Transmission
Suite d'Apostolat

Assis confortablement en travers de sa selle, Min observait le paysage. Le soleil de fin d’après-midi embrassait les champs de Vervallée. Certains habitants se retournaient sur le passage de l’Orine ; il s’était apprêté pour ses retrouvailles avec Ji-Eun, son amourette d’enfance qu’il n’avait pas revu depuis sa Cérémonie du Lien. La chevelure blonde du jeune homme brillait de mille feux sous le soleil, assortie de bijoux et de rubans blancs et rose clairs. Ce dernier arborait son kimono rose clair reçu pour la cérémonie de son passage comme Sœrei. Il tenait les rênes du cheval d’une main, l’autre étant gracieusement placée sur la selle. Le tissu de ses manches ondulait au rythme de l’équidé et dans la brise. Le trajet de Caelum vers Vervallée pouvait se faire par les Pontons, mais Min avait tenu à vivre l’expérience du voyage. Le bas de son dos le tirait et ses poignets étaient endoloris, mais l’Orine n’y prêtait aucune attention : il était trop fasciné par les scènes qui se déroulaient sous ses yeux. Il s’imprégnait des visages, du ciel et de la nature, comme pour enregistrer chaque détail dans sa mémoire. Son voyage au cœur des terres magiciennes prenait fin, bien que Min ne soit pas encore certain d’où aller. Il se sentait bien sur ces terres, mais rien ne l’y retenait. Ce n’était pas chez lui. Et pourtant, il lui semblait inconcevable de revenir à Onikareni.

Ce retour sonnerait comme un aveu d’échec. Aucune rencontre avait des Maîtres potentiels n’avait été fructueuse et Min n’avait rien accompli de particulier. Il n’avait plus qu’un seul chemin qui semblait se construire devant lui… mais pour s’y avancer, Min avait besoin d’encouragements. Et Ji-Eun saurait trouver les mots, il en était certain. Son Art Divin était le chant et ce n’était pas seulement pour sa voix magnifique : elle savait manier les mots. « Nous arrivons, Min ! » Le blond secoua la tête, tiré de ses pensées. « Pardon ? » Demanda-t-il en clignant des yeux. « Le manoir de Sieur Alvin Morataun se trouve sur la droite, derrière ce portail. » Son guide tira les rênes et son cheval ralentit, imité par celui de Min. « Mon voyage se termine ici, Min. » Il descendit du cheval et tendit la main pour aider l’Orine à faire de même. Le brun la prit et ses genoux flanchèrent légèrement en touchant le sol. La grande main de son guide s’appuya sur son épaule pour l’aider à se relever. Il avait été un guide fantastique, lui partageant une partie de son puits infini de connaissances sur sa race et ses terres d’origine. « Merci beaucoup. J’espère vraiment te revoir à Onikareni. Tu dois absolument voir les Töh Taureaux », poursuivit-il en le prenant dans ses bras pour une courte embrassade. « Je n'y manquerai pas. Tu recevras ma lettre ! » Et sur ces dernières paroles, il raccrocha le cheval à l’autre avec une longe et fit demi-tour. Min gratifia son destrier de quelques tapes sur l’encolure et les regarda s’éloigner avec un pincement au cœur. Ce qu’il détestait le plus pendant les voyages, c’était les adieux. Et il avait dû beaucoup en faire lors de ses dernières péripéties. Il avait grand besoin de se poser quelque part pour se ressourcer ; Min n’était pas un explorateur dans l’âme. Il aimait trop son cocon.

« Kim Ji-Eun… j’arrive », commenta-t-il en se tournant dramatiquement vers un grand portail en fer. Derrière les barreaux, il apercevait une grande forêt où se dessinait un chemin naturel. Il serpentait vers le manoir, qui se situait en haut d’une colline. Le blond l’avait aperçu en arrivant, comme indiqué par son guide. L’Aisuru de Ji-Eun n’était pas particulièrement riche ou célèbre, mais sa famille jouissait d’un large patrimoine. En croyant ce que racontait Ji-Eun, la fratrie d’Alvin évoluait dans la politique.

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