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 [Top Site 60] - Parfois, il y a des morts

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Aliénor Vaughan
~ Magicien ~ Niveau II ~

~ Magicien ~ Niveau II ~
◈ Parchemins usagés : 581
◈ YinYanisé(e) le : 20/12/2016
Aliénor Vaughan
Jeu 01 Juil 2021, 21:10


Image par Gabriel Gomez

Parfois, il y a des morts


« Maman maman !!! Où est donc mon jupon ? Raa ! Isabeault ! C’est toi qui me l’a piqué encore je suis sûre ! Sale peste ! » Dans la maison de la famille Vaughan, les murs tremblaient presque. Isaure s’entraînait à la valse avec Dagobert pendant qu’Ambroisine était enfermée dans sa chambre avec une « amie » de l’université. N’importe quelle oreille indiscrète aurait pu entendre de longs soupirs de plaisir s’élever par l’embrasure de la porte s’il n’y avait pas eu tant de boucan. Entre les jupons, les froufrous, les bijoux et les commentaires des filles du Comte Vaughan, le calme avait dû plier bagage. Surtout que le phénomène semblait contagieux. Sur toutes les Terres des Magiciens et des Sorciers, les mêmes problématiques se posaient dans les demeures des nobles familles, même si le reste de la population n’était pas en reste non plus. Les bals privés et publics étaient nombreux à se dérouler en cette période, afin de s’entraîner au mieux pour le vrai bal, celui de Lagherta. Tant de frivolité aurait pu paraître agaçante à bien des peuples et, pourtant, c’était au sein d’événements comme celui-ci que les Mages discutaient de diplomatie. Avant de pouvoir former un accord, il fallait prouver une certaine capacité à se tenir. C’était d’autant plus vrai pour les Sorciers qui méprisaient les sauvages. Tout était très normé et les chorégraphies préparées longtemps à l’avance. Il ne fallait pas se ridiculiser durant les festivités ou, pire, être exclu de la salle. Tous voulaient faire bonne impression, surtout que les Souverains seraient présents. Les rumeurs allaient bon train, parcourant les maisonnées à coup de « Et l’Empereur Noir ci, et l’Impératrice Blanche ça. ». Tous faisaient des pronostics sur qui serait présent et qui ne le serait pas. Niklaus Salvatore, nouvellement Empereur du Spectre de la Dame, et célibataire, était sur toutes les lèvres. « Tu savais qu’il était célibataire ? » « Il est tellement séduisant ! » « Tu plaisantes j’espère ? Il est roux ! » Les bruits n’arrêtaient jamais, soit sur les Grands, soit sur les plus Petits. Parce que, oui, en dehors de toutes cette agitation, des commandes chez les couturiers et des régimes soi-disant miraculeux, il y avait quelque chose d’autant plus primordial : le choix du cavalier ou de la cavalière et le fameux certificat !

La coutume existait depuis longtemps mais n’était pas pratiquée de la même manière chez les Magiciens et les Sorciers. Chez les premiers, elle prenait des tournures de jeu et s’adressait aussi bien aux hommes qu’aux femmes. Elle n’était pas obligatoire. Chez les deuxièmes, rien ne ressemblait à un jeu. Les femmes, surtout de la haute noblesse et qui étaient parfois écrasées sous le poids d’un mari trop insistant, tenaient là l’occasion de se venger si elles le désiraient ; en précisant qu’il était honteux pour un mari de ne pas conduire sa propre femme au bal. Parfois, il y avait donc des morts, soit que le mari eût perdu et eût éliminé le vainqueur, soit que l’un des candidats eût simplement succombé à une épreuve trop difficile donnée par la Dame. C’était la raison pour laquelle peu d’événements l’appliquaient encore. Néanmoins, l’on disait que Val’Aimé Taiji, le Chef des Armées et Main de l’Empereur Noir avait insisté pour que la coutume trouvât sa place pour le bal de Lagherta.  

« Douce ? Tu vas faire quoi comme épreuve pour choisir ton cavalier ? » demanda Pâquerette. La petite fille avait organisé un concours de saut à la corde. Le garçon qui en ferait le plus grand nombre se verrait remettre le fameux certificat, tamponné du sceau des Vaughan et signé. Pour les familles moins aisées, il n’y avait pas de sceau, juste une signature. Le certificat regroupait le nom de tous les participants – il devait au minimum y en avoir deux, l’intitulé de l’épreuve, en quoi elle consistait et les scores de chacun. Il proclamait le vainqueur qui s’engageait donc à amener l’organisateur de l’épreuve au bal. L’entrée n’était possible que par paires. Un cavalier et une cavalière, ni plus ni moins, sans compter les enfants en bas âge, bien évidemment. Cependant, même les petits, ceux qui étaient en âge de concevoir des épreuves, aimaient se prêter au jeu. « Je ne vais pas en faire. Armand en organise une et j’aimerais être sa cavalière. » Chez les Magiciens, c’était équitable. Chacun, quel que fût son sexe, pouvait être le centre de l’attention, la « main » à gagner.

Aliénor apparut dans le salon. Plusieurs de ses sœurs étaient debout sur des tabourets alors que les plus grandes étaient en train de leur donner des conseils, sous le regard occupé de couturiers qui auraient volontiers rouspétés si le bruit n’était pas déjà élevé. Les plus petites n’arrêtaient pas de bouger. « Tu y vas avec ton mari ? » demanda Douce à sa jumelle. « Non. Officiellement, son cavalier est Adam Pendragon. » Il y eut quelques sourires en coin. Personne n’osait rien dire mais tout le monde le pensait : ce bal allait être parfait. Voir l’Empereur Noir, un homme aussi amusant qu’un piège à loup, se trimballer un Luxurieux aux idées lubriques durant toute une soirée vaudrait sans aucun doute le détour. « Tu es interdite de bal ? » « Non. » « Alors quoiii ? » s’impatienta Isabeault qui en avait marre que sa sœur fût le centre du monde. « J’ai le droit d’organiser mon épreuve et pourrai être accompagnée durant la soirée par un autre homme. Le sceau royal en attestera. » « Trop biiieeennn ! Tu vas faire quoi comme épreuve ? » « Je n’y ai pas encore réfléchi. » avoua-t-elle. « Le vainqueur devra se rendre jusqu’au palais à Amestris avec le papier que je lui aurai donné pour le voir être certifié conforme par apposition du sceau royal. » La Magicienne ne pouvait pas s’empêcher de penser que, peut-être, l’homme victorieux finirait sa vie dans un cachot après les festivités. Elle n’avait toujours pas rencontré son nouveau garde du corps et elle n’avait plus revu le Duc Taiji.

Comme si la Comtesse Vaughan mère lisait dans l’esprit de sa fille, elle demanda des nouvelles du Chancelier des Ténèbres. La famille avait fini par s’habituer à l’homme, aussi parce qu’il était très érudit. Aux dîners, il faisait toujours sensation. Lorsque tous étaient moroses, il pouvait faire la conversation à lui seul. « Il ne reviendra plus. » murmura la Magicienne. « Je vais avoir un autre garde du corps. Ses fonctions lui prennent beaucoup trop de temps. » L’annonce n’était pas pour plaire à la rondouillette mère de famille. Les deux affreux qui étaient avec Lhéasse au début ne lui avaient pas plus du tout. Elle avait été contente de s’en débarrasser. Les Sorciers bien comme il faut ne couraient pas les rues. Elle n’acceptait toujours pas que le Duc eût été si proche de sa fille mais il ne l’avait jamais touchée et lui avait sans doute évité bien des déconvenues. « Tu sais comment s’appelle le prochain ? Je pourrais peut-être essayer de me renseigner. » « Aucune idée. » « Tu n’as pas demandé ? » « Ce n’était pas le moment. Lhéasse a coupé court à la conversation. » Madame Vaughan eut un sourire amusé. « Je vois je vois. Intéressant. » « Qu’est-ce qui est intéressant ? » « Rien. » Elle marqua une pause. « Et Priam Belegad, comment va-t-il ? » « Comment le saurais-je ? » Elle préférait éviter le sujet. « Il participera peut-être à ton épreuve. » « Pourquoi ferait-il ça ? » « Je ne sais pas. C’est mon petit doigt qui me l’a dit. » la taquina sa mère. Mais ça ne faisait pas rire la Magicienne. « Bientôt, tu ressembleras à ton mari à force de faire toujours la gueule. » lâcha Isabeault. Aliénor tourna les yeux vers elle, prête à lui rétorquer qu’elle ferait mieux de la fermer avant qu’elle ne décide de demander à son fameux mari de la jeter en prison pour outrage. Pourtant, les mots s’arrêtèrent à la barrière de ses lèvres.

La Magicienne venait d’avoir une idée : elle allait organiser une course équestre sur le bord du Lac Bleu. Elle n’était pas certaine d’attirer foule, étant donné son statut d’Épouse Maudite, mais elle désirait participer au bal. Si personne ne venait, elle regarderait la liste des épreuves proposées par les hommes des environs, afin d’y tenter sa chance. « En tout cas, si ça intéresse quelqu’un, je compte faire une épreuve sous forme de défilé. Les hommes devront se dévêtir et me plaire. Le vainqueur sera celui qui aura les plus beaux abdominaux ! » déclara Isabeault. Aliénor leva les yeux au ciel, ce que sa sœur remarqua. « C’est vrai que tu ne peux pas comprendre. Le Roi Noir ne doit pas en avoir. » La Magicienne inspira. « Tu connais si mal le Grand Chaos. Cela se voit que tu ne l’as jamais approché. » C’était simplement parce qu’elle l’agaçait. Elle aurait encensé Elias pendant des heures rien que pour lui faire fermer sa grande gueule enfarinée. « Hé bien, on dirait que ton mariage se porte bien, finalement. » « Mieux que le tien j’imagine. Tu arrives à trouver le sexe de ton mari sous sa bedaine ? » Elle allait sans doute loin mais ça lui plaisait assez finalement, d’être crue. C’était peut-être à cause de l’éducation réprouvée de Priam. « Et toi, l’Empereur Noir ne te trouve pas trop vieille ? Peut-être que ça expliquerait pourquoi tu n’es pas encore enceinte, ma pauvre ! » « Stop ! Vous dépassez les bornes ! » décréta la mère des deux Magiciennes. « Séparez-vous. Allez ! Oust ! Je ne veux plus vous voir ensemble, vous me faites mal au crâne. Par Suris tout puissant ! » Cependant, Aliénor, sans faire grand cas des paroles de sa mère, se déplaça vers Isabeault et lui envoya sa main dans la figure. « Reparle-moi encore une fois ainsi et je ferai en sorte de t’interdire le bal. Est-ce clair ? » Pour le coup, le silence venait de reprendre ses droits.  

1697 mots

Explications


Hello !  nastae

Cet Event est ouvert aux personnages de : Mancinia, Nostradamus, Typhon, Astriid, Kyra, Latone, Nausicaä, Djinshee, Aylivae, Kaahl, Niniel, Kitoe, Priam, Adam, Léandra et moi, pour la participation au Top Site n°60

C'est un événement qui a lieu avant le Bal de Lagherta. En quoi consiste-t-il ? Ha ha 8D

Alors, en gros, pour pouvoir être admis au bal (outre avoir une belle tenue), il faut être accompagné par un individu de l'autre sexe (les Sorciers ne tolèrent pas l'homosexualité donc c'est pour ça, faut deux individus de sexe différents ensemble - en sachant qu'un personnage androgyne peut se faire passer pour l'autre sexe mais faudra tenir le rôle et pas se faire gauler sinon c'est la porte xD). Cette obligation tient au fait que, pour les danses, il faut autant de danseurs que de danseuses et, en dehors de ça, c'est la tradition ^^

Sauf qu'il ne suffit pas de demander à Micheline d'être sa cavalière, non ! Il faut participer à une épreuve, la gagner et obtenir un certificat.

Chez les Magiciens et les autres peuples :
- L'homme ou la femme organise une épreuve
- Des individus viennent relever l'épreuve
- Le gagnant gagne le certificat et devient donc le cavalier ou la cavalière de l'organisateur.
- Le certificat est un morceau de papier qui contient le titre de l'épreuve, en quoi elle consiste, le nom des deux témoins de l'épreuve (pour certifier qu'elle a bien eu lieu), le nom des participants, les scores, le nom du vainqueur, la signature des parties, le sceau de la famille s'il y a un sceau. Des modèles de certificat sont faciles à trouver.

Chez les Sorciers :
- C'est pareil sauf que seules les femmes peuvent organiser l'épreuve. Les hommes participent. Et, généralement, Sorcier oblige, les épreuves sont un peu moins bon enfant que chez les Magiciens xD Pour les Dames Noires - vu que j'ai pensé à vous et suis allée plaider votre cause 8D - vous êtes libres d'organiser une épreuve, étant donné que le Roi va au bal avec Adam ^o^ Mais par contre le vainqueur doit aller jusqu'à Amestris, au palais, pour faire tamponner le certificat par l'administration royale.

Vous pouvez donc soit participer à l'épreuve de quelqu'un, soit organiser votre propre épreuve. Si jamais votre PJ va au bal avec un PNJ, ça devra être un PNJ du même niveau que lui dans la hiérarchie ou inférieur. Bref, vous pouvez vous mettre d'accord entre vous. Si un PJ a plusieurs candidats, le tirage au sort peut être requis, tout ça tout ça (mais je crois que ça devrait aller o/).

Bon courage 8D

Participations au Top Site 60 & Nombre de mots


Le nombre de mots standard est de 1500 mots. Vous avez néanmoins des réductions en fonction du nombre de votes que vous avez réalisés =)

Voici le classement des participants :

Deux participations à 900 mots :
Kyra

Une participation à 900 mots :
Mancinia - Astriid - Nausicaä

Gains


Pour 1500 mots (ou 900 mots en fonction) :
- 2 points de spécialité
- Un pouvoir mineur en rapport avec l'épreuve organisée ou réalisée | Pour rappel, un pouvoir mineur est un pouvoir qui ne peut pas porter préjudice à quelqu'un.

Fin de l'Event


Le 31 août, 23h59 ^^



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Ven 09 Juil 2021, 15:33


Crédit : Make up - _Z eD_


Parfois, il y a des morts




« Te rends-tu compte ? Toutes ces belles qui s’émoustillent rien que pour moi. Je dois être le seul homme digne d'intérêt de ces épreuves. » L’Alfar était adossé contre l'encadrement de la fenêtre, hypnotisé par le spectacle qui se jouait en contrebas, tandis que son interlocutrice était bien trop concentrée par le reflet que renvoyait sa coiffeuse pour véritablement certifier ses dires. « Ton défi est grotesque. » Conclut-elle en grommelant. Nausicaä n’avait de cesse de pester depuis le lever du soleil. Entre le brusque réveil que l’on lui imposa pour suivre un court improvisé, ses cheveux qui s’opposèrent à toute coopération et Sylas qui ressentit subitement l’envie de s’attarder dans sa chambre pour l’asticoter – encore. Oui, à son sens, elle avait toutes les raisons du monde pour être irritable. « Allons, ne te montre pas si aigrie. Il ne tient qu’à toi d’y participer, mais de toute évidence, tu t’entêtes à vouloir saboter nos épousailles. Que diront les convives de me voir sans ma promise ? » – « Comme si cela t’importait. Soupira-t-elle d’agacement, Sans compter que seule la parole de ton père fait foi de nos fiançailles, personne à l’extérieur de ses murs n’a connaissance de notre mascarade et aucune alliance ne décore mon annuaire pour le prouver. » Incontestablement son doigt était à nouveau vierge de tout bijou. Il lui fut difficile de renoncer à l’alliance que lui avait offert Deldùwath, car à ses yeux il n’était pas seulement question d’une union, mais d’une trace de sa vie passée. Si elle n’avait plus de légitimité pour la porter, elle émit tout de même le caprice de transformer l’anneau en pendentif – facilement dissimulable grâce à une longue chaîne. Elle ne pouvait le nier, l'Elfe sombre ne parvenait pas à faire le deuil de sa relation outrepasser. Néanmoins et par-dessus tout, la véritable raison de sa résistance concernant l'épreuve de son futur fiancé était tout autre : il était hors de question qu’elle se rabaisse à concourir pour obtenir les bonnes grâces d’un homme. Ce ne fut pas ainsi que sa mère l’éduqua, bien au contraire. Et quand bien même. Elle n’aurait aucune chance face à ce florilège d’Orethi qui se pavanait aux portes de la demeure. « Ne t'inquiète guère pour cela, ce n’est qu’une question de temps. De toute évidence, il faudra bien te faire une raison. » C'était peine perdu et il le savait pertinemment. La demoiselle était trop capricieuse et obstinée pour songer à devenir raisonnable, il suffisait de la regarder s’entêter à vouloir se coiffer seule pour le comprendre aisément. Elle se refusait à admettre qu’elle n’était plus capable d’effectuer le moindre chignon décent et elle était loin de vouloir déposer la brosse, puisque pour la troisième fois d'affiler, elle défit sa coiffure pour recommencer son art capillaire – l'agaçant un peu plus. « À moins que cette remarque n'ait pour objectif que de me démontrer ta jalousie naissante ? » Elle ne put s'empêcher de lever les yeux vers le ciel. « Du moment que l’alliance me revient, je leur laisse faire ce que bon leur semble de ton corps. Estime donc toi heureux que je ne cherche nullement à obtenir une emprise sur toi. » En réalité, ce n’était qu’une douce illusion qu’elle essayait tant bien que mal de se convaincre. Même si elle l’aurait désiré, jamais elle ne pourrait en être capable. Ils ne vivaient pas sur le même pied d’égalité, son partenaire étant bien supérieurs à elle et ceux, sur tous les domaines. Il le savait pertinemment et aimait en jouer, tels un chat se distrayant avec sa proie ; parfois en la laissant espérer qu’elle pouvait obtenir le dessus, parfois en la remettant à sa place avec sournoiserie, souvent sans le moindre ménagement. « Et si lors des festivités je tombais éperdument amoureux ? » Aucun risque. Tu es la seule chose que tu aimes. Le reflet de son partenaire apparu subitement à ses côtés, la faisant défaillir. Ses mirettes quittèrent instinctivement le miroir pour se retourner vers Sylas, qui, brusquement, attrapa son menton entre son index et son pouce.

Un vent de panique souffla en elle, faisant vaciller son cœur. Était-il capable de lire dans ses pensées ? Avait-elle dépassé les limites du raisonnable ou n'est-ce qu'une nouvelle saute d'humeur ? Elle ne serait départagée ses interrogations, mais ce qu'elle pouvait affirmer c'était que ses yeux étaient intensément plongés dans les siens, d’une lueur qui ne lui plaisait pas. Elle déglutit, paniquée, ne sachant que lui répondre, ni sûr qu’elle ton elle pouvait encore se permettre de répliquer. Son esprit apeuré défila des réponses qui n’avaient aucun sens. Sa nuque commençait à la tirailler, tant sa tête était forcée de rester haute et droite. Ses mirettes ne pouvaient fuir son regard, tant la pression sur son menton l’empêcher de remuer. Après quelques instants de silence – qui lui sembla être des éternels minutes – Nausicaä lui offrit un faible sourire. « Comme ton esprit doit être beau pour penser à de telles choses. » Il sourit à son tour, plus sincèrement, avant de se pencher pour lui voler un furtif baiser.  « Comme le tien doit être tragique pour le croire. » Un second baiser fut déposé avant que ses dents n’attrapent sa lèvre inférieure pour la mordre agressivement.  


“ Elle ne devait pas se rebeller. Elle ne devait pas crier. Elle ne devait pas pleurer. C'était ses conditions. Ses règles de leur union. ”


Un gémissement plaintif fut la seule opposition qu'elle ne put contenir, tandis que des larmes naissantes faisaient leur apparition. « Tu as perdu. Ricana-t-il en délaissant sa chair, Je vais solliciter une Näg pour te sauver de tes problèmes capillaires. Ce n’est pas ainsi que les prétendants vont se bousculer pour ton épreuve. » Il déplaça l'une des mèches rebelles de la martyr derrière son oreille avant de s'éloigner, un vague signe de la main en guise d'au revoir. « Je n’ai pas besoin d’aide ! » Son cri d’opposition se heurta contre une porte close, ce qui accentua sa rage démesurée et déclencha ses larmes incontrôlées. « Surtout pas du tien... » Elle regarda à nouveau son reflet dans le miroir. Sa lèvre ne saigna pas – ou que très légèrement – à l'instar des traces de dents qui furent nettement visible. Si elle connaissait des insultes, probablement qu’elle l’aurait injurié. À défaut, elle se contenta de pleurer. Nausicaä n’était pas inquiète de n’avoir aucun cavalier à sa disposition, ni d’avoir aucune épreuve à donner promptement, elle avait bien trop de problèmes parallèles à gérer. Sans doute que Deldùwath serait disposé à venir voler à son secours. Elle l’espérait. Elle en rêvait. Au final, peut-être même qu’elle n’irait pas se joindre aux festivités. Tout simplement. Ça réglerait bien des désagréments. De toute manière, l’envie n’y était plus, la mélancolie l’ayant dévorée sans remords. D’un pas las, elle se dirigea vers son lit pour se laisser mollement tomber dessus. Ses idées n’étaient plus très claires. Pour l’heure, elle voulait juste dormir à nouveau, voir même disparaître six pieds sous terre. La suite des évènements l’angoisser, le bal l'effrayait et qui pouvait lui dire ce que l’avenir lui réservait.



1210 mots
Merciii
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Priam & Freyja
~ Ange ~ Niveau III ~

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◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam & Freyja
Ven 16 Juil 2021, 01:01



Unknown

Parfois, il y a des morts

Participation à l’épreuve d’Aliénor | Priam



Assis sur une chaise, les coudes posés sur les genoux, Priam gardait la tête basse. Ses épaules voûtées se soulevaient au rythme lent et profond de sa respiration. Les yeux fermés, il laissait la musique enfler dans ses oreilles. Le chant des instruments éveillait son cœur. Il le gonflait d’une mélodie sourde et ronflante. Des images de danseurs frappaient son esprit comme les doigts du pianiste malmenaient son instrument ; elles le transportaient, écumantes d’une sauvagerie millimétrée, transpirantes d’une sensualité ascète, suintantes d’envies bridées. Elles tourbillonnaient : le tournis l’aspirait.

Le claquement des chaussures sur le sol brisa la musicalité de sa transe. Il releva lentement la tête, de l’agacement au fond des yeux. « Il faudrait s’y remettre. » Nalim se tenait juste devant lui. Sa canne balayait nonchalamment le sol devant lui. « Je te pensais plus résilient. » L’esquisse d’un sourire courut sur ses lèvres. « J’ai juste demandé cinq minutes. » - « Tu ne les auras pas sur la piste de danse. » souffla-t-il. Le regard de Priam s’assombrit. Le diplomate haussa les épaules. S’il avait redoublé d’exigence, c’était pour son bien. Il posa un genou à terre pour se trouver à la hauteur de son disciple. « Le fait qu’ils se rapprochent des Magiciens ne fait pas des Sorciers des enfants de chœur. En cas de faux pas, ils n’auront aucune pitié. Et ce ne sera pas seulement toi qu’ils verront faillir, mais toute une race. On ne peut pas se le permettre, pas dans l’état actuel des choses. » À ce sujet, ils n’avaient pas besoin de mots pour se comprendre. Malgré eux, ou parce qu’ils le voulaient, les intrigues politiques valseraient sous leurs pas cadencés. L’ombre de la Terre Blanche planerait. « Si tu veux danser avec leur Roi, il faut être à la hauteur. » S’il avait été insignifiant, le problème ne se serait sans doute pas posé. Cependant, comme le dit l’adage, avec un grand pouvoir viennent de grandes responsabilités. Priam ne pouvait pas faillir lors de cette danse. D’autant moins si sa sœur partageait ses pas avec l’Empereur Noir. Nalim ne savait pas ce qu’il espérait à ce sujet. Son abandon à la Coupe des Nations, et par la même, son refus d’épouser le Monarque, pouvaient constituer de sévères motifs de griefs. Que le Petit Pigeon choisît sa cadette et qu’elle acceptât de se prêter au jeu pouvait être interprété de bien des manières. Une moquerie, une provocation, une proposition, une conciliation. Se souviendrait-on qu’ils étaient les Élus d’Hel’dra ? L’Edastür était partagé. Cette danse lui semblait empoisonnée. Elle était autant un moyen de briller que de s’humilier.

Son buste pivota afin qu’il pût voir la danseuse, dans son dos. À l’écart, elle les observait. C’était une Magicienne dotée d’un talent tout particulier. Nalim connaissait sa famille depuis des années. Elle avait accepté d’aider le fils de Réprouvés à apprendre les rudiments et à répéter. Il allait s’adresser à elle lorsque le mouvement de Priam lui fit redresser la tête. Comme lui, il se leva. Les yeux de l’Immaculé étaient rivés sur l’horloge, suspendue au mur d’en face, au-dessus d’un grand miroir. « Nous sommes là depuis deux heures. » Ils avaient convenu de s’entraîner une heure et trente minutes. « Je suis fatigué. Je risque de vous écraser les pieds. » dit-il à la Mage avec un sourire désolé. « On devrait peut-être arrêter là et reprendre demain. » Nalim hésita, puis opina. S’il le contraignait encore, le Belegad risquait d’y mettre toute sa mauvaise foi réprouvée. L’entraînement n’aurait plus aucun intérêt. Parfois, il fallait savoir lâcher du mou aux chevaux récalcitrants pour mieux les amadouer par la suite. Tout était une question de dosage. « Si la Vicomtesse Halloy n’y voit aucun inconvénient… » Ils se tournèrent vers la concernée, qui s’était approchée. « Du tout. J’aimerais mieux que Monsieur Belegad ne se casse pas une jambe avant le bal. » Un sourire doux et paisible ourla ses lèvres. « Je vous en suis reconnaissant. » affirma-t-il, une lueur amusée plantée dans le regard. « Merci pour le temps que vous avez consacré à cette leçon, Vicomtesse Halloy. Demain vers dix heures du matin, ça vous irait ? » - « C’est parfait. À demain matin, dans ce cas, Monsieur Belegad. » Il lui sourit et acquiesça, puis se détourna pour attraper sa veste. Après avoir salué la Vicomtesse et son mentor, il se dirigea vers la porte. À son grand soulagement, aucun des deux ne chercha à le retenir. Si Nalim avait su où il se rendait, il aurait sans doute perdu sa tête plus tôt que prévu.



« Regardez ! » - « Han ! » - « C’est Priam Belegad ! » - « Oh la la ! » L’Ange passa quelques mètres devant elles, juché sur sa monture. C’était un grand cheval gris, aux longues ailes blanches. Il avait un posé de pied gracieux, sublimé par l’élégance naturelle de son port de tête. C’était un animal comme on en voit parfois, de ceux que l’on pourrait croire façonnés par des Dieux – il l’était. Son cavalier avait aussi fière allure, dans sa chemise bleu outremer. Toutefois, il demeurait chez lui quelque chose d’exotique, comme si l’odeur de la terre et du sang imprégnaient éternellement sa peau. Ses yeux, comme deux ersatz de champs d’or, portaient sur le monde un regard rude et franc. Il ne semblait pas fait de la même matière que les Magiciens. « J’espère qu’il va gagner ! » - « Moi pas, comme ça, j’aurai une chance d’y aller avec lui ! » Le groupe d’adolescentes gloussa en chœur. « C’est un fils de Réprouvés, il t’écraserait sans doute les pieds dès la première danse. » - « Oh, non, je suis certaine qu’il peut faire preuve de beaucoup de délicatesse… C’est un Ange, après tout. Et puis il paraît qu’il s’entraîne dur avec la Vicomtesse Ophélia Halloy. » - « Pssst ! Regardez, il va vers la Comtesse Vaughan ! » Toutes les jeunes filles inclinèrent leur buste, soit en avant, soit en arrière, de sorte à pouvoir observer la scène.

Près de la ligne de départ de la course, une tribune avait été montée, depuis laquelle l’Épouse Maudite et ses proches assisteraient à l’épreuve. Le cavalier s’arrêta devant. De là où elles se trouvaient, elles n’entendirent pas les mots qu’il prononça, ce qui suscita une vague de soupirs déçus et une série de propositions fantasmées. « Vous croyez qu’il lui a déclaré sa flamme ? » - « Tu es folle ? Il y a sûrement des Sorciers ! » - « Pourtant, je ne vois pas Lhéasse Taiji. » - « C’est vrai, tiens… » - « Peut-être que des affaires le retiennent à Amestris ? » - « Ou alors, il n’a pas voulu assister à l’épreuve parce qu’il est fou d’elle et qu’être présent sans pouvoir participer lui broierait le cœur. » - « Tu ne crois quand même pas à cette histoire, Armelle ! » - « Pourquoi pas ? » - « C’est son garde du corps ! » - « Mais ce serait teeellement romantique ! » - « C’est surtout un Sorcier ! » - « C’est juste un détail, je suis certaine que par amour, il pourrait changer. Elle pourrait le rendre bon. Ou alors il resterait un Sorcier, et ce serait une sorte d’amour impossible… » Elle soupira. « Je ne sais pas quelle version je préfère. » Ses amies échangèrent des coups d’œil éloquents, mais ne commentèrent pas. « Moi, je ne pensais pas que le Petit Pigeon viendrait. » - « Ah bon ? Pourquoi ? » - « L’Épouse Maudite… Il y a de méchantes rumeurs qui circulent sur le sort réservé à ses prétendants. » - « C’était plutôt à l’époque de Niklaus Salvatore, non ? » - « L’Empereur Noir actuel a fait écorcher les Sorciers qui convoitaient l’Impératrice, je te rappelle. » Un silence mortifié plana sur la petite assemblée. Les regards des jeunes filles se posèrent sur l’Ange et elles le dévisagèrent comme elles l’auraient fait s’il s’était agi du cadavre grisonnant d’un macchabée.

Une poignée de minutes plus tard, les quelques fous qui osaient concourir pour danser avec la Dame Noire lancèrent leurs chevaux au galop. L’enthousiasme de la foule accompagna leur départ. Puis, peu à peu, celle-ci se fit plus rare, plus éparse, jusqu’à laisser un silence battu par le martèlement des sabots. La galopade résonnait dans le cœur de Priam, telle l’envolée cardiaque qu’il avait ressentie à la vue d’Aliénor Vaughan.



« Il a gagné ! Je vous l’avais dit ! » Armelle lança son chapeau en l’air, enivrée de joie. De ses grands yeux bruns, elle suivit le cavalier et sa monture jusqu’à la tribune. L’étalon était couvert de sueur. Sa crinière emmêlée collait à sa peau. La chemise de son partenaire était elle aussi mouillée, et ses cheveux bataillaient sur son crâne. La fatigue imprégnait leurs expressions. Ils avaient bien moins de prestance qu’au départ de la course, mais l’épreuve avait mis en exergue la fougue qui les animait. La jeune Magicienne longea le chemin pour se rapprocher de l’estrade. Elle vit la Comtesse Vaughan féliciter le gagnant et lui remettre le contrat qui certifiait qu’il avait gagné l’épreuve. Ils s’étaient rejoints et se tenaient si proches l’un de l’autre qu’il aurait suffi de deux pas pour que leurs corps ne se touchassent. Les paupières d’Armelle papillonnèrent, en proie à ses rêveries. « Merci. » dit l’Ange. Il s’inclina vers la jeune femme, pour lui souffler quelque chose que ni Armelle ni les autres personnes présentes ne purent entendre : « Maintenant, on sait que mon cheval court assez vite pour échapper aux Sorciers. » Il se redressa et sourit. Ça avait quelque chose de provocateur et de doux à la fois.



Message unique – 1645 mots

Du coup, Priam accompagnera Aliénor au bal, s'il survit à Amestris et si Nalim ne le tue pas entre temps nastae




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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Lun 19 Juil 2021, 18:26



Parfois, il y a des morts


J’observais Arsène et Cendre depuis plusieurs semaines à présent. L’homme était le garde du corps de celle qui partageait ma vie. Depuis ce qu’il s’était passé dans le château, le Baron Paiberym l’avait vendu. Il devait rester sur le sol de sa barronnie mais celui-ci ne manquait pas d’édifices. Comme il n’était plus réapparu depuis quelques temps, le projet immobilier visant à en acheter un autre pour y loger toute la famille avait été mis en pause. Lucius était le plus souvent à Adraha, même s’il était revenu sur les Terres du Lac Bleu pour la Galette et avait également été aperçu au cœur de l’Archipel d’Aeden. Les enfants plus jeunes habitaient à Boraür et empruntaient les pontons pour aller en cours aux Palais de Coelya. Parfois, ils passaient quelques jours à l’internat de l’école ou venaient loger dans l’un des appartements du centre que possédait Kaahl. Cendre vivait ici et j’avais décidé de la suivre pour plusieurs raisons. Tout d’abord, il y avait la boîte aux mystères. Ensuite, et surtout, je l’aimais beaucoup. Je la trouvais belle et inspirante. Elle aimait les fleurs et moi je l’aimais. Je prenais donc soin de son jardin pendant qu’elle prenait soin d’Arsène qui, lui-même s’occupait d’elle et des plantes. Le soldat avait la main verte et comme, occasionnellement, j’avais l’impression étrange qu’il me regardait, je lui pardonnais d’être si proche de la Magicienne. Au début, j’avais ressenti une drôle d’émotion mais elle s’était apaisée d’elle-même. Je savais que Cendre ne me voyait pas. Même lorsque je dormais sur elle, elle ne me sentait pas. Je m’étais d’ailleurs retrouvée plus d’une fois à valdinguer sur le matelas, après qu’elle se fût levée brusquement. Arsène avait tendance à bouger la nuit et sa main, de temps à autre, venait s’écraser sur la poitrine de la Magicienne, sur laquelle je dormais paisiblement avant l’attaque surprise. Elle et lui étaient allés vite. Elle avait été touchée par son intérêt pour elle et le fait qu’elle fît partie des Puff-Puff Gueurles à présent. Il l’avait soutenue, avait cuisiné pour elle et avait montré bien d’autres talents. Il était beau, gentil et galant. Il n’était, cependant, ni riche ni célèbre. Il avait quelques petits défauts que moi seule pouvais constater. Déjà, il mettait ses doigts dans son nez quand personne ne le regardait. Il aimait aussi les revues coquines et je savais exactement où est-ce qu’il les cachait. Rien ne m’échappait. L’homme était très souple, comme j’avais pu le constater plusieurs fois. Il lui arrivait de sentir ses pieds, comme pour s’assurer qu’ils ne puaient pas. Je ne savais pas si je devais classer ça dans les défauts ou les qualités. Il prenait soin de Cendre et préférait se laver plusieurs fois par jour plutôt que de risquer de l’incommoder avec son odeur. Il avait l’air drôlement complexé et, à vrai dire, il l’était. Parfois, sa langue fourchait et il s’embrouillait. Ça lui arrivait, même s’il avait une diction correcte la plupart du temps. Il perdait ses moyens quand le sujet évoqué était moralement répréhensible mais que, lui, était concerné. Comme les revues coquines par exemple. Il aimait les filles avec des gros seins, parce que c’était ce genre de filles qui apparaissait dans ce qu’il regardait. L’avantage du fait d’être naturellement invisible, c’était bien de pouvoir lire les journaux intimes des autres et de s’approcher pour observer les agissements de chacun de plus près. Personnellement, j’étais bien d’accord avec lui. Depuis que j’avais moi-même une poitrine, je trouvais ça très amusant et douillet.

« Je suis heureux d’avoir réussi ton épreuve. » murmura Arsène à Cendre. Ils étaient en train de danser et je me trouvais sur l’épaule de la jeune femme. Ça me donnait l’impression de valser avec eux. Ils allaient doucement, parce que la Magicienne, malgré son statut de danseuse, n’était pas très douée. Elle apprenait et dans les bras de son amoureux, tout paraissait bien plus facile. J’étais heureuse pour eux. Surtout, j’étais heureuse de vivre là. Ma colocataire avait beaucoup de goûts en commun avec moi. Elle avait mis des plantes partout, adorait effectuer des travaux manuels et agencer son espace. Elle dessinait parfois, sculptait d’autres fois. Elle touchait à tout et aimait tout ce qui était coloré, exactement comme moi. La seule ombre au tableau était que le Protecteur des Étoiles me manquait. Lorsque je regardais le ciel étoilé, je pensais à lui. « Moi aussi. » lui dit la Magicienne, avant de chercher ses lèvres. Je souris. Moi aussi j’aurais bien aimé faire un bisou à Cendre. Tant pis, je vivais par procuration. Ce n’était pas si triste. Leur joie me rendait heureuse. « J’ai hâte d’être au bal, même s’il va falloir que je m’entraîne davantage si je ne veux pas te faire honte. » Elle l’avait dit sur le ton de l’humour mais je savais que c’était une peur chez elle. Elle l’avait noté dans son journal. Arsène s’arrêta. Il la regarda. « Tu ne me feras jamais honte, tu le sais, n’est-ce pas ? » Les joues de Cendre devinrent deux grosses fraises. Ils étaient tout mignons, même si je ne comprenais pas son attrait pour les hommes. « J’espère que tu ne te trompes pas. » fit-elle, gênée. Elle avait une faible estime d’elle-même, ce qui me rendait bien plus triste que ma propre condition. Cendre ne disait presque jamais ce qu’elle avait sur le cœur si c’était négatif. Je savais, pour avoir lu son journal, qu’elle craignait de blesser les autres. Ce qui se passait, alors, c’est que les autres finissaient toujours par la blesser, même sans le vouloir. Néanmoins, ce n’était pas moi, invisible, qui pouvais l’aider à comprendre comment fonctionnaient ses semblables.

L’épreuve s’était déroulée quelques jours plus tôt. Lorsque le garde du corps avait dit qu’il était heureux d’avoir gagné celle-ci, ses propos auraient pu porter à croire que beaucoup d’hommes avaient été présents. En réalité, ils étaient trois : Arsène, le voisin de Cendre qui devait avoir à peu près treize ans et le libraire du quartier qui avait eu un coup de cœur pour elle le jour où elle avait fait tomber toute une rangée de livres sans faire exprès. Depuis, il l’observait en silence, un peu comme moi. C’était un homme sans couleur, invisible, un peu fade. Parfois, je lui rendais visite pour l’observer, même s’il ne me voyait pas non plus. Il était gentil et lisait dès qu’il n’avait pas de visiteurs. Il était cultivé mais avait un charisme inexistant, juste de quoi servir ses clients modestement. Il était diplômé avec distinction, comme le montrait le bout de papier qu’il gardait précieusement dans la partie privative de sa boutique. Lui aussi, manquait de confiance en lui.

Le grand jour, les trois hommes s’étaient donc livrés bataille. Je les avais observés confectionner leur plus beau gâteau pour Cendre. Cet épisode m’avait rappelé la Coupe des Nations des Déchus. Comme de coutume, il y avait eu des témoins afin de certifier la bonne tenue de l’épreuve. Comme j’étais petite et que je passais partout, j’avais rapidement constaté que les Magiciens les plus puissants étaient des tricheurs. Néanmoins, les Sorciers ne pourraient sans doute pas contrôler l’exactitude de chaque témoignage. Quant à moi, j’allais me rendre au bal sur l’épaule de Cendre. Personne ne me remarquerait.

En tout cas, nul n’avait triché lors de l’épreuve de ma colocataire. Les garçons s’étaient appliqués, essayant de deviner les goûts de la femme de leurs pensées. Si Arsène gagna, ce fut pour plusieurs raisons : il était doué en cuisine, plus que le voisin, et plus que le libraire et, surtout, il connaissait bien les goûts de la demoiselle. Il vivait avec elle, pour des raisons professionnelles et personnelles. Il savait qu’elle raffolait de la crème glacée, des fruits, des chouquettes et de la chantilly. Il avait donc mixé l’ensemble dans une confection bien à lui et la magie avait opéré. Lorsque les desserts étaient arrivés à Cendre, de façon anonyme, et qu’elle les avait goûtés, son choix s’était naturellement porté sur celui d’Arsène. J’avais moi-aussi trempé mon doigt dans les compositions. Le voisin avait simplement exécuté un quatre-quarts. C’était le seul gâteau qu’il savait faire et il avait été légèrement désarçonné devant l’épreuve. Il ne s’y était pas attendu. Le libraire, lui, avait opté pour quelque chose de plus osé mais il n’avait pas forcément bien réussi. Son dessert supposait un peu d’alcool. Néanmoins, il avait eu la main lourde. Croquer quelques bouchées du dessert avait suffi à m’émécher.

« Je sais que je ne me trompe pas. D’ailleurs, je ne te lâcherai pas de la soirée. Tu vas être obligée de ne danser qu’avec moi. Pour ta sécurité. » décréta-t-il, avec un sourire. « Ta mission se termine bientôt. » dit Cendre, soudainement anxieuse, sans répondre à sa plaisanterie précédente. Le danger ne semblait pas la guetter et Vervallée était suffisamment sécurisée pour assurer sa protection. « J’espère qu'on pourra se voir quand même... » Il lui sourit. C'était un sujet délicat. « Je ne sais pas si je serai affecté à la protection de quelqu’un d’autre mais je risque de t’envahir sur mon temps libre. » « Mais si tu es obligé de partir loin ? » Il se voulut rassurant. « On fera avec, ne t’inquiètes pas. N’y pense pas pour l’instant. Le bal nous attend et nous avons encore bien des progrès à faire pour être le couple le plus resplendissant de la soirée. » Elle rit à son tour, devant cette perspective.

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Lun 19 Juil 2021, 19:41



Parfois, il y a des morts


Rp précédent : La Coupe des Huit

Ükjilh i Tobieth. C’est ce que j’étais devenu, à la suite de ma victoire à l’épreuve de l’île d’Ildirim. J’étais aussi fier qu’un paon, à déambuler parmi les Chamans qui voyageaient avec moi. « Que les Ætheri nous aident avec celui-ci. » « Qu’ils nous préservent de l’envie de l’abandonner dans une forêt. » étaient des paroles que j’entendais de plus en plus fréquemment. Elles n’étaient pas sérieuses, personne ne m’aurait jamais abandonné, mais illustraient parfaitement l’enfer que je faisais vivre à ceux qui foulaient le sol de l’étranger avec moi. Mon cas commençait à poser quelques questionnements. Je n’étais pas simplement Ükjilh i Tobieth. J’étais également Isemssith. Je jouissais d’une popularité chez les Chamans, chez les Faes et les Lyrienns. Je n’étais pas encore au courant de ma participation au Conte des Trois Royaumes. Je ne savais pas lire, ce qui freinait l’arrivée du savoir jusqu’à moi. Surtout que dans le conte en question, j’étais une fille. Il valait mieux que je ne l’apprisse jamais. « J’étais bon quand même ? Avec Quartier de Lune ! Je n’avais qu’à tirer et ma flèche allait se ficher directement dans la cible ! C’était trop facile ! » Je péchais par Orgueil. La vérité était toute autre. Je n’avais pas été bon. J’étais simplement aussi têtu qu’une mule. Ma force avait résidé dans ma détermination, celle-là même qui me faisait clamer que je serais le plus grand chasseur du monde. Certains disaient que l’important c’était d’y croire, d’autres levaient les yeux au ciel devant mon comportement imminemment puéril. « Hein j’ai été bon ? » demandai-je au renard élémentaire qui me suivait à présent partout, puisque personne ne voulait me féliciter ni parmi les Chamans, ni parmi les Esprits. Ils devaient tous être jaloux de mon succès ! De toute façon, quand je serais le plus grand chasseur du monde, ils ne pourraient plus rien me dire ! Je leur couperai le sifflet rien qu’en arrivant ! La bestiole, pour toute réponse, régurgita de l’herbe. « J’imagine que ça veut dire oui. » dis-je, en haussant les épaules. « Prends en soin, Tekoa. » « Oui oui. C’est quand qu’on arrive ? » « Bientôt. » Parce que j’étais devenu propriétaire. C’était la deuxième fois ! En réalité, j’étais même Roi des Contes mais je ne le savais pas encore. « C’est vrai qu’il y aura des gens pour me servir ? »

J’étais tout excité. À ce stade, ça frôlait presque la folie. Je faisais des aller et retour et m’épuisais dans le vide. Pour un grand chasseur en devenir, je ne ménageais pas mes forces. Ça avait l’avantage d’amuser le renard qui me poursuivait et jouait à mordre mes chaussures dès qu’il en avait l’occasion. On m’avait dit qu’il provenait de l’élevage de la famille Blaise. Je ne connaissais pas du tout. Je ne sortais pas souvent d’Awaku No Hi et j’avais déjà du mal à rester concentré sur la théorie du tannage alors je ne pouvais pas savoir ça. En plus, il fallait que je retinsse les différentes prières aux Ætheri, ce qui n’était pas une mince affaire tant ils étaient nombreux. « Tekoa ? » « Oui ? » « Pourrais-tu me définir l’humilité ? » Je fis la moue, conscient de la boutade. « Pfff. Même plus le droit d’être content maintenant ! » rétorquai-je. J’en faisais peut-être un peu trop mais… j’étais heureux ! En plus, j’avais toujours désiré sortir d’Awaku No Hi. On m’avait dit « Tu sortiras quand tu seras grand. » et ce n’était pas vrai ! J’étais sorti avant ! Même si je commençais à être plus grand qu’auparavant.

Lorsque nous arrivâmes, j’aimai tout de suite ma maison. J’adorais cette île en réalité. Tobieth était un lieu où la nature était prédominante. Partout, de vastes espaces verts s’étendaient. Des prairies faisaient face à des petits bois clairsemés. De l’eau irriguait le tout et la faune était omniprésente. « On a le droit de chasser ici ? » demandai-je. « Ce n’est pas chez toi. » me dit un adulte, en guise de réponse. Malgré l'imprécision, je compris pourtant le sens : c'était non. « Et ne parle pas des Esprits. » me chuchota-t-il. « Mais je sais, c’est bon ! » Je savais mais je gaffais pourtant fréquemment, en parlant à voix haute ou en racontant des anecdotes. Heureusement, je ne parlais pas le commun et ce que je formulais était un vrai charabia pour mes interlocuteurs, ce qui limitait les dégâts. Il fallait que je grandisse et que je devinsse plus sage. La tâche serait rude.

Dans la maison, il y avait dix Lyrienns de la Nature. Je les avais salués promptement avant de visiter. Je leur avais même fait un petit discours très inspiré, qu’ils n’avaient évidemment pas compris. Avec mon style vestimentaire et mes cheveux en pagaille, je devais leur faire un drôle d’effet. La réciproque était vraie. Il n’y avait pas qu’eux. La demeure également. Je n’étais pas habitué à ce type de construction. Même le palais de Zaowa était différent. Ce qui me plaisait, en revanche, c’était que la nature était omniprésente et que, sur le toit, il y avait une zone où je pouvais marcher et contempler le ciel. Ce serait probablement mon endroit préféré de la bâtisse, par sa structure mais également parce que c’est par une nuit où j’observais justement les étoiles que tout commença.

Je n’aurais jamais pensé me rendre un jour à un bal. Je ne connaissais aucune danse de salon. Le rythme des Chamans n’était pas le rythme des Sorciers et des Magiciens. Nous dansions pour les Dieux, pour la vie, nous nous donnions dans la danse, pour une cause qui nous dépassait largement. Il ne s’agissait pas de représentation et de séduction. Cette dernière pouvait advenir, lorsque nous honorions la Vie, et, bien sûr, certains danseurs étaient très populaires et créaient le désir, mais ce n’était pas le but premier. L’objectif était profond et nos gestes symboliques. La transe n’en devenait que plus signifiante. Nous recherchions la communion avec les Ætheri, à ouvrir une voix entre eux et nous, pour atteindre leurs volontés. Dans ces moments-là, j’oubliais mes petites victoires parce qu’elles n’avaient plus aucune importance. Je n’étais personne, que le serviteur du Divin.

Les yeux perdus sur les étoiles, je fus détourné de ma tâche par un Esprit. La conversation fut difficile. Il dut m’expliquer ce qu’était un bal, ce qu’était qu’une épreuve et un certificat. Tous ces concepts me semblaient aussi lointains que bizarres. Ce qui était bizarre provoquait chez moi un sentiment soit de curiosité, soit de perplexité. J’étais perplexe, et pas très sûr de tout comprendre, ni même d’avoir envie de faire une épreuve pour être le cavalier, sans cheval, ce qui était curieux, d'une fille. Néanmoins, lorsqu’il me prononça les termes mêmes de l’épreuve, ma vision de la chose changea. « Le Cyclone vous appelle. De par son effroyable maladresse, le Cyclone se retrouve démunie face au dernier caprice de sa progéniture, la mignonne mais pas moins tumultueuse Tornade. En effet, le Cyclone souhaite présenter à la Tornade un nouveau compagnon de jeu : un Feluche. Hélas, le Cyclone réduirait le pauvre Feluche à l'état de bouilli rien qu'à son approche ; il lui faut une poigne aguerrie mais douce, un élu vif mais calculateur. Si tu es capable de combler la Tornade et de contenter le Cyclone, alors ce dernier te récompensera de sa bénédiction. Son Œil veillera sur toi en compagnie des Ætheri. » C’était un défi que j’allais relever, même si je n’avais aucune idée de ce qu’était qu’un Feluche. Il me fallut donc me renseigner sur l’animal, ainsi que sa géolocalisation. Par chance, l’île de Tobieth possédait les paysages adéquats.

« Je vais chasser le Feluche !! » fut ma nouvelle phrase fétiche. Les Lyrienns devaient se demander ce que j’avais à courir partout et à ramper sous les meubles, comme si j’étais en embuscade. Ils ne dirent cependant rien jusqu’à mon départ, le grand jour. Les Élus de Natyrië étaient des gens bien et chacun voulait me connaître au mieux, même si nous savions tous que ça prendrait du temps. En réalité, j’aurais bien voulu les amener sur Awaku No Hi mais les Chamans qui m’accompagnaient n’avaient pas approuver l’idée. Pour ça, je les trouvais tous nuls !

_

Le renard élémentaire me suivait encore. Je pensai un instant que ce n’était pas l’idéal pour la chasse au Feluche mais je commençais à comprendre qu’il était aussi têtu que moi. Je le laissai donc marcher à mes côtés. « On va essayer d’attraper un Feluche pour que le Cyclone puisse le donner à la Tornade. » dis-je, plus pour me convaincre moi-même que pour essayer d’établir un contact oral avec le renard. Je me demandais bien qui était le Cyclone, et la Tornade aussi. Si le Cyclone ne pouvait pas attraper le Feluche, c’était peut-être parce qu’il n’avait pas de mains ? À moins qu’il ne soit vraiment maladroit ? C’était forcément une fille parce que, si j’avais tout compris, on ne pouvait aller au bal que par paire de sexes différents. Une fille nommée le Cyclone ? Elle avait l’air trop bien pour être réelle, cette fille.

Plusieurs heures plus tard, mes échecs se succédaient dans un rythme déconcertant. Si j'étais parvenu à apercevoir des Feluches, je n’avais pas réussi à en attraper un seul. Je faisais trop de bruit, j’étais trop lent. La créature était timide et dès qu’elle suspectait qu’un événement qui sortait de l’ordinaire était en train de se produire, elle fuyait. Lorsque je restais immobile, je pouvais les observer sans difficulté mais je n’arrivais pas encore à rester sans bouger suffisamment longtemps. Il arrivait toujours un moment où mes articulations me faisaient mal et où mes membres s’endolorissaient. « Raa mais j’arrive à rien ! Faudrait que je sois invisible pour réussir à en attraper un ! » pestai-je, ce qui fis fuir tous les animaux à la ronde. « Être invisible… » murmurai-je. Peut-être que je pourrais essayer… Je n’avais jamais été doué en magie, ce qui aurait dû me décourager. Au lieu de quoi, je fronçai les sourcils, me levai et allai m’asseoir contre le dos d’un arbre au tronc blanc autour duquel j’avais aperçu plusieurs fois des Feluches s’activer, comme de petites châtaignes mouvantes. Je me mis en tailleur. Mon renard élémentaire me suivit et se coucha là. L’animal commençait sans doute à comprendre ce que j’essayais de faire : attraper les petites boules qui gigotaient par terre et dans les branches.

Je me concentrai, ordonnant mentalement à mon corps de disparaître. Il ne produisit rien. Il fallait que je fîs autrement. Si je commençais par un morceau de mon anatomie, ce serait peut-être plus facile. Je me focalisai donc sur mon orteil, le fixant comme si je m’attendais à ce qu’il explosât d’une seconde à l’autre. « Raa mais raaa ! » Pourquoi ne veut-il pas obéir ? me demandai-je, inconscient, pour l’instant, qu’il s’agissait d’une question que je me poserais en boucle durant de nombreuses minutes. Après avoir essayé un nombre incalculable de techniques, inventées par mes soins, je soupirai. Peut-être que le Cyclone n’aurait jamais son Feluche ? « Allez, courage. Les Dieux te regardent. » dis-je à voix haute. Et il n’y avait rien de pire que le regard des Ætheri lorsque j’échouais lamentablement. Je me redressai un peu et fermai les yeux. Les commentaires des Esprits n’aidaient pas non plus. Je devais persévérer. Inspirer. Expirer. Inspirer. Expirer. Disparaître. Inspirer. Expirer. Me calmer. Sentir la magie en moi. La réveiller. Je devais prier les Dieux pour qu’ils m’exhaussassent.

Soudain, un phénomène me tira de ma méditation. Autour de moi, une sorte de grosse plante se referma. J’ouvris les yeux, pris au piège entre des feuilles vertes et rouges. « Mais ! » Il y avait mon renard élémentaire ainsi qu’un groupe de Feluche qui cherchait à fuir sans y parvenir. Ils me firent presque mal au cœur, avec leurs petits corps minuscules. Tant pis ! C'était le moment ou jamais ! Après plusieurs essais, je réussis à prendre le plus gros entre mes mains et l’amenai vers mon visage avant d’ouvrir légèrement les doigts. « Ne t’inquiète pas. C’est pour le Cyclone que je fais ça. Tu ne vas pas souffrir. Je ne vais pas te faire de mal. Je ne fais pas de mal aux créatures de Phoebe pour le plaisir. Je les honore. » Même si je venais sans doute de traumatiser la petite bête.

L’Esprit qui m’avait donné la mission perça la prison feuillue. Je ne savais toujours pas ce qu’il s’était passé et n’envisageais pas que mon renard élémentaire pût être à l’origine du piège qui s’était refermé sur les créatures et moi. Je ne savais pas non plus si j’avais réussi à devenir invisible. « Félicitation ! Tu accompagneras donc la Hǫfðingi au bal ! » Je clignai plusieurs fois des yeux. « Attends… QUOI ? »

2138 mots donc 104 mots écrits par Léto

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Kitoe
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Kitoe
Sam 24 Juil 2021, 00:37

Leigh
Parfois, il y a des morts
Ils étaient cinq. Cinq candidats à se battre pour elle. Leigh ne savait pas si elle devait en rire, être fière ou encore dégoûtée. Ces cinq abrutis avaient choisi de tenter leur chance avec elle, en sachant ce à quoi ils s’engageaient : à souffrir, bien sûr. C'était drôle de voir ce à quoi ils étaient prêts pour un simple bal au bras d'une personnalité, aussi peu charismatique et détestable pouvait-elle être. La Démone était impressionnée par cette force de caractère. Elle-même se sentait capable de s’infliger ce genre de supplice, mais elle avait un point de vue différent avec la motivation des autres. Car à son avis, la contrepartie n’en valait pas la peine. Leigh était une prostituée, une Démone, une ennemie à leur peuple, une faible, une femme vulgaire et provoquante, et en principe il n’y aurait même pas de coucherie. Il n'y avait rien de glorieux à vouloir d'elle comme compagne. Pourquoi faisaient-ils cela ? Comment faisaient-ils pour supporter la douleur ? Était-il nécessaire de se donner autant de mal pour une soirée dansante en sa compagnie ? Elle ne pensait pas, mais quelque part, c’était leur problème si leur sens des priorités s’élevait à un niveau effleurant la vase. Ce qu'elle avait en plus, ce n'était que ce lien avec Elias. Son titre de Dame Noire les avait attirés comme de sales vautours et elle ne pouvait que les considérer bassement pour cela. S’il avait autant de valeur pour eux, qu’ils fassent. Ça l’arrangeait, puisqu’elle voulait honorer sa danse obtenue grâce à la fève. Et puis, elle voulait rencontrer l’homologue de son futur mari. En attendant, les vautours seraient punis pour leur culot. L’un d’entre eux profiterait de la charogne ensuite, celui qui se serait montré digne d’intérêt et chez qui elle soupçonnerait qu’il n’y avait pas que son statut qui l’intéressait. Au pire, il aurait été suffisamment dévoué pour gagner. Leigh aimait la dévotion. Que l’heureux gagnant fût un déséquilibré ou un fou ne l’intéressait pas. Elle voulait savoir combien il serait capable de mettre sur la table pour l’obtenir elle, le temps d’une nuit. Combien de temps la laisserait-il l’observer de haut, quelle quantité d’énergie et de ses tripes, de sa chair ? Vibrait-il, lui aussi, alors qu’il performait ? Prenait-il finalement du plaisir à la faire vibrer ? Que trouvait-il en elle ?

Assise dans un large fauteur, les jambes élégamment croisées, ses yeux étaient baissés sur eux. À genoux, soumis à son regard expert, ses prétendants haletaient, poussaient des plaintes ou des grognements qui faisaient frémir chaque cellule de son être. Pour le bal, la Démone avait choisi de faire simple. Elle avait donné rendez-vous à ceux qui le voulaient bien dans un salon emprunté à la volée. Elle ne connaissait le propriétaire de cette maison de personne. Elle s'était présentée, vaguement au hasard, et en avait demandé la mobilisation pour quelques heures. Lysistrate avait essuyé plusieurs refus avant de trouver l’homme idéal, Elazar. Celui-ci avait accepté en échange d’une contribution en nature, alors que sa femme était absente. À la base, la Vile avait pensé à trouver refuge chez son frère, Agazio, mais celui-ci avait évidemment refusé d'abriter les magouilles de sa pute de sœur. Et puisqu'aucun homme n'était autorisé au Château Interdit, elle avait dû improviser.

Pour en revenir à son frère, celui-ci y allait avec sa propre femme. L’homme avait eu du mal à la laisser choisir le contenu de l'épreuve sans interférer. C’était aussi le cas de la Démone, qui aurait rêvé voir Agazio souffrir sous les directives de celle qu’il avait l’habitude de battre. Cependant, elle avait déjà promis à la femme de ne pas la mettre en danger, et donc de ne pas interférer. Helena avait imposé plusieurs directives à son mari, comme ne pas la frapper et se montrer galant. L’épreuve s’était arrêtée à ces quelques manières-là, ainsi qu’une épreuve plus ou moins bidon à laquelle Lysistrate avait accepté de témoigner. Helena n'avait pas voulu prendre la liberté d’une vengeance pourtant méritée compte-tenu du nombre de fois où il l'avait marquée. Malheureusement, elle craignait les représailles de retour de leur soirée. Leigh avait trouvé cela dommage. A sa place, elle aurait attaché Agazio à un meuble et frappé à n’en plus pouvoir. Il lui aurait fait frôler la mort plus tard mais au moins, elle l’aurait dominé l’espace de quelques heures.

C’était en partie pour compenser ce manque que la Démone avait choisi de conduire sa propre épreuve de cette façon : elle avait demandé à ses prétendants de retirer leur haut puis leur avait chacun donné un martinet. À genoux devant sa personne, ils devaient se fouetter le dos, sans s'arrêter. Le dernier à suffisamment supporter la douleur pour continuer serait l'heureux gagnant. Le jeu avait commencé depuis quelques minutes. Après des départs timides, le temps pour leur corps de s’habituer à la morsure des lanières, ils avaient atteint une cadence régulière à sa demande. Il y avait un peu de sang sur le carrelage. Celui-ci giclait de temps à autres, alors que le cuir entrait trop profondément dans la chair de ces idiots. Un instant elle avait pensé, à la fin de leur supplice, à leur annoncer que le gagnant était finalement celui qui leur avait offert son salon pour l’épreuve – et qui par la même, n'avait pas participé à cette séance de labour – dans le but de voir leurs visages se tordre de déception, de colère et de révolte. Elle avait renoncé à cette idée en se rappelant qu'elle pourrait jouer des blessures de son futur cavalier en effleurant de temps à autres son dos meurtri. Car évidemment, il était hors de question que celui-ci se soigne ensuite. Leigh avait hâte d'entamer valse et tango afin de le voir se tendre. Le seul fait de se tenir droit serait une torture pour lui, sans parler de ses vêtements serrés.

Le premier prétendant abandonna peu de temps après le début du supplice. Au bord des larmes, bavant et le nez coulant, il avait perdu ses moyens. Après avoir relevé son nom, Leigh lui demanda de disposer, sans qu’il ne demande son reste. Elle lui laissa à peine le temps de se rhabiller. Il remit sa chemise dans la rue, qui se teinta aussitôt de rouge. Elle réserva le même traitement aux deux suivants, qui dépassèrent de peu la dizaine de minutes. Les renvoyer comme s’il ne s’agissait que de chiens était divertissant. Le dernier déclara forfait encore une dizaine de minutes plus tard. A bout de forces, le prétendu vainqueur s'infligea encore quelques coups avant de laisser tomber son instrument de torture au sol. Il se rattrapa avec ses mains pour ne pas tomber en avant, comme venait de le faire son dernier concurrent. Il tremblait, ça se voyait d'ici. Son dos n'était plus qu'un amas de chair rouge et sanglante. C'était à se demander si l'on verrait bientôt les os de ses côtes. Leigh prit alors la peine de se lever et se plaça à sa hauteur.

-Je ne vous ai pas demandé de vous arrêter.

L'élu leva les yeux vers elle. Elle y lut ce qu'elle interpréta comme un mélange de haine et de supplication.

-Allez. L'encouragea-t-elle.

Elle lui rendit son martinet.

-Si proche du but, ce n'est pas un coup de plus qui va vous achever. Sinon je choisirai le second lorsqu’il sera réveillé. Techniquement il n’a pas gagné, mais il a pris la peine d’aller au-delà de ses limites. Et vous, vous n'aurez rien. Tout ce que vous aurez fait n'aura servi à rien. Vous allez souffrir. Vous allez passer de très mauvaises journées et des nuits encore pire, pour rien. Alors qu'autrement... Elle se baissa pour continuer en susurrant. Nous pourrions nous pencher sur d'autres éléments, au-delà de ce bal. Je trouverais dommage de limiter notre relation à cela.

-Quel genre d'éléments ?

Elle avait l'impression d'entendre sa voix pour la première fois. La Démone haussa les épaules. A lui d'imaginer lesquels, elle lui laissait carte blanche. Leigh aimait être surprise. Evidemment, elle pensait au sexe, mais s'il avait d'autres idées, elle serait aussi ravie de les entendre. Il était toujours amusant de confronter les points de vue, autant pour ouvrir son propre champ des possibles que pour réduire les idées de l'autre en cendres. De cette manière, tout était un terrain de jeu.

-Réfléchissez-y. Vous me donnerez votre réponse lorsque vous irez faire tamponner votre certificat. Dans tous les cas, rassurez-vous : je suis du genre à tenir mes promesses.

Ce n’était pas toujours possible – les cas de force majeure obligeaient – mais elle essayait du mieux qu’elle pouvait, avec compensation dans la situation contraire.

-Maintenant, fouettez-vous.

Il le fit, un râle lui échappa. Leigh retînt un gloussement de plaisir.

-Comment vous appelez-vous ?

-Elric Gallini.

La femme tourna les talons. A une table plus loin, elle s’empara de quoi écrire.

« La résistance : les participants devront se flageller le dos à l’aide d’un martinet sans s’arrêter. Le dernier à abandonner sera l’heureux gagnant.

Témoins : Lysistrate Dogma, Elazar et Mélania Star, à Amestris.

Participants à l’épreuve : Théodore Mandel (7 minutes et 82 coups de fouet) ; Elric Gallini (28 minutes et 170 coups de fouet) ; Jacob Terneaux (16 minutes et 118 coups de fouet) ; Flavien Eliure (27 minutes et 161 coups de fouet) ; Honoré Derac (13 minutes et 108 coups de fouet).*

Vainqueur de l’épreuve : Elric Gallini.
»

La Vile compléta le certificat de sa propre signature. Elle releva les yeux vers Elric, qui ne s’était pas remis debout, trop accablé par la douleur. Aucun des deux ne le savait encore, mais le Sorcier ne signerait pas. Cas de force majeure : c’était la volonté des Divins.

1641 mots
*Note : j’ai fait un petit calcul mais je sais pas si c’est réaliste. Nous nous contenterons donc du therme « soutenu » /sbaf/



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Mer 28 Juil 2021, 00:18




Parfois, il y a des morts

Organisation de son épreuve | Laëth



Cher Lucius,

Je suis certaine que tes efforts en danse paieront et que tu n’auras pas l’air ridicule. Cependant (parce que j’imagine que ta crainte va persister), si jamais tu écrases le pied de l’Ultimage, tu pourras toujours lui parler de dragons pour la distraire. Elle ne pourra pas en vouloir à quelqu’un qui partage sa passion.


Elle regarda son bras. Le nom d’Edwina y était toujours inscrit. Il faudrait qu’elle le touchât pour la retrouver et l’embrasser, un jour. L’idée la troublait. Autrefois, Kaahl l’avait aimée. Elle avait l’impression diffuse de s’apprêter à refermer une boucle – ou à ouvrir une nouvelle porte.

Et dans le cas où elle essaierait de te pourchasser à travers toute la salle de réception, peut-être que j’essaierai de voler à ton secours. Priam sera là – il danse avec l’Empereur Noir –, et moi aussi.

À la lecture, son ton paraîtrait taquin, amusé et tendre. C’était le but. De ces trois humeurs, elle n’éprouvait que la dernière. Temporairement ; parce qu’elle pensait aux enfants Paiberym.

J’aimerais que ton père participe à l’épreuve que j’organise pour être mon cavalier, mais je doute qu’il réapparaisse ainsi, d’un coup… J’espère quand même qu’il sera là.

Il serait là. Sous une autre forme et avec d’autres obligations. Mais il serait là. Elle le verrait. Pour essuyer la même indifférence, saturée de violence, que lors de la Galette. Pour ne pas pouvoir parler franchement de ce qui la tracassait. Pour se forcer à la comédie quand son palpitant luttait pour ne pas s’effriter – ou pour ne pas flamber de colère. Pour repenser à ces quelques paragraphes, dans le Conte. Aux rumeurs sur le fait qu’il était devenu le Chevalier de cette femme. À sa trahison, à Adam. Elle relut ce bout de phrase qui l’avait déjà fait pleurer – « il t’aime et on le sait tous ». Les larmes revinrent abreuver sa cornée. Parfois, elle essayait de se remémorer les propos raisonnés du Déchu, juste après la création du Lien. Impossible de s’en persuader. Même les paroles de Jun ne suffisaient pas. Dans ces moments-là, elle songeait que, peut-être, la folie était devenue maîtresse de ses pensées. Peut-être qu’elle faussait toutes ses perceptions et enrobait chaque esquisse de réflexion.

Il m’a écrit, mais comme à vous, il me manque.

Ses iris verts glissèrent jusqu’à une autre lettre, laissée sur sa droite. L’écriture élégante du Mage n’annonçait rien de réjouissant. Lorsqu’elle l’avait reçue, ses mains tremblaient. Un signe de vie. Une attention. Un murmure.

Elle l’avait décachetée, puis avait aussitôt fondu en larmes, sans savoir s’il s’agissait de soulagement ou de terreur. Le flou ne s’était estompé qu’après quelques minutes de sanglots. Les premiers mots de son fiancé l’avait apaisée, parce qu’ils portaient la trace du pardon – ou d’un pardon possible. La suite l’avait bouleversée. Une part d’elle-même hurlait de frustration et de peine à l’idée qu’il refusât de la voir, quand bien même les raisons pouvaient être compréhensibles. Par instant, des doutes et des absurdités revenaient l’assaillir. Et s’il ne l’aimait plus ? Et si c’était juste une excuse pour ne pas la voir ? Et s’il attendait qu’elle se lassât de l’attente et le laissât tranquille ? Et si…? Les possibles tournoyaient en cercle vicieux.

Surtout, il y avait cette « épreuve ». Les échos avaient ricoché jusqu’aux bouches magiciennes. Elle avait su que l’Empereur Noir comptait se faire crucifier. Ça semblait tellement improbable qu’elle n’en avait mesuré la dangerosité qu’en lisant la lettre du Mage. Son cœur avait failli. Ne pas survivre ? Mourir ? À quel point allait-il mal, pour accepter l’idée qu’il pût décéder des suites de la crucifixion ? Malgré tout ce qui les tenait éloignés, tout ce qui bataillait contre leurs sentiments respectifs, comment pouvait-elle, elle, lire cela et rester de marbre ? Comment retenir les tambours de révolte qui frappaient aux portes de son cœur ? Comment ne pas s’imaginer partir pour Amestris et tout y mettre en œuvre pour qu’il n’y mourût pas ? Comment supporter une existence où, consciente des risques encourus par l’homme qu’elle aimait, elle n’avait rien fait ? Ses gènes réprouvés bouillonnaient et, parfois, elle avait envie de lui porter elle-même le coup fatal, pour lui apprendre à être aussi stupide et égoïste. Aussi stupide que quand il prétendait se réjouir de la création de son Lien avec un putain de Déchu.

Elle était en colère, elle était inquiète, et elle était profondément triste – d’une tristesse plus détachée du vacarme de sa culpabilité, pourtant toujours imposant. Elle n’avait pas répondu à sa lettre.

J’imagine qu’il va tout faire pour qu’on puisse le voir au plus vite.

Freyja baissa la tête. Elle l’espérait, sans avoir trop envie d’y penser. Le déni avait cela de confortable qu’il battait en brèche la plupart de ses tourments. Quand elle arrivait à tout oublier, elle menait sa vie d’une main de maître. Les entraînements, la marbrerie, la salle de spectacle, la musique ; elle progressait sur tous les terrains. Parfois, même, elle se noyait dans le travail pour oublier.

Félicitations pour ta participation et ton classement à la Coupe des Huit. Pour ce qui est de la jeune fille qui t’a embrassé, je ne peux pas répondre à sa place. Je pense cependant que le mieux est de ne pas l’embrasser quand tu la reverras, en tout cas, pas en guise de salut. Si elle ne s’y attend pas, ça risque de la perturber. Ceci dit, j’imagine que si elle t’a invité à Lagherta pour danser, alors qu’elle t’a embrassée, c’est qu’elle est intéressée. Si tu veux être au clair sur votre situation, le mieux est sans doute de le lui demander, même si ce n’est jamais facile.

Pour ton père et moi, c’était un peu différent. Il a manifesté très tôt son intérêt pour moi. J’étais réticente, même si je n’étais pas insensible à son charme. Je n’avais pas du tout prévu de tomber amoureuse – bien que ce ne soit pas le genre de choses que l’on puisse prédire, je le sais bien – et je n’avais pas envie que cela entrave ma progression, notamment militaire, chez les Anges. J’avais peur de m’engager, d’autant plus que je ne connaissais que très peu Kaahl. C’était assez bizarre et insensé, de mon point de vue. De plus, c’est un Magicien, et à l’époque, cela constituait un véritable problème pour la fille de Réprouvés que je suis. Néanmoins, on s’est revus quelques fois, on s’est écrit, on a discuté, et peu à peu, j’ai baissé ma garde. Puis, je l’ai embrassé. Comme tu le sais, c’est délicat, pour un Ange, d’embrasser quelqu’un sans en être amoureux ; et à cet instant-là, j’étais certaine de l’être. On a décidé de continuer à se côtoyer, et de fil en aiguille…


Elle lui avait passé beaucoup de détails. Il y avait des choses qu’elle ne pouvait pas dire à un enfant, et d’autres qu’elle ne pouvait dire à personne.

Chaque relation est différente, Lucius. Mais si tu aimes cette fille, n’hésite pas à le lui montrer ou à le lui dire. Soit ce sera réciproque, et alors tu seras très heureux, soit ça ne le sera pas, et tu seras sans doute malheureux, mais tu pourras être fier du courage dont tu as fait preuve, et te servir de cette expérience pour les prochaines.

Je t’aime très fort aussi. Prends soin de toi, et passe le bonjour à tes frères et sœurs, à Pauline et à Minéphore. À bientôt.

Laëth


L’Ange ferma la lettre, puis regarda la petite pile de courriers auxquels elle devait encore répondre. Il y avait surtout des correspondances en rapport avec la marbrerie, mais aussi une missive d’Adam. Il l’y priait de répondre rapidement. Elle n’avait pas répondu rapidement, puisqu’elle n’avait toujours pas répondu. D’abord, parce qu’il racontait à peu près n’importe quoi, ce qui rendait sa lettre à la fois désagréable et particulièrement louche, et l’avait conduite à se questionner sur les raisons de l’adoption de tant de bizarreries – elle avait conclu qu’il s’amusait juste à la tourmenter, avec ironie et dérision. Ensuite, parce que les anecdotes inventées, les commentaires sur sa poitrine, l’humour graveleux et les dessins de cœurs et de pénis l’avait agacée. Enfin – et c’était sans doute une raison suffisante –, parce que c’était Adam. S’il y avait une part de mauvaise foi, c’était surtout qu’elle ne savait ni quoi lui répondre, ni comment s’adresser à lui. En fait, elle redoutait un peu de le revoir. Son comportement au moment de la création du Lien avait dilué une forme de honte en elle ; et elle ignorait comment gérer son rôle de Gardienne. Elle soupira. De toute façon, elle ne savait pas où se trouvait Kaahl. Peut-être à Amestris, mais elle se voyait mal donner l’adresse du palais royal au Déchu. Il aurait sans doute fait une syncope. Un léger sourire glissa sur sa bouche. Un faux Magicien, un faux Humain : elle commençait à avoir une belle collection de contrefaçons.



« Dis donc, y’a un peu de monde au bord du pré, en fait ! » s’amusa Priam, qui observait le troupeau de concurrents, en lançant un coup de coude taquin à sa cadette. Celle-ci lui coula un regard en coin. « Je ne pensais pas qu- » - « Laëth ! LAËTH ! » Elle pivota pour apercevoir une petite tête blonde se faufiler en sautillant entre les concurrents. Aussitôt, un grand sourire illumina ses traits. « Alcide ! » - « Je vais participer à ton épreuve ! » - « C’est vrai ? » Elle rit. « Je serais ravie que tu sois mon cavalier. » Le petit garçon sourit de toutes ses dents. Il s’approcha, jusqu’à se tenir devant elle et son frère. « Salut Priam ! » dit-il. Après que celui-ci l’eut salué, il se tourna à nouveau vers l’Aile d’Acier. « J’ai déjà participé à des épreuves mais j’ai perdu. » L’enfant ne se départissait pas de son sourire. « Ce n’est pas grave, parce que ça me permet de m’entraîner et d’apprendre plein de choses. En plus, c’est la première fois que je viens ici ! Papa a accepté que je vienne, sous la surveillance d’une de mes grandes sœurs, qui vit déjà ici. » Papa, c’était Jun. Dès qu’elle s’en souvenait, l’Ange était troublée. « On pourra prendre le goûter ensemble, après ton épreuve ? » - « Bien sûr. » - « Chouette ! Tu me montreras tes endroits préférés, comme j’ai fait quand tu étais à Boraür ? » Elle acquiesça. « Super ! Bon bah à tout à l’heure ! » dit-il en s’éloignant et en agitant la main. « Tu vas bientôt les cueillir au berceau, à ce rythme-là… » fit-il, espiègle. « Ou les rejoindre directement dans le cercueil. » répliqua-t-elle, en désignant un vieil homme qui peinait à marcher, même avec l’aide de sa canne. Son frère le considéra, puis sourit : « Ça ne m’étonne pas. Tu as toujours eu un attrait pour ce qui sort de l’ordinaire. » Elle lui jeta un regard amusé. S’il savait.

La jeune femme avait hésité sur le thème de l’épreuve. Parmi une myriade d’idées inapplicables, elle avait songé à un combat, à une joute musicale, à l’écriture de nouvelles brèves ou encore à la création d’une petite sculpture. Elle s’était finalement décidée pour la musique. Paradoxalement, elle avait trouvé refuge dans les notes de ce violoncelle que Kaahl lui avait offert. Elle avait augmenté la fréquence de ses cours avec le vieux Magicien et passait parfois de longues heures dans la salle de concert, à faire résonner le chant de l’instrument sous le haut plafond. Elle nourrissait l’espoir qu’un jour, d’autres musiciens se joignissent à elle, là-bas. Cette journée serait peut-être l’occasion de rencontrer un premier partenaire.

Il était seize heures. L’épreuve allait commencer. L’Ailée tendit la main vers un foulard bleu, posé parmi d’autres rubans sur une petite table près d’elle. Elle le noua autour de sa tête, de sorte à cacher ses yeux. Les autres témoins de l’épreuve devaient faire de même. Ils ne devraient se fier qu’à leur ouïe – et non juger des compétences par l’apparence. Sans voir, ils se laisseraient mieux transporter par les notes, comme du sable entraîné par la danse d’une rivière.

À la fin du concours, les esprits étaient fatigués par le voyage que leur avaient fait faire les instruments. Il résonnait dans les âmes une tranquillité particulière, tendre et délassée. L’Aile d’Acier souffla, prête pour les délibérations. Lorsqu’elles se terminèrent, elle appela le candidat numéro sept. Une silhouette familière se dégagea, et son cœur rata un battement. « Adriel ? » Il haussa les épaules et sourit.



Message unique – 2107 mots

Alooors, Laëth organise son épreuve et ça donne ça : faut jouer de la musique /sbam Le jury a les yeux bandés et les candidats sont numérotés par ordre de passage. Et c'est Adriel qui gagne ! Voilà nastae




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Kitoe
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Kitoe
Ven 30 Juil 2021, 23:41

Kitoe & Toki
Parfois, il y a des morts
The Devil - Banks


-Attends, tu ne fais pas bien le... Aïe ! On avait dit qu'on tournait vers la droite, pas la gauche !

-Je fais de mon mieux avec ce que j'ai. En l'occurrence, tes souvenirs. T'avais qu'à mieux te rappeler, ça t'apprendra.

Ça leur aurait évité de devoir s'entrainer dans le salon pendant des plombes. Le Reflet était ennuyé. Son modèle allait sortir et vivre une énième aventure tandis qu'elle resterait là à s'occuper d'une entreprise qu'elle n'avait techniquement pas créée.  Kitoe dirait qu'elle avait eu sa chance à la Coupe des Huit, mais ce n'était qu'un événement parmi la dizaine auxquels la Démone avait participé. Un peu jalouse d'être ainsi délaissée, Toki s'était lancée dans une course à l'événement depuis peu. Kitoe n'était pas au courant et s'en fichait pas mal, puisqu'elle vivait régulièrement des choses palpitantes. C'était pourquoi Toki ne lui en avait pas parlé : pour ne pas que sa comparse ne se prenne au jeu et ne creuse l'écart entre elles, voire, pourquoi pas, qu'elle se retrouve au pied du mur lorsque sa Copie l'aurait dépassée de quelques palmarès.

-Rhooo, chut ! Moi aussi je fais de mon mieux.

Elles étaient bien parties pour se bouder l'une l'autre, ce qui n’était pas pour améliorer leur humeur.

-Arrête de râler, c'est toi qui veux tout ça. Lui rappela Toki, qui était mine de rien la plus calme des deux.

La Démone ferma les yeux, tentant de se reconcentrer. Chacune tentait un effort pour éviter une dispute.

-Je râle parce que je fais ça pour Lia et qu'elle est partie.

-Comment ça elle est partie ?

Ça n'avait pas de sens, la petite adorait danser. Kitoe se détacha de son double et s'assit sur une chaise.

-Lia, reviens. Il faut que tu apprennes, si tu veux aller à ce bal.

Kitoe regardait dans le vague. Elle semblait avoir quitté son corps. Toki attendit. En principe, elle ne devait pas intervenir, mais sa Lia à elle était impatiente. Cette dernière avait une idée derrière la tête.

-Si tu reviens pas, je prends ta robe et je vais au bal à ta place !

-Nonnnnn !

La provocation lui avait fait l'effet d'un électrochoc. La Vile bondit sur ses jambes. Il était hors de question qu'on lui prenne sa robe. C'était avec Bellada qu'elle l'avait eue en plus ! Pour rien au monde elle n'était prête à la céder, pas même à son double ! Déterminée, elle reprit les mains de celle-ci et elles se remirent au travail.

-Je compte venir de toute manière. Annonça Toki après un certain temps, un sourire aux lèvres.

-... Quoi ?

Elle venait tout juste de prendre cette décision. Kitoe ne l'en empêcherait pas et elle le lui faisait comprendre par la lueur dans ses yeux et le soupçon d'empathie qu'elle lui insufflait.

-J'en ai marre de rester là tout le temps, moi aussi j'ai envie d'aller au bal. Et puis tant qu'à apprendre à danser, autant que ce soit le plus utile possible.

La Démone cligna des yeux et prit le temps de la réflexion.

-D'accord.

Le silence retomba ensuite, chacune se concentrant sur les pas. Leurs lèvres articulaient les temps sans qu'aucun son ou presque ne s'échappe. Toutes deux commençaient à valser sans faire de fautes. Elles échangèrent les rôles puis passèrent au tango.

-Tu as une idée d'épreuve ? Demanda finalement Kitoe.

L'originale avait déjà la sienne. Elle consistait en une chasse : "Le vainqueur sera celui qui me rapportera le plus beau gibier". L'animal en question finirait dans sa boucherie, évidemment. Toki ricana.

-Oui.

Les deux seraient différentes, mais elle l'espérait, complémentaires.

_

-Bonjour Mad-...

-Dégage.

C'était le jour des résultats. Assise à son bureau, Kitoe regardait défiler les prétendants, la tête posée dans sa paume.

-... Excusez-moi ?

-Je t'ai dit de dégager. T'as perdu l'épreuve.

Elle baissa les yeux sur son parchemin et annota quelques chiffres. Comme elle s'ennuyait, elle faisait la comptabilité en même temps. Ne se consacrer qu’à ces bons à rien était clairement une perte de temps.

-Mais vous n'avez même pas...

-Quoi, c'est cette dinde là ? Coupa-t-elle.

Elle pointa un doigt accusateur sur l'animal, suspendu par les pattes dans les mains du chasseur. Les yeux exorbités, le bec entrouvert, ses ailes à moitié déployées sous l'effet de la gravité, l'oiseau était bien loin de ses attentes.

-C'est un fais-...

-Elle est nulle. En plus elle n’a que la peau sur les os.

-C'est un faisan. Répéta-t-il.

Il était assez vexé. L'oiseau était beau pour son espèce. Puisque ce n'était pas une dinde chopée chez un paysan quelconque, forcément, c'était moins dodu. La Démone ne prit même pas la peine de lever les yeux pour constater son erreur. Elle savait que ce n'était pas une dinde, mais elle n'était au plumage près. Tant que ça ne correspondrait pas à ce qu'elle exigeait, ça ne serait pas bon. Il n'y avait pas de "peut-être".

-Hm. Ça change rien, t'as perdu. Rentre chez toi. Si t'en veux pas, tu peux poser ton oiseau sur la table là, j'en ferai quand-même quelque chose. La sortie est au sous-sol.

-Je suis rentré par la porte derrière moi.

Elle eut un rire et haussa les épaules. Dommage. S'il avait été suffisamment con, elle aurait pu en faire quelque chose de lui aussi. Un peu comme son faisan, la tête en bas. On passa au suivant.

-Bonjour Mademoi...

-C'est ce cerf que vous voulez me présenter ?

-Oui. Belle bête non ? C'est un mâle, abattu ce matin, l'un des plus gros que j'ai eu à chasser jusqu'ici. Il a encore ses bois en plus, vous pourriez en faire un trophée.

Piquée par l'intérêt, Kitoe quitta sa place pour tourner autour de la trouvaille.

-Et vous le portez d'une seule main ?

Le type était grand et musclé, plutôt séduisant. C'était un Démon. Il acquiesça.

-Impressionnant.

Pas vraiment. Kraa était capable de la même chose avec un mégacéros. Mais bon, chacun son truc. Se désintéressant de l'animal, Kitoe tourna autour du chasseur et ne se gêna pas pour tâter ses muscles.

-Vous n'êtes pas mal non plus.

-On me le dit souvent.

Prétentieux. Tout à coup, ça lui sauta aux yeux et elle n'aima pas.

-Revenez demain. Je vais éliminer tous les candidats après vous et nous pourrons parler des choses sérieuses plus tranquillement, qu'en dites-vous ?

Ils se sourirent mutuellement de manière assez hypocrite. Lui devait penser que demain, s'il revenait, il allait la violer et la tuer. En réalité, s'il revenait demain, elle allait le bouffer. Après une longue joute visuelle, le géant finit par quitter la pièce. Kitoe repartit à son bureau, tandis que le suivant arrivait. Cette fois, ce fut un sourire sincère qui illumina son visage.

-Regardez qui voilà.

_

Toki déposa l'assiette devant son invité et ancra ses pupilles dans les siennes. Ils n'étaient que tous les deux.

-Bon appétit. Susurra-t-elle.

Un grand sourire aux lèvres, son visage était très proche de celui du Sorcier. Ses yeux mi-clos le regardaient avec chaleur. Le plat qu'elle venait d'apporter ne contenait qu'une seule chose : un morceau de chair cylindrique long d'une vingtaine de centimètres pour un diamètre d'environ six. La partie la plus fine se prolongeait en s'élargissant brusquement, devenant plus plat, plus tordu. On distinguait cinq ramifications plus ou moins repliées sur elles-mêmes qui se terminaient chacune par une sorte de croûte solide en forme d'amande. L'ensemble de la chair était doré et sèche en surface. Cet avant-bras avait cuit des heures au four. Elle l'avait salé et huilé, mais n'avait rien rajouté d'autre afin d'en conserver les arômes d'origine.
Toki se recula doucement, puis prit place en face de lui. Elle s'accouda et posa son menton dans ses paumes. Elle admirait son petit spectacle avec intérêt, même si l'issue de cette "épreuve", où les autres avaient abandonné d'eux-mêmes – question d'éthique, racontait-on – était évidente. Lorsqu'il s'était présenté, le Reflet était devenu fébrile. Elle avait envisagé de pleurer, ou de se laisser aller à une réaction à peu près aussi stupide. Sa venue l'avait chamboulée, autant qu'elle aurait pu chambouler son modèle.

-J'ai eu peur que tu n'existes pas.

Cet homme était issu d'un rêve. En le revoyant, elle avait ressenti une joie et un soulagement plus grand qu'elle ne l'aurait cru, cependant édulcoré par de la déception : celui qu'elle avait idéalisé dans son songe se révélait moins attrayant que dans son souvenir. Moins bien entretenu, moins charismatique. C'était presque s'il ne la repoussait pas, à certains égards. En tous cas, il repoussait Ellie. Le Reflet se raccrochait au souvenir du songe et à leur désir exacerbé pour adoucir son jugement.

-Je suis contente de voir que ce n'est pas le cas finalement.

Malgré tout, il aurait été dommage que leur relation ne s'arrête qu'à une nuit. Du bout de l'index, elle se mit à dessiner des formes imaginaires sur la surface de la table.

-Dans le rêve tu m'as dit que... Tu voulais être mon fantasme. Elle se leva pour revenir près de lui, s'accroupit pour s'accrocher au rebord de la table. Elle pétillait, à la manière d'une enfant à qui on avait promis un chiot pour l'anniversaire. C'est vrai ?

Ses idées se bousculaient dans sa tête, si vite et en une telle quantité qu'elle ne pouvait même pas les évoquer. Elle savait juste que si tel était le cas, alors elle avait plein de projets pour lui. Toki prit une inspiration.

-Je voudrais qu'au bal, tu sois le plus bel homme avec qui je puisse danser.

Il pouvait faire ça pour commencer, non ? Comme ça, ils seraient tous les deux beaux et elle serait comme une princesse au bras d'un prince. C'était tout ce qu'elle demandait pour une soirée parfaite. En se redressant, elle reprit tout à coup en maturité.

-Moi aussi j'aimerais bien devenir le fantasme de quelqu'un. Laissa-t-elle entendre.

Elle avait ce sentiment qu'il pourrait être le sujet parfait pour ça. Kitoe voulait le rendre dépendant d'elle.

-Et je voudrais te dire un secret. C'est important.

Elle s'approcha encore plus de son oreille pour que sa voix ne soit plus qu'un souffle. Elle faisait attention à ne pas le toucher. En fait, elle n'avait établi aucun contact physique depuis leurs retrouvailles, et les Aetheri savaient à quel point c'était difficile pour une fille aussi tactile qu'elle. Mais c'était intentionnel. Pour lui donner envie à lui, et à elle aussi. Créer des fantasmes demandait des sacrifices.

-J'aurai un autre prénom. Il y a des gens que je ne veux pas risquer de croiser.

Elle s'écarta, n'en dit pas plus. Finalement, elle aimait bien se prendre à cette sorte de jeu avec lui. Se rendre mystérieuse, en quelques sortes importante, l'amusait.

-C'est juste pour le papier. Après, tu pourras m'appeler comme tu le souhaites.

Tant que l'on ne faisait pas entrer deux Kitoe Idael dans la même soirée, ça lui allait.

1810 mots



Bijin
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Latone
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Latone
Ven 20 Aoû 2021, 16:09




Hé, morveuse !

Prête pour ta fessée ?

Je suppose que tu as déjà tenté de déchirer la lettre et que, malheureusement pour toi, tu as fini par te rendre compte qu'elle reprendrait son état initial systématiquement. Dès que tu auras calmé tes nerfs, tu pourras continuer la lecture.

Bien. Tu as aimé mon dernier cadeau ? Cette Alfar a bien failli te tuer, c'était intéressant de te regarder te prêter au jeu du chat et de la souris. Nous devrions tester un jour. Oh, ne t'inquiète surtout pas : je t'enverrai d'autres engeances te malmener la Vie. Il faut bien la pimenter un peu pour la mériter !

Cela étant, j'ai une proposition à te faire. Tu dois être au courant qu'un bal se tiendra à Lagherta. Ce ne doit pas être dans tes plans d'y aller, mais je pense que c'est l'occasion pour toi de tuer quelques Mayfair. Voire l'Empereur Noir en personne. Cela te plairait, n'est-ce pas ? Je te promets d'être ton cavalier et te garantir l'entrée, si tu parviens à surmonter mon épreuve.


Les détails qui s'ensuivirent n'aidèrent pas la Bleue à se calmer.

~~~

Charras en mettait du temps. Ce n'étaient pas les Réprouvés qui manquaient à Ciel-Ouvert, Latone pourrait choper n'importe lequel pour rameuter toute la troupe ! Mais pour le bien de son souhait, elle n'avait eu d'autres choix que de se rabattre sur les relations de la nouvelle Hurabis. Après mûre réflexion – et surtout de nombreuses tentatives infructueuses – la Bleue voulait bien s'en remettre au jugement des Réprouvés. Leur soif du combat leur fera sans doute relever le défi, même si les chances semblaient minces selon Cicataz. L'Ygdraë était catégorique : une catastrophe se préparait si la Hurabis Latone ne faisait pas machine arrière. Tant mieux, la Bleue aimait bien les catastrophes. Puis bon, s'en remettre à Cicataz revenait à se poser cette question : devait-on croire un génie incompris ? Soit elle visait parfaitement juste, soit elle se retrouvait complètement à côté de la plaque. C'était ainsi avec l'Ygdraë : du pile ou face pur et dur. Parmi les Guides, Latone était la seule qui ne craignait pas ses inventions, d'autant plus qu'elles impliquaient les propres productions de la Bleue. Bien évidemment, la Kirzor s'était gardée de révéler le caractère divin de ses poires, seulement étonnée que sa camarade Marcheuse semblait capter leur importance. Les Juns pourraient être bien plus que les composants de sobres plats ou de son jus favori. À chaque fois qu'elle-même en consommait, Latone se sentait plus vivante, davantage détachée de sa précédente condition. Ce poirier lui apparaissait comme une clé, un moyen d'atteindre des sommets. Il lui fallait juste les bons éléments en main pour le prouver. Malheureusement pour elle, Cicataz entrevoyait bien mieux ce genre de détails.

" Ça va être une première ! J'ai si hâte ! L'inventrice trépignait sur place, accoudée derrière le comptoir du fleuriste. Les résultats ne furent pas probants sur ma propre personne, mais sur le corps musclé et saillant d'un Réprouvé, ma potion va produire un miracle ! " Latone se gratta le crâne, de moins en moins convaincue par son enthousiasme. Au moins, ils serviront de cobayes. Puis qu'elle-même avait refusé de tester.

" Qu'est-ce que t'as changé dans ta recette pour que ça marche enfin ? "

" En plus de ton jus de poire et de quelques ingrédients de mon cru, j'ai rajouté une graine brute de ton poirier, qu'un agent dissolvant se charge alors de stabiliser avec le reste des composants. Il ne faut pas réduire en poudre la graine avant de la rajouter, j'ai découvert qu'il fallait vraiment que le mélange se fasse dans la matrice ! " Ça n'a aucun sens. Pour la Hurabis, en tout cas.

De toute manière, que les avantages conférés par la potion furent visibles ne faisait pas parti de ses priorités. Tout ce qui importait à Latone, c'était de remporter le défi lancé par Jun. En vérité, elle se fichait pas mal de pouvoir s'infiltrer au bal sur Lagherta, les Sorciers n'auront qu'à attendre leur tour pour le jugement de la Marche. Non vraiment, tout ce qu'elle cherchait à accomplir, c'était d'impression Jun. Il n'y avait aucune dette émise, seulement une volonté tacite d'être à la hauteur de son offrande. Sa Vie, elle le dédiera à une cause toujours plus grande, toujours plus haute. Jusqu'au jour où Latone pourra lui coller une belle fessée, à ce sacripant.

Alors que la Kirzor se contait divers scénarios où le Taiji mordait la poussière sous son implacable courroux, leurs fameux cobayes pointaient enfin le bout de leur nez. Charras les enjoignit à rentrer à l'intérieur de l'établissement, fermé à la clientèle pour cette occasion spéciale. À l'intérieur, les arômes florales frappaient avec force, presque trop invasifs pour quiconque à l'odorat un brin sensible. Lorsque l'odeur fut surmontée, le regard était alors happé par les étagères remplies de différents bocaux, la grande majorité dédiée à la consommation de poires. Son jardin n'étant pas encore bien grand pour faire pousser d'autres fruits, le commerce s'en fera sa spécialité pour quelques temps. Quoi qu'il en soit, l'Orisha remarqua bien vite cette lueur d'intérêt dans les yeux de ces Bipolaires, venus tout droits de Bouton d'Or. Ils étaient les proies parfaites pour son commerce et son expérience. Les présentations faites, sommaires, la Bleue ne tarda pas une seconde pour les attirer dans son piège, impatiente à l'idée de se pavaner, victorieuse, face à Ezechyel.

" Et c'est pourquoi je vous ai invités à cette dégustation spéciale. Si vous vous livrez à l'expérience de mon amie ci-présente, à savoir tester sa nouvelle potion à base de mon jus de poire, vous repartirez avec une palette complète de notre spécialité, gratuitement ! "

Les Réprouvés adoraient les défis, ils ne pouvaient qu'accepter.

" Attend une minute. Il faut qu'on boive ta potion fabriquée à partir de ton "jus de Jun", c'est ça ? "

" C'est ça ! "

Latone était si souriante, si avenante. Sa gaieté se décomposa néanmoins lorsque la bande de brutes se mit à rire de plus en plus fort, multipliant les moqueries à son égard. Bon sang, ils étaient beaucoup moins benêts que ce qu'elle escomptait. Elle avait rêvé d'un Réprouvé pourtant, celui du dîner-là, et lui au moins avait épanché sa soif avec le jus de poire, et son propre jus ! Furieuse, l'Orisha grinça des dents et les deux Marcheuses présentes surent que cela irait de mal en pis. D'un coup sec sur un meuble, elle réduit à néant leur hilarité.

" Ah ouais ? T'es une lavette ? " Une veine apparente sur sa tempe montrait son humeur massacrante.

" Je ne suis PAS une lavette. " Cicataz se fit un peu plus petite derrière le comptoir.

" T'es pas capable de boire ça à cause de son nom : t'es une lavette. Les deux titans en vinrent presque à coller leur front. Je vais aller chez toi et étiqueter toutes tes réserves d'alcool avec "Jun", tu t'enfermeras alors dans ta misérable existence de lavette, incapable de surmonter trois pauvres lettres. Tu ne sais peut-être pas lire mais rien que de t'imaginer marqué par l'Empereur Noir me fait trop rire ! "

Prenons un moment pour être tous surpris que Latone, la furie ambulante en personne, ait préféré user de sa plaidoirie comme arme, plutôt que son poing. Car contre toute attente, il céda.

" Donne-moi ta merdasse. "

Aussi changeante qu'une Bipolaire, l'Aäsho démontra son ravissement en se chargeant elle-même de la dégustation, même si l'Ygdraë aurait adoré être à sa place. Mais bon, depuis son point de vue avec un simili de barrière en cas d'échec, ce n'était pas plus mal de laisser la Bleue se confronter au danger. Ladite potion ne renfermait qu'une petite quantité de liquide. On pourrait presque la confondre avec le jus du poirier, mais une analyse plus profonde de l'aspect laissait entrevoir comme des scintillements à sa surface, des sortes d'étoiles qui détonaient silencieusement dans la matrice. La brillance de la potion et son coloris tendant plus vers le rouge la rendaient unique. Malgré tout, ce qui les intéressa toutes, c'était le résultat après ingestion… Pour tout dire, lorsque le goûteur se mit à devenir rouge et hurler comme un détraqué sur place, Charras crut avoir affaire à un pétage de câble à la Réprouvée, comme à la maison. Pourtant, il sembla se contenir et grandement impressionné par la nouvelle forme qu'il subissait entre guillemets.

" OH ! Oooh ! J'ai un trop plein d'énergie, c'est incroyable ! Il regarda ses mains à tour de rôle, béat. J'ai l'impression que je peux toutes vous pilonner et vous casser la gueule, en même temps ! Latone chercha dans le regard de Cicataz si cela faisait partie des effets secondaires ; apparemment non, c'était attendu. C'est super, vraiment super ! Il s'enquerra avec ses camarades, assez bref. Mais on n'embarquera pas pour autant ton jus tant qu'il portera ce nom. Latone serra des dents. C'est comme ça : ça ne se vendra pas chez nous. C'est comme proposer du jus d'Asmodée aux angelots. Elle… comprenait la référence, forcément. Change le nom et on accepte de faire affaires. "

La condition de Jun fut pourtant de leur vendre cette merveille sans altérer son nom d'origine. Les natifs de Bouton d'Or s'avéraient encore plus têtus qu'elle. Fichtre… Elle avait perdu, car le jus de Jen se popularisera chez leurs rustres voisins.


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By Jil ♪
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Astriid
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Astriid
Lun 23 Aoû 2021, 12:55

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Parfois, il y a des morts
Astriid & Lucius





Un ruban d'un bleu océanique entre les dents, Astriid était aux prises avec une robe qu'elle tentait de retoucher avec l'aide de Solenn. La concentration creusait des sillons sur son front et son épaisse toison cuivrée avait été remontée sur sa tête en un chignon maintenu par un crayon épais. «Alors, vous vous en sortez ?» Les interrogea Valÿn en se rapprochant de la table. «Chut !» Soufflèrent Astriid et Solenn en même temps avec des airs de poules en colère. Valÿn battit en retraite en levant les mains. «D'accord d'accord.» La rousse inspira profondément et sans interrompre le mouvement régulier de son aiguille sur l'ourlet, elle reprit sur un ton plus égal. «Excuses-moi. Je ne veux surtout pas me rater. Solenn est déjà bien gentille de me prêter une de ses robes pour le bal, je ne voudrais pas la ruiner par inadvertance.» L'Ygdraë lui fit signe que c'était oublié. En plus d'être une Ygdraë expérimentée qui les guidait, Solenn se révélait d'une générosité sans bornes pour les Eskëts qu'elle surnommait parfois affectueusement "ses enfants". Discrètement, il fit un clin d'oeil à l'Ildra qui comprit aussitôt et prit des mains d'Astriid son ouvrage. Alors que cette dernière allait protester, Valÿn lui prit ses mains et l'emporta hors de sa chaise. «Mais la robe...» Commença la rousse avant qu'il ne la fasse taire d'un doigt sur ses lèvres. «Je crois que tu as besoin de te détendre. Allons, montre-moi comment tu valses.» Renonçant avec un sourire vaincu, elle accompagna les mouvements lents de son ami, laissant son corps se souvenir des pas basiques qu'ils avaient appris récemment.
«Agrou ?» Piäh Nour s'était arrêté pour les regarder avec intérêt, une patte en l'air. Un éclair de malice étincela dans ses iris noirs. «Agrou !» Affirma-t-il avant de se ruer sur la table dans l'idée de prendre son élan pour rejoindre sa maîtresse. Instantanément, ce fut le chaos. Tous se mirent à hurler des imprécations, le Kinshäla paniqua et agrippa plus fermement ses griffes sur la robe. Voyant les Ygdraës fondre sur lui, il émit un rire rauque en croyant à un jeu et sauta au sol, entraînant tous les travaux de couture avec lui. Les pattes empêtrées dans les tissus, une floppée de rubans dans la gueule, il se mit à courir agilement entre les jambes des Elfes. D'un bond prodigieux, l'animal sauta dans le coffre immense qui habillait l'un des murs de l'appartement. Astriid poussa un rugissement victorieux et se jeta sur lui, les mains en avant pour attraper le chapardeur. Ce dernier gloussa et sauta sur le côté au dernier moment tandis que l'Ygdaë basculait dans le coffre tête la première. Sous le choc de sa chute, le couvercle vacilla avant de se refermer sinistrement sur l'Eskët qui poussa un petit cri étouffé. Des promesses de revanche sur les lèvres, elle poussa sur le battant en bois pour jaillir hors du coffre, complètement échevelée et recouverte d'étoffes froissées.
Ennuyée, Astriid souffla fort sur le tissu pour le faire glisser de sa tête. Son regard tomba alors sur un jeune homme, planté au milieu d'une pièce qui n'avait plus rien à voir avec son appartement. Bouche bée, elle le dévisagea. Réalisant qu'elle commençait à ressembler à un poisson avec un quotient intellectuel à un chiffre, elle se reprit et un sourire vint éclairer son visage. «Salut ! Je suis Astriid !» Sans marquer la moindre gêne, elle tourna sur elle-même pour inspecter les lieux et ses doigts rejoignirent son menton alors qu'une mine songeuse s'imprimait sur ses traits. «Mmh. Etrange. On est où ?» Interrogea-t-elle Lucius avant de plisser les yeux en le regardant. D'un pas, elle se rapprocha de lui pour mieux discerner ses traits. Le visage levé vers lui, ses yeux se plissèrent sous l'extrême concentration qui incendiaient ses neurones. «Je t'ai pas déjà vu quelque part ? Ou peut-être pas.» Elle plaqua ses poings sur ses hanches. «Etrange.» Répéta-t-elle avant de froncer son nez. Elle recula ensuite d'un pas et se mit à rassembler les tissus colorés qui étaient tombés au sol. «Je suis désolée de débarquer comme ça, ce n'était pas volontaire. C'est ce maudit animal, je le poursuivais et... » Elle soupira sans terminer sa phrase. L'Ygdraë commençait à être habituée à se voir téléportée sans raison, les Aetheri savaient où. Se poser des questions ne lui apportaient que des migraines et de toute façon, connaître les réponses ne lui permettraient pas de faire cesser ces interruptions soudaines dans sa vie. Il fallait s'en accommoder avec le sourire et tout se passerait pour le mieux. «La robe de Solenn est fichue.» Se lamenta-t-elle pour elle-même en étreignant la robe dans ses mains.
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Astiid tendit les bras devant elle pour porter un regard critique sur la robe. «Oui, j'imagine.» Marmonna-t-elle sans conviction avant de la rejeter négligemment dans le Coffre. Froissée pour froissée, ça ne changeait plus grand chose. Solenn avait de l'or dans les mains, et avec l'aide de la magie, elle serait sûrement capable de sauver le tissu abîmé. De plus, l'Elfe venait de trouver plus intéressant que le morceau d'étoffe. Croisant les bras, elle se tourna vers le jeune homme qui venait de décliner son identité. Elle avait déjà entendu le nom Paiberym à plusieurs reprises, que ce soit dans les journaux ou au détour de quelques conversations entendues dans les lieux publics. C'était un nom sujet à de nombreuses rumeurs. Cela expliquait peut-être pourquoi son visage lui était légèrement familier. «Effectivement. Vous y allez aussi ?» S'enquit-elle poliment en résistant à la tentation de le dévisager davantage bien que ses longues oreilles s'agitassent légèrement, traduisant son intérêt. L'Ygdraë avait opté à son tour pour le vouvoiement. Elle réalisait que sa familiarité excessive se conjuguait mal avec le fait de discuter avec un des membres de la noblesse magicienne. Avec un inconnu tout simplement, se reprit-elle en son for intérieur, se remémorant de la réprimande de Neah. Le souvenir restait cuisant dans sa mémoire et depuis ce jour, elle prêtait plus d'attention aux conseils de Raïm et des Ygdraës de son groupe. Elle se fustigea mentalement ; une fois encore, elle avait manqué de méfiance devant un inconnu. «Je pense que oui. Il suffirait que j'essaie de retourner dans le Coffre et de voir ce qu'il se passe.» Répondit-elle sur un ton léger en tapotant le meuble comme elle l'aurait fait avec un chien fidèle. «Et si ça ne fonctionne pas...» Elle haussa les épaules. L'idée de ne pas pouvoir revenir d'où elle venait ne semblait pas l'inquiéter outre mesure et elle ne fit guère attention au trouble soudain du jeune homme. «C'est gentil, merci beaucoup.» Fit-elle en lui adressant un sourire éclatant tandis qu'il bafouillait. Elle était un peu surprise par son côté candide qui, bien qu'adorable, lui donnait surtout envie de le taquiner pour le voir perdre davantage ses moyens. D'ordinaire, c'était d'elle qu'on se moquait gentiment. «Faim ?» Elle frotta son ventre en s'accordant quelques secondes de réflexion. Sagement, elle croisa les mains dans son dos. «Non, je ne voudrais pas vous déranger davantage. J'ai déjà fait irruption dans votre chambre, je ne voudrais pas abuser de votre gentillesse. Je ne devrais même pas être là. Même si j'admet que c'est bien utile d'être déjà à Lagherta sans avoir besoin de voyager. » Ajouta-t-elle avec un petit rire. Elle songea que Raïm serait fier d'elle. Il avait réussi à lui inculquer un vernis de politesse et de connaissances sur l'étiquette qu'il lui faudrait observer au bal. Des habitudes, lui avait-il dit, qu'elle serait bien inspirée de conserver dans sa vie de tous les jours. Il y a quelques mois, elle aurait certainement accepté l'offre de Lucius et serait peut-être déjà installée sur son lit, en attendant sans honte qu'il lui apporte à manger. A la place, elle positionna sa paume vers le plafond et après quelques secondes de concentration, une poignée de chamallows d'un rose poudré apparurent. «En revanche, je n'ai jamais besoin d'avoir faim pour une petite sucrerie. Tenez, c'est pour vous. Pour me faire pardonner de mon intrusion.» Enfournant elle-même un des bonbons moelleux dans sa bouche, elle observa Lucius en mâchant rapidement, à la manière d'un écureuil.
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«Un dragon ?» Répéta Astriid, un air hébété peint sur le visage. Elle cligna des yeux pour se reprendre. Il avait dit ça de manière si désinvolte qu'elle cru s'être méprise sur le sens de ses mots. Lucius ne collait pas avec l'image qu'elle se faisait des Dragonniers. Issu de son imagination fertile, et souvent erronée, elle les voyait taciturnes et sauvages. À l'inverse, l'homme en face d'elle éclatait d'innocence et les réactions ingénues éclairant son visage adulte donnaient à l'Elfe une curieuse impression de décalage. Ce n'était pas pour lui déplaire, elle-même n'était pas aussi mature que son âge ou sa race le suggérait. «Je n'y ai pas encore réfléchi.» Répondit-t-elle en le suivant. En fait si. Mais le sujet la contrariait légèrement et elle l'avait laissé de côté. Elle avait assumé que Välyn se proposerait mais sans qu'elle comprenne bien pourquoi, son ami avait décidé d'y aller avec Aëvanna. Peut-être préféraient-ils rester entre Cyraliels ? Peut-être ressentaient-ils des sentiments l'un pour l'autre et elle avait été aveugle tout ce temps ? Poser ces questions à Välyn exigeaient un moment d'intimité mais ces derniers se faisaient trop rares et la finalité serait la même. Raïm et Daràdir ne voulaient pas aller au bal et il ne restait à la rousse qu'un désagréable goût amer dans la bouche. «Merci.» Fit-elle en prenant la tenue qu'il lui prêtait. Elle alla ensuite s'asseoir sur un petit pouf et le regarda se changer. Elle songea, amusée, qu'un oeil extérieur y verrait une scène de ménage d'un couple se préparant à rejoindre la chambre pour la nuit, sauf qu'ils étaient des inconnus l'un pour l'autre. Ses marmonnements portant jusqu'à elle, elle lui lança avec une moue malicieuse : «Ça vous va très bien. Il y a presque de la place pour deux dedans.» Elle gloussa un peu bêtement. Son haut trop grand renforçait l'impression de petit garçon qui se dégageait de ses manières attendrissantes. Etrangement, il éveillait en Astriid le désir de passer sa main dans ses cheveux pour le décoiffer. À la requête du brun, elle porta la main à ses oreilles, surprise. «Ah euh. Oui si vous voulez.» Elle tressaillit involontairement au contact étranger sur ses longues oreilles et se sentit rougir légèrement. «Désolée, elles sont un peu sensibles.» Elle croisa brièvement son regard et gênée, elle fourragea dans ses cheveux pour que leur volume dissimule plus efficacement ses oreilles avant de se lever. «C'est la seconde fois qu'un Magicien m'invite à rester dormir. C'est agréable de se sentir si chaleureusement accueilli quelque part.» Remarqua-t-elle, heureuse du changement de sujet offert par le Magicien. Son propre peuple était plus réticent à se montrer si ouvert envers des étrangers et elle trouvait cette spontanéité rafraichissante. S'ils étaient tous aussi charmants qu'Asra et Lucius l'étaient, Astriid était prête à s'établir parmi les Mages Blancs. En vérité, elle n'avait pas envie d'essayer tout de suite de déceler le mécanisme activant la Magie du Coffre qui la renverrait auprès des siens.
Allongée sur le lit, Astriid avait les yeux grands ouverts. Ses prunelles suivaient attentivement les lentes volutes reflétées par les rayons de lune au gré des errances des nuages. Elle lissa soigneusement pour ce qui devait être la quinzième fois les draps propres sur son corps. Raïm et les autres devaient se faire un sang d'encre et elle se sentit vaguement coupable. Elle n'était pas vraiment en danger et il était bien plus amusant d'être avec Lucius. Ils ne se connaissaient pas et pourtant, elle se sentait bien avec le Magicien. Il était comme elle, il ne réfléchissait pas, il était juste heureux de vivre et son une aura lumineuse l'attirait comme la flamme capture le papillon. Constatant le chemin qu'avait à nouveau prit ses pensées, elle roula sur le ventre et grogna dans l'oreiller, la robe pyjama s'entortillant autour d'elle. Le vrombissement aigu d'un moustique près de son oreille acheva de l'agacer et elle rejeta brusquement les couvertures avant de se glisser hors du lit. À pas de loup, l'Ygdraë parcourut le couloir, cherchant la chambre de Lucius à tâtons. Elle s'y engouffra et souffla doucement : «Lucius ?» Discernant sa silhouette sur le lit, Astriid s'approcha à petits pas rapides : «Je vous ai réveillé ?» Elle chuchotait fort, l'idée étant d'effectivement, le réveiller. Elle s'installa au pied du lit, cherchant à percer les ombres pour voir le visage de Lucius. «Je n'arrive pas à dormir.» Dit-elle, statuant l'évidence. Elle coinça une mèche derrière son oreille avant de tordre l'ourlet de sa robe, cherchant ses mots. D'une voix chargée d'espoir, elle se lança finalement : «Je pensais, si vous n'avez pas encore de cavalière pour le bal, est-ce que vous accepteriez de participer à mon épreuve ? Je sais qu'on ne se connaît pas mais je vous aime bien. Et je ne vous monopoliserai pas toute la soirée, ce sera un moyen pour tous les deux d'aller au bal ! Et j'aimerais beaucoup y aller avec vous.» À la faveur de la nuit, il était plus facile d'énoncer certaines choses. Elle ne voulait pas avouer qu'elle n'avait pas d'autre alternative, tout d'abord car elle ne voulait pas le vexer, ensuite car elle était sincère. Et s'il devait refuser, son humiliation appartiendrait à la pénombre. «J'ai déjà une idée d'épreuve, je pense qu'elle vous amuserait !» Elle marqua une pause avant d'ajouter, hésitante : «Enfin, seulement si vous le voulez.»
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«Raïm était fou de rage. C'était pas beau à voir.» Astriid haussa les épaules. «Comme d'habitude non ?» Valÿn croisa les bras et s'efforça de prendre un ton sévère. «Justement ! Tu ne peux pas t'empêcher de faire ça, hein ?» Elle feignit de ne pas comprendre. «De quoi tu parles ?» «T'es toujours en train de disparaître on ne sait où, tu ne peux pas essayer de faire attention ? C'est la première mission de Raïm en tant que Braskä, tu ne lui facilites pas les choses.» Astriid exhala un soupir et ancra ses yeux dans ceux de son ami. «Ce n'est pas comme si je faisais exprès. Et puis il ne m'est rien arrivé. Lucius était très gentil.» «Et il ne m'ennuyait pas avec ses questions et sa morale.» ajouta-t-elle in petto. «Mais tu es restée absente toute la nuit !» Insista l'Eskët sans remarquer que la rousse s'assombrissait de seconde en seconde. «Bien sûr que oui puisque j'ai dormi avec lui.» Satisfaite, elle le vit ouvrir, puis refermer la bouche sans qu'aucun son n'en sorte. Qu'il fasse donc les conclusions qu'il voudrait, pensa-t-elle, surprise de sa propre perfidie. Il parut blessé et elle s'en voulut. Elle n'avait pas besoin de lui dire qu'elle avait dormi avec le Magicien, surtout qu'il ne s'était rien passé. Son geste l'avait prise par surprise et elle avait rougi avant de réaliser qu'il s'était rendormi aussi sec. Utiliser cette information tout en suggérant autre chose était indigne d'elle et de l'amitié qui la liait à l'Elfe aux cheveux gris. Elle ne savait pas ce qui lui prenait mais récemment, sans même y réfléchir, ses mots étaient aussi pointus que des flèches. Était-ce le résultat de sa jalousie qu'il n'aille pas au bal avec elle ? Impossible, elle ne lui en tenait plus rigueur. «Je suis désolée, je...» «Ça ne fait rien !» S'empressa-t-il d'ajouter pour lui couper la parole. «Tu as raison, je me suis montré indiscret et tu fais ce que tu veux.» Il tourna les talons après un sourire qui se voulait rassurant et Astriid se mordit les lèvres, la culpabilité lui étreignant le coeur.

«Tu es sûre de toi ?» Raïm fixait l'Elfe avec suspicion. «Mais oui ! Il a dit qu'il serait là !» Il se renfrogna avec un air buté. «Mais on ne le connaît pas.» «Mais si, son nom de famille c'est Paiberym.» Expliqua-t-elle patiemment. Il réfléchit en frottant son collier de barbe avec son index. «Paiberym... Comme le baron ou le marquis là ?» «Euh... Oui je crois oui.» Fit-elle distraitement. Pourquoi la harcelait-il avec son interrogatoire ? S'il s'inquiétait tant, il n'avait qu'à l'accompagner au bal en tant que cavalier, songea-t-elle en fronçant les sourcils, bien qu'elle soit satisfaite qu'il n'en fit rien. Il aurait certainement refusé de danser toute la soirée et l'aurait empêchée de s'amuser. Lucius serait un partenaire bien plus agréable avec qui elle était certaine de passer un moment mémorable. C'était son premier bal et il était hors de question qu'on la prive de cet évènement. «Et admettons qu'il vienne, si c'est quelqu'un d'autre qui remporte ton épreuve ?» Astriid marqua une pause. «Je n'avais pas pensé à ça.» Reconnut-elle et Raïm la considéra en soufflant si fort par le nez qu'elle jura avoir vu un morceau suspect en sortir. Grimaçant, elle s'éloigna de l'ombre dispensée par le géant. «Tu as prévu quoi pour ton prince charmant ?» Un sourire radieux éclaira le visage d'Astriid tandis qu'elle ignorait sa pique. «Un concours de déguisement !»

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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Lun 23 Aoû 2021, 13:04



Parfois, il y a des morts


« Je comprends pas pourquoi c’est lui qui y va avec elle… » soupira Sjar. Je le regardai tendrement. C’était pour le mieux. Je n’avais pas pu lutter contre la stratégie adoptée par Érasme. Je ne l’aimais pas, pas plus qu’il me portait dans son cœur, mais je n’avais pu me résoudre à le laisser continuer dans cette voie-là. J’avais l’impression de m’être fait manipuler, et c’était le cas, mais qui aurait accepté de gagner dans ces conditions ? Je baissai les yeux et soupirai en passant une main sur mon visage. J’aurais volontiers souhaité m’envoler sur Azur, convaincu que m’évader dans les cieux m’aurait aidé à fuir cette réalité qui me dépassait. Comment quelqu’un pouvait-il arriver à de telles extrémités ? Je me sentais impuissant face à lui, parce qu’il était déraisonnable. J’avais essayé de le convaincre mais il n’avait rien voulu entendre. Il désirait accompagner Eméliana et cette envie avait tout emporté, comme un tsunami ou l’explosion d’un volcan. Et il y avait ce malaise de plus en plus prégnant entre nous. Lors de cette épreuve, nous avions été si proches que je l’avais sentie, cette chose en moi qui s’agitait. « Ne t’inquiètes pas, Sjar. On aura d’autres occasions d’aller à un bal ensemble, elle et moi. » « Oui mais lui il est méchant ! » « Elle ne se laissera pas faire. » lui répondis-je. « Même ! Il mérite même pas ! » L’Humain fit la moue, ce qui m’arracha un sourire. « Ne t’en fais pas. Occupe-toi de conduire ta propre cavalière au bal. » Ses yeux s’illuminèrent soudain et il commença à me raconter l’épreuve et comment il l’avait gagnée. Il était fier.

De retour dans ma chambre, je fermai la porte et m’appuyai contre celle-ci, dépité. Mon père possédait des terres sur Lagherta, ce qui m’avait permis de m’y rendre accompagné de mes frères et d’Ida sans dépendre de la Couronne sorcière. Je soupirai, repensant à ce qu’il s’était passé. Érasme me déplaisait à un point tel que je ne savais que faire des sentiments que je nourrissais à son égard. Je n’avais pas envie de le tuer mais je sentais que mon corps cherchait à le repousser ou à se tenir le plus loin de lui possible.

Alors que j’avais commencé à m’avancer vers mon coffre pour changer de vêtements et en enfiler de plus propices à la nuit, un bruit étrange se fit entendre, suivi par l’apparition d’une fille. J’écarquillai les yeux, incertain. Au début, je pensai à Eméliana mais constatai que ce n’était pas elle. Seule la teinte de leurs cheveux était identique. « Euh… ? » Elle ne semblait pas bien sauvage, ni mauvaise. Par rapport à Érasme, un Démon aurait paru convenable. Néanmoins, je fus rapidement rassuré et me permis même un rire, constatant son état. « Sur Lagherta. » dis-je, alors qu’elle s’approchait déjà. « Qu’est-ce que… ? » Elle ne semblait pas avoir entendu parler de la distance réglementaire entre deux individus étrangers. C’était curieux, qu’elle apparût ainsi dans ma chambre. J’étais pris entre deux eaux, entre l’étonnement et l’envie de rire à cause de son comportement et de ses mimiques. Je fixai sa robe. « Je pense que ça peut être rattrapé non ? » Je n’y connaissais rien. Ce que je sus, c’est que mon pyjama n’était plus dans mon coffre. J’avais donc échangé, sans le vouloir, mes habits contre une fille. « Oh pardon. » murmurai-je, en remarquant que je ne m’étais pas présenté. « Je suis Lucius Paiberym et nous sommes ici dans la maison de mon père. Vous hum… Astriid, c’est ça ? Cette robe, c’est pour le bal, n’est-ce pas ? Et… » Comment dire ? « Vous êtes arrivée ici par ce coffre ? Je veux dire… Pouvez-vous repartir ? » Je blêmis. « Pas que je veuille vous mettre dehors, absolument pas. Vous pouvez rester dans ma chambre si vous voulez… Enfin… Dans ma chambre, pas obligatoirement. Je veux dire, il y a d’autres chambres ici. » Entre l’enfant et l’adulte, je n’arrivais pas à trouver une juste place. L’enfant aurait adoré qu’elle dormît avec lui. Mais l’adulte comprenait que ce n’était pas convenable. Disons qu’avec un corps comme le mien, je ne pouvais pas lui demander de jouer avec moi et de partager mon lit. « Vous avez faim peut-être ? »

______________________________________

« Oui. » lui répondis-je, même si l’envie n’était plus aussi forte qu’avant. J’avais réellement pensé y aller avec Eméliana mais les choses ne s’étaient pas passées comme prévu. En soi, ça n’aurait pas été grave si son cavalier actuel n’avait pas été aussi dérangé. Heureusement, la Sorcière semblait réussir à le contenir, mieux que moi. « Si je réussis une épreuve. » précisai-je. « Sur Lagherta, il y a quelques Magiciennes mais… » Réta souhaitait que je participasse à son défi. Je doutais que ce fût une bonne idée. « Je ne sais pas, il faudra que je me renseigne demain, avant que toutes les femmes aient un cavalier. Sinon… » Sinon je n’irais pas, même si je ne savais pas si c’était possible, étant donné que je devais danser avec l’Impératrice Blanche. « Sinon j’irai observer la faune et la flore. L’île est surprenante. » Je me dis qu’elle aimerait peut-être se promener en ma compagnie le lendemain, pour découvrir l’endroit avec moi. Elle avait de longues oreilles qui s’agitaient de temps en temps. C’était mignon. En réalité, plus je la regardais, plus j’avais l’impression de la connaître. Je devais me tromper.  

Je pris une friandise, en la fixant d’un œil curieux. Elle était amusante. « Merci Astriid ! » lui dis-je, avant de manger moi-même la guimauve sans me méfier. « C’est super bon ! » m’exclamai-je, à la manière d’un enfant. « Enfin, je ne vais pas en abuser sinon mon Dragon ne pourra jamais me porter. » Je souris, taquin. C’était un essai de plaisanterie. Que je prisse vingt kilos ne changerait rien pour lui. De toute façon, pour le moment, je ne pouvais pas voler seul. J’étais impatient mais brûler les étapes ne m’apporterait que des accidents consécutifs. Il fallait que je m’habituasse à ces animaux mais également aux conditions en altitude. « Donc… » Je m’approchai du coffre et l’inspectai. « Mon pyjama n’est vraiment plus là. » Je me retournai vers elle. « Ce n’est pas grave, je vais aller en chercher un autre dans la salle qui sert de penderie. Je pourrais vous en trouver un aussi, si jamais vous ne pouvez pas repartir, ou ne voulez pas. » Je la fixai. « C’est drôle parce que… J’ai vraiment l’impression que… » Non, je ne pouvais pas dire qu’il y avait cette impression persistante de la connaître. Ce serait gênant. « Euh… En fait… Vous y allez avec quelqu’un, vous, au bal ? »

Je lui fis signe de me suivre dans le couloir. Une fois devant la bonne porte, j’entrai dans la pièce et fouillai parmi les vêtements entreposés là. Je lui tendis une tenue pour la nuit et lui souris. « C’est à Dulcidée mais je ne pense que ça ne la dérangera pas. » Je me dirigeai vers les vêtements de mon père. La maison n’était pas encore pourvue pour moi étant donné ma croissance rapide. Puisque mes habits avaient été engloutis, c’était la seule solution de rechange que j’avais. Je pris un haut à manches courtes, enlevai le mien et le remplaçai par celui-ci. « C’est un peu large mais ça ira. » fis-je, à voix haute. Pour le bas, j’attendrais d’être seul. Je levai les yeux vers elle. Ses oreilles ressortaient entre ses mèches rousses. Elle ressemblait à Eméliana mais son visage était plus doux et ses yeux avaient quelque chose de pétillant et d'agréable. Je ne pouvais pas douter de sa gentillesse. Elle se ressentait. Je restai silencieux un temps, à l'observer, avant de reprendre la parole. « Dîtes… est-ce que je peux toucher vos oreilles ? » demandai-je soudainement. Je regrettai la question au moment même où je la posai. Être grand, c’était difficile. Il fallait faire attention à tout. « Si ça ne vous dérange pas. » dis-je rapidement, avant de changer de sujet. « Il y a une chambre vide, deuxième porte sur la gauche en sortant. Vous pouvez l'utiliser si jamais. »

______________________________________

Je m’endormais souvent vite. Je possédais toujours le sommeil lourd des enfants car je n’avais pas encore suffisamment de soucis pour côtoyer les insomnies. Peut-être que cela viendrait plus tard et sans doute aurais-je dû profiter de ces instants de félicité mais ce que je n’avais pas encore perdu ne pouvait me manquer. C’était toujours ainsi, même si je m’estimais déjà chanceux de manière générale. J’aimais la vie. Mon traumatisme quant à la mort de Constantine s’était mué en un trou noir. Je savais que j’étais présent à ce moment-là mais y songer ne créait qu’un vide. Je ne voyais rien, juste l’escalier et l’obscurité de ce que mon cerveau ne désirait pas se rappeler. J’avais donc fixé quelques secondes le plafond, en pensant aux oreilles d’Astriid et en m’imaginant en posséder des semblables puis j’avais fermé les yeux. Là, j’avais continué à m’imaginer être un Ygdraë et je m’étais endormi.

Je me redressai, l’esprit embrouillé. Le drap glissa jusqu’à ma taille et je tâtonnai dans l’objectif de trouver le haut de mon père sans réelle volonté. « Qu’est-ce que... ? » Le matin, j’étais toujours un peu bougon. Il me fallait du temps avant de démarrer, sauf s’il était question de Dragons. Là, je sautais du lit et filais, quitte à ne pas petit-déjeuner. Visiblement, on n’était pas encore le matin. « Astriid ? » J’entendis ses explications d’une oreille absente, celles sur le fait qu’elle n’arrivait pas à trouver le sommeil et passai une main dans mes cheveux d’un air endormi, en essayant d’enfiler une manche avec l’autre. « Le bal... » J’étais complètement déphasé. « Oui... d’accord. » dis-je, en essayant d’aligner mes idées. J’avais juste envie de dormir. Je la cherchai, comme j’aurais cherché mon dragon en peluche et, une fois que j’eus attrapé sa main, je me laissai retomber en arrière, en la tirant vers moi. « Demain. » lui soufflai-je, en tapotant ses cheveux dix secondes avant de me rendormir, à moitié défroqué.

______________________________________

« Tu veux que je t’aide ? » me demanda Cendre, avec un grand sourire. Je n’en savais rien mais elle avait acquis une certaine expérience des costumes depuis qu’elle s’entraînait avec les Puff-Puff Gueules. « Non merci, c’est gentil. Je dois gagner à la loyal ! » lui répondis-je. « Comme tu voudras ! Je vais aller chercher le thé et les biscuits. » Je lui souris à mon tour et la remerciai. Si la jeune femme était censée être ma nourrice, depuis ma croissance soudaine, nos rapports avaient commencé à changer. Elle ne m’aidait plus à prendre mon bain ou ce genre de choses. Je ne savais pas exactement comment je me sentais vis-à-vis d’elle. Ma propre adolescence me jouait des tours. Parfois, j’étais gêné en sa présence, parce qu’elle m’avait vu tout nu plus petit. D’autres fois je déambulais sans vêtement en ne me souvenant plus vraiment de ma condition. C’était arrivé deux fois depuis la Galette et la couleur des joues de la Magicienne avait eu tôt fait de me rappeler la réalité.

Lorsqu’elle réapparut, j’étais en train de fixer un morceau de tissu rembourré que j’avais fabriqué. Cendre m’avait fourni le matériel et donné quelques conseils qui s’étaient avérés plus ou moins fructueux, qu’ils fussent mauvais ou que je fusse un piètre exécutant. « Tu l’as rencontrée à Lagherta alors ? » « Oui. Comme je t’ai dit, elle est apparue dans mon coffre. » Elle prit une mine perplexe. « C’est curieux quand même. Tu es sûr que ce n’est pas un Démon venu te tenter ? » « Me tenter ? » « Oui… Un peu comme moi avec ces gâteaux. » Elle sourit et je ris en continuant de fixer mon costume. « Elle n’avait pas de gâteaux si ça peut te rassurer. » « Totalement. » Elle prit un biscuit et me fixa. « Quoi ? » « Rien. Tu as tellement grandi… Hier encore tu m’arrivais là et maintenant… » Je la dépassais. « J’ai l’impression d’avoir pris dix ans d’un coup. » conclut-elle. Je m’approchai, les bras tendus et lui fis un câlin, dans une phase enfantine. Arsène s’était montré très compréhensif concernant la situation, après avoir eu la même réaction qu’elle la première fois qu’il m’avait revu depuis la mort de Constantine et d’Apolline. Il avait rapidement compris que je restais une sorte d’enfant à l’intérieur, bien que les choses changeassent de plus en plus. L’enfant se retrouvait écrasé sous l’adulte, pour des raisons diverses et variées.

Invisible, Odile était en train de grignoter des petits morceaux de gâteau. Elle nous écoutait, sachant parfaitement que même si nous entendions du bruit, nous aurions tôt fait d’oublier sa présence. Cendre notait parfois qu’il manquait un petit morceau dans ses aliments mais elle plaçait ça sur le dos du folklore et de ses légendes. Elle laissait toujours de la nourriture près de la fenêtre et celle-ci disparaissait. C’était une habitude. Elle était sûre que quelque chose de bénéfique venait chercher ce qu’elle offrait, ou un Æther, et que, en échange, la créature lui portait chance.

« Et cette Astriid, elle te plaît ? » me demanda la jeune femme aux cheveux bleus lorsque nous fûmes installés autour de notre tasse de thé. « Comment ça ? » feignis-je de ne pas comprendre. Il y avait quelques avantages à mon état instable. Parfois, j’ignorais sciemment des choses, en jouant de ma condition. Je n’en étais pas spécialement fier mais ça m’évitait d’être pris au dépourvu. « Tu la trouves jolie ? » « Oui. » « Et elle est gentille ? » « Oui. Elle est drôle et assez légère. J’aime bien être avec elle. » « Je vois. » répondit-elle, avec une drôle d’expression. « Je m’en suis servi comme doudou je crois bien. » ajoutai-je, sans arrière-pensée. « En doudou ? » « Oui… Je crois bien qu’il s’est passé quelque chose dans la nuit et puis je l’ai prise avec moi. » C’était un peu flou dans ma tête. Il m’avait d’ailleurs fallu un moment avant de me souvenir qu’elle m’avait conviée à son épreuve et c’était uniquement parce qu’elle en avait reparlé ultérieurement. Sinon, j’aurais oublié. « Tu la prises avec toi ? » « Oui… Parce que le matin elle était avec moi. » « Tu ne sais pas ce que vous avez fait ? » « Si. On a fait ce qu’on fait dans un lit. » Dormir. Elle ouvrit la bouche, ne sachant que dire. Odile avait ouvert des yeux ronds. La transition avait été également compliquée pour la Fae. Avant, j’étais déjà géant pour elle mais, maintenant, j’étais comme une montagne. « Tu te protèges au moins ? » me dit Cendre, en paniquant légèrement. « Me protéger ? » Je ne comprenais plus rien. Pourquoi devrais-je me protéger pour dormir ? Parlait-elle de mon pyjama ? Elle se leva, sortit de la pièce et revint à l’intérieur avec un petit panier contenant plusieurs fioles et crèmes. « Tiens. C’est pour toi ! Il faudra que tu en parles avec elle ! C’est important, tu sais. » « Ah… Euh… D’accord. »

Le jour de l’épreuve, je me rendis au lieu de rendez-vous, habillé pour l’occasion. J’étais plutôt fier de mon costume. Je représentais un Dragon Élémentaire de Sable et avais passé un temps considérable sur ses ailes et ses longues cornes. Faire tenir la sphère entre elles avait été compliqué et j’avais fini par craquer et demander un peu d’aide à Cendre. J’avais pris de la peinture pour me faire des écailles jaunes et vertes. À la différence de celui que j’incarnais, j’étais d’une excellente humeur. « BWAAAAA ! » fis-je, en arrivant derrière l’Ygdraë, mes mains en formes de serres. Je me mis à rire dès qu’elle se retourna. « Alors ? Je suis comment ? » demandai-je, de plus en plus amusé. J’avais posé mes affaires à quelques mètres de là, le temps de lui présenter mon travail de couture. Il fallait que je lui parlasse de ce que la Magicienne m’avait donné mais, étant donné que je ne savais pas exactement ce dont il s’agissait, je ne savais pas trop comment aborder la question. Et puis, nous n’étions pas seuls. Je redevins un peu sérieux. « Bonjour. Je suis Lucius Paiberym. Enchanté. » L’homme qui l’accompagnait m’intimidait légèrement.

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Mer 25 Aoû 2021, 12:48



Parfois, il y a des morts


Rps précédents : Danse et jalousie et Le Rêve qui tue

« Honoré. » Mon regard se tourna vers ma sœur. « Oui ? » « J’espère que tu gagneras l’épreuve de la Princesse Eméliana. » murmura-t-elle, en me fixant d’un air exigeant, avant d’ajouter : « Néron se rend au bal avec la Princesse Rose-Abelle. » J’émis un son rempli de sarcasme. « L’honneur est sauf alors. » « Ce n’est pas drôle. » Néron n’était pas notre frère mais notre demi-frère. Là était toute la différence. Notre père, l’Archimage Dorak, s’était remarié après le décès de notre mère. Il était le seul Chancelier des Ténèbres marié à n’avoir qu’une épouse. Le dernier venu était donc, depuis sa naissance, le petit favori. Ma sœur, qui avait une ambition de titan, n’arrivait pas à l’avaler. Néanmoins, je ressentais également sa fureur. Le poids qui reposait sur nos épaules était considérable. Notre père pourrait nous châtier à la moindre occasion. Nous vivions dans l’opulence uniquement grâce à lui, ce qui rendait notre position vacillante. Le seul lien que nous avions avec l’homme était celui du sang. Nous n’étions plus réellement une famille et, chaque jour, nous ressentions l’intérêt de notre paternel décroître à notre égard au profit seul de Néron, particulièrement avancé pour son âge. Le Dorak était exigeant et nous savions qu’un faux pas nous conduirait tout droit dans une impasse. Il serait facile pour Vladémir de déclarer que nous n’étions pas ses enfants ou de nous effacer. L’héritage, dans ce cas, irait à Néron seul.

« Il faut que nous assurions notre avenir et la Princesse Eméliana est une belle garantie. » « Elle est jeune. » « Ce n’est pas dérangeant. Nous connaissons tous les penchants de l’Empereur Noir pour la chair fraîche. Que tu t’intéresses à la Princesse ne posera sans doute aucun problème. » « Je ne m’intéresse pas à la Princesse. » dis-je. « Tu vas t’y intéresser. » répondit-elle, avec le regard de quelqu’un qui ne supporterait pas un refus. J’ouvris la bouche mais aucun son viable n’en sortit. Au lieu de quoi, je soupirai et accoudai mon coude sur la porte du fiacre, le temps de réfléchir. « Et pourquoi n’essaierais-tu pas de charmer Érasme ? » Elle me fixa un instant. « Parce que je suis une femme et que les rumeurs le disent moins malléable qu’elle. » « Depuis quand les rumeurs te font-elles peur ? » Il devait y avoir autre chose. Avait-elle peur de lui ? J’en doutais. Les bruits le disaient aussi plus proche du trône que la Princesse Eméliana. Le petit sourire qui apparut sur les lèvres de ma sœur me fit comprendre le fin mot de l’histoire. « Tu refuses Érasme parce que tu vises le Roi. » Elle releva les yeux vers moi. Son sourire s’agrandit. « Mon air juvénile est à mon avantage, Honoré. » « Mais le Roi est… » « Vieux. Cela ne pourrait être l’affaire que de quelques années. » Je ris. « C’est ça. N’es-tu pas au courant de ce qui est arrivé aux femmes de Niklaus Salvatore ? » « Je prendrai des garanties et, avec un peu de chance, je pourrai accoucher du futur Roi ou de la future Reine. Fils du Grand Chaos et petit fils d’un Chancelier des Ténèbres, l’enfant aurait toutes ses chances. » Elle plaça une mèche de cheveux derrière son oreille. « Que ce soit par toi ou par moi, nous devons assurer notre avenir pour être certains que notre père ne nous déshéritera pas d’une manière ou d’une autre au profit de ce morveux de Néron. »

____________________________________________________

« Qu’as-tu prévu de faire, Eméliana ? » Je souris, devant la mine interrogative de Réta. « Si tu veux le savoir, tu n’as qu’à deviner. » La brune réfléchit un instant. Je n’aimais pas qu’elle me tutoyât mais cette idiote oubliait à chaque fois les règles de bienséance. Je la suspectais de copier Érasme, simplement pour s’attirer ses bonnes grâces. Une vraie petite chienne. Elle soupira. « Ne me le dis pas si tu ne veux pas. En tout cas, tu as beaucoup remué et parlé cette nuit. » Je plissai les yeux. « Nous ne dormons pas ensemble, Réta. » Elle prit un air légèrement fou. « Mais j’aime bien te regarder dormir. » Elle approcha sa main de mon visage. « Tu es si belle, lorsque tu dors. Et tellement sage. » La peau de mon cou se tendit. Que lui prenait-il tout à coup ? Je dégageai sa main et levai légèrement le menton. « Si tu cherches à te venger de la bêtise d’Érasme, tu ferais mieux de t’en prendre à lui. » Elle sourit. « Qui te dit que c’est de lui dont je suis amoureuse ? » Je soupirai. « Arrête. Ce n’est pas drôle. Quant à ce genre de commentaires, je te prierais de t’abstenir à l’avenir. La croissance rapide d’Érasme a détraqué son cerveau mais ce n’est pas une excuse pour que tu suives le même chemin que ton idole. » « Peut-être que c’est lui qui suit le même chemin que moi ? » Elle n'avait pas tort. « Tss. »

Comme la Sorcière me regardait toujours après quelques secondes de silence, je l’interrogeai. « Quoi ? » « Je me demande pourquoi tu es plus populaire que moi, c’est tout. » Parce qu’elle était folle ? Instable ? Stupide ? Je souris. « Comme si je le souhaitais. » « Mais le fils du Dorak vient spécialement pour ton épreuve. Cela ne te fait rien ? » « Je me fous d’Honoré. Ce n’est qu’un opportuniste sous le joug de sa sœur. Ils ont peur pour leur avenir, tous les deux. Il serait prêt à tout pour épouser une Princesse. Je parie qu’Idérile essaiera de charmer Érasme dès qu’elle le verra ou, mieux, le Roi. » « Pourquoi toi ? Et pas Délilah ou moi ? » Je levai les yeux au ciel. « Ne me parle pas de Délilah. » « C'est toi qui l'a fait venir. Elle va encore essayer de nous habiller à sa façon, en plus. » « Je le sais. Et essayer de me nourrir comme si j’étais malade. » Je déglutis, avant de froncer les sourcils. « Cette fille est une vraie vache. Ses seins suffiraient à nourrir tous les pauvres d’Amestris si on les lui coupait. » « Erk. » Délilah était mon plus gros souci actuellement. Elle était l’aînée et jouissait d’une réputation sulfureuse qui faisait parler d’elle. Là où je faisais pitié physiquement, elle faisait envie. Les Mages Noirs étaient tous outrés par la simple existence de la Princesse mais il était clair qu’elle entrait dans les fantasmes de beaucoup de ses détracteurs. « Si tu te mariais à Honoré, tu… » Je la fusillai du regard. Il en était hors de question. De plus, j’avais déjà promis ma main à quelqu’un. Avec l’apparition de Lucius dans ma vie, la chose devenait quelque peu… compliquée. Néanmoins, pour le moment, aucune des deux enveloppes que j’avais reçues ne s’étaient ouvertes et je n’avais plus eu de nouvelles de l’homme qui s’était donné comme objectif de faire tomber Elias Salvatore du trône noir.

« Alors ? De quoi as-tu rêvé cette nuit ? » reprit Réta, alors que nous nous rendions sur les lieux de l’épreuve. Je soupirai. « Pourquoi veux-tu savoir ? » « Parce que tu avais l’air… amoureuse. » Mes yeux roulèrent. « Je n’en ai aucune idée. » mentis-je. Je me rappelais parfaitement les danses que nous avions exécutées, Lucius, Érasme, cette Ygdraë et moi-même. Astriid Cëlwùn. Pourquoi elle ? Elle n’avait rien à voir avec ce qu’il s’était déroulé sur Lagherta plus tôt. Que l’entraînement me travaillât était une chose, qu’elle apparût dans mes songes en était une autre. Je ressentis comme une pointe de jalousie au creux de ma poitrine. Heureusement, nous étions arrivées. « Il s’agit du lieu de mon épreuve. C’est une réplique du labyrinthe qu’il y aura au bal. » « Tu as décidé de les perdre ? Le premier à sortir réussira l’épreuve ? » « Non. » Je souris. Cela aurait été trop facile. Je ne voulais pas que le hasard me portât un cavalier. Je désirais autre chose. « Chaque homme aura un mouchoir en tissu avec lui. Celui qui gagnera sera celui qui réussira à sortir du labyrinthe après avoir convaincu les autres de lui donner son mouchoir. » « Tu penses que Lucius gagnera ? » « Je ne pense rien du tout. » Si. Parce que Lucius était de loin celui qui saurait garder son calme et convaincre. Il était resté à mes côtés durant la Coupe des Huit. Il m’avait encouragée. « Tant mieux parce qu’il me semble trop gentil pour gagner. Surtout que ce labyrinthe va vite devenir un nid à Sorciers. » Je pensai que le Magicien pourrait simplement attendre que les Mages Noirs s’autodétruisent, avant de convaincre celui qui aurait récupéré la totalité des mouchoirs à l’exception du sien. Ce dernier serait suffisamment amoché pour ne pas résister s’ils venaient à en venir aux mains. Un plan parfait, en somme. « Si tu n’aimes pas Délilah, pourquoi est-elle témoin ? » Je souris. « Parce qu’elle n’a pas encore organisé son épreuve. » « Et ? » Et son physique attirerait les candidats de la mienne comme des mouches. Moins motivés, ils se battraient avec moins d’acharnement. « Et rien. »

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Mer 25 Aoû 2021, 16:59



Parfois, il y a des morts


« Éraaasme ! Comme tu as grandi ! » Mon visage se tourna sur le côté et mes yeux se posèrent sur Délilah. Je retirai mon bras de sa prise avec une expression faussement dégoûtée. Elle était belle, magnétique, et mon corps réagissait à sa présence malgré moi. Je la haïssais. « Et toi tu as grossi. » lui dis-je. « Tu trouves ? » demanda-t-elle, en s’éloignant un peu. « Et vous Honoré, vous trouvez ? » Elle passa ses mains sur son ventre avant de remettre ses cheveux en place. « Euh… Non. Vous êtes très belle, Princesse Délilah. » Une trainée et un lèche-cul, pensai-je sans rien ajouter. « Et vous… Qui êtes-vous ? » demanda-t-elle à Lucius. « Personne. » répondis-je. « Tu as retrouvé ta famille d’origine Érasme ? C’est cela ? Vous vous ressemblez tellement tous les deux. » Elle rit, avant de se déplacer vers le Magicien et de faire exactement ce qu’elle avait fait avec moi, à savoir attraper son bras pour le poser l’air de rien contre l’un de ses seins. Je la connaissais. Un jour, elle avait essayé de faire la même chose avec Val’Aimé Taiji et la suite avait été particulièrement amusante. Elle avait été clouée au lit, son épiderme couvert de verrues, en plus de la fièvre, de la diarrhée, des cauchemars et du reste. Je m’étais alors amusé à placer du poil à gratter dans son lit pendant son sommeil et à déchirer ses vêtements minutieusement. Maintenant que j’étais plus grand, je pourrais peut-être lui faire bien pire. Oui, voilà. J’avais envie de lui faire regretter d’être si aguicheuse. Je soupirai et m’avançai. « Délilah. » « Hum ? » Sa voix elle-même me hérissait tant elle était voluptueuse. « Lâche-le. C’est le copain d’Eméliana. » articulai-je lentement, avec un petit sourire vicieux. La rouquine le regarda avec d’autant plus d’intensité. Qu’aimait faire Délilah par-dessus tout ? Briser les couples. C’était une vipère et si elle n’avait pas été la fille du Roi et de la Reine, son corps aurait sans aucun doute été retrouvé gisant dans un caniveau quelconque tant les femmes du Royaume la haïssaient. Les hommes avaient beau la critiquer, ils étaient nombreux à avoir envie de la Princesse. Elle le savait et en jouait. Elle profitait de leur intérêt pour leur dérober tout ce qu’elle pouvait. Elle les charmait et prenait leurs affaires personnels. Quelques bruits disaient qu’elle les poussait à la folie et à la ruine. Je n’en étais pas sûr mais cela me paraissait crédible. Officiellement, nul homme ne s’intéressait à elle. Officieusement, ils lui couraient tous après. « C’est vrai ça ? Que vous êtes le copain d’Eméliana ? » Je souris, devant l’air gêné de Lucius. Il ne répondit pas. « Je suis témoin dans cette épreuve vous savez. » Elle se pencha à son oreille. « Vous pouvez essayer de me soudoyer si vous voulez. » Elle rit. Généralement, c’était plutôt elle qui soudoyait les autres. Je la fixai. Peut-être serait-elle utile, finalement. « Non. Si je gagne, je veux que ce soit mérité. » « Oh, voyez-vous ça. Comme vous êtes mignon. » dit-elle, en titillant son nez avec son index. Il se recula et la regarda. « Érasme… Je crois que j’intimide ton nouvel ami. » « Ce n’est pas mon ami. » « Je ne suis pas son ami. » Les deux phrases étaient sorties simultanément, ce qui fit sourire la rousse. « Alors vous êtes quoi ? Ennemis ? Vous vous battez pour la même fille, après tout. D’ailleurs, Érasme, tu participes à l’épreuve ? C’est étonnant. » « J’ai des affaires à régler avec Eméliana. » Elle sourit, absolument pas crédule. Les excuses des hommes, elle en avait entendu des centaines. « Je vois. » murmura-t-elle, en m’observant avec un air qui ne me plaisait pas. « Je comprends mieux pourquoi tu me trouves grosse. » articula-t-elle, ses paroles s’insinuant comme du poison dans mon esprit. « Et vous ? Vous n’avez pas répondu. Comment me trouvez-vous ? Ne suis-je pas plus belle qu’Eméliana ? » La concernée fit mine de ne pas avoir entendu. « La beauté n’est pas tout ce qui importe. » « Vous fuyez. » « Je préfère Eméliana. » Elle rit. « Vous n’avez aucun goût alors. Ou bien vous mentez pour lui faire plaisir. Les Magiciens, si attentifs et délicats… » Je souris en voyant Delilah parcourir le torse de Lucius vers son pantalon. Je savais ce que ça faisait, d’être impuissant face à elle. Pour autant, je ne compatis pas. « Princesse Délilah ! » Le mouvement s’arrêta. Notre aînée se tourna vers Eméliana. « Oui, chérie ? » « Je dois m’entretenir avec le Chancelier Elzagan après le bal. Je ne manquerai pas de lui parler de votre comportement si vous continuez. » L’autre pâlit, à mon plus grand plaisir. « Surtout, ce n’est pas poli de vous comporter ainsi devant Honoré qui a fait tout ce chemin pour participer à votre épreuve. N’est-ce pas ? » « Euh je… » Quelle garce. « Mon frère est venu pour vous, Princesse Eméliana. » intervint Idérile. « Oh. Toutes mes excuses. » répondit-elle, agacée d’avoir échoué dans sa stratégie d’évincer le fils du Dorak. Réta sourit et se pencha vers elle. « Il est pas mal. Si tu veux, je peux essayer de t’en débarrasser. » « Volontiers, même si je doute que tu parviennes à tes fins. » murmura-t-elle, sans que personne ne pût entendre.

_________________________

Au début, nous étions quatorze. J’en avais convaincu quatre de me donner leur mouchoir, simplement en exposant que j’étais le Prince Noir et que s’ils ne cédaient pas, je les ferais tuer dès que nous sortirions du labyrinthe. Sur les quatre, certains avaient déjà récupéré le tissu que possédaient d’autres. Il me manquait à présent six mouchoirs. « Prince Érasme. » Je tournai les yeux vers Honoré, proche d’un angle de mur végétal. Je souris et m’avançai, les mains dans les poches. Une fois arrivé à sa hauteur, j’appuyai mon bras droit sur une branche. « Honoré. Vous savez ce que je pense ? » lui dis-je, sur le ton de la confession, en me penchant un peu pour être à sa hauteur. Nous avions vingt centimètres d’écart. « Non. » « Que vous êtes trop vieux pour l’épreuve d’Eméliana et que vous préférez Délilah. » Je souris et m’approchai encore. « Vous enflez en pensant à elle alors… donnez-moi votre mouchoir. » « Je suis désolé mais je ne peux pas faire ça. » Ma main se posa sur sa joue et je finis par lui donner une petite claque sans force, juste pour le maintenir éveillé, juste pour l’humilier un peu. « À cause d’Idérile ? À cause du trône ? Pourtant, Délilah est l’aînée. » « C’est une trainée. » lâcha-t-il, avant de se rendre compte de ce qu'il venait de dire. « Et alors ? Vous rendriez tous les hommes du Royaume jaloux. » Je n’avais jamais réellement essayé de monter une stratégie avant ce moment. « Je veux accompagner Eméliana au bal. » m’imposa-t-il. Les stratégies n’étaient peut-être pas faites pour moi. « Aaah. » soupirai-je. Pourquoi m’embêtais-je ? Je souris, avant que mon expression ne changeât. Je lui envoyai mon genou dans les parties, en prenant appui avec mes mains sur ses épaules. De tout ce que j’aurais pu faire, jamais il n’aurait pensé que je le frappasse. C’était totalement contraire à tout ce que l’étiquette nous imposait, en tant que nobles. Mais je me fichais de l’étiquette. Je l’attrapai par les cheveux. « Écoute-moi bien, espèce de connard. Eméliana est à moi. Si tu continues à lui tourner autour, je te coupe les testicules et je te les fais manger. T’as pigé ? » Ou je les ferais mangées à sa sœur. Ma main se faufila dans l’une de ses poches. Par chance, j’y trouvai deux mouchoirs : le sien et un qu’il avait dû dérober plus tôt. « Bien. » articulai-je, un sourire dément sur les lèvres.

« Tiens tiens. » Lucius. Je m’approchai. « Dis-moi, Lucius… Combien as-tu de mouchoirs ? » Il s’arrêta et me laissa venir. « Quatre. » « J’en ai dix. Ce qui veut dire qu’il ne reste plus que nous deux. » « Je vois. » « J’en ai plus alors peut-être qu’on pourrait partir du principe que j’ai gagné ? Donne-moi ceux que tu as. » « On pourrait. » répondit-il. « Et donc ? » « Non. » Mes narines se dilatèrent légèrement sous l’effet de l’agacement. « J’ai dix putains de mouchoirs et tu n’en as que quatre. Qu’est-ce qu’il te faut de plus ? Tu crois que je vais te donner les miens ? » Je ris. « T’es complètement stupide en fait. » Mon index vint se poser sur son torse. « T’es un Magicien alors reste en dehors des affaires des Sorciers. » Il inspira, conscient que nous nous trouvions tous les deux dans une impasse. « Prince, Érasme, vous voyez Eméliana souvent. Vous pourr… » « Et c’est une raison ? Je la vois tout le temps alors je dois laisser un sale Mage Blanc l’accompagner au bal ? Tu veux ruiner sa réputation, c’est ça ? » « Non, je veux simplement l… » « Ferme-la ! » vociférai-je. « Je suis le Prince Noir. Tu dois te coucher. La partie est terminée ! » Voir son visage m’agaçait. Ses traits étaient si semblables aux miens que percevoir le doute ou l’exaspération chez lui créait chez moi une rage persistante. Je voulais griffer sa peau, pour qu’il ne me ressemblât plus, lui casser les os, pour que son contour fût différent du mien. « C’est embêtant. » dit-il, en essayant de rester calme. « Quoi ? » « Cette situation. » Sans doute aurait-il préféré ne pas tomber sur moi pour la finale. J’étais dans cette optique également. J’aurais voulu qu’il disparût bien avant. Être avec lui c’était… éprouvant, bien plus que ce que j’aurais pu penser. « Hum… » fis-je, avant de lui coller une claque. « Qu’est-ce que… ? » Sa main à présent sur sa joue, il fronça les sourcils. « Prince Érasme, je… » En fait, je n’avais plus envie de l’écouter. Je voulais juste le faire disparaître. Je voulus lui en donner une autre mais il intercepta mon poignet. « Lâche-moi ! » « Non ! » Mon genou remonta vers ses parties. Il se décala et, à cause d’un faux mouvement de l’un de nous deux, nous nous retrouvâmes au sol. « Merde ! » laissai-je échapper. « Donne-moi ces putains de mouchoirs ! » « Pas question ! » dit-il, en essayant d’attraper mes mains pour éviter que je le frappasse à nouveau.

Quinze minutes plus tard, nous saignions tous les deux. Ce sale Magicien avait fini par me frapper aussi. D’un point de vue extérieur, nous aurions semblé ridicules. De notre poing de vue, nous nous livrions une guerre éreintante. Essoufflés, nous avions besoin de nous arrêter régulièrement. Dès que l’un de nous récupérait assez de force, c’était pour s’approcher de l’autre et le frapper. Nos phalanges étaient égratignées à cause de nos actions et de nos faux mouvements. Parfois, nous rations notre cible alors même qu’elle était immobile à cause de la fatigue et retombions lourdement sur le sol. « Laisse-la moi ! » criai-je, les cheveux en bataille, les lèvres serrées. Du sang perlait au coin de ma bouche, à cause de la rencontre de mes dents contre ma peau. « Non ! » « Putain de Magicien… » « Tu ne sais dire que ça, c’est ça ? » « Ferme-la. » « Tu rêves. » Le fait qu’il me résistât créait chez moi quelque chose d’inconnu jusqu’ici. Je voulais le réduire au silence et me déplaçai dans ce but. Mon genou buta contre son pied et je m’étalai sur lui. Il essaya de me repousser avec sa paume de main, en la collant sur mon visage. Je lui mordis l’index, il me frappa de l’arrière de sa main. Je rampai pour lui faire face et pris sa tête entre mes doigts. Il fit de même. « Pourquoi est-ce que tu ne veux pas céder. » « Parce que. » « Pourquoi ? » « Parce que. » Je me mis à rire. « T’es sûr que c’est pour Eméliana ? » « Non. » avoua-t-il. « J’ai juste envie de t’empêcher de gagner. » Il sourit et je ris d’autant plus. Alors c'était ça. C'était moi, la raison. « Sale… » Je m’interrompis, ayant soudainement une idée. Je me redressai un peu et envoyai mon poing dans mon propre visage. « Qu’est-ce que ? » Je plantai mes prunelles dans les siennes. « Donne-moi tes mouchoirs, sinon je continue. » « Tu es fou… » Je penchai légèrement la tête sur le côté et recommençai, lâchant un râle. « Arrête ! » Je griffai mon épiderme pour toute réponse. La douleur précéda le sang. « Arrête ! » répéta-t-il, en essayant de me calmer. Je le repoussai et recommençai, plusieurs fois, jusqu’à voir flou, jusqu'à en ressentir un plaisir étrange même. Et cet abruti céda.

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Jeu 26 Aoû 2021, 00:59

Alekto
Parfois, il y a des morts
-Ça te dit d'y aller ensemble ?

Il avait proposé ça sur un coup de tête, mais maintenant que les mots étaient sortis de sa bouche, il ressemblait à ces prétendants apeurés qui approchaient pour la première fois la fille de leurs rêves. Sauf qu’Alekto n’avait rien de la fille de ses rêves, et cette dernière était tout à fait au courant. Il n’était pas le garçon de ses rêves non plus, après tout. C’était pourquoi elle avait froncé les sourcils pour marquer sa surprise.

-Pour aller au bal ? Tu veux dire, nous deux ?

Ils n'avaient fait que mentionner l'événement sans planifier de s'y rendre vraiment. Lazarius avait tenté sa chance. Lui avec elle ? Elle avec lui ? Évidemment, c'était une question con. Il n'y avait pas trente-six mille interprétations. Lazarius pourtant, acquiesça, sans lui reprocher la stupidité de son doute.

-Tu penses que c'est une mauvaise idée ? Je me disais que ça nous permettrait de sortir du quotidien et de faire un truc un peu... atypique et amusant.

"Atypique et amusant"… Il avait assurément quelques travers magiciens. Lazarius n'était pas orphelin, même s'il se faisait considérer comme tel. Il vivait chez sa grand-mère, ses parents à Vervallée. Le jeune Sorcier n'avait divulgué cette information qu'à quelques rares personnes pas forcément de confiance, ce qui lui avait valu d'être traité de fils de Magiciens plus rapidement qu'il ne l'aurait voulu et avait trié les candidats à son amitié en un rien de temps. En fait, seule Alekto était restée, en plus de deux ou trois types un peu bizarres. À croire que la Sorcière avait une attirance naturelle pour les Mages en transition, puisque sa dernière vraie amie en date avait fini chez les Bleus. Elle haussa les épaules.

-Non, non. Nous pouvons faire comme ça, pourquoi pas.

À force de passer du temps ensemble, en deux bons rejetés des groupes d'étudiants plus populaires, ils étaient devenus amis. De bons amis. Non, ils n'avaient pas la moindre attirance l'un envers l'autre. Ils s'entendaient juste bien et passaient la plupart de leur temps ensemble. Néanmoins, face à leur popularité écrasée lorsqu'il s'agissait de conquêtes, ils s'étaient un soir fait la promesse suivante : "Si on n'est toujours pas casés après avoir fini nos études et avoir entamé nos carrières, on se marie." C'était Lazarius qui avait lancé l'idée et Alekto avait accepté sans vraiment penser à ce à quoi ça les impliquait. Après tout, pourquoi pas. Ils s'entendaient suffisamment bien ensemble et ne se prenaient jamais la tête. A défaut de s'aimer, ils mèneraient une vie relativement tranquille. Pour conclure leur accord, ils s'étaient serré la main, puis étaient partis en cours.

Après la proposition, ils n'avaient pas reparlé du bal avant plusieurs jours. Lazarius avait relancé la conversation en mentionnant qu'il serait pertinent de discuter de l'épreuve que la Sorcière devrait concevoir. Celle-ci y avait songé, un petit peu, sans pour autant trouver quelque chose de convenable. Un concours de potion, c'était une activité souvent exigée par les jeunes prétendantes d'Asresh, mais qui inspirait Alekto de manière toute relative. Elle ne voulait pas faire comme toutes ces pestes, notamment parce qu'elle se figurait déjà leurs remarques vis-à-vis de son originalité et de ses espoirs ridicules d'attirer quelqu'un. En cela, elles auraient un peu raison.

-Oh et puis zut, un poème, ce n'est pas bien ?

En y réfléchissant à deux fois, une telle épreuve ne l'épargnerait pas des critiques. Rien ne l'épargnerait, en fait. Mais trop tard, elle l’avait dit.

-Un poème ? Répéta le jeune homme.

Ça ne lui ressemblait pas du tout. En fait, quand il n'y avait pas de pratique, cela avait tendance à l'ennuyer.

-Oui. Toi et les autres bizarres qui voudront bien de moi, vous allez chacun m'écrire un poème et me le réciter. Celui dont l'écriture me plaira le plus deviendra mon partenaire. Et je suis très sérieuse. Ajouta-t-elle face à son expression oscillant entre surprise, "C'est une blague ?" et déception.

Pourtant, Lazarius était un littéraire. Il était juste trop modeste et ne se sentait pas à la hauteur face à ses potentiels concurrents.

-Es-tu si désespérée que tu es prête à passer un moment aussi barbant, à écouter des hommes essayer de maitriser la rime riche ?

-Justement, le but sera de ne pas m'ennuyer. Celui qui m'ennuiera le moins gagnera, mais j'espère passer la barre de la neutralité, voire de l'amusement.

-Comment ?

-A vous de le trouver, justement.

-Alekto. Si tu veux que je vienne avec toi, il va falloir me donner une chance.

-C'est toi qui as proposé ce bal, alors c'est toi qui veux venir avec moi. Pas l'inverse. Elle lui sourit, tandis que son visage à lui se décomposait. Ça va, je plaisante.

Visiblement, sa réplique ne plaisait pas au jeune homme. Elle se pencha vers lui. Le rapprochement le mit un peu mal à l'aise. Comme c’était aussi son cas, elle renonça.

-J’imagine que les autres, et encore faut-il qu’il y en ai, écrirons un texte visant à me flatter un minimum. Mais je veux un texte qui m’amuse et qui concerne tout, sauf moi.

Elle aimait l'humour noir, cela allait de soi. Ce serait un plus.

-Evidemment qu'il y en aura d'autres. Murmura-t-il après un moment.

-Pourquoi penses-tu cela ?

Qu'il envisage d'avoir de la concurrence lui paraissait absurde. Elle était plus âgée que tout le monde, pas très belle, un peu stupide et on la trouvait bizarre. Lazarius croisa son regard et se mit à rougir. Alekto ne comprit pas vraiment.

-Pour rien.

***

-Ton pied.

-Hein ?

-Bah recule. Avec le droit.

-Ah, oui.

Alekto se replaça correctement. Elle regardait constamment ses pieds, ses mains bien accrochées à son partenaire. Ils n'avaient jamais été aussi proches l'un de l'autre et dans cette configuration, ça gênait surtout elle. Droit, Lazarius prenait plaisir à se trouver supérieur dans ce domaine. Ses quelques centimètres en plus aidaient.

-On dirait que tu n'as jamais appris la valse.

-Disons que je ne suis pas très douée en danse. La dernière fois que j'ai pratiqué remonte à longtemps... je ne m'en souviens même plus, tu vois.

En même temps, ils se mettaient à tourner doucement pour que la femme parvienne à suivre.

-Où est-ce que tu as appris la première fois ?

Elle haussa les épaules et releva la tête pour penser.

-Je ne sais plus... quand j'étais enfant.

Plus évasif, on ne pouvait pas. Lazarius savait que contrairement à lui, elle était orpheline et n'avait pas joui d'une jeunesse aussi mouvementée que la sienne. Néanmoins, il ne comprenait pas pourquoi elle était si réservée. Parce que pour le reste, elle ne l'était pas. Il avait un peu de mal à avaler qu'elle avait juste oublié la moitié de sa vie. Certes, Alekto n'avait pas une mémoire d'éléphant, mais l'inverse était exagéré. Son excuse sur ses pitoyables capacités en danse le rendait aussi sceptique. Pour la côtoyer depuis plusieurs mois, il savait comment elle fonctionnait : tête en l'air, il était vrai, mais investie et attentive dans ses divers apprentissages. Dans ses études, sa volonté lui permettait souvent d'arriver à ses fins, même si les débuts pouvaient être caduques. Il ne faisait pas de doute qu'au terme de leur entrainement, la Sorcière parviendrait à danser correctement la valse et le tango.

Lui avait appris la première dès son plus jeune âge, avec ses parents. La seconde lui avait été enseignée par sa grand-mère. De par ses parents, il était issu d'une famille relativement aisée. Les danses avaient fait partie intégrante de son éducation, tout comme l'art de la conversation, auquel il excellait nettement moins, ainsi que des principes pompeux comme la modestie et la générosité. Principes qui avaient poussé, puis fané en lui comme un massif de roses près d'une mine de métaux lourds. Au grand plaisir de sa vieille grand-mère, qui vivait seule depuis que son mari était mort. Ce dernier s'était pendu lorsqu'il avait appris que son unique fille avait tout plaqué pour faire sa vie chez les Mages Bleus. Pour Lazarius, autant dire que la relation avec son ailleule était particulière. Eméline se faisait chaque jour une joie de voir que son petit-fils avait retrouvé le chemin perdu par sa mère. Toutefois, le sang qui coulait dans ses veines la dégoûtait tant qu'elle était incapable de ne pas le lui rappeler à longueur de journées. Il avait les traits de son ignoble père, qu'elle n'avait vu qu'une fois, et les insupportables attitudes niaises de sa mère, "toujours les mêmes depuis que je l'ai jetée dehors". A travers lui, elle avait compris qu'en douze ans, sa fille n'avait pas changé. Maintenant, il en avait dix-neuf et elle le répétait encore. Après tout, elle n’y était pas pour rien quant à son manque de confiance en lui. Ça le rendait d’ailleurs encore plus Magicien, qu’elle disait. Comme son nom de famille. "Tu aurais dû être un Abele. Comme nous tous." Des fois, elle le fatiguait tellement qu’il avait envie qu’elle meure, ce qui lui permettrait de toucher plus rapidement son héritage – puisqu’il était son seul descendant sorcier, il avait le droit à tout. Néanmoins, la bique s’avérait utile de temps en temps.

-C’est bien là ? Demanda Alekto alors qu’ils accéléraient.

-Oui.

Son ton un peu trop cordial la fit rire.

-Quoi ?

-En temps normal tu es plutôt timide, mais là c’est tout le contraire.

-Et tu trouves ça amusant ?

-Oui.

Il se détacha de son regard pour projeter le sien plus loin. Il était un peu ennuyé de l’impression qu’il donnait aux gens. Il n’aimait pas être ce garçon réservé et incertain. Mais elle avait raison, et c’était plus fort que lui.


~1611 mots~
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Parfois, il y a des morts
Dorian & Tamina





RP lié : Le gémissement

«Pourquoi est-ce que je n'y vais pas tout simplement avec toi ?» Commençais-je à ronchonner, traînant les pieds à la suite de Laysa. «Parce que, bien que tu sembles le penser, ma vie ne tourne pas qu'autour de toi et que j'y vais avec quelqu'un d'autre.» Je me renfrognais. «Et avec qui ?» «Jaloux ?» Un toussotement moqueur s'échappa de moi. «Ouais, c'est ça.» Peut-être un peu. Après des mois à vivre presque chaque instant aux côtés de ma génitrice, à être la cible de ses attentions, j'avais omis qu'elle pouvait entretenir d'autres relations. «Ne t'en fais pas, je pense que c'est une épreuve qui te plaira.» J'émis un grognement dubitatif et m'enfonçais dans un silence boudeur qui dura jusqu'à notre arrivée aux terres du lac bleu.

Nous fûmes invités à entrer dans la maison par une Vampire à l'aspect enfantin et j'arquais un sourcil. Je tendis mon esprit pour Laysa pour lui transmettre mon interrogation. Sa réponse résonna dans ma tête en un mot. «Dalemir.» Je lui glissais une œillade outrée. «Tu veux que ma cavalière soit une gamine ?» L'amusement de Laysa était perceptible. «Eh bien quoi ? Ça correspondra bien à ton comportement. J'ai parfois l'impression d'avoir transformé un adolescent.» Et elle me ferma son esprit pour couper court à notre échange, me laissant m'étouffer seul sur mon indignation.
La mine sombre, je me laissais entraîner sans un mot jusqu'à une chambre éclairée par quelques bougies. Laysa alla s'installer gracieusement sur un fauteuil dans un coin de la chambre et je repérais trois autres Vampires dont l'une m'était légèrement familière. Je n'eus pas le temps de m'attarder sur elle car mon attention fut attirée par un mouvement sur le lit. Un adolescent y était attaché et si j'en croyais mes sens, il n'était pas une créature nocturne mais plutôt le goûter. Trop aimable. J'écoutais les explications sur la nature de l'épreuve et mon froncement de sourcils s'accentua. Était-il consentant ? L'avaient-ils payé pour participer à cette épreuve ? Il ne paraissait pas très rassuré, ainsi exposé sans défense au beau milieu d'enfants de Lubuska. Je n'aurais pas aimé être à sa place.
Voyant que personne ne bougeait, je me grattais nerveusement la nuque. «Vous allez tous rester là à regarder ?» Je grimaçais. Non contents de changer des enfants en monstres assoiffés de sang, ils étaient aussi voyeuristes. J'exhalais un soupir et m'approchais du lit sur lequel je m'assis. Tentant de faire abstraction des regards posés sur moi, je détaillais ma victime. «Bonjour. Je m'appelle Dorian.» Si j'avais été doué dans ce domaine, j'aurai sûrement essayé de le mettre à l'aise pour lui faciliter les choses. À la place, je posais une main sur sa cuisse et esquissais un sourire affamé qui dévoila mes canines qui s'étaient allongées, ma Soif excitée par la présence du garçon offert sur le lit. «Tu sais, tu ressembles à quelqu'un que je connais.» Plus ou moins. Ou peut-être était-ce moi qui voyait le blond partout. À vue d'oeil, peu d'années devaient séparer Bae du garçon sous mes yeux. Mon regard descendit sur son cou, marbré de plaies que je reconnus sans difficulté. Je les effleurai brièvement et ne dissimulais pas mon mécontentement. «Ça ne va pas ça. Je n'aime pas passer après quelqu'un. Il va falloir trouver autre chose. Offrons-leur un spectacle quitte à être observés.» Je rivais mon regard au sien et descendis paresseusement mes doigts jusqu'à sa clavicule jusqu'à rencontrer le col de sa chemise. Je pris tout mon temps pour détacher un à un les boutons, découvrant centimètre par centimètre sa peau presque aussi blafarde que la mienne. Si je me concentrais, je pouvais presque imaginer tenir entre mes mains le corps étroit de Bae. Le souvenir du Rêve était toujours aussi vif, entretenant mon obsession vis-à-vis du blond et mes pensées revenaient invariablement à lui et à cette nuit à Merhoneän. Alors que je pensais que le temps ferait son travail, le désir de le revoir s'intensifiait et provoquait une douleur presque physique dans ma poitrine. Maintenant que j'avais réussi à m'extirper du manoir du marquis de Sanguice à Durienrisda, je ne désirai rien de plus que tout mettre en œuvre pour le retrouver. Tout cela sans que Laysa le sache, j'ignorais quelle décision elle prendrait en apprenant mon intérêt pour Bae.
Après l'avoir dénudé jusqu'à la taille, je m'installais au dessus de lui et plaçais mes mains de chaque côté de son corps. «Il faut que tu gémisses pour gagner c'est ça ?» Un sourire carnassier crocheta les commissures de mes lèvres. «Tu as déjà l'habitude des morsures de ce que j'ai vu. Je vais essayer quelque chose de nouveau pour que ce soit aussi intéressant pour toi que ça ne va l'être pour moi. Tu me diras ce que tu en penses.» Je me penchais sur lui et mes lèvres effleurèrent en premier le haut de son torse et empruntèrent un chemin descendant jusqu'à son téton. Là, mes crocs remplacèrent la douceur de ma bouche et je m'enfonçais en lui. Les paupières serrées pour résister à la vague du plaisir ressenti à boire son sang, je refermais mes poings sur les draps pour me retenir de ne pas aspirer tout son fluide vital.

«Efface ce sourire terriblement suffisant de ton visage.» Fit Laysa, faussement désapprobatrice. «Ce que tu peux être insupportable parfois.» Trop enivré pour répondre, je me contentais d'acquiescer sans réussir à vraiment me départir de mon air satisfait. Elle avait raison, cette épreuve s'était révélée plus plaisante que je ne l'avais escomptée. Je gardais en mémoire le mélange confus d'émotions que j'avais remarqué sur le visage de celle qui serait ma cavalière au bal. Tamina. Quelque chose me disait qu'elle allait regretter son épreuve et son partenaire à Lagherta.



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