poitrine la déchirait. Tout désir s’écroula, et il ne demeura que l’insupportable réalité. « Ne pleure pas… » murmura-t-elle contre son épaule. C’était trop tard : elle entendait et sentait les saccades de sa respiration. Ses propres larmes dévalèrent ses joues. L’Ange le serra contre elle, comme si elle ne pourrait plus jamais le faire. Elle le serra contre elle à se fondre en lui, elle l’agrippa à ne plus jamais le lâcher. Avec l’espoir vain que cela pût tout résoudre, elle répéta : « Je t’aime. » C’était sans doute pire. Peut-être que si elle l’avait détesté, tout aurait été plus supportable. Mais elle voulait qu’il sût, malgré tout, elle voulait qu’il sût ; elle le voulait avec une urgence despotique. Elle renifla. Sa main droite remonta vers le visage du brun, et elle caressa doucement sa tempe. Ses mèches de cheveux chatouillaient ses doigts. « Je ne veux pas mourir non plus. » Son existence n’avait pas le droit de s’arrêter de cette façon-là. Pas comme ça. Pas si brutalement. Pas à ce moment-là. La Mort n’avait pas le droit de la prendre maintenant. La figure de Jun s’imposa à elle, et en même temps, tous ces discours qu’il lui avait tenus, sur des réalités alternatives, sur d’autres possibles, sur différentes versions du vrai. Elle se souvint du rêve qu’il lui avait partagé, du Destin implacable et de celui qu’on peut changer. Peut-être que dans certaines versions de l’histoire, elle mourait. Pourtant, il devait aussi en exister dans lesquelles elle s’en sortait. La guerrière qui l’habitait était incapable de s’avouer déjà vaincue. Elle refusait de rendre les armes.

Freyja remonta un peu contre le corps de Kaahl et déposa un baiser dans son cou. Puis, elle se redressa, une main de chaque côté de sa tête, sur le matelas. « Regarde-moi, s’il te plaît. » Ses doigts se rapprochèrent de lui et glissèrent contre sa mâchoire. « Regarde-moi. » Elle renifla et essuya rapidement les larmes qui couvraient ses joues, puis sa main retourna sur la peau du Mage. Son pouce chassa les sillons mouillés qui y couraient. Ses yeux verts, rougis par la tristesse, cherchèrent les siens. « Je ne vais pas mourir. » C’était une promesse : à elle-même, mais à lui aussi. Une promesse à la vie, une promesse à l’avenir. On lui répétait souvent d’arrêter de promettre l’impossible, mais ce serment-là, il fallait le faire. Il fallait le faire pour y croire. Sans lui, elle serait morte. L’Aile d’Acier inspira, puis souffla. Sa respiration était encore fébrile. Elle tentait d’éclaircir ses idées. Il leur fallait penser, et agir. Le temps leur était compté, et pleurer n’apporterait aucune solution. « Priam ne me laissera pas mourir. » Les liens du sang pouvaient se révéler cruels. Dans leur cas, elle savait qu’ils auraient chacun été prêts à tout pour sauver l’autre. « Mais il ne croira jamais Elias. Il faut que ce soit moi qui lui parle et qui le persuade de te choisir pour le procès. » Elle sonda son regard, hésita une dernière fois, puis dit : « Je crois qu’il faut lui dire la vérité. » Ils en avaient déjà parlé, longtemps auparavant. Kaahl avait été prêt à le faire. « Il sera en colère, il me détestera et il voudra sans doute te tuer, mais il ne me laissera pas mourir. Il comprendra pourquoi toi plutôt qu’un autre. » Elle savait ce qu’elle risquait. Jamais son frère ne l’enverrait au trépas, mais il était possible qu’il refusât de lui adresser la parole. Pour quelques temps ou pour toujours. Le secret du Mage pesait aussi lourdement sur son existence que sur la sienne. Sauver sa vie impliquerait peut-être de perdre Priam. Si elle décédait, elle le perdrait tout à fait. Sa situation la contraignait à parier sur le futur pour protéger le présent. « Et pour ma défense… » Elle baissa la tête et se mordilla la lèvre. « Si je dois garder la marque un certain temps, autant qu’elle serve. » Prononcer ces paroles lui broyait l’estomac. Elle ne voulait pas rester une esclave. Cette position la débectait. « Il faudrait que tu m’achètes. Toi ou Elias. Plutôt Elias, je pense. » Son cerveau réfléchissait à mesure qu’elle parlait. Elle se redressa pour le regarder. « Je serai ta propriété. Ce sera normal que tu me défendes, et peut-être que ça rendrait ton peuple plus réticent à me faire tuer, parce que ce serait une façon de t’insulter. Non ? Et ça peut être logique que tu m’aies acheté pour me faire payer mon refus de t’épouser, à la Coupe des Nations. Ça ne surprendrait personne que tu te venges de la sorte, si ? Tu pourrais jouer là-dessus. Tu pourrais dire que tu veux faire valoir tes droits sur moi, et que si je meurs, tu ne pourras pas. Et que la mort est « trop douce » en punition des affronts que j’ai commis. Tu pourrais aussi dire que ma mort pourrait entraîner des conséquences néfastes avec l’extérieur, et ne servirait pas les Sorciers. Les Anges ne feront rien pour moi, mais il y a Priam, et Kaahl. D’autres aussi peut-être… J’ai de la famille et des amis chez les Réprouvés. Peut-être que le fait de m’exécuter entretiendrait d’autant plus leur rancœur. Je ne sais pas si c’est très souhaitable, malgré la victoire des Sorciers. Ils vont évoluer. » Ses iris verts scrutaient son visage, à la recherche du moindre indice. « J’ai bien compris que Cyrius me détestait, mais je ne pense pas que lui comme Val’Aimé puissent aller contre toutes les lois ou la logique. Et ils doivent bien te craindre un petit peu… » Elle n’en était pas certaine. Elle n’était certaine de rien. Mais la certitude n’importait jamais aux proies : quoi qu’il arrivât, elles se débattaient jusqu’à la fin. « Tu crois que ça marcherait ? »



Message XV – 1062 mots

Les Sorciers ont toujours été le plus grand fantasme des Réprouvés [A] - Que la Lumière rayonne et que l’Ombre dévore | Réprouvés & Sorciers - Page 2 1929536143




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Dim 20 Mar 2022, 11:50



Que l'Ombre dévore


« Je t’aime aussi. » murmurai-je, en tentant de réguler les tremolos de ma voix. C’était presque impossible. Ma nouvelle condition rendait ma façon d’être différente, plus sensible, plus ancrée dans le réel émotif. Repousser mes sentiments était difficile, bien que mon esprit restât tactique. J’avais conscience, pleinement, de l’importance des êtres que j’aimais, de leur poids dans mon existence, de mon attachement à eux. Je l’aimais et, là où le Sorcier aurait pu la sacrifier sur l’autel de ses desseins, ce n’était pas mon cas. Ça ne l’était plus. L’entendre pleurer m’arrachait le cœur et contribuait à mon propre malheur. Mes doigts avaient beau s’agripper à elle, j’avais la sensation horrifiante qu’un jour, ils se refermeraient sur du vide. Je ne pouvais pas accepter qu’elle ne fût qu’un souvenir, une marque de présence invisible. Je ne désirais pas son souvenir, je la désirais elle, tout entière, à mes côtés. Je pourrais même accepter qu’elle s’arrachât à moi, qu’elle me quittât, si elle restait en vie. Ce serait douloureux mais moins que la perdre pour de bon.

Je la fixai à son deuxième commandement. Mes yeux me piquaient et la tristesse comme la fatigue y jouaient une partition qui les rendaient brillants et irrités. Un début de migraine m’assaillait, une migraine de contrariété et de peine, la migraine de ceux qui ne dorment pas assez, juste entre les deux sourcils. Et quand elle prononça son affirmation, je voulus la croire plus que tout. Si je savais d’expérience que la volonté est parfois insuffisante face à l’inéluctable, je ne pouvais pas me permettre de ne plus me battre, de ne plus chercher un moyen, de ne plus au moins essayer. Nous ne gagnerions rien à rester statiques. Nous ne gagnerions rien en fuyant. Il nous faudrait donc attaquer, ensemble. Je devais accepter ce « nous », l’inclure, elle, dans la stratégie, et arrêter de penser comme un Sorcier, à croire que seuls mes mouvements la sortiraient d’affaires. Nous devions coopérer. Je devais lui faire confiance. Je lui faisais confiance. Aussi, je l’écoutai me dérouler ses idées, son plan pour sauver sa propre vie. Dans mon esprit, les liens se firent entre toutes les idées, en des myriades de « si » menant à des impasses et à des voies plus praticables. Que faire en cas d’échec ? Comment rattraper telle ou telle situation ? Quelle était la solution la plus à même d’aboutir ? Je pouvais réussir à convaincre Priam mais cela prendrait du temps et ne se ferait peut-être pas sans l’intervention de ma magie, ce qui vicierait son consentement. Si j’achetais Laëth, je n’avais plus besoin de l’autorisation de son frère mais elle était préférable, surtout parce que je n’étais pas certain que les Mayfair m’accordassent la propriété de la jeune femme si rapidement. Si ma demande de propriété restait pendante le temps du procès, je ne serais pas officiellement son maître. Je pourrais néanmoins bien plus justifier sa défense en posant en argument ma volonté de l’acquérir, tout en appuyant mes dires par la copie de mon offre d’achat aux Mayfair en guise de preuve. Priam restait donc indispensable et Laëth réussirait mieux que moi à le faire plier. Quant au fait qu’il sût, nous en avions déjà parlé. Les risques pour moi étaient grands mais moins que par le passé, grâce à ce que j’étais à présent. Me dénoncer ne lui apporterait rien, plus maintenant. J’inspirai et laissai l’air ressortir lentement de mes poumons. J’acquiesçai. « Oui, ça peut marcher. » Ce n’était pas certain. Ce n'était pas certain et faire d'elle ma chose me répugnait.

Je me redressai à mon tour, plaçai mes mains sur ses hanches et la fixai. « Il va falloir que nous agissions ensemble pour que nos actions soient le plus efficaces et rapides possible. Je vais retourner à Amestris et préparer mon offre d’achat aux Mayfair. Je ferai en sorte d’éliminer la concurrence s’il y en a, soit en étouffant les autres offres, soit en offrant bien plus. Ma position devrait me permettre de t’acquérir à termes mais je ne sais pas combien de temps ça prendra. Ça n’a pas d’importance : le fait que la procédure soit en cours me donnera la légitimité d’assurer ta défense. Certains parleront mais la majorité sera convaincue, comme tu l’as fait si justement remarquer, que je désire simplement protéger mon patrimoine et te faire payer moi-même l’affront que tu m’as infligé par le passé. Tous se réjouiront en pensant que ton sort sera bien pire que celui que pourrait prononcer Cyrius à ton encontre et les propriétaires d’esclaves pourraient même aller dans mon sens, en ayant peur pour leurs droits si la Couronne venait à ne pas respecter le mien. » Le Roi pourrait même en ressortir affaibli car la question des esclaves touchait un bon nombre de Mages Noirs, sans parler des Mayfair qui possédaient une position dominante dans la société sorcière. « Je vais envoyer des Sorciers te chercher et te ramener au palais, dans mon bureau. Je vous laisserai seuls après avoir préparé les papiers que ton frère devra signer une fois qu’il sera redevenu un homme. Je vais essayer de préparer une potion qui inversera le sort mais je ne suis pas expert en la matière. Puisqu’il en va de mes intérêts en tant que futur propriétaire, je pourrais peut-être demander à un alchimiste de s’en occuper avant ton arrivée… » Je réfléchissais en parlant. C’était la meilleure solution. Ma requête serait cohérente. « Je préparerai ta défense pendant ce temps et, ensuite, en fonction des réquisitions de Val’Aimé et de ma plaidoirie, Cyrius rendra son verdict. » Ce dernier point était le plus incertain, à présent. Tout dépendait encore de Cyrius mais ce serait à moi de soulever des arguments qui provoqueraient l’adhésion du peuple et feraient pression, inévitablement, sur sa décision. Peut-être, d’ailleurs, avais-je tout intérêt de préparer une propagande journalistique qui mettrait le feu aux poudres dans le cas d’une défaite. « Et si nous perdons, nous ferons appel. » L’appel serait peut-être jugé irrecevable, puisque la décision émanerait du Roi, mais si le peuple se rebellait, il y aurait une chance qu’il fût accepté. Je n’allais pas tuer Cyrius, j’allais lui rappeler que, contrairement à lui, je n’étais pas devenu Roi pour les besoins stratégiques d’un autre mais parce que j’avais travaillé et avais mérité le titre. J'étais le Roi véritable et il devrait se plier à mes volontés, de gré ou de force, en laissant notre relation privée en dehors du champ de la politique.

Mes yeux cherchèrent ceux de l’Ange. « Nous allons faire ça : nous battre jusqu’au bout. » Des questions restaient néanmoins en suspens. Elle perdrait peut-être son frère. Elle serait aussi mon esclave., pour un temps indéfini. Mais tout ça valait mieux que la mort. « Je vais partir, maintenant. » dis-je. « Et tu pourras dire à Priam que… » Je n’aimais pas avoir à le dire tant mon état actuel me débectait, malgré l’absence total de tourments dus à la magie pernicieuse que je possédais avant. Elle l'avait peut-être remarqué, sans en être certaine. Depuis la Crucifixion et ma libération de la Couronne du Cycle Infernal, il y avait eu ce changement incompréhensible. L'évidence était pourtant criante tant ma magie valsait en volutes céruléennes. Et je ne portais aucun artefact. « Tu pourras lui dire que je ne suis plus un Sorcier... pour le moment. »

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