Chanson thème de l’événement : Whatever You Imagine de Wendy Moten Explications générales Avec l’état de santé déclinant de la Déesse-Totem Ava, les Evershas veulent mettre en place un ordre de succession. Il faut savoir que la souveraineté chez les changeurs de forme est déterminée par l’interprétation des volontés de Phœbe. Personne ne peut légitimement réclamer le trône sans la bénédiction de la déesse de la lune et de la nature. Il y aura donc une grande fête à la cité de Dhitys pour déterminer les Evershas les plus aimés de Phœbe, et donc, les plus susceptibles de remplacer Ava. Bien qu’il soit de nature privé, un événement d’une telle ampleur ne passera pas inaperçu du reste du monde.
C’est pourquoi vous, joueurs passionnés, aurez l’opportunité de faire sortir des prétendants à la succession eversha des coins les plus reclus de votre imaginaire ! L’exécution de l’événement est fort simple. Votre personnage (peu importe sa race) entendra parler d’un ou d’une hurluberlue en lice pour devenir souverain des Evershas et réagira à sa convenance à la nouvelle dans un message unique. À vous de choisir la proportion qu’occupera votre hurluberlue dans votre message. Au terme de l’événement, je choisirai un de ces PNJs dans mon message de conclusion à l’événement.
En bref, vous vous imaginer un PNJ Evershas de niveau IV, aussi sérieux ou ridicule qu’il vous plaira. La véracité importe peu, ce qui compte, c’est que ce PNJ soit plus grand que nature. Vous devrez ensuite conclure votre message par une note de fin qui précisera à qui ira le soutien de ce PNJ s’il n’est pas élu. Vous pouvez choisir l’un des trois Evershas ci-dessous, ou l’un des PNJs créés par les autres joueurs. Optionnellement, vous pouvez également ajouter à votre note de fin comment vous voulez que votre PNJ trépasse (les meilleurs nous quittent que trop souvent avant l’heure).
Ultimement, quatre Evershas feront partie des élus. Le quatrième sera le PNJ que j’aurai choisi au terme de l’événement. Pour les trois autres, il s’agit de :
Léandra, la lionne de l’aube. La descendante de la Déesse-Totem Mélinda, qui précéda Ava. Elle incarne un courant conservateur qui aspire à un retour au « bon vieux temps » qui précéda le règne de la présente Déesse-Totem. Elle a les faveurs de trois des cinq Grandes Dynasties et des opposants au règne d’Ava.
Rakel, le seigneur des marais. Le frère de la Déesse-Totem Ava. Il incarne un courant de continuité qui aspire à préserver le statu quo. Il a les faveurs de l’actuelle Déesse-Totem et de ses alliés.
Typhon, le monstre de Durienrisda. Il s’agit de mon personnage. Il incarne un courant d’ouverture pour faire des Evershas un peuple plus accessible au monde extérieur. Il a les faveurs de deux des cinq Grandes Dynasties.
Note : les détails de tous les PNJs importants sont disponible dans ma section PNJ.
Explications spécifiques aux Evershas du Rocher au Clair de Lune ou de l’Antre des marais La cérémonie de succession à lieu à Dhitys. Il s’agit d’une cité sacrée jalousement gardée du Rocher au Clair de Lune et lieu de résidence de la Déesse-Totem Ava. Par conséquent, elle n’est accessible qu’aux personnages Evershas de niveau II ( Enfants de Phœbe) et plus. Les niveaux I (Réceptacles) sont jugés trop instables et incontrôlables pour participer aux cérémonies religieuses. Cela dit, qu’il soit ou non admis à l’intérieur de la cité, le simple fait de l’apercevoir est un événement majeur de la vie des Evershas. Il faut savoir que la plupart des changeurs de forme n’ont jamais mis les pieds à la capitaine de leur peuple. S’y rendre pour une cérémonie, quelle qu’elle soit, est donc un privilège.
Note pour les personnages Evershas vagabonds : il faut faire partie d’une meute du Rocher au Clair de Lune ou de l’Antre des marais pour faire le voyage jusqu’à Dhitys. Il n’y a ni route, ni indication qui mène à la seule cité des Evershas. Il faut donc connaître l'emplacement de la cité, ou quelqu'un qui dispose d'un tel savoir, pour s'y rendre.
Si votre personnage est de niveau I (Réceptacle) et fait le voyage en compagnie de sa meute, alors il vivra l’événement en dehors de Dhitys. Il sera en compagnie d’une poignée d’adultes de sa meute (généralement des vieillards) chargés de veuillez sur les Réceptacles. Cela dit, vous ne vous sentirez pas isolé pour autant. Ils seront des milliers avec vous à s’entasser aussi près que possible des points d’accès à la capitale pour y observer de loin ce qui s’y déroule. Ce sera tout de même une ambiance festive et vous aurez accès à plus de victuailles que vous en aurez vu de toute votre vie (pour vous amadouer).
Si votre personnage fait partie d’une meute et est de niveau II ou plus, alors il sera invité à vivre l’événement en personne. Vous y verrez alors des Evershas d’innombrables meutes. Alliés et ennemis partageront leur repas, boiront, chanteront et danseront ensemble. Aucun changeur de forme en âge ne sortira vierge de Dhitys. Des mariages spontanés seront organisés, les meutes scelleront des alliances, des couples se formeront et ce sera l’opportunité pour d’autres de se joindre une nouvelle meute correspondant mieux à ses valeurs et à ses ambitions. Ce sera un joyeux chaos qui occasionnera un dur lendemain de veille pour plusieurs et profitera grandement à d’autres.
Gains Pour un message unique de 450 mots : la nouvelle avec un n minuscule. Votre personnage peut se vanter d’avoir des informations exclusives sur la noblesse eversha. Ça ne vaut pas grand-chose, mais ça se glisse bien dans une conversion pour paraître plus éduqué. Pour un message unique de 900 mots : le gain de 450 mots plus 1 point de spécialité, 6 points de RP ou une arme. Pour un message unique de 1800 mots : le gain de 900 mots plus 1 pouvoir mineur ou un compagnon.
Date limite pour participer : 15 décembre 2023 15 janvier 2024
C’est dans le palais de Dhitys que se réunirent les Grands Totems du peuple Eversha, les représentants personnellement choisis de la Déesse-Totem. Il s’agissait d’un immeuble d’allure rudimentaire, guère plus spacieux qu’un manoir, avec de nombreux puits de lumière où la végétation soignée permettait d’héberger un grand nombre d’espèces d’animaux rares. L’on pourrait croire à une ménagerie, si ce n’était que tous les animaux étaient libres d’aller et venir où il leur plaisait dans la résidence. Une puissante magie était à l’œuvre en ces lieux pour fournir diverses conditions d’habitation, de l’aridité du désert à l’humidité de la jungle pour que toute la ménagerie puisse s’y sentir confortable. Une petite cascade d’eau pur derrière le bâtiment laissait écouler un ruisseau qui traversait le palais et permettait aux résidents de s’y désaltérer et de s’y nettoyer. Et au centre de ces espaces, se tenait la chambre de la régente des Evershas.
Rakel et Typhon, deux des sept Grands Totems présents, profitaient de cette rencontre pour se mesurer l’un à l’autre. Le premier, d’apparence humaine, avait récemment tenté, mais en vain, de se débarrasser du second, qui avait l’apparence d’un homme-serpent-tigre. Cela n’empêchait pas Rakel de féliciter son rival de sa persistance et de ses prouesses magiques, alors que Typhon acquiesçait avec un regard assassin en retour.
Si ces deux changeurs de forme étaient nés Evergrims, des Evershas pur sang, Rakel avait fait de Typhon un monstre, un Hesshas dit chimérique. Cette transformation différait du Hesshas Pery sur lequel elle était basé, car plutôt que de devenir une monstruosité difforme, Typhon avait une apparence se rapprochant de la chimère. Les Evershas étaient d’ordinaire immunisés contre une telle transformation, mais Rakel disposait des ressources et des moyens de ses ambitions. Il va sans dire que Typhon n’avait qu’une envie, c’était de retourner la faveur envers son rival. Or Rakel avait non seulement une puissance exceptionnelle, il avait également le soutien de la Déesse-Totem, sa sœur. Typhon était donc forcé de se tenir à carreau.
« Mais regarde-toi ! se moqua Rakel à l’égard de son rival. Je lis dans tes yeux la jeunesse, un esprit farouche, créatif, ambitieux même… Je comprends mieux pourquoi mes espions ont eu autant de mal à retrouver ta trace. Mais ça n’explique pas comment tu t’es sorti de mon piège… — N’est-il pas tôt pour vanter tes méfaits ? Riposta Typhon avec mépris. Tu ne voudrais tout de même pas que notre Déesse-Totem te démette de tes fonctions… — Eh, eh, eh ! Tu as encore beaucoup à apprendre de la politique, jeune guerrier. De nous tous, Grands Totems, c’est toi qui représentes la moindre menace au règne de ma sœur. Me démettre de mes fonctions ? Rien ne me ferait plus plaisir ! C’est pourquoi elle n’en fera rien. Mais sérieusement, comment tu as fait ? — Parce que tu crois que je vais te le révéler ? — Un homme à bien le droit de rêver ! Et puis zut, je n’en peux plus. Bouge-pas, je vais ajuster ta tenue. À croire que je ne t’ai rien appris… — Mais tu ne m’as rien appris ! »
C’est tout juste après que Rakel ait eu le temps de passer en revue la présentation de son collègue, qu’Ava, la Déesse-Totem des Evershas fit inviter ses fidèles représentants à la rejoindre dans sa chambre. Les mots d’Ava étant les mots de Phœbe, ce n’est pas la régente qui informa les Grands Totems des événements à venir, mais son porte-parole. La concerné se tenait dans la pénombre, caressant son serpent de compagnie. Elle portait des vêtements légers qui permettaient d’entrevoir les séquelles que le temps apportait sur son corps vieillissant. Évidemment, tous ceux présents savaient pour l’affliction qui faisait vieillir la régente, alors nul ne poussa l’audace à émettre de commentaires déplacés.
Les Grands Totems furent informés des plans pour une grande fête, suivit de la cérémonie de succession. Ce serait la plus grande fête depuis la victoire contre les Vampires à Durienrisda. Il était donc essentiel que tout se déroule comme prévu. Pour ce faire, les Grands Totems avaient un rôle bien précis à jouer. Officiellement, la cérémonie de succession avait pour but de nommer des successeurs potentiels advenant le « trépas » de souveraine. Malgré son mutisme, la colère d’Ava créa un frisson qui parcouru l’échine de tous ceux présents, signe que l’idée lui déplaisait grandement. Un geste de la main d’Ava permis au porte-parole de continuer sa narration du plan.
Il fut donc révélé, qu’officieusement, cette cérémonie était un piège. C’était un leurre pour pousser l’auteur de l’affliction à se révéler au grand jour. Car il ne fallait pas se méprendre, Ava n’était ni mourante ni affaiblie. Il en faudrait beaucoup plus pour souiller sa divine puissance. Or, l’apparence de la faiblesse était un poison insidieux qui donnait de fausses-espoirs aux esprits faibles. C’est pourquoi les élus que les Augures nommeront étaient prédéterminés par la Déesse-Totem ainsi que les Grandes Dynasties pour servir d’appâts sans éveiller les soupçons.
Il y aurait Rakel, dans le rôle du frère jaloux et désireux d’hériter du trône. Il y aurait Typhon, dans le rôle du guerrier ambitieux en quête d’une nouvelle conquête. Il y aurait Léandra, la Grande Augure qui aspirait à pourfendre Ava pour venger son aïeule. Et enfin, il y aurait un dernier candidat, dont la sélection serait laissée aux soins des Augures, dans le rôle du négligé. Ensemble, le quatuor allait offrir une diversion qui libérerait Ava de ses responsabilités pendant un temps. Et surtout, cela allait permettre aux autres Grands Totems de ratisser les plus sombres recoins du monde pour identifier la source des malheurs d’Ava.
Les intentions de la Déesse-Totem dévoilées, les Grands Totems s’inclinèrent avec respect et s’en retournèrent dans l’espace commun en compagnie du porte-parole pour discuter logistique. Le temps d’Ava était précieux, d’autant plus dans son état actuel, alors il importait de le respecter tel un joyau.
***
Rakel et Typhon se retrouvèrent seuls dans la pièce du palais qui leur fut assigné pour patienter en attendant la cérémonie de succession. Invités personnellement au Rocher au Clair de Lune, ces deux chefs de meute avaient laissé les leurs à l’Antre des marais pour veiller à leurs affaires respectives durant leur absence. Et maintenant, tel que le voulait la coutume, les deux hommes devaient ne pouvaient rentrer au bercail avant la fin de la cérémonie à venir.
En principe, c’était par les signes de Phœbe et la divination que les informations d’importance se répandaient d’un bout à l’autre des territoires evershas. Mais en vérité, les Grands Totems, avec leurs informations privilégiées, étaient les seuls à détenir l’information exacte. Ils avaient donc le pouvoir d’informer des foules nombreuses lors de cérémonies régionales. Et puis, les Augures locaux, par leurs relations avec les Grands Totems et leurs connaissances des signes, avaient accès à une partie suffisamment détaillée de cette information pour la partager avec des masses encore plus nombreuses. Enfin, les autres, qui vivaient dans les coins les plus reculés, se contentaient des signes et des rumeurs pour fournir une information approximative.
Étant donné l’élitisme qui régnait au Rocher au Clair de Lune, l’Antre des marais était considéré comme une région reculée, et ce malgré la présence de maintenant deux Grands Totems. Ces derniers étaient donc contraints au palais de Dhitys pour préserver le privilège de naître au Rocher.
« Rah !!! Nous aussi on devrait passer la nouvelle, pesta Typhon avec frustration. Il y a tant de vétérans qui ont quitté le Rocher pour se battre contre les Vampires. Ils ne méritent pas ça… — Du calme, du con. Je n’aime pas ça plus que toi, avoua Rakel, mais c’est ce qui est, et ce qui sera. Et ne t’avise pas de faire le con. Crois-moi, tu ne veux pas te mettre les Grandes Dynasties à dos. — Ouais, ouais… — Ah, mais ne fait pas cette tête ! Parce que, sérieusement, on est coincé ici. Alors, tu vas me le dire comment tu t’es échappé ? — Et toi, tu vas me le dire pourquoi tu as essayé de me faire tuer ? — Eh, eh, eh ! Mon gars, déclara Rakel en prenant ses aises sur des coussins placés au sol à cet effet. Il n’a pas été prévu de nous héberger séparément. Ma sœur estime que nous avons besoin de rapprochement. Alors, que ça te plaise ou non, tu es coincé avec moi. Tôt ou tard, tu vas me dire ce que je veux savoir. »
Typhon savait pertinemment que si Rakel l’avait souhaité, il aurait obtenu une chambre individuelle. En tant que frère de la Déesse-Totem, il avait une autorité supérieure à celle de l’homme-serpent-tigre. À son tour, Typhon s’installa à son aise, alors son corps gigantesque occupa dès lors le gros de la pièce. Rakel voulait du rapprochement ? Le Hesshas géant, long de 6 mètres 25, allait le lui imposer.
« Pas très bavard, hein ? À ta guise. — Alors, nous sommes des prisonniers, ou des invités ? — Honnêtement… les deux ? — Eh, oh ! Il y a quelqu’un !?! J’ai faim. Apportez-moi à manger avant que je bouffe Rakel ! — Eh, eh, eh ! Apportez-mens en aussi ! Et plus que lui ! — Tu crois vraiment que tu peux t’empiffrer plus que moi ? — Je vais me gêner ! — Qu’on nous apporte toute la viande que vous trouverez !!! — Là tu parles ! Allez, du con, montre-moi ce que tu vaux. Et quand je t’aurai battu, tu n’auras d’autres choix que de répondre à mes questions. »
Et c’est ainsi que les deux hommes passèrent deux journées entières à s’empiffrer. C’est à sa grande surprise que Typhon peina à tenir le rythme de Rakel. Ce dernier avait certainement trouvé une manière de tricher, car il était invraisemblable que le corps humain puisse ingurgiter autant de nourriture qu’un géant monstrueux dont le corps était adapté pour engloutir les quantités faramineuses de nourriture nécessaire à sa subsistance. Pourtant, c’est ce qui se passa et sans même que Rakel n’ait recourt à son animal Totem qui dominait Typhon en taille et en poids. Et quand le fameux alligator albinos se révéla encore plus insatiable, l’homme-serpent-tigre fut contraint d’admettre que son appétit avait été vaincu.
Rakel sut enfin comment Typhon avait échappé au naufrage de son navire par un pouvoir de téléportation vers un mystérieux monde contenant des portails qui menaient à divers endroit du monde. C’était ainsi que pendant que le plus puissant des Grands Totems avait perdu la trace de sa victime, celle-ci libérait des esclaves de l’Antre des damnés pour reconstruire sa meute qui avait été soudoyée. En retour de ses explications, Typhon apprit que son rival n’essayait pas réellement de le faire tuer. Ce n’était pour Rakel qu’une distraction parmi tant d’autres pour passer le temps. Alors en récompense d’une performance divertissante, l’homme-serpent-tigre reçut la permission d’étendre son territoire dans l’Antre des marais pour mieux y établir sa meute et accroître la puissance de celle-ci.
Typhon s’apprêtait à remercier son rival de ce soudain élan de générosité, quand il remarqua finalement que le ventre de ce dernier n’avait même pas pris un kilos. Pourtant, l’homme-serpent-tigre, lui, était gonflé comme un ballon. Le Hesshas compris alors qu’il avait été dupé.
« Tu pouvais bien me battre… il n’y a que moi qui s‘empiffrait ! Bon, aller, crache le morceau. Tu ne donnes jamais rien pour rien. — Eh, eh, eh ! Il faut vraiment que tu apprennes à maintenir ta garde, se moqua Rakel. Mais soit. Tu es ma plus grande création, tu sais ? Tu es un Hesshas qui partage les valeurs des Evergrims; un monstre qui a l’allure d’une chimère; un chef de guerre qui a mené ses troupes à la victoire. Il m’a fallu des années de travail pour obtenir un Hesshas qui plaise suffisamment à ma sœur pour devenir l’un de ses Grands Totems. J’aimerais ne pas avoir à recommencer. — Et pourtant, tu n’as aucun remords à me tendre des pièges mortels. Ça fait deux fois que je dois rebâtir ma meute par ta faute ! — Mais par Phœbe, parce que ce sont des épreuves ! Ma sœur n’a aucune compassion. Tu vois comment elle nous jette dans la fosse aux lions ? Tous ceux qui aspirent à remplacer Ava vont se ruer sur les élus, incluant les élus eux-mêmes, pour les tuer et prendre leur place jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’un. Tu n’es pas prêt. Ta meute n’est pas prête. — Évidemment qu’ils vont le faire. Et si c’est ce que la Déesse-Totem désire, alors je pourfendrai tous ceux qui chercheront à m’écarter du rôle qui m’a été donné ! Je lèverai une armée et je partirai à la conquête du Rocher au Clair de Lune, parce que c’est ce que Phoebe veut de moi ! — Et moi, je devrai t’en empêcher pour jouer mon propre rôle, du con ! Alors, écoute-moi bien attentivement. Quand tu auras échoué, parce que oui, tu échoueras, viens me voir. Ne crève pas bêtement. Il y aura un après à ces conneries. — Je m’en souviendrai. Mais comme je ne te fais pas confiance, je vais tout faire pour que ça n’arrive pas. — Peu m’importe, tant que tu restes en vie. Maintenant, ne perdons pas de temps. Il ne faut surtout pas que tu perdes ton titre d’élu le premier. Ma sœur ne te le pardonnera pas. »
C’est ainsi que Rakel passa semaines suivantes à entraîner Typhon jour et nuit. L’homme-serpent-tigre appris ainsi comment se servir de son corps de serpent afin d’asséner de violents coups de queue capable de broyer les os sans même avoir recourt à la magie. Il apprit aussi une prise de lutte consistant à tournoyer rapidement avec son adversaire sur lui-même pour le désorienter. En somme, l’homme-serpent-tigre s’inspira de l’alligator pour ajouter des techniques de combat à son répertoire. Et puis, ce fut le jour de la cérémonie de succession...
2257 mots de RP
Yllore Sùlfr ~ Eversha ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 40 ◈ YinYanisé(e) le : 22/11/2023
Nous vivions loin, si loin de Dhitys. Cela faisait longtemps, si longtemps qu'aucun n'avait mis les pieds dans la capitale. La Guerre des Crocs avait bouleversé notre quotidien de manière si drastique. Si dramatique pour certains. Si révolutionnaire pour d'autres. Pourquoi vivre reclus ? Telle était la question de ceux ayant eu le courage — ou la folie — de participer à cette guerre. En effet. Cela faisait longtemps, si longtemps que nous avions préservé la meute en évoluant dans l'Antre des Marais. La majorité de la famille en avait oublié la cause. Le gène s'était naturellement tu chez les Sùlfr de la meute, comme obéissant à l'objectif fixé par leurs derniers porteurs : se faire le plus petit possible. Faire oublier un don devenu malédiction. Ce fut un succès. Mais aujourd'hui les plus jeunes, les plus téméraires, les plus ambitieux, soulevaient l'idée saugrenue de quitter cette terre marécageuse. « La Déesse-Totem est mourante, nous n'avons plus à craindre quoi que ce soit. » était l'argument des uns, persuadés que la royauté était à l'origine de notre exil. « Nous ignorons qui lui succèdera, si tant est que quelqu'un la succède. Edel peut rendre la vie comme elle l'entend à celui à qui elle échappe. » était la réponse des autres. Et au milieu de ce débat étaient ceux partagés entre ces deux idées. Il était temps de vivre un renouveau. La Guerre des Crocs nous a montré que la distance ne nous protégeait pas des conflits de notre race. Là était une chose sur laquelle tous étaient d'accord. On ne pouvait plus se considérer isolé quand deux Grand Totem avaient élu domicile dans la même région que la nôtre. Pour autant, est-ce que cela était un argument pour retourner sur le Continent de nos origines ? Après un long moment de réflexion et de méditation, l'Augure avait tranché la question. Pour l'instant la meute resterait dissimulée dans l'épais marécage de l'Antre. Cette nouvelle reçut autant de signe de contestation que d'approbation. « Néanmoins– ». Le silence revint lorsque cet unique mot frappa l'air de tout son caractère inattendu. « –je me rendrais à Dhitys. Degataga. Ari. Vous, votre conjoint et vos enfants viendraient également. ». Un murmure s'éleva dans les airs. Légèrement en retrait, j'assistais en silence à cette convention exceptionnelle, la main entrelacée à celle de ma sœur. Sa proximité me rassurait dans ce climat d'incertitude. « Il doit y avoir tellement d'Evershas différents là-bas... » l'entendis-je souffler. Je posai mon regard sur elle, puis lui répondit. Yllore Sùlfr « Ça doit être effrayant. ». Le simple fait d'y songer me terrifiait, aussi je resserrai un peu plus l'emprise de mes doigts sur les siens. « Oui, surtout s'ils sont tous aussi forts que la Déesse-Totem ou ses seconds. ». Reportant mon attention sur Pittiulaaq, j'opinai du chef, craignant déjà pour nos aînés. « Je sais pas vous, mais le temps de l'absence de Pittiulaaq, moi je bouge pas de mon trou. » déclara Payne, notre cousine la plus proche. Du haut de son mètre quarante, elle savait tout de même se faire entendre, à l'égal du rouge-gorge qu'elle était dont le chant ricochait sur les troncs pour se répandre dans toute la forêt. « Moi j'ai peur que les quadrupèdes en profitent pour prendre la tête de la meute... », déclarai-je, un nœud contractant mon estomac de façon désagréable à la mention de cette éventualité. Je n'étais pas la seule à l'envisager. C'était d'ailleurs parce que d'autres avaient formulé l'idée que j'y songeais également, d'autant que la majorité des contestataires faisaient partie de ce groupe de carnivore. « Nous sommes encore plus nombreux qu'eux, ils ne pourr– » - « Yllore. ». Le temps se figea un court instant autour de moi lorsque la mention de mon nom me parvint. J'aurais alors aimé être à la place de Payne, c'est-à-dire petite, en sentant le poids des regards de l'assemblée sur moi. Piquée d'une énorme bouffée de stress, mes joues me brulèrent. « Toi aussi tu viendras. ». Un nouveau murmure s'éleva de la meute, tandis que j'accusai la nouvelle. Pourquoi ? Mon don avait été la cause de notre exil et je savais que l'Augure considérait cette magie comme une mauvaise chose. Alors pourquoi voulait-il que je vienne ? Mon opinion sur ce sujet divergeait de la sienne, et j'aurais dû être ravie de cette nouvelle, mais je ne me sentais pas prête à affronter le monde, à me confronter aux autres meutes. Un mouvement me tira en arrière. Yllesha. Je l'entendis prononcer quelques paroles à mon endroit, mais je fus incapable de les comprendre. Nous eûmes à peine le temps de faire trois pas avant qu'une vive douleur me saisisse, sa main m'échappant tandis que mes bras se firent ailes.
Le bras sous celui de ma sœur — la seule chose sur laquelle j'avais insisté étant la venue d'Yllesha au Rocher au Clair de Lune — j'observais chaque individu que notre petit groupe croisait avec une méfiance mêlée de curiosité. Mon regard bondissait d'une silhouette à une autre, essayant de deviner le Totem de chacun. Puis je finissais indéniablement, après avoir détaillé une dizaine de personnes, par lever les yeux sur la capitale. Ça ressemblait donc à ça une ville ? L'ersatz de meute avançait lentement, aidé par les coups de canne que mettaient les deux Augures — en la personne de Pittiulaaq et sa concubine, Killa — en amont dans les jambes des autres. Ça me faisait sourire de voir la façon qu'avaient nos aînés de s'imposer dans la foule. Les regards mécontents de ces derniers avaient cependant pour effet de taire mon amusement. « Ari, Degataga, vous avez libre court d'entrer pour assister par vous-même à la cérémonie. » - « Et vous ? » - « Moi, je veillerais sur nos jeunes Réceptacles. Killa ira avec vous. ». En même temps qu'il prononça ces mots, la concernée approuva par un sourire. « Surveillez vos mots et vos actes. Les plus grands noms résident à Dhitys. Ce que l'un de vous fait ou dit se répercute indéniablement sur le reste de la Meute. » mit-elle en garde les privilégiés pouvant passer les portes de la capitale. Autour de nous, le brouhaha prit soudain de l'ampleur, mettant un terme à la conversation du groupe. Nous portions alors tous notre attention sur l'objet de cette nouvelle ambiance. Là, avançant au centre d'un large sillon, une petite silhouette marchait, droite et fière, suivie par quelques autres individus d'une même stature. Malgré sa taille il y avait une chose qu'elle dégageait rendant sa personne difficile à manquer et qui m'intrigua au plus haut point. Comment un être si petit pouvait donner la même impression qu'un géant de deux mètres ?
Amalia posa un regard à gauche. Puis elle tourna la tête à droite. Puis son attention revint sur la grande porte de Dhitys de laquelle ils approchaient. Son pas était lent, mesuré, un peu flegmatique. Une forme de méfiance brillait dans les yeux amènes de la jeune femme. Cette méfiance qui éclairait le regard de tout animal ne pouvant prétendre au titre de prédateur. Malgré sa petite taille, elle dégageait une forme d'assurance qui obligeait au respect, y compris des géants composant certaines meutes. N'est pas appelé à succéder à la Déesse-Totem qui veut et Amalia avait fait ses preuves quand bien même son Totem soit l'un des moins pris au sérieux. En effet, la femme arborait sous forme animale celle du koala. À cause de ça, elle s'était vue contrainte à quitter sa propre meute de naissance dont les mœurs et les habitudes divergeaient trop des siennes pour qu'elle y demeurât. Elle avait construit de ses mains et par sa volonté un clan correspondant au lent mais exigeant style de vie de son Totem. Il s'était ensuite agrandi en recueillant les mal-aimés et mésestimés Totems des Evergrims. Là était la cause l'ayant menée à ce jour. Elle avait rapidement assimilé que sa condition l'empêchait de prendre le dessus par la force, que seule, jamais elle ne pourrait faire face au monde sans craindre pour sa vie. Pour ces mêmes raisons, elle n'agissait jamais de façon précipitée. Ses actes étaient chaque fois murement réfléchis de sorte à ce que les moyens mis en place soient les moins couteux possible, qu'il s'agisse de temps, d'accessoire, ou tout simple de vie. Une réussite résultant de pertes trop grandes n'en était pas une à ses yeux. De ce fait, pour elle, la Guerre des Crocs fut un véritable échec dans la victoire qu'avaient obtenue Rakel et Typhon. Mais ce qui était une qualité chez elle était également son plus grand défaut. Agir dans l'instant sans prendre le recul nécessaire la mettait dans une posture désagréable et lui faisait régulièrement prendre des décisions qu'elle regrettait par la suite. « Amalia, tu ne crois pas qu'il serait plus prudent de répondre à l'appel pour nouer une alliance seulement, et non pour parvenir à obtenir la faveur de Phoebe ? ». Son amie, sa sœur, son amante, Clara, était toujours inquiète dans ce genre de situation. Elle était plutôt de celles qui fuyaient la confrontation dès lors qu'elle impliquait un prédateur, à l'égal de l'écureuil qui l'habitait. Or, aujourd'hui, ils étaient pour sûr au moins trois carnivores à attendre la mort d'Ava pour se saisir du trône. « En d'autres occasions, peut-être. Mais aujourd'hui est un jour de festivité pour tous. » répondit l'Augure avant de balayer la foule du regard. « Regardes les, tous ces enfants. Ils sont autant à craindre que les Grands Totems. Combien d'ours, de lions ou de loups sont dissimulés parmi eux, des créatures incontrôlables qui seraient prêtes à se jeter sur leur propre sang dans un élan de primitivité. ». Ces paroles arrachèrent un frisson d'horreur à son amie. « Et pourtant aujourd'hui ils sont tous là, au pied de Dhitys. Le répit est de mise pour la journée à venir. ». Une moue plissa la bouche de l'écureuil en un mince fil rosé. Elle n'était pas totalement convaincue par l'assurance de la cheffe de meute. « Aujourd'hui peut-être. Mais demain sera un nouveau jour placé sous d'autres augures. ». Amalia sourit. « Je ne suis qu'un koala. Si certains Grands Totems devaient chercher à évincer quelqu'un en premier, ce serait un Eversha avec un Totem bien plus puissant et imposant. On ne gagne pas en crédibilité en se débarrassant de plus faible que soi. C'est même tout le contraire. ». Bien qu'elle se soit pas en reste non plus. Elle ne brillait peut-être pas par sa force ou sa célérité, néanmoins elle avait appris à affûter sa réflexion et à aiguiser sa magie. Mais ça, ils n'avaient pas besoin de le savoir dans l'immédiat. Sa vis-à-vis ne sembla toujours pas convaincue cependant. « N'as-tu pas confiance en moi ? ». La question eut pour effet immédiat de faire naître un sentiment de culpabilité chez la sceptique. Amalia était celle qui avait unifiée les Totems les moins valorisés. Paresseux, écureuils, mulots, kakapos... Ils étaient devenus un bloc où chacun faisait confiance à l'autre et l'aidait en cas de pépin. Amalia avait su les guider et les protéger des prédateurs par des méthodes inhabituelles, propres à ce à quoi pouvait penser une proie pour la survie de son espèce. « Bon sang, ce que je rêve qu'on arrive pour se poser. J'en peux plus de marcher, je ne sens plus mes pieds. » lâcha la koala dans un soupir las, ce qui eut le don de faire rire sa sœur. Il y avait certaines choses qui ne changeaient pas chez un individu, quand bien-même celui-ci prenait du galon.
Je n'arrivais pas à détacher mes yeux de la petite personne à la tête du groupe et éclipsant ses suivants, quand bien même son ombre ne soit pas bien grande. L'air me manqua alors soudainement. Une force tranquille frappa mes épaules et étreints mon être tandis que, dans un mouvement furtif, je croisai les iris de cette personne. Ce ne dura qu'un court laps de temps, à peine de quoi ancrer chaque ondulation de couleur dans ma rétine. Ce fut pourtant suffisant pour me marquer pour ce que je supposai être à vie. Il était des personnes qui s'imposaient par la taille, d'autres par la voix, d'autres par la force. Cette Eversha n'était d'aucun de ceux-là. Je le sentais. On disait qu'un mot pouvait être aussi efficace que le tranchant d'une arme. Faisait-elle partie de ces orateurs mortels ? « Ils sont tous comme ça dans la capitale ? » demandai-je en me tournant vers les deux Augures de ma meute. « Non. Ceux-là sont une poignée. Ils seront néanmoins tous présents aujourd'hui. » rassura en partie Pittiulaaq de sa voix chevrotante. « Je suis bien contente de rester là alors. » entendis-je souffler Yllesha.
— Il y a de l'agitation concernant l'état de santé de la Souveraine des Evershas.
Lancinia s'interrompit, loin d'être contrariée par le manque d'attention que Mancinia portait aux nouvelles. Assise à son bureau, l'Humaine était en train de lire un document tout en prenant des notes sur des points important pour rédiger un rapport plus concis. Pour autant, ce n'était qu'un moyen pour elle de faire comprendre qu'elle attendait simplement la suite, n'ayant rien à dire sur quelque chose qui s'apparentait plus à une rumeur qu'a un fait.
— En raison de cette inquiétude, la désignation d'un successeur devrait être effectuée sous peu. Ils sont actuellement quatre en lice pour obtenir les faveurs de leur peuple, ainsi que celui de Phoebe, pour ainsi prendre la suite d'Ava.
Combien de règnes avaient-elles vu se créer et s'éteindre ? Cela ne devait pas être surprenant, ni inquiétant, ce qui était nécessaire était de savoir si le changement de régime conserverait le statu quo entre les deux nations, voire serait profitable ou, au contraire, ferait s'effondrer ce qui avait été bâti. L'avenir, c'était ce vers quoi Mancinia était tournée. Juvaniel semblait promettre un avenir rayonnant de Paix, mais aucune des deux n'y croyait vraiment. Elles allaient simplement jouer le Jeu comme elles l'avaient toujours fait jusqu'à la prochaine trahison conduisant à la prochaine guerre. Lancinia avait autant à coeur les ambitions de Mancinia. Elles étaient les mêmes, mais avec des ambitions et des volontés différentes. Celle qui devait agir comme sa doublure était devenue sa source d'informations la plus fiable ; en glanant des informations partout où ses oreilles pouvaient entendre, sa place était assurée. Son travail à la Joaillerie permettait de saisir des opportunités, que ce soit au comptoir ou durant ses voyages. Pour autant, elle était certaine que Mancinia avait déjà conscience des noms des futurs désignés, de leurs atouts, de leur alignement envers les Enfants de Sympan, mais cela ne voulait pas dire qu'elle pouvait se permettre d'être négligente dans son rapport sous prétexte d'une légère fatigue. On ne pouvait pas gérer chaque difficulté pour elle, l'Humaine devait faire ses preuves et se démarquer avec un talent qui lui était propre.
— Il y a Léandra, surnommée la Lionne de l'Aube. Fille de l'ancienne Souveraine, Mélinda, elle s'est toujours farouchement opposée à la prise de pouvoir d'Ava suite aux circonstances de la disparition de sa mère. Autant dire que cette dernière bénéficie de tous les soutiens inverse de son adversaire, Rakel. Il est ... Le Seigneur des Marais. Il est le frère d'Ava, en totale guerre de successions contre Léandra puisqu'il bénéficie de tous les soutiens de sa soeur affaiblie. — J'ai envie de croire que ce sera Typhon qui sera choisi.
L'intervention de Mancinia lui fit comprendre que ce n'était pas nécessaire de poursuivre. Elle avait son favori dans la liste depuis un moment puisque, après tout, ce dernier était ouvert d'esprit et avait à coeur de renforcer alliances et entendes des siens. Une ligne de conduite comparable à la personne assise qui avait oeuvré à la prospérité de quelques liens désuets en s'assurant qu'ils soient remodelés avec ce que désiraient les générations actuelles.
— Il est vrai que Léandra est conservatrice et que Rakel n'aura pas le soutien des militaires du Royaume.
L'ancienne Reine n'avait pas eu de graves reproches à leur encontre et laissait les Evershas pratiquer le commerce à Utopia pour maintenir un semblant de lien. Cette neutralité pouvait être arrangeante avec Léandre, à l'inverse de Rakel, puisque les pertes dans l'Antre des Marais demeuraient aussi un mauvais souvenir dont certains lui imputait. Qu'ils aient raison ou tort laissait présager un avenir assez tendu. Typhon, lui, était assez réputé pour avoir offert une oasis à la Matasif Leenhardt lors de son mariage. Certainement le cadeau le plus prestigieux reçu par l'Humaine et qui permettait de s'orienter dans la partie où il avait été implémenté tout en permettant à une nouvelle variante d'espèce de prospérer. Des vaches du Désert. De quoi faire rire, mais qui tenait vraiment au coeur de Mancinia qui prenait soin de l'entretien et de la vie de ses animaux, comme l'avait enseigné Drejtësi à tous les Humains. Peut-être était-ce la raison de la proximité des Enfants de Sympan et des Evershas ? Lancinia eut un petit soupir, les doigts serrant la paperasse qu'elle tenait près du coeur et qu'elle ne prenait que pour se rassurer. Sa mémoire était plus vive et elles retenaient de meilleures informations, ce qui lui permettait d'éviter de faire des bourdes.
— Ah, il y a un autre candidat dont je n'ai pas fait mention.
Sans doute parce qu'il s'agissait du moins important. Tout du moins en apparence ... littéralement.
— Talochard ... C'est assez délicat de la cerner. Farouche, elle est fière de son sang pur et aurait pour but de militariser les Evershas. Tous les Evershas. Elle ne cesse de parler de revanche envers certains voisins et tient quelques partisans de son côté, avides de faire la guerre. C'est la moins pacifiste de tous et affiche clairement des intentions belliqueuses, y compris pour certains membres de sa race qu'elle n'hésiterait pas à offrir en offrande à la Lune. — On dirait une fanatique. Peut-être une admiratrice de la Guerre des Dieux. — L'on dit qu'elle coupe la langue de tous ceux qu'elle tue et se ferait un collier avec, comme si du sang de Démon coulait dans ses veines. Ce qui est le plus surprenant ... c'est son totem. — C'est une Eversha Papillon, c'est ça ?
Assez ironique quand il s'agissait aussi du symbole qui caractérisait les Gardiens Azurées. Pour autant, ils seraient bien idiots de sous-estimer les Lépidoptères sous prétexte farfelu qu'ils soient fragiles.
— Certainement une espionne par excellence pour faire tomber ses adversaires. Peut-être a-t-elle des dossiers compromettants sur ces derniers et, inévitablement, qu'ils ne manqueront pas de vouloir la faire taire d'une manière ou d'une autre. Les successions peuvent se régler dans le sang, surtout avec des adversaires aussi extrêmes.
La plus faiblarde du groupe serait certainement une alliée de poids, ou une alliée parasite qui ne manquerait pas de trahir au bon moment. C'était à double tranchant et une personne malavisée risquait de voir son sang couler à la place de la personne prévue. Mancinia se demandait ce qui allait se produire tout en ayant conscience que la suite n'était pas de son ressort. Elle ne pouvait rester qu'assise. Et attendre.
Mancinia & Neah Aimer c'est ce qu'y a d'plus beau. Aimer c'est monter si haut. Et toucher les ailes des Anges ...
By Astriid ♫
By Shanxi ♫
Dürdane Bēkara ~ Eversha ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 192 ◈ YinYanisé(e) le : 09/01/2022◈ Activité : Boulangère [Rang I]
Dim 14 Jan 2024, 15:59
– Les enfants ! Les enfants, on se calme et on écoute le cours, tenta de se faire entendre la Professeure Akli de sa voix stridente.
Pff... Aucune autorité, releva une fois de plus mentalement Dürdane qui n’appréciait toujours pas les méthodes d'enseignement de la professeure de « Culture et Connaissances des races et des empires : intérieur et extérieur ». On va vraiment devoir la supporter jusqu'en dernière année ?
Comme pour répondre à sa question muette, Erkan se pencha vers la jeune fille et lui chuchota d'une voix de conspirateur :
– Il paraît qu'elle traite les Sixièmes Années de la même façon. Même qu'une fois, elle en a envoyé un au coin, comme un bébé ! C'est ma sœur qui me l'a dit.
– Super, grommela Dürdane, peu enthousiaste à l'idée de se faire infantiliser ainsi jusqu'à ses dix-huit ans par quelqu'un qui n’était même pas capable de garder sa classe attentive.
– Silence ! Voilà, alors, aujourd'hui, nous allons parler de la race des Evershas. Vous savez, cette race d'homme-bête qui vit recule au delà de la chaîne de montagnes des Edelweiss.
Encore un super cours en perspective... commenta intérieurement Dürdane en se massant les tempes en prévention du mal de crâne qui finirait forcément par survenir.
– Il nous est parvenu qu'en ce moment une grande fête a lieu dans leur capitale au Rocher au Clair de Lune. Elle s'appelle Dhitys, et c'est une ville tenue aussi secrète que notre adorée Qaixopia ! Alors, d’après vous, que célèbrent-ils ?
– Moi je sais ! C'est pour la religion ! lança Illi en même temps qu'elle levait la main.
La Professeure Akli se tourna vers elle et lui fit les gros yeux pour signifier son mécontentement face à son comportement mais cela n'eut pas le moindre effet sur leur turbulente camarade de classe qui essuyait régulièrement de pires remontrances de la part du corps enseignant.
Dürdane décocha un bâillement discret, ce cours ne l’intéressait aucunement. Ces arriérés bouseux et primitifs pouvaient bien faire ce qui leur chantaient tant qu'ils restaient chez eux avec leur magie écœurante et leurs changements de formes pas naturel.
Dürdane fut brutalement sortie de sa rêverie par l'effervescence qui venait de gagner la salle de classe. Tout le monde s'agita autour d'elle et les tables furent rapidement déplacées dans un joyeux brouhaha.
– On fait un travail de groupe, lui souffla Erkan face à sa mine déconfite. On va devoir piocher un nom d'Eversha connu et l'associer à ses hauts fait pour ensuite déterminer qui pourrait succéder à la Déesse-Totem Ava.
– Erkan ! Je peux me mettre avec toi ? Comme ça je suis sûre que notre champion sera le mieux dessiné !
À cause de la sollicitation impromptue et envahissante d'Illi, Dürdane dut ravaler la remarque acerbe qui lui était spontanément venue aux lèvres mais elle n'en pensait pas moins. Elle trouvait cet exercice idiot et inutile et ne comprenait pas en quoi cela l'aiderait dans sa vie de tous les jours de connaître le nom ou les exploits du potentiel futur dirigeant des Evershas.
– On a tiré Rougou Gulabi ! annonça Erkan en sortant le bout de papier du sac qui passait de groupe en groupe.
Les trois camarades purent ensuite lire la description succincte qui était associée à ce nom.
– Un flamant rose, cracha alors Dürdane. Mais quel est l’intérêt de pouvoir se transformer en flamant rose ?
– Hum... Pouvoir voler, j'imagine, lui répondit Illi, hésitante. Ça vole bien un flamant rose, hein ?
Erkan, Illi et Dürdane se regardèrent avec perplexité avant de hausser les épaules car aucun d'entre eux n'avait jamais croisé ce genre d'animal, hormis dans les livres d'images pour enfants.
– À dompté la Hyène d'airain... à gagner le tournoi des Savāra... lista Erkan en déchiffrant l’écriture rugueuse de leur professeure au tableau. À créé une oasis... ah non, ça c'est sûr, c'est l'exploit de Typhon Gargantua !
– Qu'est-ce que notre petit flamant rose a bien pu faire, lui, pour se démarquer des autres ? se demanda Illi à voix haute.
– Sûrement pas la prouesse de rallier six meutes à lui tout seul, grinça Dürdane en contemplant à son tour le tableau noir. J'imagine qu'il faut être sacrement fort pour ça.
Illi et Erkan acquiescèrent avant de se replonger dans l’énumération des hauts fait disponibles, néanmoins, Dürdane n'y tenant plus brisa le silence d'un commentaire qui la taraudait depuis le début du cours :
– Sérieusement, comment on peut être sain d'esprit avec un corps qui n'est pas bien défini. Vous vous imaginez vous, vous transformer en animal comme ça, n'importe quand, n'importe comment ?
– Je suis sûr que je ferai un magnifique lévrier ! nota Erkan en inspectant son corps dégingandé avec un large sourire.
– Oh, non, je te verrai bien en corgi plutôt ! ajouta Illi tout aussi joyeusement que son camarade. On dit que c'est un chien heureux qui sourit tout le temps.
– C'est vrai, il paraît que l'apparence de la forme humanoïde d'un Eversha est liée à l'apparence de son animal, exposa le jeune garçon en saisissant précipitamment un crayon. Mais alors, à quoi pourrait bien ressembler Rougou Gulabi ? Un flamant rose, ça a de longue pattes n'est-ce pas ? Et un long cou ?
Tout en développant ses idées à l'oral, Erkan les esquissait sur le papier tandis qu'Illi battait des mains gaiement pour l'encourager.
C'est à ce moment là que Dürdane se prit la tête entre les mains, sentant poindre le mal de crâne pressenti au début du cours.
Ils se sont bien trouvé ces deux là, il n'y en a pas un pour rattraper l'autre, grommela-t-elle entre ses dent avec une pointe de jalousie.
– Mais bien sûr ! s'exclama brusquement Illi comme frappée par une évidence. L'exploit de Rougou, c'est d’être le meilleur Eversha pêcheur de perles !
– Oui tu dois avoir raison, avec ça, il peut faire du commerce, faire prospérer sa tribu et donc devenir souverain ! compléta Erkan vivement.
Dürdane, quant à elle, avait fini par décrocher complètement de l'exercice, ne comprenant pas l'engouement qu'éprouvait son ami pour ce cours. Que chaque race reste bien tranquillement chez elle et tout le monde pourrait enfin vivre en paix.
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Notes : - Le soutien de Rougou Gulabi ira à Typhon Gargantua pour son ouverture sur le monde extérieur. - S'il doit mourir c'est le cou tordu et la tête servant de maillet de croquet !
Dürdane Bēkara ~ Eversha ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 192 ◈ YinYanisé(e) le : 09/01/2022◈ Activité : Boulangère [Rang I]
Je levai vivement la tête en entendant la porte s'ouvrir. Un vent de panique m'alimenta soudainement en songeant à leur réaction en me découvrant sur le canapé. J'en descendis donc rapidement et feins l'innocence en me précipitant à leur rencontre, brassant l'air de ma queue et la gueule grande ouverte. J'étais si heureuse de les savoir de retour, enfin. J'avais pleuré à leur départ, les avait appelé pour qu'ils reviennent. Puis je compris que ça ne servirait à nouveau à rien. Alors j'avais abandonné le pas de la porte pour les coussins du canapé en cuir épais. Je jetai un œil sur le coucou de l'entrée. Trente minutes ? Ils s'étaient absentés pendant trente minutes ? J'avais eu l'impression de les avoir perdu toute une après-midi tant le temps fut long, même en passant le temps en faisant une petite – « Roxane ! » – sieste... Les oreilles baissées, je fis mine de ne pas l'avoir entendu et continuai à faire la fête à Marie. Mais lorsqu'il réitéra son appel avec plus d'autorité, je fus bien contrainte d'y répondre. À pas de loup — un cousin lointain de ce que j'ai cru comprendre — , je revins au salon où je le savais mon maître m'attendait. Les oreilles rabattues, je détaillai son expression, sachant parfaitement ce qu'il m'était reproché. Malgré les remontrances, je continuai à m'approcher, jusqu'à être à un mètre de lui. Je commençai alors à balayer l'air de ma queue en me rapprochant encore jusqu'à me coller à ses jambes et m'asseoir sur ses pieds, le museau haut levé. Je pus ainsi constater, ô joie, son visage se détendre et un sourire peindre ses lèvres. Ma propre expression se modifia pour exprimer le bonheur de le voir me pardonner. Encore quelques secondes et j'accueilli sa main sur ma tête avec ravissement comme il m'excusa enfin. Je lui fit alors part de mon sentiment d'un jappement ravis, puis m'éloignai en sautillant vers la cuisine, la gueule ouverte et la langue pendante. Au bruit qui me parvenait, Marie devait être en train de ranger les courses. « Marie ! » la saluai-je dans un nouveau jappement en me collant à elle. « Roukette ! » me répondit-elle en se penchant sur moi, ébouriffant ma tête en plaçant ses mains de chaque côté de mon visage. « Roukeeeeeeeeette ! ». Je me dressai vivement, tournant l'encolure vers Sophie qui revenait du jardin en courant vers moi. « Sophie ! » répondis-je avec un aboiement heureux. Elle était partie chez une copine hier soir. Elle m'avait terriblement manqué tout ce temps passé sans elle. C'était vraiment l'une des plus belles journées que je pouvais vivre donc. Franck et Marie, de retour après un temps trop long loin de moi, Sophie revenue après une éternité d'absence, des caresses de la part de chacun, un câlin énorme de ma petite sœur — c'était toujours comme ça qu'ils l'appelaient, ma petite sœur — et même... Oh mon dieu, était-ce réellement ce à quoi je pensais ?! J'exprimai ma gratitude en faisant un tour sur moi-même, prenant à peine garde aux battements de ma queue qui s'écrasaient sur le visage de Sophie, puis me saisis à pleine gueule de l'os à moelle que Marie me tendait. Je rejoins enfin mon panier, plus heureuse que la plus heureuse des personnes.
Brunel — la peluche qu'il m'avait offerte le jour où ils m'eurent adopté — sous une patte, mon os à ronger coincé entre mes deux pattes, Je tendis l'oreille en entendant le ton soucieux de Marie et, surtout, mon nom être prononcé. Tout n'était pas très clair du fait des murs qui les séparaient de mon lit, aussi je me décidai à les rejoindre, confiant mon os à Brunel. « Je ne comprends pas d'où vient le problème. Elle ne serait pas la première Eversha à y être envoyé. ». Je posai ma tête sur la cuisse de Marie que je sentais plus inquiète que Franck. « La question n'est pas là. Tu l'as lu toi aussi dans le journal, la situation des Evershas n'est pas la plus stable qui soit. » rétorqua-t-elle en posant une main sur ma tête. « Déjà que ce n'est pas une race avec une hiérarchie très stable... ». Franck et Marie m'avaient appris ce qu'étaient les Evershas lorsqu'ils assistèrent à l'une de mes transformations involontaires. Je ne m'étais cependant jamais trop senti appartenir à cette race. J'étais simplement une chienne, celle de Franck, de Marie, et de Sophie, et ça m'allait très bien comme ça. « Ils disent même qu'ils se sont réunis à Dhitys. Ce n'est pas un bon signe. Tu te souviens de ce monstre qui était là pendant le mariage de la Marquise Leenhardt ? Certains journaux affirment qu'il serait un prétendant au trône. ». Je grognai à la mention du monstre en question. Je ne l'avais aperçue que de loin, mais ça avait été suffisant. Il faisait peur. Je ne l'aimais pas. Quoiqu'il en soit, cette discussion me concernait moins que ce que je pensais. Je fis donc demi-tour et allais chercher une balle que je posai aux pieds de Franck avant de m'asseoir, en attendant qu'il s'en saisisse. « Et c'est ça qui t'inquiète ? Tu sais qu'à Basphel elle sera épargnée de ce qu'il se passe ici-bas. ». Je me redressai et sautillai en avant pour donner un coup de pattes dans la balle et la rapprocher des pieds de Franck. « Elle l'est plus encore ici, avec nous. ». Je voulus attirer leur attention d'un jappement. « Tu aimes les éléphants, n'est-ce pas ? » - « Je ne vois pas le rapport. ». Cette conversation commençait à m'agacer. Pourquoi est-ce qu'ils préféraient parler plutôt que jouer avec moi ? « Wouf ! ». Le couple se tourna sur moi. « Va voir Sophie pour jouer s'il te plaît. » intervint enfin le Magicien. Je reniflai néanmoins de mécontentement et décidai de plutôt bouder, retournant ainsi à mon os à moelle.
Loin de la tranquillité de la maisonnée, par-delà l'Edelweiss enneigé, au fond d'une forêt dense, quelques jours à peine avant qu'ait eu lieu cette discussion, arrivait le rapport entre la mention de l'éléphant suivant l'échange concernant la politique Eversha. Un homme avançait vers la capitale, suivie de quelques individus. La tête haute, il frayait un chemin à sa meute avec la démarche d'un mannequin. Le groupe suivait son chemin en formant une ligne droite, son épouse fermant la marche et veillant sur les plus jeunes au cœur de la file. Il n'était ni trop grand, ni trop petit. Ni trop fort, ni trop fin. Il pourrait presque passer inaperçu dans la masse en fait et son silence n'aidait en rien. Pourtant quelque chose dénotait chez les siens, et chez lui plus particulièrement. Cette chose, c'était la sagesse. Dans son regard. Dans sa posture. Dans ses expressions. Il posait sur le monde un œil paisible, humble, sérieux, critique. Baako était le descendant d'une récente lignée d'Eversha mastodonte. Il avait eu un frère et une sœur, tous les deux incarnés par le rhinocéros, là où leur cadet était né comme lui, éléphant. Pour la sauvegarde de la meute, il avait dû demander aux deux premiers de quitter le groupe. Il gardait néanmoins des relations parfaitement fraternelles avec eux et des plus cordiales avec leurs meutes respectives. Car c'était ainsi qu'il voyait les choses. Une politique basée sur l'entente, les compromis, la paix, les échanges, était une politique d'union selon lui. A ses yeux, la guerre ne menait qu'à la mort de la race. Il suffisait de voir les meutes les plus sauvages et barbares, et les relations qu'elles entretenaient avec les autres. Lui préférait protéger ceux qui devaient l'être plutôt que d'ouvrir l'offensive. Qu'il soit carnivore, herbivore, petit, grand, à plume ou à écaille, il ne faisait aucune distinction. C'était en cela que lui et sa meute étaient connus. Cela ne voulait néanmoins pas dire qu'il proscrivait la violence. Il la savait parfois nécessaire et l'incarnait avec force lorsqu'il devait en faire usage. Gard à celui qui s'en prendrait à sa famille. Paisible, oui, il l'était. Implacable, il l'était tout autant. Baako chargeait, piétinait et transperçait celui qui ne fuyait pas malgré les coups de semonce qu'il pouvait donner. Ceux-là étaient, de toute façon, fous pour s'en prendre à une famille d'éléphants, et donc voués à une mort proche.
Mots 1398 | Allégeance : Aucune particulière. Eventuellement il soutiendrait moins Rakel, Talochard et Yushka mais sans s'opposer non plus. Lui et sa meute ne sont en guerre avec personne à l'heure actuelle et ils ne comptent pas y entrer. Il continuera à vivre et faire vivre sa meute comme d'ordinaire, qu'importe le prochain souverain potentiel. Il se montrera hostile envers l'un ou l'autre Eversha seulement s'il s'en prend à son clan. C'est un pacifiste et diplomate avant tout.
La lettre trônait fièrement sur son bureau, aussi colorée et clinquante qu’à son habitude : l’enveloppe, d’un doré scintillant, se paraît de liserés d’un rouge si chatoyant qu’on aurait cru qu’une langue de feu parcourait le papier. Le parfum de sa tante avait pénétré les narines d’Aubépine bien avant qu’elle n’atteigne le seuil de la chambre. Un grand sourire aux lèvres, elle sautilla jusqu’à la fenêtre en se pinçant le nez. Si cette odeur était toujours porteuse d’une bonne nouvelle – une réponse de sa tantine préférée ! -, elle n’arrivait toujours pas à s’y accommoder. L’air frais s’engouffra dans la pièce et après quelques minutes d’aération, la petite Magicienne retrouva sa main libre. D’ici la fin de sa lecture, ses yeux cesseraient de lui piquer. L’excitation faisait trembler ses doigts, mais elle parvint à utiliser son coupe-papier sans déraper, cette fois. Comme d’habitude, Phil avait filé à la première occasion. Ça arrangeait bien l’adolescente ; ainsi, le hibou ne laisserait pas traîner ses yeux où il ne fallait pas. Ça ne l’étonnerait pas qu’elle sache lire. L’inconvénient, c’était que si Aubépine se blessait, elle ne serait pas là non plus pour la soigner.
« Elle a fait vite, cette fois ! » s’enthousiasma la Magicienne, drôlement contente d’avoir reçu une réponse aussi rapidement. Des paillettes lui sautèrent au visage lorsqu’elle extirpa la lettre soigneusement pliée de son enveloppe.
Quand elle avait eu vent de ce qui allait se tramer prochainement à Dhitys, l’adolescente avait immédiatement pensé à sa tante. En plus d’être très cultivée, c’était aussi la seule de sa famille à ne pas esquiver ses questions, quelle qu’en soit la teneur. Pour elle, la curiosité était une qualité, et elle ne rechignait aucunement à assouvir celle de sa nièce. Pourtant, les Hommes-Bêtes n’était pas un sujet qui avait beaucoup intéressé la jeune fille jusqu’ici. Ils ne lui semblaient pas assez maléfiques pour entrer en ligne de compte dans les plans de son grand projet. Elle les imaginait comme un peuple un peu primitif, aux mœurs et aux rites étranges, certes, mais pas de quoi fouetter un Eversha, justement. De toute façon, ils restaient bien sagement entre eux dans leurs forêts. Du moins, c’est ce qu’elle croyait, jusqu’à ce qu’elle réalise que Basphel en comportait toute une flopée. Ça l’avait suffisamment intriguée pour qu’elle se penche un peu plus sur la question. Elle avait alors compris que la race était bien plus complexe qu’elle ne le pensait. Avec stupéfaction, elle était même tombée sur quelques hauts faits accomplis par certains d’entre eux qui lui avaient délicieusement glacé le sang.
Connaître une succession de son vivant, c’était une sacrée chance. Évidemment, elle ne pourrait pas y participer, même de loin. Cependant, Aubépine flairait là l’opportunité d’approfondir ses connaissances sur une race qu’elle avait peut-être mis de côté à tort. Et si elle pouvait en plus épater ses camarades Evershas pour la même occasion… pourquoi hésiter ? Elle avait donc écrit à sa tante, prétextant devoir préparer un exposé pour une classe et lui demandant ce qu’elle savait des élus potentiels à cette fameuse succession.
« Ma chère petite bouille de Magicienne,
Quel sujet captivant que tu abordes là ! C’est un plaisir pour moi de t’y répondre. Mais dis-moi, n’as-tu donc pas étudié la guerre des Crocs à l’école ? Si ce n’est pas au programme cette année, je te conseille d’y regarder de plus près par toi-même. Ça concerne aussi les Vampires, que tu affectionnes déjà un peu plus… hihi !
Quant à ta question, aussi intéressante soit-elle, permets-moi de te répondre légèrement à côté. Je suis certaine que beaucoup de tes petits camarades de classe sont en ce moment-même en train de préparer leurs exposés sur Typhon Gargantua, le monstre, ou bien sur la descendante de Mélinda la vaincue, Léandra. Si tu veux te démarquer, il va falloir aller voir ailleurs. Oh, je pourrais te citer pléthore de candidats aux méthodes barbares, comme tu me l’as expressément demandé. Mais ma chérie, comme je vais peut-être te l’apprendre, tout ne se règle pas par la violence, chez les Hommes-Bêtes !
Il se trouve que je m’étais renseignée il y a quelques années sur Haggo le Rutilant, l’un des prétendants au titre de Dieu-Totem aujourd’hui. Si sa couleur préférée est le rouge, ça n’a rien à voir avec le sang que d’autres aiment répandre sur les champs de bataille, crois-moi ! On dit de cet individu qu’il a un charisme et un bagou exceptionnels, et c’est grâce à la négoce et à son sens du compromis qu’il est parvenu à faire prospérer son groupe et à rester en bons termes avec les chefs de meutes les plus sanguinaires. C’est par son capital et sa main-mise sur le commerce qu’il accroît son territoire. Il tient d’ailleurs son titre de son goût prononcé pour les belles choses, que ce soit les bijoux, le maquillage ou les tissus de qualité. Lui et moi avons cela en commun !
Étant donné que son Totem est celui du Bonobo, certaines mauvaises langues se plaisent à affirmer qu’il est né de l’union d’un chimpanzé et d’un Luxurieux. Évidemment, ce sont des foutaises. D’après de nombreuses sources, Haggo est issu d’un groupe de Bonobos de Sang Pur, et il l’est lui-même. Cela dit, et je pense que tu es assez grande pour le savoir, les relations charnelles sont effectivement une de ses façons de résoudre les conflits. Il aime organiser de grandes soirées fastueuses qui virent inéluctablement en orgies. De nombreux litiges politiques furent réglés de la sorte. Il est notamment connu pour avoir dit un jour : « Le coït plutôt que la mort ! » Passionnant, n’est-ce pas ? J’imagine que c’est dans cette optique qu’il envisage son ère en tant que Dieu-Totem.
Oh, ne dis pas à ton père que je t’ai parlé de ça, tu sais comment il est ! Il croit encore que tu es sa toute petite fille mais contrairement à lui, je me souviens ce que c’est d’être une adolescente de ton âge ! Ah, quelle période bénie, tout ce bouillonnement d’hormones, la beauté de la jeunesse… ça me manquerait presque ! Mais c’est plutôt un sujet à aborder autour d’une tasse de thé ! Je veux tout savoir de tes conquêtes, petite cachottière !
Eh bien, ceci étant dit, j’espère t’avoir donné assez de matière pour ton exposé, ma chérie ! N’hésite pas à me renvoyer une lettre si tu as d’autres questions.
Tendrement, ta Tantine qui t’aime »
Le visage cramoisi d’embarras, Aubépine replia précipitamment la lettre et la fourra dans un tiroir. Elle se demanda un instant si elle devait la déchirer, ou peut-être la brûler. En tout cas, elle ne pouvait pas effacer les mots imprimés sur sa rétine. La petite Magicienne soupira. Ce n’était pas comme ça qu’elle allait attirer l’attention des Basphéliens Evershas. Peut-être que cela intéressait la Démone rencontrée à la soirée pyjama ?
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- Haggo le Rutilant, du Totem du Bonobo, soutient Baako (pour son côté pacifique et parce qu'il le trouve canon) - Il n'est pas à l'abri d'une indigestion, d'une petite mort ou d'une vulgaire lame
Typhon Gargantua ~ Eversha ~ Niveau V ~ ◈ Parchemins usagés : 921 ◈ YinYanisé(e) le : 09/01/2019◈ Activité : Chasseur [Rang III] & cuisinier [Rang III]
Mar 16 Jan 2024, 17:24
Résultats de l’événement Voici d’abord la liste des élus potentiels :
Amalia la koala (soutient à Bob Kacando). Seules la patience et l’ingéniosité permettront aux élus de conserver leur titre jusqu’à la succession. Les Augures ont jugé que cette Eversha avait de bonnes chances de réussir.
Talochard la papillon. Le peuple eversha est territorial et violent, mais il n’a aucun appétit pour la guerre. Les Augures ont jugé que cette Eversha ne serait pas assez populaire pour justifier sa nomination.
Rougou Gulabi le flamant rose (soutien à Typhon). Le commerce a peu de valeurs aux yeux d’une population principalement nomade. Les Augures ont jugé que cet Eversha ne serait pas assez populaire pour justifier sa nomination.
Bop Kacando le caméléon (soutient à Amalia). Un espion brille par sa capacité à ne pas attirer l’attention. Les Augures ont jugé que cet Eversha ne serait pas assez populaire pour justifier sa nomination.
Yushka l’ours (soutient à Rakel). Les changeurs de forme sont farouchement indépendants. Les Augures ont jugé que cet Eversha serait trop infâme pour justifier sa nomination.
Elidia la Wynmeris (soutient à Amalia). Une réputation qui se définit par la différence ne permet pas de rallier la majorité à sa cause. Les Augures ont jugé que cette Eversha ne serait pas assez populaire pour justifier sa nomination.
Phlorevis la scolopendre (soutient à Talochard). Les Evershas sont des créatures sociales, se rassemblant en fonction de leurs affinités et suivent un chef digne de leur respect. Les Augures ont jugé que cette Eversha serait trop infâme pour justifier sa nomination.
Baako l’éléphant. Le pacifisme est tout autant désirés des uns que répugner des autres. Les Augures ont jugé que cet Eversha était trop polarisant pour justifier sa nomination.
Haggo le bonobo (soutient à Baako). Le coït est une valeur sûr pour rejoindre la grande majorité des changeurs de forme. Les Augures ont jugé que cet Eversha serait assez populaire pour justifier sa nomination.
Verdict : Amalia est nommée la quatrième élue.
Parmi les Augures d’influence au Rocher au Clair de Lune, la majorité silencieuse est d’avis que l’affliction d’Ava tire son origine de Phœbe elle-même. Ils y voient le signe que la Déesse-Totem a perdu les faveurs de la déesse-mère. D’aucuns osent se prononcer sur ce sujet, car les représailles seraient immédiates et définitives, mais ils sont nombreux à souhaiter la mort d’Ava. Conscients que la Déesse-Totem avait secrètement choisi les trois premiers élus pour ses sombres desseins, les Augures ont porté leur choix vers l’élue qui, selon eux, pourrait changer la donne. En conséquence, bien que Haggo le Rutilant aurait été le choix qui aurait le mieux servi les intérêts d’Ava, les Augures choisirent plutôt Amalia.
Conséquences pour la suite des événements
Amalia reçoit le soutien de Bop Kacando et d’Elidia.
Léandra ne reçoit aucun soutien.
Rakel reçoit le soutien de Yushka.
Typhon reçoit le soutien de Rougou Gulabi.
Amalia donnera la meilleure première impression lors des célébrations suivant la cérémonie de succession. Elle obtiendra ainsi un soutien populaire qui la propulsera à l’avant-plan et éclipsera les autres élus. Son alliance avec Bop Kacando et d’Elidia lui permet de devenir intouchable jusqu’au prochain événement. Cela dit, toute cette attention empêchera Amalia d’interagir, en bien ou en mal, avec les autres élus.
Léandra perdra son titre d’élu de Phœbe lors d’une confrontation avec Typhon. L’isolement et la soif de vengeance de la lionne de l’aube, qui ne se présenta pas à la cérémonie de succession, anéantiront ses chances de sortir des ombres d’où elle complotait. Peut-être aura-t-elle voix au chapitre, mais ça ne sera pas en tant que successeuse à Ava.
Rakel exigera la soumission de l’Antre des marais à sa volonté ainsi qu’un imposant tribut pour lui donner les moyens de se débarrasser de ses rivaux. Les demandes irrationnelles du seigneur des marais occasionneront un soulèvement populaire. Grâce au soutien de Yushka, toutefois, Rakel échappera à la mort. Il se réfugiera à Dhitys, auprès de sa sœur, pour préparer un nouveau plan.
Typhon lèvera une armée de vétérans de la Guerre des Crocs à Durienrisda et partira à la conquête du Rocher au Clair de Lune. Conscient que sa bande hétéroclite de monstres, d’exilés et de sang-mêlé ne fera pas le poids face aux Grandes Dynasties, le monstre de Durienrisda profitera de l’assistance de Rougou Gulabi, de l’attention populaire rivée sur Amalia, ainsi que de l’isolement de Léandra pour soumettre la lionne de l’aube à sa cause. Le chef de guerre ajoutera ainsi les rebelles opposés à Ava à son armée.
Conclusion Les mésaventures de Typhon feront partie d’un RP distinct qui se déroulera entre cet événement et le prochain. N’hésitez pas à me contacter si vous voulez participer à l’invasion du Rocher au Clair de Lune par les exilés de l’Antre des marais.
En ce qui concerne les prétendants non choisis, ne les écartez pas trop tôt ! Après tout, ce sont des Augures avec de puissantes meutes, pourvues d’une grande influence dans leur région respective. Leur soutien représente donc un atout considérable pour les élus en titre. C’est pourquoi vous, joueurs passionnés, aurez l’opportunité d’influencer la succession des Evershas par le biais de vos PNJs. Aujourd’hui, Léandra à fait les frais de vos décisions. Quand sera-t-il pour la suite ? Nous le découvrirons lors du prochain événement !
Merci pour votre participation !
Après un long entrainement, Typhon en était aujourd’hui à sa troisième journée avec rien d’autre que de l’eau pour se sustenter. Il patientait, recroquevillé sur le sol de sa chambre, en attendant l’opportunité de prendre l’offensive. Une présence se manifesta et la porte s’ouvrit. Entra alors un homme aux cheveux blancs qui donna un coup de pied au ventre de l’homme-serpent-tigre en position vulnérable.
« Change d’air, du con. Tu dois être à jeun. Ce soir, Ava va s’asseoir sur toi, je te rappelle. »
Quelques mois plus tôt, la voix du Grand Totem Rakel aurait stimulé chez l’homme-serpent-tigre une vive colère et un profond désir d’en découdre. Et puis, la famine aurait poussé Typhon à se jeter sur son rival pour le dévorer vivant. Typhon aurait alors été repoussé par le Totem d’alligator albinos, supérieur en taille et en poids. En quelques minutes de lutte, l’homme-serpent-tigre affamé aurait été vidé de son énergie, puis vaincu. C’était le scénario qui s’était répété, encore et encore, chaque fois que l’homme-serpent-tigre s’était soumis à l’exercice. Aujourd’hui était la dernière chance d’enfin éviter cette finalité. Dès ce soir, Typhon et Rakel seraient nommés élus de Phœbe. Ils devraient alors repoussés les prétendaient désireux de les remplacer, puis, inévitablement, de s’affronter l’un l’autre. L’exercice actuel était donc la dernière altercation amicale entre les deux Grands Totems.
Après avoir attendu que son adversaire baisse sa garde, Typhon souleva son imposant buste du sol et rampa vigoureusement vers Rakel. L’imposante masse que l’homme-serpent-tigre possédait le long de son corps de 6 mètres 25 fut mobilisée pour enlacer le bipède et le clouer au sol.
« Transforme-toi, si tu l’oses, cracha Typhon au visage de son adversaire. Je t’aurai arraché la gorge avant que tu aies la chance de te libérer. — Bien, félicita Rakel qui donna trois tapes pour que son compagnon le relâche. Une mise en scène bien exécutée, puis des mouvements souples et fluides. Me pisser dessus était un peu excessif, en revanche. — Ce n’était pas voulu. Je gère mal mes envies depuis la transformation. — Bah, ça va s’améliorer avec le temps. Maintenant, viens dans la lumière et couche-toi sur le dos. Je vais t’examiner. »
Rakel tâtait attentivement le corps de l’homme-serpent-tigre. Grâce à son régime d’entrainement, ce dernier avait pris beaucoup de poids depuis son arrivée au palais de Dhitys. Ce faisant, l’impressionnante masse musculaire du Hesshas géant avait enfin de quoi soutenir ses efforts. Un corps bien sculpté était certainement plaisant aux regards, mais un Eversha qui se respectait avait besoin de réserves d’énergie, donc de graisse. La vie nomade ne permettait pas toujours de se nourrir quotidiennement. Les adultes devaient donc être en mesure de se s’abstenir pour le bien des enfants.
Au début de l’entrainement, Typhon donnait l’impression d’être en bonne santé, mais c’était tout juste s’il pouvait tenir une demi-journée sans manger. L’expertise de Rakel fut précieuse pour en déterminer la cause. Étant donné la physionomie monstrueuse du Hesshas, il y avait une démarcation entre les différentes parties de son corps. Il faut dire que nombre de ses organes étaient doublés. Ce faisant, le buste humanoïde de l’homme-serpent-tigre, qui régissait une partie moindre des fonctions vitales, était la première partie de son corps à accumuler des graisses. Le cerveau étant l’organe le plus vorace du corps, le buste de Typhon servait de réserve énergétique distincte pour les organes servant à ses fonctions cognitives.
La partie serpentine du Hesshas, bien plus imposante, régissait le reste des fonctions vitales. Elle nécessitait donc bien plus d’énergie, prévenant l’accumulation de graisse. Cette dualité avait échappé à Typhon, qui n’en était qu’à sa deuxième année à vivre sous les traits d’un monstre. Puisque l’épouse de Typhon avait subi la même transformation, Rakel théorisa que l’infertilité du couple était possiblement attribuable à la malnutrition. Architecte de la conversion d’Evergrims en Hesshas, l’homme-alligator désirait faire de Typhon un modèle à suivre les Hesshas, mais bien plus important encore, un exemple pour encourager l’acceptabilité des Evergrims.
« 1005 kilos à la pesée. Ton buste est bien charnu et le reste semble avoir un poids santé. J’estime que tu peux y aller d’un régime de 50 à 60 kilos de viande par jour pour te maintenir. Mais n’hésite pas à te goinfrer de temps à autre. Une centaine de kilos de plus ne te ferait pas de mal. — J’ai du mal à croire que j’ai pris 400 kilos en trois mois. J’ai presque doublé en poids et pourtant, je n’ai pas eu l’impression de m’empiffrer plus que de raison. — Évidemment, ton corps est pourvu de grandes facultés d’adaptation. Et maintenant, accompagne-moi. Tu vas prendre un bain et te préparer pour la cérémonie. Trois artistes vont te peindre. — Des peintures ? Ah… oui. Ma tunique est certainement trop petite, constata Typhon en enfonçant son doigt dans son ventre bien gras. J’ai beaucoup grossi. — C’est le prix à payer pour le confort des fesses d’Ava ! Mais ne t’inquiète pas. La corpulence des différentes parties de ton corps va certainement s’harmoniser quand ton régime se stabilisera. — Ça va me manquer de parler à un Rakel gentil… — Bon, suffit le papotage. Nous allons te costumer pour qu’Ava paraisse faible quand elle s’assiéra sur toi. Les artistes vont te recouvrir d’une peinture au charbon et incorporer des squelettes d’animaux pour augmenter ta carrure. Tu n’auras qu’à te montrer menaçant et la Déesse-Totem s’occupera du reste. »
Force était d’admettre, vivre et s’entrainer avec son rival dans un espace restreint avait tempéré les ardeurs de Typhon à l’égard de Rakel. Malheureusement, le mentor attentionné qui était à l’œuvre n’était qu’un clone. Le véritable Grand Totem Rakel ne perdait pas son temps à fraterniser avec l’une de ses créations. Cette tâche avait plutôt été déléguée à un alter ego adapté pour la situation. La réalisation fut lente à venir, mais Typhon finit par assembler les indices laissés à cet effet. Même s’il était un clone avec des capacités moindre par rapport à l’original, toutefois, ce faux Rakel était au moins aussi puissant que Typhon grâce à son imposant Totem d’alligator albinos.
***
La journée ne tirait pas encore à sa fin, mais la pleine lune était visible dans le ciel de fin d’après-midi. La Déesse-Totem avait quitté son palais avec son entourage et accomplissait la tournée cérémonielle de Dhitys, où les Evershas Evergrims les plus influents se joignaient à la régente spirituelle des changeurs de forme. Ils formaient une file unique longue de plusieurs centaines d’hommes et de femmes de rang.
Pendant ce temps, les Grands Totems avaient directement rejoint le Kiansha et expulsaient vigoureusement quiconque s’y trouvait avant l’heure. Les fidèles généraux accueillirent ensuite la Déesse-Totem qui marcha gracieusement jusqu’au centre de cet espace dépourvu de végétation. À sa suite, les Evergrims à sa suite prirent place en périphérie de cet espace où la blancheur du Rocher était exposée à la vue. Enfin, les invités de marque s’approprièrent les espaces vacants jusqu’à ce que se complète un cercle ininterrompu de changeurs de formes doter de leurs plus beaux atours. Lorsque ce cercle fut complet, les invités de moins prestigieux prirent place derrière, laissant le centre du Kiansha à la Déesse-Totem et ses sept fidèles.
Vint finalement le tour des innombrables pèlerins de passage. Ceux-ci prirent place derrière les invités de la Déesse-Totem à l’orée de la forêt entourant l’étroit Kiansha. Les places où l’on pouvait encore apercevoir ce qui se passait dans la clairière rocailleuse étaient rares. L’on se tassait donc inéquitablement ici et là, tantôt priorisant le confort, tantôt une vue obstruée. Comme il était coutume, chacun était libre d’adopter la forme qui lui plaisait pendant la cérémonie. Il y avait donc toute une ménagerie d’animaux de toutes formes et de toutes tailles.
Une fois la foule installée dans les environs du Kiansha, Typhon positionna son corps serpentin afin d’offrir une position assise à la Déesse-Totem vieillissante. Il s’étendit lui-même sur le côté et replia son corps serpentin vers sa poitrine, d’avant en arrière, comme s’il recroquevillait des jambes. Ava grimpa avec agilité sur le corps du Hesshas, puis elle prise place dans le repli entre le ventre humanoïde et son corps serpentins. Typhon s’ajusta ensuite pour s’assurer que la Déesse-Totem était stable et confortable. Cette manœuvre avait été mainte fois répétée et s’exécuta donc sans accroc. Ainsi positionnée, Ava apparaissait telle une chétive et frêle grand-mère. Son choix de vêtements, de maquillage et son gestuel allaient également en ce sens. Les fanaux qu’allumèrent les autres Grands Totems engendrèrent alors un jeu d’ombres et de lumières qui effaça la présence de l’homme-serpent-tigre pour exposer celle de la régente des Evershas.
En temps normal, la Déesse-Totem Ava se tenait droite et forte tout au long de la longue cérémonie, mais pas aujourd’hui. C’était une démonstration de faiblesse publique qui ne laissait personne indifférent. Car les Evershas n’avaient guère de tolérance pour la vulnérabilité, il aurait été socialement acceptable qu’un membre de la foule s’avance et défie la Déesse-Totem. L’on devinait donc que l’issue de la cérémonie serait déterminante pour l’avenir du peuple des changeurs de forme. Ava fit enfin signe à l’assemblée de lui offrir le silence. La cérémonie allait commencer.
« Mes enfants, je me présente ici devant vous porteuse de nouvelles. Le grand cycle de la nature, celui de la naissance, de la vie et de la mort, poursuit son œuvre. Comme vous le voyez, mon enveloppe charnelle est au crépuscule de sa vie. Sous peu, un nouveau corps sera choisi pour accueillir mon esprit immortel et continuer de vous guider. Je vous annonce donc… ma succession. Mais un voile de vieillesse recouvre mes yeux et mes oreilles. Je m’en remets donc à mes Augures pour lire les signes. »
En tant que Déesse-Totem, les mots d’Ava étaient les mots de Phœbe. Quand l’une s’exprimait, l’autre était sous-entendu sans distinction. L’annonce était par conséquent lourde de sens. Elle impliquait que la déesse Phœbe cherchait un nouvel hôte pour devenir son avatar mortel. C’était du jamais vu dans l’histoire Eversha tel que raconté. D’ordinaire, ce choix se portait après le trépas de l’enveloppe mortelle, pas avant.
***
Quatre Augures, chacun de renommée nationale, prirent place devant la Déesse-Totem et ses Grands Totems. Ils s’inclinèrent respectueusement, puis installèrent un tapis cérémoniel pour y accomplir leur travail. De l’encens fut brulé et des feux furent allumés pour contrer la luminosité décroissante du soleil qui concluait sa course journalière. C’est précisément au crépuscule que la cérémonie des signes de Phœbe commença. Pour débuter, chaque Augure apporta le signe qu’il avait observé et le déposa aux pieds de la Déesse-Totem en expliqua sa provenance et son contexte. L’un après l’autre, Ava bénit ces signes.
La première Augure apporta une branche de pin à moitié calciné. Elle expliqua que l’arbre avait été frappé par la foudre et avait pris feu. La majorité du pin brula, mais l’arbre survécut et la vie reprit son cours. Cette branche, en particulier, avait produit de nouvelles épines vertes malgré la brulure sévère. Il s’agissait d’un signe de survie et de renouveau.
Le deuxième Augure apporta le cadavre momifié d’un jeune serpent à deux têtes, mort après que l’une de ses têtes eut dévoré l’autre. Il expliqua qu’un tel serpent était plutôt rare, mais que sa finalité était des plus communes. Il s’agissait d’un signe de mise en garde contre les luttes fraternelles.
Le troisième Augure apporta une vieille machette rouillée. Il expliqua que si ces couteaux étaient appréciés des Evershas, le peuple des changeurs de forme n’était pas un peuple de forgerons. C’était donc un outil venu d’ailleurs, de pillages ou de marchandages, qui a participé à l’histoire du Rocher. Il s’agissait d’un signe des modestes liens qui unissaient le Rocher au Clair de Lune au monde extérieur.
La quatrième Augure apporta une feuille d’eucalyptus à moitié dévoré. Elle expliqua que le monde animal était en équilibre entre les herbivores, qui se nourrissaient de la terre, les carnivores, qui se nourrissaient des herbivores, et des détritivores, qui retournaient les charognes à la terre. Il s’agissait d’un signe de l’importance des herbivores dans le cycle naturel.
Les quatre signes approuvés par Ava, l’interprétation débuta. Inhalant les fumées des encens, les Augures débattaient de leurs symboliques. Ils cherchèrent à en trouver le sens profond, car c’était ainsi que Phœbe communiquait avec ses enfants en dehors de l’entremise de son avatar. La déesse de la lune et de la nature ne s’impliquait jamais directement ni n’offrait de réponse claire aux interrogations des Evershas. Elle offrait toutefois aide et réconfort via des symboles naturels et par son regard qui perçait l’obscurité de la nuit pour donner ses diverses formes à la lune.
Le soleil avait fortement diminué à l’horizon et les estomacs commencèrent à réclamer le repas du soir quand les Augures se mirent enfin d’accord et proposèrent leur interprétation à la Déesse-Totem. Dans des cérémonies moindres, les interprètes se seraient adressés directement à la foule. En présence de l’avatar de Phœbe, toutefois, il était tenu de valider l’interprétation en premier lieu. D’un hochement de tête, Ava incita les Augures à procéder. L’ainée du quatuor, une vieille, mais vigoureuse Eversha, prise la parole.
« Voici l’interprétation des signes. Par la grâce de son regard qui illumine d’en haut, et de son avatar mortel qui nous protège d’en bas, j’affirme qu’ils sont quatre digne d’offrir leur corps à Phœbe. Léandra, la descendante de Mélinda. Rakel, le frère d’Ava. Typhon, le fléau des Vampires et Amadia, la prudente. Que le plus méritant se montre digne de cet honneur. Et maintenant, remercions Phœbe de sa sagesse en festoyant ! Buvons, mangeons et faisons l’amour. Démontrons-lui notre affection en étant bons vivants. Je déclare vôtre cette nuit de pleine lune ! »
La foule eut tôt fait de quitter le Kiansha pour retourner à Dhitys, où les effluves du festin lunaire étaient portés par la brise. Ils étaient nombreux à être déçus, mais encore plus nombreux étaient-ils à reporter au lendemain tout ce qui n’impliquait pas une panse remplie, un flot d’alcool et une soirée charnellement active. En l’espace d’un instant, toute la discipline et la retenue qui avaient permis la cérémonie des signes s’évaporèrent. Ce fut un chaos festif instantané qui donna lieu à l’une des célèbres festivités lunaires de la capitale des Evershas.
***
Ava et ses Grands Totems retournèrent au palais, où un bilan de la cérémonie aurait lieu. Cette rencontre faisait fi du protocole et des habitudes de la Déesse-Totem de s’exprimer par l’un de ses porte-paroles. Ces derniers étaient notablement absents. Enfin à l’abri des regards, la Déesse-Totem déchira son costume et ordonna la tenue d’un banquet. En quelques instants, une table basse ainsi que des coussins et de grandes quantités de nourritures furent apportés. Puis, d’un mot d’Ava, tous les animaux et son entourage quittèrent le bâtiment, laissant seuls les hauts-dirigeants du peuple eversha.
Ava continuait de se dénuder et de se démaquiller quand le véritable Rakel fit irruption dans la pièce. Le Grand Totem prit la place de son clone qui quitta la salle pour se préparer pour sa prochaine mission. D’un signe de sa sœur, l’intendant de l’Antre des marais se mit à son aise et attrapa une cuisse de volaille qu’il mordit goulument.
« Tous les espions sont morts, annonça fièrement Rakel. Les plus savoureux ont été inclus aux plats qui vous ont été préparés, ma sœur. Il faudra du temps pour envoyer des remplaçants nous épier, alors nous pouvons discuter tranquillement. — Enfin, ricana Ava d’un rire malsain. Ça fait des mois que leur incompétence me tombe sur les nerfs. Et respire, Typhon, tu n’es pas sur cette table, alors tu n’as rien à te reprocher. — C’est ta faute Ava, se moqua sournoisement Rakel. Après tout ce mutisme, te voilà bavarde ! Alors, comment était la cérémonie ? — Assommante… soupira la régente. Ces connards espèrent vraiment que je vais clamser. Bon, tour de table. Typhon, tu commences. — Avec la permission de Rakel, je vais étendre mon territoire et prétendre le défier ouvertement. — Ça ne trompera personne, réfléchit Rakel à voix haute. Je vais plutôt m’attirer l’ire de l’Antre et inciter la population à me renverser. Ça te donnera le champ libre pour lever une armée et partir à la conquête du Rocher. — Ça me plait, acquiesça Ava. Typhon, tu vas plutôt te mesurer à Léandra. — Dans ce cas, les demi-mesures ne réussiront pas. Je vais faire tout ce qui est en mon pouvoir pour vous renverser, Déesse-Totem. — Excellent, répliqua Ava, révélant un sourire carnassier. Typhon s’établira au Rocher avec son armée. Ainsi, tu imposeras tes Hesshas à la société evergrims. Et Rakel redeviendra l’unique Grand Totem de l’Antre. Bien, voilà pour nos élus. Maintenant, vous autres, qu’allez-vous faire pour m’aider à me débarrasser de ces rides qui foutent le bordel à mon règne ? »
C’est ainsi que la soirée se poursuivit alors que les Grands Totems débattaient des meilleures méthodes à employer pour découvrir la source du vieillissement d’Ava, puis de renverser ses effets. Ces sujets étant particulièrement sensibles et secrets, ils étaient discutés à porte close et en l’absence de tout témoin. N’ayant plus voix au chapitre, Rakel et Typhon furent excusés de la réunion pour aller se mêler aux festivités qui avaient lieu dans en dehors du palais. Les élus avaient désormais leur rôle à jouer pour détourner l’attention populaire.