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J2, I am Willow - Power

J’étais assis près de la cheminée. Mes yeux étaient ancrés dans les flammes. L’air qui flottait sur mon visage était grave et haineux. Judicaël me fixait d’un œil inquiet. Je finis par me lever, par poser la main sur le manteau au-dessus de l’âtre. Mes doigts se tendirent et, d’un mouvement violent et rapide, j’envoyai mon poing sur la zone même où ma paume reposait précédemment. La roche entailla ma peau. Je m’en fichais. « Non ! » finis-je par articuler, en me retournant pour fixer le rouquin. Il parut surpris, pas par ma réaction mais par l’effet que mon refus créa en lui. Il ne me connaissait pas aussi autoritaire, aussi ténébreux. Alister, quant à lui, n’avait pas bougé. Il était en bout de table. S’il avait laissé Judicaël parler, c’est qu’il avait jugé qu’il m’était bien plus proche et que la nouvelle serait plus facile à entendre d’entre ses lèvres. Il désirait éviter de me donner un ordre direct, en tant que Chef des Armées et, de ce fait, mon supérieur. « Je dois trouver le psychopathe qui a fait ça dans ma propre maison ! » Ce n’était pas négociable. Pour une fois que j’avais la volonté d’agir aux côtés des Magiciens, pour une cause qui détruirait le mal un peu plus, ils refusaient mon aide. La raison et l’objectivité me poussaient à comprendre les raisons du refus et pourquoi ils tenaient à m’éloigner. J’aurais sans doute fait exactement la même chose face à quelqu’un dans mon cas, à moins d’avoir la volonté de le briser davantage. Néanmoins, je n’étais pas fais de sucre. J’étais le putain d’Empereur Noir.

Lorsque je me rendis compte que je tremblais de rage, il se passa une fraction de seconde avant que je n’inspirasse profondément. J’expirai l’air par la suite et ressentis un relâchement dans l’ensemble de mon corps. Ce n’était pas grand-chose mais le retour à un état plus contenu était obligatoire. Je ne pouvais pas me permettre de faire disparaître les murs qui nous entouraient sous un accès de violence. Je serrai les dents et passai mes doigts sur mes yeux avant de serrer l’arête de mon nez. Je soupirai et me rassis. Je soignai ma plaie, profitant du silence pesant qui s’était installé entre nous trois. Judicaël jeta un coup d’œil à Alister qui prit la parole. « Cela vous arrive souvent d’avoir des accès de colère, comme ça ? » Je levai les yeux vers lui. Je lus dans son regard qu’il regrettait quelque peu d’avoir posé la question. Il connaissait parfaitement la réponse. « Je n’ai pas des accès de colère. » répétai-je, lentement. « Ma meilleure amie s’est fait violer et écarteler dans mon château. On lui a arraché les ailes. On lui a arraché les dents. On lui a arraché les ongles. On l’a torturée avant de la tuer. Sa fille est morte. Les deux étaient chez moi parce qu’elles avaient besoin de protection contre un homme qui a rejoint les rangs des Sorciers. Je devais les pro-té-ger. Vous entendez ? Et vous me demandez si j’ai souvent des accès de colère ? Vous avez envie d’en voir un, accès de colère ? » « Non. Personne ne s’emportera aujourd'hui. » murmura Judicaël, en attirant mon attention. « Le Duc Vaughan ne voulait pas vous manquer de respect. Il s’inquiète pour vous, c’est tout. Comme je m’inquiète pour vous étant donné les récents événements. Que ce soit cet homme qui a pris votre apparence au Grand Fessetival de la Charité en déclarant avoir violé Laëth Belegad, que ce soit l’assassinat dont nous avons déjà discuté qui vous visait particulièrement, que ce soit la mort de Constantine Vaughan ou la disparition d’Adélie Vaughan, il est normal que vous ressentiez une forme de rage et d’injustice. » « Je veux l’attraper et l’enfermer. » « Vous n’avez pas l’air de vouloir seulement l’enfermer. » ajouta le Nylmord. Bien sûr que non. J’avais envie de jouer avec lui, moi-aussi. « Peu importe, Alister. C’est normal, au début, de réagir ainsi. Il y a des choses que l'on ne peut pas attendre venant de la cible d'un tordu. La mesure en fait partie, surtout dans les premiers temps. Mais je suis certain que Kaahl saura se reprendre. » me défendit Judicaël. Le bras droit de l’Impératrice Blanche pencha la tête sur le côté, comme s’il venait de capter quelque chose dont il n’avait pas pris pleinement conscience auparavant. Il ne dit cependant rien à ce sujet et se contenta de continuer. « Votre famille entière a été mise sous protection, que ce soit à Boraür ou ici. Nous essayons de comprendre ce qui est arrivé à votre gouvernante, pourquoi est-ce qu’elle dort ainsi. Néanmoins, aucune magie ne semble pouvoir la réveiller pour le moment. Si tous les éléments qui sont survenus récemment sont liés, mes hommes retrouveront rapidement le coupable. Je vous le garantis. » Il semblait sincère mais je savais qu’il n’avait aucune foutue idée d’à qui il se frottait. Je ne pouvais pas le lui révéler. « Et s’ils ne le retrouvent pas et qu’il continue ? » « Alors je vous appellerai pour nous aider. Mais je refuse de vous faire travailler sur l’affaire pour l'instant, comme je n’aime pas vous savoir dans l’armée alors que votre état est instable. » Il marqua une pause. « Vous avez refusé de vous arrêter un temps donc j’ai accepté de vous maintenir dans l’armée. Cette mission est la seule que j’ai à vous proposer en l’état actuel des choses. Soit vous l’acceptez, soit je vous dispense de vos fonctions jusqu’à ce que vous alliez mieux. De toute façon, soldat Paiberym, un homme de confiance vous suivra et me rapportera vos agissements. S’il s’avère que votre état empire et que votre instabilité mette en péril mes hommes, vous devrez arrêter. »

Après un silence, je finis par prendre l’enveloppe qu’il me tendait. C’était une mission qui regroupait deux sections de l’armée : Marivaux et De Laclos. « Vous aurez les deux fonctions. Vous rencontrerez votre mentor de la section De Laclos ainsi que votre apprenti de la section Marivaux. Bétina Vaughan a jugé que vous aviez les capacités pour guider un soldat. Vous discuterez des détails de la mission lorsque vous serez arrivé à destination. Des gens comptent sur vous. J’aimerais autant que vous ne décliniez pas l’offre. » « Et pour Lucius ? » « Les Dragonniers ont accepté qu’un psychologue le suive dans sa progression et ont promis qu’ils s’occuperaient de sa sécurité. Je resterai en contact avec eux régulièrement par le biais de mes collaborateurs. Vous pouvez lui écrire. Si quoi que ce soit d’étrange venait à se produire ou s’il venait à se rappeler de ce qu’il a vu, vous en serez immédiatement informé. » « Bien. » C’était une acceptation de façade. J’allais trouver Ârès avant eux. Contrairement au Nylmord, je savais ce que je cherchais.

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Fin