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 [Quête] Le renégat des ronces [feat Romumu]

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Lun 22 Fév 2016, 21:17

Chelae passa sa chaude cape sur ses épaules et on referma la porte derrière elle. Elle se couvrit un peu plus. C’était le soir et il faisait froid. Son souffle formait de la buée qui remontait, paisible, vers le ciel. Il arborait maintenant des reflets roses et violets. C’était l’heure. Elle se mit à marcher. On lui avait dit de se rendre à l’auberge d’Anarion, où elle trouverait un contact. Un Sorcier, plus exactement. On l’avait chargée de retrouver un autre de cette race, qui, semblait-il, nuisait aux siens. Elle n’avait pas eu grand nombre d’informations, le sujet était encore assez flou, alors qu’elle avait eu tout le temps de méditer pendant deux jours. Cependant, quelque chose lui échappait plus encore que cette affaire. Elle ne comprenait pas. Pourquoi elle ? Pourquoi lui avait-on confié cette mission, alors qu’elle n’avait toujours pas montré ses preuves au peuple ? Son père aurait-il insisté pour qu’on la lui confie ? Ce n’était pas vraiment son genre. Pas qu’elle allait s’en plaindre, au contraire. Mais il avait déjà cédé aux exigences de sa mère, qui avait insisté pour qu’un domestique vienne lui rendre service dans son nouveau chez-elle… Elle s’en serait volontiers passée, elle ne le méritait pas, mais Dreska avait si peur de perdre son autre fille… Elle ne pouvait que compatir. Elle aussi voulait revoir sa sœur. Il lui arrivait de ne penser qu’à ça pendant des jours entiers.

   Les rues n’étaient pas trop bondées, à Linaewen. Vu le froid, ce n’était peut-être pas si étonnant. De son enfance, elle n’y était que peu allée, les jours de fêtes, et forcément, c’était plein. Aujourd’hui, elle y habitait. C’était tout autre. Elle regrettait un peu la demeure de sa famille. Mais elle était aussi contente. Ici, elle était persuadée qu’elle apprendrait beaucoup plus qu’autre part dans la cité.

   Plongée dans ses songes, elle faillit louper l’auberge. Ses pas s’arrêtèrent net et elle se dirigea vers la porte. Les vitres étaient illuminées et on entendait de l’extérieur l’allégresse qui s’y trouvait. Pour tout dire, elle n’y avait jamais mis les pieds. Ce genre d’endroit ne faisait pas parti de ses lieux favoris. Elle ouvrit. Un flot de chaleur l’envahit et elle ne tarda pas plus pour entrer. Une serveuse l’aborda et lui proposa de ses services. Chelae refusa poliment et regarda autour d’elle. Elle n’avait aucune idée de ce à quoi pouvait ressembler son Sorcier… Ses yeux se figèrent presque d’eux-mêmes sur une silhouette – un homme – assis à une table, et visiblement seul. Elle ne discernait pas son visage. Lentement, elle s’approcha et s’installa juste en face de lui. Elle garda le silence pendant quelques instants. Elle espérait ne pas s’être trompée… Prenant son courage à deux mains, elle se racla la gorge.

   -C’est vous ?

   Elle ne chercha même pas à en dire plus. Son acolyte comprendrait bien assez vite de quoi elle parlait… Si c’était lui. A moins qu’il ne soit complètement stupide… Quoique pour un Sorcier, ça ne l’aurait pas étonnée. Du peu qu’elle en savait ou de ce qu’elle avait ouïe à leur sujet en tout cas, certains étaient de véritables barges. On disait que leur magie noire leur montait à la tête. Enfin bon, maintenant qu’elle y était, elle n’allait pas faire marche arrière. Elle lui tendit la main.

   -Chelae. Enchantée.

   Non, elle n’était pas folle et ignorante pour donner ainsi son nom en toute confiance. Elle avait ses raisons. Et non, elle n’était pas enchantée. Elle ne le disait que par pure politesse. Elle ne pouvait être enchantée qu’en la présence d’un autre Alfar. Le reste n’était pas à la hauteur de son peuple. Or de l’enchantement on retirait une sorte d’émerveillement, dont l’origine ne pouvait être que d’un supérieur ou d’un égal, éventuellement. En bref, ces deux mots qu’elle avait prononcés ne servaient qu’à mettre cet homme en confiance. Sinon, leur mission serait tout bonnement impossible. Tant qu’à travailler ensemble, mieux valait installer une atmosphère agréable. Elle attendait donc à ce que lui fasse de même, qui qu’il soit.

   Les présentations faites, ils n’avaient pas à trainer. Chelae tenait à ce travail. Elle ne pouvait se permettre de renoncer. Elle ne se pardonnerait jamais une telle fausse note. Il fallait au moins qu’elle essaie. Elle réussirait, c’était certain, mais il fallait être conscient que l’échec pouvait à tout moment lui sauter au cou, cuisant. Elle se leva. Elle devait cesser de penser, ou elle se perdrait.

   -Bon, il me semble qu’on a du boulot. On discutera dehors.


   Elle retourna vers la sortie, veillant du coin de l’œil à ce que le Sorcier la suive.

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Mar 23 Fév 2016, 22:17

Dans la pénombre de la nuit déposée sur la lueur vacillante des bougies disséminées, je travaille sur des rapports scientifiques, tentant de départager le concret de l'affabulation dans le travail de mon maigre effectif de scientifiques…


Je soupire… Je ne parviens pas encore à rendre mon centre influent. Mes employés ne sont que des charlatan incapable de produire des résultats ou si peu que je ne peux en tirer de véritables conclusions… Lau m'avait bien promis de m'emmener à un événement qui saurait m'apprendre à développer mon sens des affaires et de la gestion, mais en attendant, je stagnais et c'en était agaçant...


Soudain, quelques coups retentirent contre le bois qui gardait l'entrée de la pièce. Trois "toc" sonores. Nathanaël…


- Entrez, m'exclamai-je en reculant ma chaise, ayant à présent perdu le peu d'attention que je portais encore à mon travail…


Le majordome entra, baissa les yeux et se plia en deux avant de se redresser pour lancer avec assurance.


- Slydr est revenu. Il portait une lettre pour vous, monsieur. Elle est marquée du sceau de Prison…


J'aurais pu être absorbé par mes rapports que cela n'aurait rien changé. Lorsqu'un missive me parvenait frappée de l'emblème de notre race, je me devais de tout laisser en plan pour reporter immédiatement mon attention…



Une semaine plus tard, je persévérais dans la mission qui m'avait été confiée…


Selon les hautes instances sorcières, un sorcier du nom de Argus Casteri contrevenait aux projets de l'Empereur Noir. Je n'avais pas accès aux détails, mais on m'avait chargé de l'éliminer. Hélas… Celui-ci avait prit la fuite bien avant que j'arrive au dernier lieu où il avait été aperçu, du côté de l'Antre des Marais. J'avais aussitôt fais parvenir un rapport de la situation à Ser Thalus qui avait été désigné comme mon référent dans cette affaire. Celui-ci avait été étonnamment efficace, me demandant en premier lieu de retrouver sa place. Lorsqu'il fut confirmé qu'il s'était réfugié en terrain Alfar, il organisa une rencontre avec des homologues de la race des dangereux habitants de Drosera et ceux-ci promirent de mettre à ma disposition un informateur afin de me permettre de mener à bien mon assassinat… Depuis que les récents événements avaient démontré la fourberie que ces maîtres de la nature dans sa face la plus sombre était capables de déployer, je ne pouvais m'empêcher de croire que je courais droit dans un piège… Mais Ser Thalus avait été très clair : je devais aller à ce rendez-vous, rester prudent mais ne pas me défiler sous peine de ne plus trouver ma place parmi les miens. Tout collait et je savais que mon référent faisait le choix le plus judicieux…


Nous progressions en silence à travers les quelques chemins tracés par des animaux dont je ne souhaitais pas connaître l'apparence à travers les ronces et autres végétaux dangereux. Bien que je n'eus jamais été aussi à l'aise qu'au sein de cette ambiance sinistre, je devais bien avouer comprendre la raison qui avait poussé Yshäel, ma monture, à ralentir pour avancer au pas entre les gardiens centenaires de la forêt des murmures…


Finalement et sans que rien de plus qu'un air frais tente de nous agresser, la pénombre du sous-bois découvrit Drosera, la cité des Alfars…


Me redressant, j'adressai silencieusement par ce changement de position l'ordre au Thêor de s'arrêter.


- Notre chemin se sépare ici. Je vais y entrer seul pour rester relativement discret…


L'animal émit une sorte de gargouillement que j'interprétais sans raison comme une sorte d'acquiescement. Il n'attendit pas même que je m'éloigne pour se détourner et retourner à sa semi-liberté…


Pénétrer au sein de Drosera ne sembla pas poser de difficultés. Il suffit d'abaisser mon capuchon et de paraître à l'aise et personne n'osa me regarder de travers… Je semblais un visiteur quelconque…


Mais une fois au sein de la cité, je remis aussitôt mon capuchon, dissimulant mon visage, et refermais méticuleusement mon manteau de cuir pour ne rien laisser dépasser qui aurait trahis la moindre information à mon sujet. On est jamais trop prudent…


C'est au cœur de l'Auberge d'Anarion que je devais retrouver ce fameux contact de qui je ne savais rien aussi m'y installai-je calmement, à l'écart du reste des clients pour rester discret et différencié… Une façon d'aider mon collègue aux oreilles pointues à me retrouver…


- Je vous sers quelque chose ?


- Fort au goût, léger en alcool, j'ai encore du travail…


Le serveur me sourit, comprenant visiblement ce que je voulais dire, et repartis pour revenir un instant plus tard avec une spécialité Alfar…


Je me doutais bien que cet établissement n'avait pas pour réputation d'empoisonner ses clients et ce n'était pas par méfiance que je ne fis que goûter au breuvage. Je n'avais simplement pas soif et je n'étais pas là pour ça…


Une jeune femme finit par s'asseoir en face de moi et sa première question suffit à me révéler qu'il s'agissait bien de l'informateur en question…


La toisant d'un regard sombre à travers l'ombre de mon capuchon, je levais la tête avant de lancer simplement :


- Et bien… J'espère que vous ne vous êtes pas présentée à quelqu'un d'autre de cette façon…


Je me demandais si c'était mon intelligence qui surclassait ceux que je rencontrais ou si ma race toute entière se voyait conférer une finesse à celle de l'habitant standard des terres du Yin et du Yang… Mon orgueil n'avait décidément aucune limite… Et à travers son voile de mensonge que je parvenais pas à déceler, cette alfar me semblait d'une finesse bien relative…


Elle me tendait la main. Bon… Soit…


- Mormearn. Moi de même…


Et elle devrai se contenter de ce nom de code pour le moment…


Je ne pensais pas un mot de ce que je venais de dire et je ne pris pas même la peine de le cacher. Ma voix n'avait aucune tonalité cordiale, que de la froide réversion à l'égard de cet autre qui ne m'inspirai aucun intérêt pour l'heure… J'étais médisant, malintentionné et cela risquait de me coûter cher... Mais je n'en avais nullement conscience.


Elle m'invita à sortir et je laissai quelques pièces sur la table avant de suivre l'alfar. Je me souciais guère de quitter cette auberge en ayant payé pour son accueil ou non mais je me doutais qu'il aurait été bien mal calculé de ma part que de m'écarter du chemin de la loi alors que je revêtais pour l'heure l'habit de l'ambassadeur auprès de ce peuple par le caractère officiel de ma mission.


Elle me jetait des coup d'yeux inquisiteurs…


- Inutile de me surveiller ainsi… Je ne compte m'en aller nul part, je vous rappelle que j'ai besoin de vous pour mener à bien mon devoir envers ma race…


Il y eut un moment de latence tandis que nous venions de sortir de l'auberge…


- Par où comptez-vous commencer ?


Mais Chelae n'eut pas le temps de répondre qu'un léger sifflement retentissait, accompagner d'un mouvement que je vis du coin de l'œil.


Une flèche à la trajectoire mortelle se dirigeait sur ma partenaire…


Ce que notre adversaire ne savait pas, c'est que je n'en étais pas à ma première mission. J'avais pris mes précautions…


Comme si c'était parfaitement naturel, quelqu'un vint se placer entre la flèche et mon informatrice. Il sembla que ce fut un accident. La flèche vint se planter dans le crâne baissé de cet étranger qui s'effondra sur le coup. Si cela allait créer la panique, il n'y avait aucune raison de s'inquiéter, en vérité…


- Ne vous préoccupez pas de cet homme, faites-moi confiance. Si vous avez vu d'où venait l'attaque, dépêchez-vous de trouver l'archer, je serai sur vos talons. Dans le cas contraire, tâchez de nous emmener en sécurité. Vite.



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Mer 24 Fév 2016, 20:17

Chelae n’aimait pas cet homme. Froid. Rude. Une pointe d’insolence. S’il se croyait supérieur à elle, il se trompait. Certes, il s’était présenté, mais sa conviction avait lassé à désirer. Ils furent accueillis par le froid de l’extérieur, un froid qui s’infiltra dans les moindres interstices que ne cachaient pas ses habits pourtant chauds. Mormearn – c’était ainsi qu’il s’était présenté – lui demanda par où elle leur conseillait de commencer.

   -Le mieux…

   Un sifflement retentit, suivi d’un bruit sourd puis de celui d’une chute, l’interrompit. Comme devenue muette, elle baissa les yeux. Un cadavre… Une flèche dans la tête… Heureusement pour elle, la faible luminosité de la soirée lui épargnait les détails… Elle aurait autrement eu un haut-le-cœur. Elle n’avait jamais vu de mort… Elle recula, horrifiée, mais fit la mine indifférente de celle qui ne voulait pas salir ses bottes avec le sang qui ruisselait sur les dalles. Elle récita mentalement une rapide prière. Etait-ce le Sorcier qui lui avait donné l’ordre de passer ? Elle lui lança un regard noir. En tout cas, il avait décidé d’être particulièrement désagréable.

   Cependant, elle ne put s’empêcher de comprendre. Cela répondait à la grande question qu’elle s’était posée depuis qu’on l’avait assignée à cette mission. Si elle était là, c’était parce que sa vie était sans importance. Si elle venait à mourir, personne n’en aurait rien à faire. Elle n’avait même pas songé à cette option. Ses origines aisées lui avaient fait croire qu’elle était protégée et qu’il lui suffisait de faire ses preuves…

   Sa détermination, en même temps que la pression venait de monter aussi violemment que cet homme venait de se faire tuer. Ses yeux se déposèrent de nouveau sur lui. La flèche venait de la gauche. Elle n’avait pas envie de se cacher, c’était lâche et ils perdraient la trace de l’assassin. La solution inverse ne la ravissait pas non plus. Mormearn lui avait dit qu’elle pouvait lui faire confiance… Ce pouvait être des paroles en l’air. Mais ils devaient se faire confiance, c’était le jeu. Elle avait l’impression d’être tombée tout droit dans un piège. Elle avait gravement sous-estimé la situation… Elle passa une main sous sa cape, comme pour s’assurer que ses armes n’avaient pas disparu. Sans un mot, elle se mit à marcher, s’enfonçant dans la longue rue d’où était parvenue l’attaque. Au pire, il ne serait pas allé bien loin ; cette rue était une impasse. Elle n’avait plus envie de dire quoi que ce soit. Elle ne voulait pas qu’on les entende. L’archer était de mèche avec ce foutu renégat. Ce qui voulait dire qu’ils avaient eu l’information. Ce qui voulait dire que les contacts étaient très bons. Et qu’ils devaient avoir accès aux plateaux supérieurs. Elle qui pensait qu’un individu d’une autre race, recherché de surcroît, n’avait que très peu de chances de monter… Linaewen ne serait donc pas l’endroit où ils devraient en majorité concentrer leur enquête. Le travail risquait d’être long et laborieux.

   Elle avançait d’un pas rapide, scrutant la pénombre qui se faisait de plus en plus opaque. Les torches avaient beau être allumées, le vacillement des flammes lui faisait parfois voir des ombres qui n’existaient pas.

   Chelae s’arrêta net lorsqu’elle arriva au bout. Elle fit un tour sur elle-même et examina les hauts bâtiments, à la recherche d’un quelconque indice. Rien. Pas une corde accédant à une fenêtre, pas une trace de sang… Il savait voler, ou pouvait se téléporter… Super.

   -… En attendant que ce traitre se manifeste, je pense que nous pourrions faire un tour près des mines, chuchota-t-elle à son collègue, celles qui sont vides et inutiles sont l’endroit rêvé pour se cacher…

   En tant que malfrat, elle y aurait songé. Elle n’y avait jamais mis les pieds. C’était l’occasion. D’autant plus que les mineurs, détenus ou non, s’étaient pour la plupart retirés pour la nuit. Elle s’apprêtait à rebrousser chemin quand on l’attrapa par l’arrière du col. Le souffle court, elle s’agrippa à la main qui maintenait la lame d’un poignard sous son cou.

   -Laissez tomber ou je l’exécute. Menaça-t-il.

   La jeune femme était paralysée. Le moindre geste de travers et il l’égorgeait. Elle ferma les yeux et inspira lentement. Elle se concentra.

   -Tu écoutes ma voix et tout ce que tu veux faire, c’est me tuer une bonne fois pour toute, mais tu ne le fais pas. Chuchota-t-elle précipitamment, avec une locution parfaite. Tu ne peux pas parce que plus tu y penses, plus tu as envie de dormir. C’est vraiment agréable de dormir. D’ailleurs, tu sens que tes paupières deviennent lourdes. Très lourdes. Son emprise se desserre, tu lâches ton arme. Tous tes muscles se détendent et plus tu essayes de résister, plus cela te fatigue et plus tu as envie de dormir.

   Faire de longues phrases et de longs discours lui permettait de ne pas abuser de ses dons d’hypnose. C’était beaucoup plus simple de mettre le patient en transe en combinant magie et hypnose normale que de dire « dors ». Un tintement métallique retentit. La jeune femme fit volte-face. Son assaillant était partagé entre sa fatigue et son devoir. Il vacillait.

   -Tu résistes au sommeil, parce que tu as la sensation que tu ne te réveilleras pas. Avant de t’endormir, tu souhaites tout de même nous dire où se trouvent tes amis.

   -Ils… Non…

   Il ne dirait rien. Elle ne pouvait pas le forcer à faire des choses contre sa conviction. Ou du moins, pas encore. Souriante, Chelae posa un pied sur son buste et le poussa. Il ne montra aucune résistance.

   -Bonne nuit.

   Elle ramassa la dague et la passa à sa ceinture.

   -Vous pouvez le tuer, je m’en fiche. Il ne dira rien. Dit-elle à l’attention de Mormearn.

   Elle détourna la tête pour bailler sans qu’il ne le voit. C’était un effet secondaire de son pouvoir. En plus de l’avoir bien utilisé, elle s’hypnotisait toute seule. La puissance était moindre, c’était déjà ça de gagné.


   Ne laissant rien paraître, elle reprit sa marche. Comme convenu par elle : direction les mines.

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Jeu 25 Fév 2016, 22:21

J'avais rompu le contact… Tant pis, j'en trouverai un autre… En espérant que les autorité alfars ne me tiendraient pas rigueur de ce dépassement. S'ils avaient accepté de laisser rentrer un sorcier en mission dans leur cité et de mettre à sa disposition un informateur, c'était précisément pour que l'affaire ne fasse pas de vagues… Et déjà je manquais à mon devoir… Il me fallait être plus discret que cela ou bien je risquais des ennuis.


Je ne pouvais plus le déplacer, il resterait là. Chelae - du moins était-ce le nom qu'elle m'avait confié - s'élança. Elle semblait avoir une idée d'où venait le tir. Sans une hésitation, je partis sur ses talons.


Nous avançâmes à travers la foule jusqu'à une ruelle. Mais à l'intérieur, aucune âme vivante ne semblait avoir demeuré… L'alfar, qui ne perdait visiblement pas son temps, en avait profité pour réfléchir au lieu où il fallait débuter les recherches et l'énonça avec simplicité.


J'aurais bien pris le temps de donner mon approbation, mais un mouvement derrière elle me mit en alerte. La seconde suivante, ma coéquipière se retrouvait piégée par notre assaillant, une épaisse lame sous la gorge.


J'étais prêt à réagir, la main déjà posée sur le manche de ma dague, sous mon manteau. Il m'aurait suffit de me téléporter pour couper court à la tentative de menace de ce malfrat de seconde zone. Mais je préférais observer, voir comment la jeune femme s'en sortait par elle-même, avant d'intervenir…


Je fus alors le spectateur d'une séance d'hypnose réalisée avec un certain talent. Certes, son pouvoir n'avait pas une ampleur et une puissance remarquable, mais elle semblait bien le connaître et l'utiliser à son avantage avec un certaines intelligence que je ne pouvais m'empêcher d'apprécier. Une finesse digne d'un monsieur tout le monde mais correctement mise en pratique, ce qui n'était pas le cas de la majorité de la population des terres du Yin et du Yang, à mon humble avis…


- Vous pouvez le tuer, je m’en fiche. Il ne dira rien.


M'approchant du corps inconscient, je répondis avec une certaine curiosité :


- À votre place, je n'en serais pas si sûr…


Calmement, je vins déposer mes mains sur les jambes de l'homme, remontant puis descendant sur son pantalon sachant ses cuisses juste en dessous. La magie vint s'éveiller en moi naturellement, comme un chaleur venant s'installer au centre de mon ventre et grossissante jusqu'à éclater, déversant son flot dans mes membres. Finalement, comme il était de coutume quand on parlait de magie noire, elle commença à filtrer à travers ma peau comme de l'eau aurait débordé de part son ébullition, reposant dans une casserole censée la contenir. La légère mais nette vapeur noire qui vint envelopper mon corps en était la manifestation directe. S'il n'était pas encore clair dans l'esprit de l'alfar que j'étais un sorcier, un simple coup d'œil suffisait à présent pour le constater.


Je sentais le flux énergétique du corps de ma victime. Il traversait ses membres inférieurs et je distinguais à peine les subdivisions de ce fluide vital qui représentais les différents axes sur lesquels je pouvais agir. Voyons ce que je pouvais faire…


Finalement, je choisis la voie de la facilité, sachant que je n'avais pas le temps de faire dans le détail et vins simplement briser les délicats câbles qui faisaient circuler la vie au sein des jambes du malfrat inconscient.


Ensuite, je vins remonter mes mains près de son cœur pour y insérer ma magie noire… Elle vint s'enrouler autour de l'imposant organe vital que la représentation énergétique rendait encore plus évident. Je pouvais à présent éloigner mes mains du corps, mais en aucun cas relâcher ma concentration sous peine de faire une erreur qui serait… Fatale…


Je sortis ma dague, toujours dans un silence religieux, avant de l'enfoncer dans l'avant-bras de notre prisonnier.


Il se réveilla alors en sursaut, hurlant à la mort tant la douleur était insoutenable.


Par réflexe, il essaya bien de se lever, mais ses jambes étaient déjà mortes, elle ne répondraient plus jamais, il en avait perdu définitivement l'usage. La vie, ne coulait plus en elles…


Il était affolé et ça se voyait… Parfais. Tandis qu'il se débattait en bégaiements sans véritable sens, je fis un léger mouvement de la main tenant la dague, lui arrachant de nouveaux cris de souffrances. C'est ce qui s'appelait… Remuer le couteau dans la plaie… !


Il fallut répéter la manœuvre deux fois encore avant qu'il ne consente à se concentrer sur moi et à parler distinctement. Enfin… Autant que sa raison le lui permettait au vue de la terreur que je lui inspirais, entre ma lame et mon silence de plomb…


- Je ne sais rien… Je ne sais rien du tout… Je vous en prie, laissez-moi… !


Mauvaise réponse…


Il hurla de nouveau.


- Ash'latt ! On m'a contacté au nom d'Ash'latt ! Je ne sais rien de plus !


Si bête… Bien sûr que tu en sais plus ! Allez !


- Rue de la Salyvendre ! Je devais toucher ma prime là-bas.


Et bien… Ce n'était pas si compliqué !


Retirant la lame, je me levai, paisible… Finalement, ce serait ma voix qu'il aurait entendu en dernier… Quelle tristesse… La vie n'était que déception. Il aurait du le savoir… Je n'étais pas mort aujourd'hui, il devrait payer mon tribu auprès des ombres à ma place…


- Je suis désolé, mais je ne peux pas te laisser vivre, lâchai-je simplement.


Et je relâchai ma concentration. Ma magie vint compresser l'énergie vitale de son cœur en un instant et l'homme s'effondra, raide mort.


Tout en essuyant ma lame, je me concentrai à présent pour étendre mon influence magique et prendre possession de son corps vide.


- Voix des morts, entends mon appel et donne vie à ce corps selon ma volonté, divises mon âme et permets-moi de le posséder : Necromentia.


Lentement, je me levais. Mon sombre moi m'obéissait comme s'il s'agissait de moi-même. Je m'approchai de mon véritable corps avec calme et tendis mon bras ouvert par la dague Eternam.


Apposant mes mains, je récitais calmement :


- Perfecto Mortuarii. Enveloppe charnelle à jamais délaissée, puisses-tu revêtir le faste de tes années de gloire…


Et la blessure sembla guérir. Ce n'était qu'une apparence créée magiquement, mais je n'aimais pas le sang, je trouvais cela disgracieux. Ainsi refais, le cadavre ne goûterai pas si inélégamment…


- Nous pouvons repartir. Les mines, vous disiez ? Cela me convient… À moins que vous préféreriez aller voir du côté de cette rue de Salyvendre… ?


Je fis mine d'attendre la réponse de l'alfar avant de me souvenir que je devais faire une petite mise au point histoire de dissiper ses éventuels doutes…


- Oh et… Que nous soyons clair. Cet homme que vous avez vu décéder d'une flèche dans le crâne était lui aussi un cadavre ranimé. Il était mort bien avant que l'arme ne se soit fichée dans son cerveau…



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Sam 27 Fév 2016, 23:05

La jeune femme s'arrêta net. Comment ça ? Il y avait une autre solution ? Elle était curieuse de voir ce qu'il lui réservait. Elle le regarda manipuler le dormeur les sourcils haussés. Elle ne comprenait pas vraiment ce qu'il tentait de faire. Il sortit une lame, une lueur se reflétant sur le métal et l'enfonça dans son bras. La séance de torture était à l'appel. Chelae fronça le nez. Elle essayait de retenir les informations qu'il donnait, ou plutôt hurlait. Quelle discrétion... il semblait qu’elle n’eut jamais rien entendu, tant c’était silencieux… ce fut néanmoins efficace. Mormearn le laissa retomber mollement par terre. La magie de cet homme était... intéressante. En d'autre circonstances Chelae se serait bien permise d'en apprendre plus. Le corps se releva. Le Sorcier le contrôlait. Elle ne put que le constater après une seconde d'étonnement. Il lui indiqua que l'autre homme était également mort avant d'être touché par la flèche. Elle sourit, en partie pour cacher la petite répulsion qu’elle avait envers le cadavre. Sa façon de faire les choses n'était pas détestable – sauf à son avis sur la torture. La barbarie de la mort était camouflée par un certain style.

   -Eh bien... tâchez toutefois de ne pas le faire hurler, la prochaine fois. Des gens habitent ici. Dit-elle d’une voix calme.

  Elle reprit la marche.

  -Salyvendre ? Pas de problème.

   Ils retournèrent au niveau d'Anarion le plus naturellement du monde, un compagnon en plus. Un groupe s'était formé autour du premier cadavre. Chelae passa devant sans s'y attarder plus. Elle n’y jeta qu'un coup d'œil rapide.

   La rue en question n'était pas si loin que ça. Elle était réputée pour être un endroit discret. En somme elle n'était pas du tout réputée. Il n'y avait qu'une taverne et deux échoppes sans valeur tout au plus. Ce n'était pas là qu'elle aimait trainer. Elle connaissait plus de nom qu'autre chose et sincèrement elle ne le regrettait pas. C'était miteux et un peu caché du reste. Il n'y avait pas grand monde si ce n'était dans la taverne, d’où quelques voix s’élevaient. Les autres vitrines étaient fermées, et rares étaient les fenêtres éclairées à l'étage.

   Le nom Ash’latt lui revint en mémoire. Cela ne lui disait rien. Leur seule chance d’en savoir plus était d’entrer dans la taverne. Mais c’était qu’elle n’était pas très accueillante. Et s’ils se retrouvaient encerclés ? Elle ferma quelques secondes les yeux. Elle espérait que sa fatigue ne durerait pas toute la soirée. Bon… En attendant, il fallait entrer…

   Le tintement d’une clochette retentit lorsqu’elle ouvrit. Les quelques clients cessèrent leurs conversations. Ils n’étaient même pas dix. C’était tous des hommes.

   -C’est comme ça qu’on accueille les clients, maintenant ? S’exclama celui qui devait être le gérant.

   Il quitta son comptoir avec un grand sourire.

   -Ne faites pas attention, ils ne connaissent pas la politesse. Puis, à l’attention des buveurs. Bon, arrêtez de les fixer, vous ! Il regarda Chelae. Bienvenue ! Je vous sers quelque chose ? Et à vos amis ? Si ce sont vos amis… ?

   -Oui, personnellement, je prendrais bien… quelque chose de revigorant. Mais pas d’alcool.

   … On pouvait dire ça comme ça… et si l’amitié mortel-cadavre était possible, en outre. Il les invita à s’assoir sur une table, écartée des autres. Il avait le sens de l’accueil… Les discussions reprirent. Tandis qu’on les servait et qu’elle cherchait de la monnaie dans une poche, elle jaugeait chacun des clients. Ils étaient tous normaux. Des Alfars, rien de plus. En apparence, évidemment. Elle sortit quelques pièces et les tendit au gérant, qui avait aussi décidé de se lancer dans le service. Elle le regarda dans les yeux.

   -Ash’latt. Vous connaissez ?

   L’homme la regarda à son tour et se figea. Elle vit les muscles de sa mâchoire se crisper et eut l’ombre d’un sourire. Ils étaient sur la bonne voie.

   -Non, ça ne me dit rien. Répondit-il sèchement.

   Sur ce, il se retira dans les cuisines. Chelae prit son verre et en fit tourner le contenu pour l’examiner. Elle n’avait pas envie de le boire, étrangement. Elle ricana.

   -J’ignorais qu’il était possible de mentir aussi mal. Et même, je doute que ce soit légal…

   Le café qu’il lui avait servi n’avait pas l’air comestible. Boire en face d’un mort n’était pas très enchanteur non plus… Elle repoussa sa coupe. En plus de cela, l’ambiance était à mourir. A cette allure, elle allait s’endormir. Malheureusement pour lui-même, le gérant reparut. La jeune femme l’interpela. Il alla la rejoindre, résigné. Il ne voulait pas être louche face à ses autres clients qui semblaient chipoter pour un rien.

   -Vous êtes sûr que ça ne vous dit rien ? Je sens que vous le savez et que vous voulez nous le dire. Vous vous sentiriez tellement mieux. N’est-ce pas ?


   Il regarda consécutivement les trois personnes, toujours aussi tendu. La jeune femme le fixait avec une certaine insistance. S’il n’avouait rien, elle comptait sur son acolyte pour terminer le travail. Le voir à l’œuvre avait quelque chose qu’elle appréciait.

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Dim 06 Mar 2016, 17:42

- Eh bien... tâchez toutefois de ne pas le faire hurler, la prochaine fois. Des gens habitent ici.


Cela m'en coûtait de le reconnaître, mais l'alfar avait raison. J'aurais pu être plus discret. Mon goût pour la souffrance d'autrui, en particulier lorsque j'étais agacé comme c'était le cas depuis que j'étais chargé de trouver ce sorcier si problématique, n'avait que peu de limite. Lorsqu'il s'agissait de criminels que toutes les forces de ce monde condamnaient, j'avais cette satisfaction de me sentir exempt de tous regrets qui rendait la chose encore plus sensationnelle…


Mais nous étions en mission et cela faisait déjà deux bévues acides qui venaient entacher notre travail… Il fallait viser à atteindre une meilleure discrétion.


Chelae m'indiqua qu'elle savait où trouver la rue de la Salyvendre et je lui fis signe de passer devant pour la suivre, mon sombre moi sur mes talons…


Nous passâmes devant l'auberge où nous nous étions trouvé quelques temps auparavant et je ne m'en rendis même pas compte, ayant à peine la désagréable sensation que les rues étaient un peu trop fréquentés à Drosera.


L'alfar pénétra dans un étranglement entre deux groupements d'habitations et soudain les lumières se firent plus faibles et les passant infiniment plus rares. Seule une petite taverne semblait faire mine d'une pointe d'animation et Chelae sembla attirée par cette démarcation. Elle passa la porte tandis que mon sombre moi prenait le soin de rabattre sa capuche de mercenaire sur sa tête pour conserver un minimum d'anonymat. Si l'homme était attendu par Ash'latt pour affaire, il devait être connu dans le milieu… Il était préférable que personne ne le reconnaisse…


Comme on pouvait s'y attendre dans ce genre de milieu sombre, les inconnus étaient vite discriminés. Les quelques buveurs assis dans le salon au plafond bas et parcouru d'odeurs à peine désagréables se turent, nous fixèrent et il fallut que le patron fisse mine du minimum d'autorité qu'il possédait pour nous obtenir un accueil moins oppressant. Chelae prit commande et je n'estimai pas avoir à parler aussi me contentai-je de présenter trois doigts au tavernier, indiquant ainsi qu'il en serait de même concernant les boissons pour moi et mon compagnon, cadavre-ambulant semblant tout à fait humain et vivant.


- Ash’latt. Vous connaissez ?


Il mentait et ni mon informatrice ni moi-même n'étions dupe à ce sujet…


- J'imagine qu'il serait fâcheux de le faire hurler dans au milieu de tout ces types louches… Mais j'ai d'autres moyens pour le faire parler. Réessayez, je prendrai la suite si vous n'arrivez à rien.


J'avais dis cela sur un ton simple. Je me surprenais à ne pas porter de jugement dans ma conversation avec l'alfar. Je sentais l'idée de collaboration de cette mission m'imprégner. Malgré moi, je commençai à accepter l'aide de cette informatrice. Unis contre un même adversaire. Ce n'était peut-être pas forcément un mal, dans un certain sens…


Il ne disait toujours rien… Après que la jeune femme l'ait de nouveau interrogé, il persévérait à ne rien dire. Il ne fallait pas le laisser repartir, il risquait de ne plus revenir…


Et de nouveau, l'incroyable magie noire dont tout sorcier étaient dotés vint affluer dans en mon sein pour commencer à s'échapper malgré mon moi de mon corps sous forme d'une vapeur noire, néanmoins plus discrète de que lors de mes manipulations sur le mercenaire, un peu plus tôt…


Je sentais le pouvoir s'étendre et, d'une pensée, le projetai contre le tenancier de la taverne. Au fur et à mesure, je devinais sans en avoir immédiatement la confirmation son espoir s'éteindre. Sans me tourner vers lui, toujours la tête penchée et le regard dans le vague, je pris la parole d'une voix calme et légère, malgré ma voix grave et quelques peu cassée :


- Cela vous fatigue. L'angoisse, le stress… Vous savez qui est cet homme et vous savez qu'il est dangereux. Parler de lui serait une erreur qu'il pourrait vous faire payer, à vous, à votre famille… Et pourtant nous venons vous poser cette question dérangeante. Par ce seul fait, vous savez qu'il va se renseigner, vous ne savez pas comment il a fait, mais il a su et il viendra, ce soir, demain, peut-être même pas plus d'une heure après notre départ, pour vous demander si on vous à poser des questions à son propos. De quoi est-il capable ? Quelles atrocité va-t-il tenter de vous faire subir ? Qu'est-il capable de faire… ?


Au fur et à mesure que je débitais mon discours funèbre, j'accentuais progressivement la pression de ma magie noire sur le bonhomme sans prendre même la peine de voir son état… Soudain, je relâchais toute ma concentration, laissant la magie se dissiper d'elle-même.


- Mais vous pouvez croire que nous sommes là pour l'arrêter, pour vous sauver. Et si nous donner ces informations revenaient à faire cesser son règne de terreur ? Et si le gouvernement, pour vous remercier de votre aide, vous apportait son aide, de l'argent pour vivre, une protection… ? Tant de soulagement pour quelques mots prononcés…


Le mensonge était encore la meilleur façon d'apprendre l'esprit des hommes. Mais ils ne cédaient qu'à condition qu'ils croient en ces illusions qu'on voulait bien faire miroiter devant les yeux de l'espoir qu'ils nourrissaient malgré eux chaque jour…


Mais le tavernier sans s'être éloigné pour autant, restait silencieux… Inquiet de son état, je finis par me retourner calmement pour l'observer…


Il avait la tête baissée et je ne distinguais pas ses traits. Soudain, il releva le visage et je le découvrais bouffie et rouge, de lourdes larmes roulant sur ses joues. Il fit un rictus de souffrances traduisant son esprit torturé avant de lâché dans un souffle :


- Vous ne comprenez pas… Ce n'est pas moi qui vais mourir… Ils vont tous nous tuer… !


C'est alors que je compris. J'étais effaré de ne pas avoir vu ce qui allait se produire plus tôt, mais l'heure n'était plus à la stupéfaction mais à la réaction.


Dans un seul mouvement, mon sombre moi se leva, sa chaise raclant sinistrement sur le parquet de l'établissement, et je vins, dans un calme parfait et un contrôle semblant total de la situation, recouvrir de mon corps celui du tavernier, le forçant sans difficultés à se regrouper sur lui-même. Dans le même temps, je me levai de ma propre chaise et m'exclamai, écartant les bras :


- Servantes, protèges-moi.


Deux projectiles… Deux couteaux… Parmi les huit hommes présents dans la pièce, deux se sentaient l'habileté pour projeter des couteaux. Le premier vint se ficher dans le dos de mon cadavre ambulant, un peu trop frais, dont le sang se mit à couler abondamment sans que celui-ci ne bronche pour autant. Le second arrivait droit sur moi quand mon serviteur de l'ombre sortit des ténèbres devant moi et leva la main. La puissance magique dégagée fut moindre car celui-ci savait économiser celle-ci mais l'arme blanche fut stoppée net, partant soudainement parcourir en sens inverse la pièce pour aller se ficher dans un mur.


Sans une once d'hésitation, et tandis que les autres malfrats se levaient de leurs chaises, je lançai à l'attention de ma partenaire de mission :


- La table ! Vite !


L'ordre était simple et évident, je lui suggérais avec insistance de retourner la table pour s'en servir comme protection contre les couteaux volants…


Rapidement, mon sombre moi, cadavre ambulant, se saisit du tenancier et le traîna énergiquement du côté du bar pour l'y cacher et lui assurer une protection relative durant l'affrontement.


Je me serais bien lancé dans l'affrontement, mais je préférais économiser mes forces. Si une alfar offrait des capacités intéressantes en terme de combat, le sorcier que j'étais devait conserver son potentiel magique pour faire face à mon traître de confrère que nous traquions depuis bien trop longtemps, maintenant…


- Débarrassez-vous d'eux, je vous épaulerais à travers les yeux du mort-vivant.


Mon sombre moi attendait derrière le bar du tavernier. D'un bond, je franchis celui-ci et passais de l'autre côté. J'espérais sincèrement que la jeune femme soit en mesure de mettre à profit la caractéristique de relative immortalité du cadavre ambulant devenu combatant pour l'occasion. Mieux : je pouvais compter sur un arc et des flèches…


Je n'avais manipulé véritablement un tel outils. Je m'y étais bien intéressé, quelques années auparavant, mais sans plus… C'était à peine si j'en avais compris le fonctionnement. Pourtant, lorsque je bandai la corde, le molosse qui vint camper devant moi ne réalisa pas vraiment ce que l'expression "à bout portant" avait d'effrayant, même lorsqu'il s'agissait d'un débutant…


La flèche vint se planter dans son crâne et l'homme s'effondra au sol… Raide mort…


Reste sept…



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Mer 09 Mar 2016, 17:21

Adoptant une manière plus douce que précédemment, Mormearn tenta à son tour de faire parler le tenancier. Chelae le regarda faire avec un demi-sourire. La manipulation était un art à part entière… Cependant, leur victime était plus résistante que prévu. Muet, la tête baissée pour qu’on ne voit pas son visage. Il était tendu. Accoudée à la table, le menton sur une paume, elle laissait ses yeux descendre vers les mains de l’homme. Elles étaient serrées. Si serrées qu’elles en tremblaient. Sa respiration se faisait de plus en plus forte. Sa voix, lorsqu’il daigna enfin parler, était brisée. Ce n’était qu’un chuchotement qui en disait long sur la suite des événements.

   Elle se redressa. Ils allaient tous mourir ? Son air détendu disparut. Son partenaire en tout cas, avait tout de suite saisi le message. Elle sursauta presque lorsque le mort-vivant se leva. Ce qui la stupéfiait le plus était son calme. Comment pouvait-il le garder ? Tout ceci commençait à la dépasser. Elle imita ses deux camarades. La tension, palpable, allait laisser place au carnage dans une seconde… Voilà. Elle vit des objets voler, qu’elle identifia comme des couteaux. Elle ne réalisait pas vraiment ce qui était en train de se dérouler sous ses yeux… Une lame dans le corps du cadavre ambulant, une autre déviant subitement de trajectoire. La magie du Sorcier semblait sans limites…

   Justement, ce dernier lui cria un ordre, qu’elle prit un temps à assimiler. La table… Dans un élan, guidée par son adrénaline, elle mit ses mains sous le meuble et le fit basculer. Elle plongea aussitôt derrière. Un choc avec le bois, puis deux. Elle prit soin de ne pas se coller à la paroi. Elle voyait des pics argentés apparaître dans la table.

   Mormearn comptait sur elle pour passer à l’action... Maintenant ?! Disons que l’idée de se lever et de se prendre un couteau dans la tête ne lui était pas très enviable. Elle allait au moins attendre qu’ils aient terminé leur stock. Lorsque les toc cessèrent, elle tendit le cou, du côté gauche de son bouclier de fortune. Elle aperçut une lueur fondre vers elle et se cacha illico. Elle ferma les yeux. Dans la même soirée, elle avait failli y passer trois fois… Ca commençait à faire beaucoup. Elle inspira profondément et croisa les bras pour attraper les manches de ses katanas, accrochés à sa ceinture.

   Ok… A trois.

   Un… Deux…

   Elle se mit en position pour se lever le plus facilement possible.

   … Trois !

   Oubliant ses jambes, qui semblaient avoir perdu toutes leurs forces, elle pivota et se remit sur pieds. Elle dégaina ses katanas dans un tintement caractéristique qui n’était pas moins satisfaisant. La jeune femme se concentrait sur sa respiration. La mâchoire serrée, elle avançait vers ses opposants. Elle ne voyait plus qu’eux. Ce fut à peine si elle remarqua que l’un d’eux s’écroula, touché par une flèche.

   Chacun sortit ses armes. Pour la plupart, soit six d’entre eux, c’était une dague. Le dernier avait une épée, qui, à première vue, était d’excellente qualité. Comme les autres, en fait. Elle ignorait d’où ils les sortaient, mais c’était loin d’être honnête. Une boule se noua dans sa gorge lorsque deux chargèrent. Le moment qu’elle redoutait. Elle n’était pas une maîtresse d’armes… Elle avait beau être équipée, elle n’avait jamais réellement combattu. Ainsi, quand ils arrivèrent à son niveau, elle brandit ses sabres et leur fit prendre une trajectoire horizontale. Les lames se croisèrent et ne touchèrent qu’un bras. Piquée par son orgueil, les quelques cours qu’elle avait suivi quelques années plus tôt lui revinrent plus ou moins en tête. Plus ou moins, précisons bien. Elle pivota et passa entre ses deux adversaires. Elle frappa l’un dans le dos. Seulement, la plaie n’était pas assez profonde et elle n’obtint qu’un grognement retenu.

   Puis, une sensation étrange lui transperçant l’avant-bras gauche. Une douleur aiguë. Très aiguë. Trop. Comprenant à peine, elle se laissa guider par la panique. Elle lâcha son arme et rapprocha son bras blessé d’elle. Elle le regarda, ce qu’elle regretta sur le champ. Sa tête tournait. Du sang… Elle en avait partout ! Elle recula jusqu’à rencontrer le mur. Elle allait mal.

   Tentant tant bien que mal de reprendre son souffle, elle releva la tête, tremblante, vers l’auteur de sa blessure. Il était à à peine deux mètres d’elle, son couteau rougi dans une main, le katana dans l’autre. Il allait l’égorger… Elle réfléchissait à toute allure. Mais au point où elle en était… C’était tenter, ou crever. Bon, elle allait crever, sûrement. Elle avait du mal à garder son équilibre… Mais elle ne voulait pas y passer ainsi. Quelle honte… Surtout devant le Sorcier. Prenant une nouvelle inspiration, elle envoya un coup de pieds dans le ventre de l’homme. Il se plia en deux et lâcha un râle. Son instinct lui donnait une force qu’elle n’avait jamais soupçonnée. Elle brandit son sabre et l’abattit sur sa nuque. Il tomba sur le coup. Cela ne lui trancha pas le cou dans son entièreté pour autant… Elle ne put se remettre de ses émotions qu’on l’assaillait encore. Les six d’un coup. Son dos heurta un corps, qui n’était autre que celui du mort. Il était là, lui. Elle l’avait complètement oublié.

   Dans un ultime effort, elle l’attrapa par le col – elle avait si mal qu’elle pleurait à moitié – et le balança vers les deux ennemis les plus proches, puis se retourna dans l’intention d’aller se réfugier derrière le comptoir. On lui attrapa le bras. Le mauvais… Il en paya le prix. Dans la gorge… Elle se précipita ensuite vers le bar et s’écrasa presque contre le mur d’en face. Elle avait une violente migraine et un voile venait parfois brouiller sa vue. Elle essuya ses yeux trempés.

   -… Il me faut du tissu. N’importe quoi, du tissu…

   Elle aperçut le tenancier. Il était figé.

   -… Qu’est-ce que vous ne comprenez pas dans IL ME FAUT DU TISSU ? Il y en a ? Cria-t-elle, paniquée.

   Elle se releva avec difficulté et agrippa la manche de sa chemise pour l’entraîner avec elle dans les cuisines. Elle se jeta sur une pile de torchons – propres, en plus, quel luxe – avant même qu’il n’ait pu réagir et les lui tendit.

   -Faites-moi un bandage. Bien serré.

   Elle s’appuya sur le plan de travail et chercha un point fixe pour faire passer ses maux. Elle se mordit la lèvre tandis qu’il pansait son bras. Elle eut l’impression que l’opération dura une éternité. Il fit néanmoins son travail correctement.

   Elle se demandait si Mormearn s’en sortait. Elle n’allait pas le laisser seul. Elle n’était pas du tout en mesure de se battre, mais sa présence serait mieux que rien.

   L’odeur du sang lui monta au nez. La vue ne lui fut pas épargnée. Ses yeux s’agrandirent. Elle n’avait tout de même pas contribué à un tel massacre ?! Elle porta sa main à sa bouche. Son ventre se pressa tout seul et lui coupa le souffle. C’était inévitable, elle allait vomir. Elle fit chemin inverse et courut jusqu’au fond des cuisines. Là-bas, caché des regards, elle rendit tout. Elle était encore secouée de spasmes après. Elle tomba à genoux et éclata en sanglots. Elle avait tué… Mais elle n’était pas faite pour cela ! Elle qui enviait les combattants, elle avait été servie…Elle était dégoûtée…

   Pour couronner le tout, comme si ce n’était pas suffisant, elle était gelée. Elle était gelée.
   Elle pleurait. Elle venait de vomir parce qu’elle avait vu du sang. Elle avait été blessée parce qu’elle ne savait pas combattre. Elle était fatiguée parce qu’elle avait hypnotisé une personne, une seule. Et maintenant, elle n’était même plus foutue de tenir debout en gardant les yeux ouverts.


   Si ce n’était pas ridicule…

~1292~
C'est malin, qui va passer la serpillière, maintenant ?
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Lun 18 Avr 2016, 18:27

De mes yeux, je vis Chelae obéir avec une certaine... Hésitation... Que lui arrivait-il exactement ?


Et tandis que je la voyais s'attaquer à un des bandits, mon sombre moi revint en vitesse et se saisit de la dague Eternam que je lui tendais. Je n'étais pas fou et bien que je fus équipé de flèches, peut-être empoisonnées, je n'en demeurais pas moins incapable de véritablement transpercer mes adversaires avec une dextérité convenable... Il me fallait chercher le corps à corps. Je n'étais bien bien meilleur, mais je pouvais compter sur mon immortalité relative pour combler les ouvertures dans ma défense branlante...


Finalement, je pris la décision de fermer les yeux. Il me fallait toute ma concentration pour assumer ce combat...


De mes yeux de mort-vivant, je vis Chelae qui reculait face à un adversaire armé... Mais je n'avais pas le temps de plus comprendre ce qui se passait entre ces deux-là. Mon regard vint se poser sur les cinq adversaires restant. Tous portaient leur attention sur ma collègue, il me fallait rediriger celle-ci ou bien elle allait vite être submergée.


Encochant une flèche sur la corde de mon arc, je pris le temps de viser avant de tirer. Au moins, mon trait partit avec vivacité et puissance... Mais il ne vint certainement pas toucher mon adversaire. Pour autant, il eut l'effet escompté puisqu'il passa si près de celui-ci que sa surprise le fit reculer d'un pas. Il se tourna vers moi et deux autres bandit firent de même, visiblement agacés par la provocation évidente qui émanait de mon attitude. Il fallait dire que mon pantin était assez peu expressif. Un avantage en soi puisqu'il semait naturellement le trouble chez l'autre...


Finalement, je fis le premier pas. Ou plutôt... Les premiers pas !


Je m'élançai avec énergie. Mes pas étaient amples et en trois enjambés, je prévoyais d'avoir rejoins l'assaillant le plus proche.


En face de moi, je le vis relever le bras, son arme blanche bien en main. Il leva le bras, prêt à frapper. C'était trop gros, je le voyais venir. Je me félicitais de m'être choisi un corps aussi svelte en guise de marionnette. Le géant en face de moi, j'en étais certain, pensait que je lui fonçais dessus et il n'avait pas tort lorsqu'il envisageait de me stopper de toute sa stature... Mais il manquait de jugement en espérant que je me jette ainsi, tête baissée, contre lui...


Arrivé à sa hauteur, je me jetai sur le côté, juste à temps. Je vis filer la lame de mon agresseur sans parvenir à m'atteindre. Mais mon mouvement était bien incontrôlé et je me retrouvais à présent à terre. Qu'à cela ne tienne, un ample mouvement du bras me permit de taillader méchamment le mollet de l'homme qui laissa échapper un grognement de douleur sans plus laisser transparaître son ressenti. Je crus bien un moment qu'il allait m'asséner un coup fatal, mais la vérité était que j'avais bien visé, contrairement à ce que je pensais, et j'avais réussi à sectionner ou au moins endommager un nerf. Il eut juste le temps de pivoter légèrement dans l'espoir de me rendre mon coup avant que son corps ne s'effondre. Je n'avais pas perdu de temps. Sa gestion était d'ailleurs un des atouts sur lesquels je pouvais compter selon moi. J'avais une bonne vision de celui-ci et si mes mouvements n'était pas bien gracieux ni mes coups bien puissants, j'avais pour moi la réflexion, me sachant hors de tout danger car n'étant pas véritablement le corps mort que je possédais. Aussi était-il aisé pour moi de mieux imaginer posément le temps s'écoulant et le timing à adopter pour me mouvoir qu'il ne l'aurait été pour n'importe quel guerrier amateur dans mon genre...


Ainsi, alors même que mon adversaire s'effondrait, j'étais déjà en train de me relever, si bien qu'il venait à peine de réaliser qu'il était à présent étalé sur le sol lorsque je fus tout à fait debout et stable sur mes appuis. De toutes mes maigres mais non négligeables forces, j'enfonçai mon pied, dans les côtes du lourd gaillard. Immobile comme il l'était, et avec une légère pause, viser n'avait pas été bien difficile. Tandis que mon talon appuyait violemment jusqu'à être retenu par les limites de l'élasticité de la peau de ma victime, j'entendis cette dernière lâcher un grognement étouffé qui, cette fois, exprimait plutôt bien sa douleur.


De nouveau, je calculais. Il ne me fallait perdre mon temps en jouissance inutile. Il souffrait, bien, mais je devais en profiter pour mon prochain coup, profiter de la pause que la douleur lui imposait. Il souffrait et je me saisissais déjà de mon arc et d'une flèche, l'encochant alors qu'il commençait à reprendre ses esprits. Il eut bien le temps de reposer ses quatre membres au sol, se préparant à se relever. Mais il était trop tard. Je lâchai avec la douceur qui était de mise pour l'art de l'archerie, ou tout du moins une imitation plutôt convaincante, la corde, et la flèche vint se planter dans le crâne de mon adversaire qui s'effondra.


Pas de temps à perdre. Je fis quelques pas en arrière... Jusqu'à percuter quelque chose de peu stable. Tournant rapidement la tête, je constatai que c'était Chelae. Devant elle, un des brigands s'effondrait, la tête bien moins rattaché au corps qu'elle ne l'aurait du... Bien. Il suffisait qu'on unisse nos forces, à présent...


Du moins était-ce ce que j'avais espéré. Mais à l'entrée du vrai combat, celui où la surprise tirait sa révérence, venant quitter notre lot d'atout face à l'adversaire, je vis mon corps être déplacé plus que je ne sentis la poigne de l'alfar se refermer sur mon col et m'envoyer au-devant d'elle, face à deux ennemis. Je vis la lame de l'un d'eux, pointée vers l'avant et j'eus à peine le temps de m'imaginer empaler avant que mes yeux ne s'ouvre.


Un instant, je ne faisais plus attention au signaux lancés par mon sombre moi et revenais parmi les vivants, voyant à travers mes yeux, réfugié derrière mon serviteur de l'ombre.


J'avais été un moment effrayé. Je me savais protégé, dissimulé derrière mon sombre moi, cloîtré, non sans une certaine lâcheté, dans le regard d'un corps qui n'avait ni vie ni sensations, que la mort ne menaçait plus et que je pouvais quitter à tout moment. Et pourtant, les quelques sensations que je pouvais tirer du corps mort dont j'avais le contrôle étaient si réalistes que parfois, à l'image de cette fois-ci où j'avais vu la mort s'abattre sur le corps qui était le mien, il m'arrivait de croire que j'étais celui que j'incarnais et que je risquais effectivement douleur et dégradation physique... Instinct de survie, probablement...


Je pris le temps de souffler. Jetant un regard autour de moi, je vis Chelae. Elle courrait vers le comptoir. Que faisait-elle, bon sang ? N'était-elle pas censée m'aider ? Je savais bien qu'il ne fallait pas trop en attendre d'un quelconque partenaire, pourtant... Pourquoi étais-je surpris ?


Je compris lorsque je la vis se faire attraper le bras par le dernier larron. Il était en sang. Elle était blessée... Bon... Je devrai faire avec. J'eus le temps de la voir, dans un élan meurtrier remarquable, égorger approximativement son agresseur avant que mon regard ne revienne se poser sur les deux derniers assassins amateurs qui nous menaçaient...


L'un soutenait encore le cadavre de mon pantin planté sur son arme blanche d'une main. L'autre s'apprêtait déjà à s'élancer vers le comptoir à la poursuite de Chelae et, accessoirement, du tenancier qui devait encore se tapir derrière.


Fermant les yeux, je repris un contrôle plus sûr de mon sombre moi.


Levant la tête, j'attrapai de la main gauche le bras de mon adversaire, appuyant de tout mon poids contre sa main et l'arme qu'elle tenait afin de le déstabiliser. De ma main gauche, je levai ma dague et, lentement, découpai la cuir et la chair de ma victime sur son bras tendu.


Cette fois, avec une certaine satisfaction, j'obtins un véritable cri de douleur, manquant néanmoins de conviction, ce qui stoppa net son compagnon dans son élan. Me redressant, je vis son bras dont je venais de me dégager, revenir vivement vers lui tandis qu'il se le saisissait dans l'espoir de diminuer la douleur et d'éponger le sang. Mais je n'avais pas de temps à perdre et sa stupeur face au mort-vivant qu'il découvrait comme tel alliée à sa douleur le mettait dans une position de faiblesse. M'élançant en avant, je me saisi de son col, retournai la lame dans ma main et vins la planter dans son flan. D'un coup sec, je parvins à ouvrir un méchante plaie dans son côté. Mais je vis alors mon bras se rompre violemment... Je jurai en silence dans ma tête. Voilà un membre de mon corps d'emprunt qui ne serait pas utilisable avant que je ne ré-applique le post-mortem...


J'avais trop forcé. Difficile de savoir si c'était mes propres forces ou celles du cadavre qui avaient cédé les premières, cependant. Je penchai pourtant plus pour la première option...


L'homme s'effondra devant mes yeux et je fus obligé d'aller de ma main gauche récupérer mon arme tant la droite avait perdu toute mobilité.


Soudain, je me vis m'effondrer par terre. Le dernier des compères meurtriers venait d'opter pour une méthode de combat soudain très agressive et de me tomber dessus avec force. Je n'avais pas les moyens de résister et j'étais bien surpris de constater que mon adversaire avait compris comment contrer mes avantage de mort-vivant.


Mais il était trop tard.


Alors que je me débattais frénétiquement, concentrant toute l'attention de mon agresseur qui devait parvenir à me maîtriser et éviter mes assauts à la dague, j'ouvris les yeux. Sous mes ordres, mon majordome de l'ombre traversa la pièce en quelques foulées rapides et, alors même que ma cible commençait à réaliser qu'on lui fondait dessus, le serviteur invoqué leva sa main et, dans un souffle de magie qui le conjura du même coup, il propulsa l'ennemi qui vint percuter une fenêtre et retomber en dehors du bâtiment.


Dans la précipitation, je ne parvins pas à conserver ma concentration et relâchai mon emprise sur le mort-vivant qui s'effondra, inerte. En de rapides foulées, je traversai la salle, m'approchai de l'ouverture produite par le vol forcé du fort bonhomme pour constater sa mort. Avec prudence, je traversai à mon tour ce qu'il restait de la fenêtre de la taverne, retournai le corps pour découvrir un morceau de verre qui s'était enfoncé à un point vital dans le dos de l'homme... C'en était clairement finit de lui. Il ne restait de nos adversaire qu'un homme vivant mais très affaibli : celui contre qui je m'étais brisé le bras, ou plutôt celui de mon cadavre...


Je finis par passer les portes des cuisines. Le tenancier, encore tout secoué, avait besoin de temps pour se calmer et j'avais ligoté notre otage avec des cordes trouvés dans la réserve. Il avait finit par m'indiquer où ma collègue alfar se trouvait...


Alors que je ne parvenais pas à la trouver, comme ça, du premier coup d'œil, je lançai à la volée, supposant qu'elle devait être dans un coin en train de panser ses blessures :


- Tout va bien ? Tout est fini...



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Mer 27 Avr 2016, 22:27

Chelae prenait de grandes inspirations pour chasser ses vertiges. Elle s’était assise, le dos contre le mur et avait fermé les yeux quelques secondes, le temps de reprendre ses esprits.

   La salle était devenue encore plus blafarde qu’elle ne l’était déjà. Elle transpirait le froid et l’humidité, l’atmosphère était moite. Elle avait quelque chose de morbide. La jeune femme ne désirait plus que sortir, mais n’avait pas envie d’en faire l’effort. Si elle avait eu le pouvoir de se téléporter… ça ne faisait pas partie de ses atouts, malheureusement.

   Elle entendait à peine le fracas, de l’autre côté. Et pourtant, cela faisait un bruit monstre. Elle était concentrée sur elle-même, sur son état, qu’elle n’avait encore jamais vécu.

   Le silence qui régna peu après la détendit, tout en l’angoissant. C’était anormal. Que se passait-il ? Que s’était-il passé ? Mormearn, où était-il ? Sa voix retentit et la fit sursauter. Elle sortit immédiatement de sa mi somnolence. Une honte immense et affreuse la submergea. Elle l’avait laissé seul se charger de ces truands. Elle n’avait pas su utiliser ses armes correctement. Et elle avait montré tout cela à ce Sorcier, qu’elle connaissait à peine. Elle fit glisser ses mains sur son visage. Quelle honte…

   -Tout va bien… Dit-elle après s’être assurée, puis concentrée pour que sa voix ne s’éteigne pas au bout du deuxième son.

   Elle se releva douloureusement. Il ne devait pas savoir où elle se trouvait. Elle ne le voyait pas. Mais elle avait cru l’entendre à sa gauche…

   -Désolée… Je vous ai laissé tout le sale boulot…

   Elle s’avança, tout en prenant le soin de rester à proximité d’un mur ou d’un meuble où elle pouvait se rattraper en cas de perte d’équilibre. Elle ne regardait même plus de Mage Noir dans les yeux. Elle lui passa devant et s’arrêta lorsqu’elle se souvînt que l’ambiance dans la pièce d’à côté devait être encore plus morbide que dans celle-ci.

   Trêve de plaisanteries. Ils avaient du travail. Elle devait se reprendre, malgré la douleur. Elle s’approcha du tenancier. Il était ligoté et avait plus ou moins repris… Un certain calme. Elle inspira profondément.

   -Bon… Plus vite vous parlerez, plus vite ce sera terminé. Plus le temps passait, plus son besoin de sortir de cet endroit toujours plus infâme était fort. Premièrement, y aurait-il de l’eau potable ici ?

   Du menton, il désigna une carafe sur le plan de travail, un peu plus loin. Chelae prit un verre au hasard parmi ceux posés et retournés, prêt à être servis et le remplit. Elle avait soif ! Très soif. Avant de boire, elle examina le liquide. Elle n’était pas une experte. Mais avec la boisson peu recommandable qu’il leur avait servie plus tôt, il fallait croire qu’on n’était plus sûr de rien. Ca avait l’air correct. Elle le vida d’un trait, puis le reposa violemment sur la table. Elle pinça l’arête de son nez avec son pouce et son index. Elle avait mal au crâne et au ventre. Sa gorge restait nouée. Elle avait chaud et froid.

   -Pour en revenir à notre discussion… que savez-vous à propos de ce Ash’latt ?

   Elle s’approcha de lui, le regard sévère. Elle scrutait ses yeux noirs pour mettre fin à ses tournis.

   -On ne vous veut aucun mal, au contraire. Comme l’a si bien dit mon collègue tout à l’heure…

   Etait-elle crédible, à parler ainsi, alors qu’il venait de la voir complètement paniquée à la vue de son bras charcuté ? Mieux valait faire comme si de rien n’était… Cependant, il ne semblait pas décidé à répondre. De la peur, le traumatisme du combat, un secret bien trop secret ou simplement pour leur faire perdre leur temps, elle n’en savait rien et elle s’en fichait, sa tête n’était plus en mesure de réfléchir sur le pourquoi du comment. Elle voulait des réponses claires, directes et précises. Elle soupira, agacée. Sa patience avait des limites, surtout maintenant. Du pied, elle plaqua le visage de l’homme contre la surface verticale la plus proche, dégaina lentement son katana. Bien sûr, elle tremblait. Bien sûr, elle ne ferait rien, ou pas grand-chose, mais ça restait toujours angoissant.

   -Navrée d’en arriver là, mais je ne rigole pas.

   Elle plaça sa lame devant son visage, au niveau de ses yeux, qu’il la voit bien et réfléchisse plus d’une fois à ce qu’il allait faire. C’était paradoxal avec ce qu’elle avait dit précédemment. Elle tenta de rattraper le coup.

   -Votre non-collaboration fera de vous notre ennemi. Or nous sommes ici sous les ordres de deux gouvernements. Il serait dommage de se les mettre à dos.

   -… D’accord. D’accord ! C’est bon…

   Elle lâcha prise et alla s’assoir face à lui. Ce qu’elle aurait dû faire plus tôt, car c’était d’un soulagement !

   -Ash’latt, n’est qu’un pseudo. Je ne connais pas son vrai nom… Je vous jure que je ne sais pas ! Personne ne le connaît, pas que je sache. Il s’arrêta quelques secondes, réfléchissant à ce qu’il allait dire. Il n’est pas du coin… Je ne l’ai jamais croisé dans ces rues-ci, et il n’a pas l’air mal lotis, qu’il soit de Ciryon ne m’étonnerait pas… C’est tout ce que je sais !

   Chelae ferma les yeux.

   -Comment se fait-il que vous le connaissiez ? Et physiquement, comment est-il ?

   -Il est simplement passé une fois ou deux, il parlait avec d’autres clients. Il n’a rien de particuliers, il est grand et fin, avec des cheveux longs et noirs… Il avait des vêtements amples, pas facile de vous le décrire… Je sais qu’il aimait les bagues. Il en avait plusieurs…

   Il n’avait pas tout dit. Elle le savait, il manquait quelque chose. Quoi, elle n’aurait su le dire. Lui allait le faire. Elle ne bougea pas et garda le silence. S’il pensait s’en sortir ainsi, il allait être déçu. Il regarda consécutivement les deux individus, inquiet. Il entrouvrit la bouche, se ravisa. Puis, au bout d’une interminable minute, il finit par céder.

   -Il m’a payé.

   La jeune femme releva la tête – car elle s’était baissée, imperceptiblement.


   -Il voulait que je me taise sur les conversations que j’avais entendues. Il avait beaucoup de plans à partager aux autres…

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Jeu 05 Mai 2016, 19:47

- Tout va bien...


La voix de Chelae avait retentit à travers la salle. Elle finit par apparaître dans mon champ de vision. Elle ne semblait pas au mieux de sa forme... La blessure, probablement. Elle devait avoir eu du mal à trouver de quoi la soigner et avait perdu beaucoup de sang. Même si ce n'était pas grave, cela suffisait potentiellement à épuiser la victime.


- Désolé...


Elle culpabilisait ? Je n'avais pas besoin d'une alliée qui perdait confiance en elle...


- Ne vous excusez pas, lâchai-je avec calme. Vous avez bien fait. Je ne veux pas vous voir mourir avant d'avoir atteint ma cible. Je préfère que vous restiez en arrière pour vous soigner si vous êtes blessée plutôt que vous persévéreriez à attaquer au risque de prendre un coup mortel...


Et bien que mes intentions étaient avant tout de la rassurer pour qu'elle ne perde pas confiance en ses capacités, je pensais néanmoins ce que je disais... Elle pourrait mourir, mais après que la mission soit achevée...


À sa façon de se tenir vaguement aux murs et de baisser la tête, je sentais qu'elle était au moins épuisée, peut-être y avait-il autre chose à prendre en compte, mais je ne voyais pas quoi... Néanmoins, quand elle passa la porte des cuisines et commença à interroger le tenancier, je ne fis rien pour l'arrêter. Si elle voulait s'épuiser, c'était son problème. Lorsqu'elle ne serait plus en état de combattre, je l'arrêterais et achèverais la mission moi-même. Je n'avais aucun doute à ce sujet...


La suite ne fut qu'une sorte de scène improbable durant laquelle Chelae se prêta à une prestation de déjantée... Un coup, elle demandait de l'eau, se précipitait sur le verre avant de s'arrêter et de l'observer avec un certain calme. L'instant d'après, elle était en train d'interroger nerveusement le tavernier, se contentant de le presser. Encore après, elle se retrouvait, une dague pointée sur son interlocuteur, à le menacer avec tout en lui expliquant qu'elle ne lui voulait pas de mal...


Bien que son comportement n'avait aucun sens au point que je me demandais si elle n'allait pas s'évanouir sous l'excitation qui semblait la traverser, la manœuvre présentait l'avantage d'être si improbable qu'elle en avait effrayé le tenancier. Il finit par déballer tout son sac et s'il s'interrompit deux ou trois fois, il en demeure qu'il avait déclaré l'essentiel de ce qu'il avait à dire d'un coup...


Il finit par avouer qu'il avait été payé pour garder pour lui des conversations qui ne le concernait pas...


Je finis par considérer que l'étrange manège de ma partenaire devait cesser. Calmement, je m'approchai d'elle pour déposer ma main sur son épaule dans l'espoir de lui inspirer le calme...


- Ça va aller comme Che...


Mais je fus interrompu par une étrange mais familière sensation de décharge parcourant mon corps... Je l'avais pressentie ainsi qu'une seule et unique fois... Avec Lumi...


La décharge vint se propager le long de mon bras avant de sembler s'échapper de ma main. Aussitôt, je sentis la résistance de la jeune alfar céder sous ma main et avant que j'eus le temps de comprendre ce qu'il se passait, elle s'effondrait, à mes pieds, par terre.


C'était post-mortem, sort maudit qui m'avait été cédé par les Aetheri, Ecem selon mes propres croyances, et qui venait de se déclencher sans mon accord... Impossible à présent de savoir quand elle se réveillerait... Je devais voir le bon côté des choses. Elle était à présent entièrement consentante à ce que je prenne la main pour l'interrogatoire de l'otage...


Je pris un instant pour arranger le corps inerte de ma partenaire, histoire qu'elle ne reste pas ainsi, dans une position improbable. Chacun son honneur et ce n'était pas très correct de laisser le sien ainsi abîmé...


- Passons à nous, à présent... lâchai-je en me tournant vers le tavernier.





Il me fallut invoquer Yshäel pour transporter Chelae, en plein milieu de l'établissement, effrayant par la même le tenancier qui tourna de l'œil, n'en pouvant plus tant sa journée avait été perturbée... Je n'avais pas la force de porter la jeune femme moi-même...


Le Thêor répondait plutôt bien à mes ordres tant qu'ils n'étaient pas trop compliqués. Ainsi, lui demander de passer par les ruelles sombres et de se faire discret était impossible. Il me fallut ruser et indiquer précisément et en temps réel à l'animal où il devait aller, le suivant et m'appuyant sur mon sombre moi, le cadavre de l'archer que j'avais récupérer précédemment et dont j'avais réparé le bras à l'aide de Perfecto Mortuarii, pour me repérer. Je lui faisais remonter les rues que Chelae m'avait faites traverser en sens inverse, incapable de m'orienter par moi-même dans la capitale Alfar...


Nous finîmes par retrouver l'Anarion. Je jugeais que l'endroit était suffisamment fréquenté pour que nous risquions moins de croiser d'indésirables tueurs...


J'entrais seul, demandant à Yshäel de rester dans l'ombre avec le corps de la jeune alfar, mais laissant néanmoins mon sombre moi pour surveiller...


Dans l'établissement, il y avait plusieurs serveurs, tous occuper et trouver le gérant n'était pas si aisé qu'il l'aurait paru. En revanche, deux serveurs se tenaient derrière le comptoir et il y avait fort à parier que l'un d'entre eux pouvait m'aider...


Je fis quelques pas en direction du bar... Quand soudainement, je vis du coin de l'œil un objet tranchant fendre l'air en ma direction... Surpris, je m'immobilisais un instant... Trop longtemps... Le coup aurait du me tuer ou au moins m'estropier mais il n'en fut rien. J'eus un instant d'hésitation avant de comprendre... Ce n'étaient pas mes yeux qui venaient de voir l'arme m'agresser, c'était ceux de mon sombre moi !


Instinctivement, je me retournais vers la porte qui prenait soudain la symbolique à mes yeux de l'extérieur... Là où j'avais laissé Yshäel, le corps inerte de Chelae et mon cadavre animé.


Me concentrant de toutes mes forces, je parvins à voir, à travers une fente de lumière faible, les yeux de mon mort-vivant, Yshäel se battant férocement contre les assaillants tandis que le corps amorphe de l'alfar glissait lentement du dos du Thêor... Je savais que j'étais mauvais pour faire les nœuds mais je ne me serais jamais douté que cela me desservirait...


Et le contact avec mon sombre moi s'interrompit : il était définitivement mort...


"m*rde !"


Sans hésiter, je me précipitai vers la sortie. Les passants dans la rue semblaient s'être passé le mot pour me bloquer le passage. Mais mon impression tenait plus d'une sorte de paranoïa passagère que de la réalité. Simplement, sous les effets du stress, je trouvais plus de difficultés à me frayer un chemin à travers la foule que d'ordinaire...


Lorsque je parvins dans la ruelle où devait se trouver Chelae inconsciente, mon Thêor et ma marionnette, je trouvais cette dernière, le corps effondré et la tête séparée de celui-ci, qui avait visiblement roulé quelques dizaines de centimètres plus loin... Le corps de Chelae n'était plus là et Yshäel ne me regardait pas, occupé.


- Yshä ! lâchai-je, inquiet pour lui, instinctivement.


L'animal tourna la tête vers moi avec d'incroyables réflexes et sa face se tordit dans cette expression bestiale que tout un chacun interprétait naturellement comme de la colère alors qu'il était de notoriété publique qu'il s'agissait plus de peur que de rage. Il émit quelque sifflements perçants et je sentis la peur qui le traversait.


Tendant les mains avec calme, je me penchai légèrement avant de parler doucement.


- C'est moi, Yshä, tout va bien...


Je répétais des paroles apaisantes pendant quelques secondes en m'approchant très lentement, ma patience mise à rude épreuve.


Heureusement, l'animal était plus intelligent que son maître en matière de relationnel homme/bête et il finit par comprendre et se calmer. Je pus alors m'approcher pour constater qu'il avait une vilaine entaille. Je savais, d'expérience, que je ne pouvais rien pour lui. La capacité de régénération d'un Thêor est plutôt honorable, mais en contrepartie, nul premiers soins ne peuvent lui être apporté de façon concluante...


Plus intéressant : du sang qui n'était pas le sien tâchait les griffes de l'une des ses pattes antérieures. En inspectant avec plus de minutie les environs, je constatai avec une certaine satisfaction que l'un des agresseurs avait été blessé et qu'il n'avait pas remarqué avoir perdu à intervalle régulier du liquide vital...


Je pris le temps de vérifier que la blessure du Thêor ne l'empêchait pas de marcher. Puisque ce n'était pas le cas, il pouvait m'aider à pister les ravisseurs de Chelae. Et puisqu'il était tout à fait envisageable que post-mortem s'interrompe tandis qu'elle est entre leurs mains...


- En route, Yshä !



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Mar 10 Mai 2016, 22:43

Le Sorcier n’intervînt pas une seule fois pendant son interrogatoire… étrange. Violent, sans le vouloir. Chelae ne savait pas comment lui sortir les vers du nez. L’impatience n’était pas la seule fautive. L’inexpérience s’y était associée avec force.

   Ses yeux se vidaient de leur vivacité, tandis qu’elle tentait de réfléchir et de remettre ses idées en place. Elle rêvait d’un lit douillet, où elle pourrait s’emmitoufler. Un poids sur son épaule la réveilla. Elle tourna la tête vers son camarade, puis se figea, comme si on venait de la foudroyer. D’un coup, ses forces l’abandonnèrent, sa tête pencha et tout céda sous son propre poids. Elle s’écroula, tombant de sa chaise qui partit avec elle. Mais ça, elle ne le sentit pas. Elle était morte avant.


***


   Son corps fut pris d’un spasme violent. Elle ouvrit soudainement les yeux et se redressa. Gesticulant, elle essayait de se débarrasser d’un objet encore non-identifié, qui la restreignait dans ses mouvements. Ses poumons cherchèrent de l’air, de l’air pour calmer ses vertiges. Sa main s’accrocha au bord de… quoi ?, alors qu’elle cherchait le sol. Elle… n’était-elle pas tombée ? Que s’était-il passé ? Ses pupilles examinaient le moindre centimètre carré de l’endroit où elle se trouvait. Elle ne reconnaissait rien. Elle n’était pas dans la taverne. Elle battit des paupières. Où était-elle ? C’était sombre et il faisait froid. Ses jambes étaient toujours recouvertes par la couverture, dont elle s’était dégagée. On l’avait défaite de sa cape – voilà pourquoi elle avait froid – et de ses armes. Peut-être s’était-elle évanouie, et Mormearn lui avait trouvé un endroit pour se reposer… C’était dénué de sens, avec ce qu’ils étaient censés faire, mais elle ne voyait pas autre chose. Elle s’assit au bord du lit…

   … du lit ? Etait-ce un lit, en fait ? Un lit sans matelas… ? Et aussi haut ?

   Une table… ? Elle en descendit. Le sol glacé lui indiqua qu’on lui avait retiré ses bottes.

   Elle sentit quelque chose ruisseler sur son bras blessé. Elle le regarda, passa sa main dessus, la retira aussitôt et se mordit la lèvre, car elle venait de raviver la douleur. Elle saignait. On lui avait retiré son bandage. Pourquoi ? Elle allait se vider de son sang ! Elle attrapa la couverture et l’enroula autour de son bras, retenant son cri. Le tout suffisamment serré, elle fit le tour de la pièce. Du mobilier vide, sauf sur une commode, où reposaient ses affaires. Elle s’y dirigea, se recouvrit de sa cape pour se réchauffer, puis entreprit de remettre ses bottes, ce qui était relativement difficile à une main.

   La porte s’ouvrit soudainement. Chelae sursauta. Le faisceau orangé d’une torche, provenant de l’extérieur, s’infiltra. Une ombre s’approcha, cacha le rayon de lumière. L’ombre laissa place à une silhouette. La femme avait un seau d’eau dans une main, un panier, dans lequel devait se trouver du linge sous l’autre bras. Elle déposa tout cet encombrement à l’entrée, se frotta les yeux, pas sûre d’avoir bien vu, puis sursauta lorsqu’elle aperçut la jeune Alfar debout.

   -Que…

   -Qui êtes-vous ? Et où sommes-nous, exactement ?

   -… Vous n’êtes pas morte ?

   Chelae la considéra un instant, perplexe. Quelle question, évidemment, qu’elle n’était pas morte ! Cette femme ne savait-elle donc pas faire la différence entre un mort et un inconscient ?

   -Vous vous moquez de moi ?

   -Mais… non…

   Elle avait une voix aiguë, probablement à cause de la surprise. Elle se tourna vers la serrure, fouilla ses poches mais ne semblait pas posséder la clef qui y correspondait.

   -Attendez-là, vous voulez bien ?

   Sur ce, elle la quitta, ferma la porte en la claquant, peut-être dans l’espoir que celle-ci serait alors si bien fermée, que cela compenserait l’absence de clef.

   Chelae n’avait pas bougé. Elle termina de se chausser, puis se dirigea vers la porte, prenant appui contre le mur pour ne pas perdre l’équilibre. Elle l’ouvrit, découvrit un couloir, pas très long, et étroit, éclairé par trois torches. La jeune femme le longea. Au bout, un escalier. Elle pouvait entendre des voix s’élever, en bas. Elle reconnut celle de la femme, mais n’eut le temps de saisir ce qu’elle disait. Des bruits de pas retentirent, rebondirent sur les murs, comme un compte à rebours. Vers elle. On remontait.

   Son cœur s’affola. Que faire ? Elle n’allait tout de même pas rester plantée là ! Elle fit volte-face, à la recherche d’une issue. Il n’y avait que la « chambre » dont elle venait de sortir, et d’autres portes… Elle prit la poignée de la plus proche. Verrouillée. Elle essaya celle d’à côté. Pareil.

   -Regarde ! Elle est pas vivante, là, pour toi ? C’est moi qui délire, peut-être ? Puis, à Chelae. Je vous avais demandé de ne pas bouger !

   L’homme à sa suite était grand et fin. Son visage était sévère, mais on y lisait un certain étonnement. Un sourire s’y dessina doucement.

   -Ca ne sera que mieux…

   Il fit quelques pas vers elle, et elle recula. D’un geste rapide, il l’attrapa par les cheveux.

   -Faire chanter les hautes sphères avec des membres de leurs familles, c’est bien. Quand ils sont vivants, c’est mieux !

   -Lâchez-moi ! S’écria Chelae.

   Ses mains s’étaient accrochées à celle de l’Alfar. Elle enfonça ses ongles dans sa chair, tenta de contrôler son esprit grâce à l’hypnose. Cependant, le rapport de force ne lui donnait aucune chance.

   Un détail, néanmoins, l’informa sur l’identité de cet homme. Cela mit fin à ses doutes. Il avait des bagues.

   « Ash’latt… »

   Sa main droite descendit jusqu’à sa ceinture, se referma sur le manche de son katana. Il la vit et s’empara de son bras blessé. Il le serra, tira sur son bandage de fortune, lui arrachant un cri strident. Et il continua. Elle le lâcha. Le sadisme dont il faisait preuve était terrifiant. Plus il appuyait, plus il touchait la plaie, plus les forces de la jeune femme s’amenuisaient. Haletante, elle termina à genoux. Un coup de pied dans le ventre suffit à la faire s’écrouler…


***


   Lorsqu’elle se réveilla, elle était dans une toute nouvelle pièce, assise, le dos contre un mur, les quatre membres reliés à celui-ci par des chaînes. C’était particulièrement lumineux, ou du moins, c’était ce qui lui semblait. Elle prit du temps, avant de s’y habituer. Elle prit aussi du temps, avant de remarquer qu’elle n’était pas seule. Elle reconnut Ash’latt. Installé à un bureau, en face d’elle, il écrivait. Elle resta silencieuse. Elle avait mal un peu partout. Elle se contenta de le regarder, et d’examiner ce nouveau milieu afin d’espérer pouvoir un jour sortir.

   Grâce à la fenêtre qui donnait vue sur une autre fenêtre, elle savait déjà qu’elle était toujours à Drosera, dans une maison comme les autres, à l’étage, et qu’il faisait toujours nuit. En revanche, elle n’avait aucune information sur l’adresse, ni sur rien d’autre, en fait.

   Comment allait-elle faire ? Mormearn était-il à sa recherche, ou avait-il décidé de continuer seul ? Cela ne l’aurait pas étonnée. Elle ne s’était pas sentie très utile, jusqu’à présent.

   Elle ferma les yeux. Il était justement temps qu’elle fasse ses preuves. Il était hors de question qu’elle reste ici plus longtemps. Cet homme, qui qu’il fût, avait sûrement à voir avec le Sorcier qu’ils cherchaient de base. Elle devait l’intercepter ou le ralentir dans ses plans, d’une façon ou d’une autre. Elaborer un plan… Elle balayant rapidement la pièce des yeux, gardant la tête baissée. Elle n’était pas sûre de réussir…

   Une femme apparût derrière l’homme, qui n’avait pas bougé de sa chaise. Elle ressemblait en tout point à sa propriétaire, Chelae. Un semi-sourire aux lèvres, elle marcha doucement jusqu’à lui et posa une main sur son épaule, pour qu’il se retourne. A sa vue, il bondit, tourna la tête vers la véritable Chelae, qui faisait mine de dormir.

   « Maintenant ! »

   Elle enchaîna avec son don d’Envoûtement. Des plantes, il y en avait au moins deux dans ce bureau. Une sur la table, un plant de ronces miniature, et une autre au fond de la salle, dans le coin à gauche, un arbre épineux aux petites fleurs violettes. Aussitôt, les ronces se déployèrent et s’enroulèrent autour des bras de leur nouvelle proie ; leur propriétaire. Chelae ouvrit les yeux, se concentrant sur chaque mouvement du végétal ; il ne devait pas se retourner contre elle. Mais ses épines acérées l’immobilisèrent rapidement. Malgré ses gesticulations qui en brisaient les tiges, il ne pouvait se débarrasser de ces pics. Elle se concentra de nouveau sur son clone. Ce dernier n’était pas des plus puissant, mais elle comptait dessus. La seconde Chelae s’approcha de l’Alfar, arma son poing et le lui envoya en pleine figure. Elle ne lui laissa pas de répit. Elle ne devait lui laisser aucune échappatoire, surtout qu’il pouvait à tout moment utiliser l’autre plante. Elle le frappa, encore et encore, jusqu’à n’en plus pouvoir. Il termina sonné, défiguré par le sang. Alors, tremblant autant que sa consœur, le clone se baissa pour fouiller ses poches. Elle prit la clef, la libéra, puis disparut dans un soupir.

   La jeune femme ne parvînt à croire qu’elle pouvait se relever qu’une fois qu’elle le fit. Elle se dirigea vers la fenêtre : qui savait ce qui l’attendait dans le reste de la maison ? Des alliés de cette vermine, très certainement, comme la femme, un peu plus tôt… Elle ouvrit. L’air froid de la nuit s’infiltra dans la pièce. Elle ne sut pas si cela lui fit du bien. C’était mordant et revigorant. Elle passa sa tête à l’extérieur.


   Elle n’avait pas de doute là-dessus : c’était une rue de Ciryon, le deuxième plateau de la ville.

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Dim 11 Déc 2016, 22:13

Mormearn ne la retrouverait jamais. C’était la première chose qui lui était venue à l’esprit. Elle était seule pour se sortir de ce pétrin. Seule et bien trop faible. Au moins, tu as trouvé celui que vous cherchiez… Elle essayait d’être optimiste, mais c’était bien dur… Elle se tourna vers lui. « Elle » l’avait bien amoché. Elle le considéra avec dégoût. Tout ce sang… Décidément, cette soirée était des plus violentes… Elle regarda l’état de son bras. La plaie saignait lentement. Son bras avait un peu gonflé. Ouvrir et fermer sa main lui faisait mal. Il fallait qu’elle trouve quelque chose de propre, de quoi bander tout ça pour arrêter l’hémorragie. Elle irait voir un médecin dès qu’elle en aurait terminé de cette histoire. L’on disait parfois « le business avant tout » … Pour tout dire, elle n’approuvait pas cette phrase présentement, mais vu qu’elle était coincée avec son ennemi qui était aussi l’étape clef de sa mission... le panel de choix n’était pas grand.


   Dans certaines histoires, les guerriers blessés se faisaient des bandages avec les lambeaux de leurs vêtements. Chelae portait une cape, et une tunique comportant assez peu d’étoffes. De plus, pour le tout, ça n’avait pas été gratuit. C’était même presque neuf. Elle n’avait aucunement l’intention d’en déchirer un morceau, d’autant plus qu’avec tout ce qui lui était arrivé, c’était sale et elle risquait plus de contracter une infection ou une autre maladie à registre dégueulasse que de soigner sa blessure. La tenue d’Ash’latt, quant à elle, semblait bien plus propre. Elle ne comptait pas se priver pour un être aussi odieux ; la séquestrer, et puis quoi encore ? De sa main valide, elle chercha son katana. Elle se referma sur le vide. Ses yeux fatigués firent le tour de la salle. Ils étaient juste devant le bureau. Parfait. Elle les récupéra et en garda un en main. Elle se pencha vers Ash’latt, toujours inconscient.


   L’Alfar n’avait pas pensé à ce détail, mais il allait lui être compliqué de découper un morceau de tissu avec une main. Inspirant profondément, elle finit après quelques tentatives par utiliser l’autre pour maintenir l’habit en place. Elle se mordait l’intérieur de la lèvre. Elle essuya plusieurs fois ses larmes qui coulaient toutes seules sur ses joues. Elle ne pleurait pas, pourtant. Elle parvînt après de longues minutes de labeur à détacher un morceau de toile. Elle voulut le passer autour de son bras, un peu douteuse. Ce fût bien ce qu’elle pensait : il était trop court. Elle déposa le tissu sur le bureau, poussa un soupir plaintif dans l’optique de recommencer. Quand Ash’latt bougea. Elle tressaillit et reprit précipitamment son arme. Il gémit et se redressa. Il était lent et encore sonné. Chelae recula, la pointe de sa lame tournée vers lui. Elle tremblait. Leurs regards se croisèrent. Il se leva, sortit un mouchoir de ses poches pour tamponner son visage.


   -Bravo, vous avez réussi à saloper ma chemise.


   Elle ne sut pas pourquoi, mais le « De rien » retentit dans son crâne. Elle n’était pourtant pas de ce genre d’insolence, si elle était de quelque insolence que ce fût…


   -Je… Ne bougez pas.


   Il obéit. Il continuait de se nettoyer le visage comme si de rien n’était.


   -Vous êtes blessée, c’est fort dommage… Vous essayiez de vous faire un pansement ?


   Evidemment qu’elle était blessée. Il le savait très bien. Elle ne répondit pas. Elle était plutôt occupée à bien tenir son katana.


   -Vous avez besoin d’aide, peut-être ? Il fit un pas en avant. Si vous voulez, je peux…


   -Ne bougez pas !


   Il sourit. Elle s’avança avant qu’il ne rajoute quoi que soit et passa sa lame sous sa gorge.


   -Où est-il ? Siffla-t-elle.


   Elle essayait de se donner un air menaçant, mais c’était peine perdue.


   -Qui donc ?


   Le nom du Sorcier… Cela faisait longtemps qu’elle n’y avait plus pensé… Le temps de s’en souvenir…


   -Vous savez très bien. Argus. Casteri.


   Ash’latt resta silencieux. Un sourire bête ornait son visage.


   -Lui ! A l’heure qu’il est, il doit sûrement errer dans les mines, si vous voulez mon avis…


   Elle fut étonnée par la rapidité de sa réponse. Ca la déstabilisa. Que cherchait-il, au juste ? Du bout des doigts, il repoussa le katana. Elle émit quelque résistance.



   -Je sais ce que vous pensez : je ne suis qu’un pauvre fou se dénonçant lui-même et qui plus est, qui se dévoile à son adversaire qu’il tenait pour prisonnière il y a quelques minutes – j’imagine – de cela. Il lui tendit la main, comme s’ils étaient prêts à passer un accord… alors qu’il n’avait encore rien proposé. Si vous le voulez bien, nous allons pouvoir nous arranger…


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Dim 11 Déc 2016, 22:25

Chelae ne fit rien. Toujours en position défensive, elle passait consécutivement de sa main à son visage. S’arranger ? Elle en doutait fort… Pas avec ce qu’il lui avait fait. Il finit par comprendre et son bras retomba le long de son corps. D’après son expression, il n’en fut pas vexé pour autant.


   -Ca ne fait rien. Il regarda autour de lui. Hm… Allons dans un endroit plus confortable, si vous le voulez bien…


   Sur ce, il tourna les talons et se dirigea vers la sortie. Il ouvrit la porte et l’invita à le suivre. La jeune femme gardait son arme en main. Elle avançait avec méfiance. Elle avait peur. Aucune idée de ce qui l’attendait…


   Pour une demeure de Ciryon, elle était très bien tenue. Parquet d’ébène lustré, tapisseries riches et quelques toiles, Chelae aurait pu croire à une maison du troisième plateau. Ash’latt ne semblait pas peu fier. Ils étaient sur un palier dont la confection rendait le bâtiment plus grand que ce qu’il ne devait être. Ils s’installèrent plus loin, dans un chaleureux salon. L’homme avait toujours son mouchoir en main. Il considéra ce dernier avec lassitude. Alors qu’il croisait élégamment les jambes, assis dans un confortable sofa, Chelae osait à peine s’installer dans le fauteuil d’en face. Elle était plus préoccupée par son bras enflé, et la façon dont elle tenait son katana.


   -Franchement, vous pouvez le rengainer. Il ne vous servira à rien, d’autant plus que vous ne savez pas le manier. Rendez-vous service.


   -Ca vous dérange, peut-être ?


   -Je vous l’ai dit, ce n’est qu’un conseil pour vous rendre service.


   Elle le posa contre l’accoudoir, prêtre à s’en ré-emparer en cas de besoin.


   -Au fait, comment va Sorn ?


   -… Euh oui, bi… ça ne regarde ni vous ni moi. Et ne changez pas de sujet.


   Elle n’avait même pas envie de savoir d’où il connaissait son père.


   -Si vous le dites. Puis, un peu plus fort. Alika, apporte-nous à boire, tu veux bien ? Ses yeux se posèrent sur le bras meurtri de son interlocutrice. Oh, et je suppose que vous voulez soigner ça… Et de quoi la soigner, Alika ! Il s’installa plus confortablement. Quand comptez-vous retrouver Argus ?


   -Le plus tôt possible.


   Sa question lui semblait bête, surtout après ce qu’il s’était passé. La dénommée Alika fit son apparition, un plateau en main. Elle le déposa sur la petite table basse, qui séparait Chelae d’Ash’latt. Ce dernier la remercia. Le plateau contenait deux flûtes, un pichet, une bouteille et des rouleaux de tissu blanc. La servante – même si elle n’en portait pas l’habit, Chelae la considéra comme telle – leur sourit et repartit sans un mot. Ash’latt remplit les deux verres et lui en tendit un. Elle accepta même si elle ne comptait pas boire. Elle avait soif, mais sa position actuelle était bien trop inconfortable pour ne serait-ce que se persuader qu’elle n’avait aucune raison de se méfier de la boisson.


   -Malheureusement, je doute qu’avec votre bras dans cet état, vous soyez apte à aller le chercher. Les mines ne sont pas réputées pour être un endroit très sain… Montrez-moi ça.


   Il s’empara des bandages et alla s’assoir à ses côtés. Il ne lui laissait même pas le choix. Il commença par laver la plaie. Chelae se mordit la lèvre. Sa main, glacée, se crispait à chaque fois que le tissu mouillé touchait sa peau. Elle posa son verre.


   -A vrai dire, votre père me doit des comptes. Depuis des années. Et ces mêmes années qu’il balaye toute tentative de contact avec moi. Je me disais qu’avoir sa fille permettrait de le réveiller.


   Il marqua une pause. Elle essuya les larmes qui lui montaient toutes seules aux yeux. Il termina de nettoyer et passa au bandage. Evidemment, son père n’avait jamais mentionné une dette envers quiconque. Il lui apprenait des choses que Sorn aurait aimé garder sous silence, certainement par fierté. Elle comprenait. Elle-même avait du mal à croire qu’ils aient pu un jour se connaître et collaborer d’une façon ou d’une autre.


   -Mais j’ai une autre idée, qui nous arrangerait tous les deux. Il lui semblait qu’il serrait beaucoup le bandage. Nous pourrions travailler ensemble. Vous me ramenez ce que votre père me doit, et je suis votre servant. J’ai déjà quelques plans à ma disposition que vous pourriez exécuter pour moi. En échange, vous serez protégée, nourrie et lotie s’il le faut. Je pourrai même vous apporter des contacts… Qu’en dites-vous ? Vous ne le regretteriez pas, vous avez toute ma garantie.


   -Vous… vous serrez trop fort. Souffla-t-elle. Elle baissa la tête et ferma les yeux pour faire abstraction de la douleur. Et Argus ? Qu’est-ce que vous lui avez fait ?


   Qu’est-ce qui lui disait qu’il serait fiable ? Il rit doucement.


   -Il est arrivé à Drosera, un peu précipitamment. Il m’a payé avec tout ce qu’il avait pour que je le couvre. Maintenant, il est ruiné, et le contrat est terminé. Il était court parce qu’il n’avait pas grand-chose. Et puis, les archers coûtent cher, vous savez…


   Elle savait surtout que l’archer n’était pas resté en vie très longtemps.


   Alors ? Il s’était arrêté, attendant sa réponse. Il terminerait si elle acceptait, elle le savait. Mais elle n’en avait aucune envie.


   -Je ne me retourne pas contre Argus, je réponds seulement à vos questions. Je n’ai plus rien à faire avec lui, après tout. Dans votre cas, vous n’aurez rien à payer, seulement à me ramener mon dû. Je suis un homme de promesse, vous pouvez me faire confiance. Il désigna le bras qu’il s’était fait un plaisir d’enrouler. Et puis, je suppose que sans moi, vous ne tiendrez pas. Enfin, vous n’allez pas tenir…



   Son cœur battait de plus en plus vite. Prise au piège…


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Dim 11 Déc 2016, 22:37

Chelae avait demandé à la réflexion le temps de la nuit, ce à quoi il avait poliment refusé. Aucune échappatoire possible, seulement un choix : les chaines et la trahison, ou la mort. Mentir à son propre père. Le voler. Elle ne connaissait pas la somme, mais elle se doutait qu’elle était conséquente, suffisamment pour être cachée, pour que personne ne doive se douter de rien. Elle avait tellement mordu sa lèvre qu’elle était gercée et fendue. Elle avait un goût de sang dans la bouche, à présent.


   Elle s’assit sur le lit et éclata en sanglots. Qu’avait-elle fait ? Elle se reposait la question, encore et encore. Elle remettait en doute ses choix. Pourquoi avait-elle accepté ? Pourquoi avait-elle signé ? Elle était terrifiée par ce qu’elle venait de faire, terrifiée par la réaction de son père s’il apprenait un jour… Il la déshériterait, ferait absolument tout ce qui serait en son pouvoir pour l’écraser au plus profond des abîmes sans aucune considération de pitié. Il la laisserait en vie juste pour annihiler son esprit et ses espoirs. Elle n’avait jamais vu sa colère éclater, mais on pouvait facilement la deviner, et elle était terrible…


   Après lui avoir donné sa réponse, Ash’latt, un sourire narquois aux lèvres, avait insisté pour qu’elle dîne avec lui, sous prétexte qu’il n’avait pas encore mangé alors qu’ils étaient au beau milieu de la nuit. Il avait terminé son travail et l’avait invitée à descendre. Elle n’avait plus dit un mot à partir de cet instant. Elle était parvenue à se contenir, mais le repas lui avait semblé interminable. Elle n’avait presque rien mangé, le ventre serré, et trop préoccupée par son mal. Il l’avait ensuite et enfin libérée, et elle s’était réfugiée dans la chambre qu’il lui avait offert.


   Elle était fatiguée. Elle s’était un peu habituée à l’étreinte du pansement, ou bien celui-ci s’était desserré. Dormir allait lui faire du bien. Elle verrait pour Argus et Mormearn demain. Elle n’était plus en état de rien faire. Elle ferma la porte de sa chambre à clef et alla se cacher sous ses couvertures, se déshabillant à peine ; c’était trop dur.
 
   Lorsqu’elle se réveilla le lendemain, l’après-midi touchait à sa fin. Elle ne sortit pas tout de suite et pris le temps de se réveiller. Elle n’avait connu aucune interruption dans son sommeil. Elle avait pourtant mal dormi. Elle était encore fatiguée et tirait une mine affligeante. Elle ne sortit que lorsqu’elle estima s’être remise suffisamment d’aplomb.


   C’était à se demander si Ash’latt ne l’avait pas attendue toute la nuit, puisqu’il passa, comme par hasard à ce moment-là.


   -Vous avez passé une bonne « nuit » ? Comment va votre bras ?


   -Euh… Oui, bien… merci.


   Il la dirigea vers la salle à manger. Il ne la lâcherait pas avant qu’elle ait avalé quoi que ce fût. Elle n’avait évidemment pas d’appétit. Elle se força, sous le regard assidu de son « protecteur ». Ca lui donnait envie de vomir. Elle avait juste besoin de sortir, de respirer, de rentrer chez elle et de dormir à nouveau. Ensuite, quand il estima enfin qu’il pouvait la laisser tranquille, il ne la laissa pas tranquille ; il fallait changer ses bandages. Elle le considéra d’abord, clignant lentement des yeux, fatiguée, croyant à une blague. N’aurait-il pas pu faire ça pendant qu’elle mangeait ? Non, apparemment. Elle dût encore prendre sur elle. Son traitement dura un moment, à peu près aussi longtemps que la veille mais en silence. Donc, longtemps. Elle eut même droit à des médicaments. Ceci fait, Chelae remercia brièvement son hôte et s’éloigna du plus vite qu’elle put de la maison. Elle ne fit pas attention à laquelle c’était, ni à l’adresse. Elle ne contempla pas les belles demeures du plateau. Elle fila tout droit vers Linaewen avec un naturel déconcertant, comme si c’eût été un réflexe de toujours et que le reste du monde fût maudit.



   Elle passa par les grandes rues, les plus populaires. Le ciel orange s’assombrissait vite, mais ce n’était pas encore le soir. Il allait falloir qu’elle se dépêche. C’était tout à fait improbable, mais Chelae gardait espoir à retrouver Mormearn. Elle ne savait pas pourquoi. Elle ne l’appréciait pas particulièrement puisqu’elle ne le connaissait pas, mais son attitude studieuse, à tout faire comme on lui en avait donné la consigne, voulait qu’elle tente au moins quelque chose. Elle fit un détour par la taverne où ils s’étaient rencontrés la veille, sans succès. Elle passa encore un peu dans les rues, avant d’enfin soupirer, et – tant pis – se diriger vers les mines…


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Dim 11 Déc 2016, 22:47

Elle n’y avait jamais mis les pieds, et, de fait, ne savait pas vraiment à quoi s’attendre. Elle avait déjà eu quelques descriptions des lieux via des connaissances, ou même des livres, mais n’avait jamais pu en témoigner. C’était le moment. Disait-on que c’était miséreux, sale, que la plupart de ceux qui y travaillaient étaient étranges, sans civilité, impolis. Les portraits étaient tous négatifs, et par conséquent, celui qu’elle s’imaginait aussi. Mais elle était loin de se douter de la réalité de ceux-ci, souvent transformés pour faire plus littéraire.


   Plusieurs choses la frappèrent. Entre autres l’atmosphère, c’était un lieu à part. La lumière était différente, les bruits et l’odeur étaient différentes. Les ouvriers continuaient d’entrer et de sortir des tunnels alors que beaucoup à Drosera devaient se préparer à rentrer chez eux. Pour eux, la journée semblait loin d’être terminée. Elle ne voulait pas trop réfléchir à ce qu’elle voyait. Si c’était un autre monde, alors soit : son but était avant tout de retrouver cet Argus, et de « l’éliminer », c’est-à-dire le tuer… Cette dernière idée était celle qui la repoussait le plus. En fait, depuis le début, elle n’y avait pas trop pensé. Elle s’était dit que Mormearn s’en chargerait ; après tout, elle n’était à la base que là pour le guider. Maintenant, elle l’avait perdu, et le seul moyen de pouvoir déclarer son travail comme fait, était de le faire. Elle ne s’accorderait pas d’excuses.


   Elle alla s’adresser à un Alfar, qui restait posté à l’entrée de la mine, au moins depuis qu’elle était arrivée. Elle se sentait un peu bête à devoir lui demander des renseignements. Elle qui prétendait connaître Drosera… voilà que quelque chose lui échappait : ça. L’Alfar n’était pour ainsi dire pas aimable, sûrement endurci par son sale travail – elle l’admettait. Il devina tout de suite qu’elle n’avait rien à faire ici et le lui fit bien savoir à travers son adorable ton notamment.


   -Avez-vous vu un Sorcier dans les environs il y a peu ?


   -Y’a pas de Sorciers ici. Drosera est fermée. J’aurais pensé qu’vous étiez bien placée pour le savoir…


   S’efforçant de ne pas tenir compte de sa remarque, elle lui expliqua brièvement la situation, déjà un peu fatiguée à l’idée de devoir négocier pour entrer, ou obtenir quelque information que ce soit. Lui ne voulait pas la croire. Il trouvait son histoire complètement débile, d’autant plus qu’elle n’avait pas du tout la carrure de quelqu’un qui va arrêter une autre personne au nom de la loi. Après un soupir silencieux, elle fouilla dans ses poches pour retrouver la missive qu’on lui avait envoyée quelques jours plus tôt. Elle déplia le papier et le plaça sous son nez. Il lut lentement, un sourcil levé. Ca lui semblait complètement absurde. Il lui rendit sèchement sa lettre.


   -Il n’y a pas de Sorcier ici. Articula-t-il. Je le sais, je suis la toute la journée, je l’aurais remarqué.


   -Oui, d’accord, mais on m’a dit qu’il était dans les mines pour travailler.


   -C’est pas moi qui m’occupe d’embaucher.


   D’un geste du menton, il lui désigna une petite baraque une centaine de mètres plus loin. Par convention, Chelae remercia l’Alfar et se dirigea vers l’endroit désigné.


   La baraque en question n’était pas vide. En fait, il y avait une queue assez longue et ça parlait. Le ton montait un peu par moments, et Chelae devina aussitôt que le temps s’allait faire long. Et il le fut. On réclamait un salaire sous prétexte que la date était passée, ou l’on en demandait plus parce qu’on avait une famille, des dettes et d’autres problèmes du genre. Chelae tentait d’écouter pour se distraire, mais les quelques haussements de voix lui étaient désagréables. De plus, elle trouvait idiots ceux qui parvenaient à s’endetter. Elle pensa ensuite à son père et fit taire sa réflexion. Elle ne voulait pas admettre qu’elle était un peu déçue de lui. Qu’avait-il fait ? Elle ne le saurait probablement jamais…


   Chelae commençait à en avoir marre. Elle ne bougeait pas, et les choses n’avançaient pas assez vite. Elle se décala pour voir où en arrivait la queue et constata qu’il restait encore quatre ou cinq personnes avant elle. Elle prit une inspiration et passa devant tout le monde. On ne comprit ce qu’elle faisait que lorsqu’elle demanda à la première personne de lui céder sa place. Elle fit ensuite face à l’Alfar calé derrière sa petite table tapissée de parchemins. Elle s’assit et prépara sa lettre. Derrière, des protestations. Elle s’efforça de les ignorer.


   -Je cherche un Sorcier. Vous aurait-il demandé un emploi, récemment ?


   -Mademoiselle, ce n’est pas votre tour…


   -Je sais, mais ce que je vous demande est plus important. Elle posa son papier à plat sur le bureau. Avez-vous vu un Sorcier ? Ca ne prendra qu’une minute tout au plus. Oui, non, et si oui, est-ce que vous savez où il est en ce moment ?


   -Mademoiselle…


   -Répondez.


   Elle se leva brusquement et empoigna l’un de ses katanas. Elle entendit le bruit d’une arme qu’on retirait de son fourreau quelque part dans la salle mais ne broncha pas. Son cœur battait à cent à l’heure.


   -Euh… oui… enfin, il n’est pas là, on ne pouvait pas l’embaucher pour des raisons évidentes, donc… Il est parti. Il se pencha vers elle et elle fit de même. Il y a des mines désaffectées plus bas, et je crois…


   -Bien. Le coupa-t-elle.



   Elle quitta le bureau et retourna vers la sortie. Elle l’avait coupé parce qu’elle avait de plus en plus de mal à supporter le brouhaha et la tension ambiante qui s’élevait contre elle. Elle regarda droit devant elle pour ignorer les quelques insultes qu’on lui lança et retrouva l’extérieur.


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