Il s’amusait à la faire tourner en bourrique. Ce n’était pas méchant. Faust avait toujours été joueur et il essayait de faire rentrer Persy dans son jeu. Il notait son entêtement, cependant elle éprouvait une détermination si forte qu’elle ne saisissait pas l’aspect divertissant qu’aurait dû avoir ce qu’on appelait justement un jeu. Faust ne pût poursuivre sa lente fuite quand il se retrouva acculé contre la rambarde. Son bras, lui, ne se baissa pas. Le ruban se méritait. Si elle le désirait tant, Perséphone devrait faire preuve d’ingéniosité. Une nouvelle prétendante fit son apparition, mais la violette ne tarda pas à la faire disparaître. Alors seulement, son sourire espiègle s’évanouit. Faust regardait par-dessus son épaule, par-delà la rambarde, mais la fille avait disparu dans le néant. Il se retourna.
-Je suis à toi ? Demanda-t-il d’une voix quasi-blanche, comme pour confirmer.
Pourtant, elle savait pertinemment que ce n’était pas le cas. Persy pouvait jeter des gens par-dessus bord ; cela ne l’aiderait pas à obtenir son dû. Il la laissait se coller à lui pour mieux atteindre le ruban, mais le verdict était sans appel.
-Tu es trop petite.
Il fut saisi à la gorge de manière si soudaine qu’il eut la respiration coupée. Il regarda la jeune femme dans les yeux. Celle-ci ne plaisantait plus du tout. Faust eut peur. Il savait dès lors qu’elle était réellement capable du pire pour obtenir son dû. Tuer, même lui, ne lui faisait absolument pas peur. Il voulut répondre, lui intimer de reprendre son calme, quand il se sentît poussé vers l’arrière. Faust bascula, entraînant à sa suite un autre poids. Il voulut crier mais il resta muet, ahuri par la tournure que prenait les événements. Perséphone l’enlaça. Il ne savait pas quoi faire, si ce n'était la laisser faire. La regarder, et l'écouter. Faust finit par comprendre qu’il n’avait rien à craindre dans l’immédiat. Il ramena son bras contre lui. Il était hypnotisé.
-Tu m'aimes tant que ça ? Parvînt-il à articuler.
Il se prenait la réalité de son obsession en pleine face. Il avait vu leur intérêt réciproque pour l'autre, mais jamais il n'avait mesuré la force de l'addiction qu'elle avait pour lui.
-Perséphone... Il passa une main sur sa joue. Pourquoi est-ce que je le regretterais ? Que ferais-tu ?
Il voulait savoir, l’entendre de sa bouche. Peut-être qu'il la trouverait folle, mais il l'accepterait. Quelles pensées hantaient la jeune femme à son égard ? Quels scénarii se figurait-elle ? Faust la laissa l'embrasser. C'était étrange : depuis qu'ils chutaient, tout était doux. Sa panique avait été annihilée. Ils étaient dans une bulle hors du temps, dans un cocon que seuls eux avaient le pouvoir de briser. Le jeune homme glissa ses mains autour des hanches de sa prétendante et prolongea le baiser.
-Dis-moi ce que tu serais capable de faire.
Il prit doucement la main de la violette et y glissa le ruban. Il sourit en repensant à ce qu'elle venait de dire. Faust n’avait pas réfléchi à leur relation jusqu’ici. Il avait laissé les choses se faire naturellement, supposant que la barque le mènerait d’elle-même vers l’endroit où il devait aller. Persy lui forçait la main, catalysait ses réflexions d’une manière vertigineuse et presque effrayante. Il n’y avait pas été préparé et pour autant, il ne lui en voulait pas. Depuis combien de temps le convoitait-elle en secret ? Depuis combien de temps son attirance pour lui la taraudait au burin, sans qu’il n’en entendît rien ?
-Je n'ai jamais pensé à aucune autre, tu sais. Toutes ces filles n'étaient qu'un prétexte au jeu des charmes. Tu n'auras pas besoin de me les faire oublier. C'est déjà fait.
Les autres étaient fades et sans intérêt. Pour Perséphone, il éprouvait une profonde tendresse qu'il ne savait justifier. C'était juste ainsi, que celle-ci fusse extrême ou même démente n'avait pas la moindre importance. Il aimait juste la voir. Il aimait l'enlacer. Il avait aimé l'embrasser.
-Est-ce que ça te va si on retourne voir les autres ?
Il parlait doucement. Il tenait à la rassurer, à lui montrer qu'il n'avait aucune mauvaise intention. Il était avec elle.
Quelques secondes plus tard, le couple atterrissait sur l'immense canapé qui trônait au centre du grand salon. Des exclamations choquées fusèrent tout autour d'eux.
-Par tous les dieux, est-ce que vous allez bien ? Vous êtes tombés du palier !
Une jeune femme se précipita vers eux. C'était celle que Perséphone avait jeté dans le vide plus tôt. Elle était saine et sauve et avait visiblement oublié l'événement. Faust acquiesça. Il était tombé en premier et Persy était étendue sur lui. Il glissa hors du sofa, se remit sur pieds et épousseta ses vêtements.
-Toutes mes félicitations. Fit-il, pimpant. Il tendit une main vers sa partenaire afin de l'aider à se relever avec élégance. Vous m'avez eu. Je vous dois une faveur à présent.
Une manteau de nuit épaisse comme de la poix m'environnait. Des troncs à l'écorce charbonneuse s'érigeaient comme une horde de géants aux jambes emprisonnées dans un réseau de lierre argenté luisant faiblement dans l'obscurité. Loin au dessus de ma tête, des frondaisons enchevêtrées masquaient l'éclat des étoiles. Même si je discernais les arrêtes du paysage autour de moi, je me fiais à tous mes sens pour ne pas trébucher. Je cessai de courir pour tendre l'oreille. Un silence surnaturel régnait sur la forêt, pas un seul animal n'osait émettre le moindre son, j'étais même convaincu que nous étions les deux seules âmes en vie. Le bruit de ma propre respiration résonnait comme dans une pièce trop grande et trop vide. Le vent se leva, enlaçant des feuilles mortes dans quelques tourbillons indolents. Après quelques secondes, il charria aussi l'écho de ses pas et je souris, rassuré. Il n'était pas loin. « Par ici ! » Lançai-je malgré tout pour guider sa chasse. Je ne voulais pas le perdre, même si c'était plutôt à lui de se faire cette réflexion.
Je me remis en marche sans me hâter. Distraitement, je fis jouer le ruban entre mes doigts pour éprouver sa douceur. Je ne savais plus ce qui nous avait amenés à ce jeu, mais je savais m'y étais prêté sans trop râler, en imposant la condition que, pour aller en contresens de ma nature, je ne jouerai pas au chasseur. Être la proie ne me dérangeait pas s'il s'agissait de Bae. Je ne comptais pas lui compliquer la tâche. Pas trop, juste assez pour rendre les choses intéressantes. J'étais curieux de la faveur qu'il me demanderait, mais le taquiner était trop tentant et assez facile pour que j'y cède sans y penser. Je pivotai pour marcher à l'envers et l'appelai à nouveau, l'amusement audible dans ma voix.
Mes talons butèrent sur une bordure. Je me rattrapai à un arbre pour éviter de tomber en arrière et fut surpris de trouver à la place une longue colonne de marbre ébréché. Je levais les yeux mais le plafond m'était inaccessible, d'un noir mat et impénétrable. Je gravis lentement les dizaines de marches et pénétrai dans la vaste salle. Le bruit de mes pas était étouffé par la mousse qui s'était propagée sur le dallage craquelé. La forêt avait repris le contrôle de ce que l'homme avait abandonné. Je me frayai un chemin entre les nombreuses colonnes, impressionné par l'atmosphère solennelle qui se dégageait des lieux. Le vent sifflait dans ses hauteurs et je me tournai vivement quand je sentis une présence dans mon dos. À l'autre bout, Bae venait d'apparaître. Malgré la distance, j'entendais distinctement les palpitations rapides de son coeur. « Viens ! » J'agitais le ruban devant mon nez, goguenard. Je reculai et disparu dans les ombres où je me dissimulai en attendant qu'il approche. Quand il fut assez près pour que je discerne le cyan intense de ses iris, je passai discrètement dans son dos et tapotai son épaule légèrement avant de disparaître à nouveau de l'autre côté avant qu'il ne se retourne. Mon rire éclata, léger et dénué du sarcasme qui l'accompagnait habituellement.
« Est-ce que tu vas réussir à m'attraper ? » Le provoquai-je. « Tu ferais un très mauvais Vampire. » Observai-je. J'étudiai son profil et quand j'en eus assez d'être invisible, j'invoquai une brève clarté bleuâtre qui nimba ma silhouette et dès que j'eus son attention, elle s'évapora aussitôt. Mais au moins savait-il où j'étais désormais. J'attendis qu'il entre là où je me tenais et après quelques secondes à le voir me chercher à l'aveuglette, j'avançai silencieusement pour me placer à une distance de bras de lui, les mains croisées dans le dos. Dès que ses doigts effleurèrent mon torse, je reculai d'un pas. « Oops. Presque. » Dès qu'il s'avançait, je reculais de la même distance. Il faisait moins sombre à mesure que nous reculions. Les dimensions de la salle ne s'inquiétaient pas de nos entrechats et à aucun moment, un mur ne mit un terme à nos jeux. « Quel ennui. Tu es sûr d'avoir envie de m'attraper ? » Je feignais de me plaindre. Profitant d'un moment où il avait le bras tendu, je refermai ma main sur son poignet et le fit avancer contre moi puis le repoussai d'une pichenette sur le haut du torse. « Raconte-moi ce que tu feras si tu obtiens ce ruban. » Exigeai-je. « Si tu es assez convaincant, peut-être que je te laisserai l'avoir. Sinon, je disparaitrais. »
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Kitoe ~ Démon ~ Niveau II ~ ◈ Parchemins usagés : 1741 ◈ YinYanisé(e) le : 09/11/2016
Le jeu avait été déclaré au beau milieu du repas, alors qu'ils se restauraient tous à la même table du grand manoir où on les avait tous rassemblés. La décoration était riche, majoritairement rouge et or. Les hommes avaient mangé face aux femmes, copies conformes les uns des autres. A gauche, une dizaine de Neah. A droite, le même nombre de Mancinia. Jude avait compté ses adversaires. Ils avaient beau dîner ensemble, le Démon les exécrait tous autant qu'ils étaient. Ces foutus usurpateurs... Le roux jeta un œil à l'assemblée de Mancinia. De la même façon, elles le dégoûtaient. Elles se ressemblaient toutes. Sauf une. Jude pouvait la reconnaitre d'un simple coup d'œil. C'était elle qu'il convoitait. Elle et elle seule. Les autres n'avaient aucune valeur à ces yeux. C’étaient des filles superficielles, stéréotypées et particulièrement stupides. Elles n'étaient rien face à la véritable reine. Elles ne lui parvenaient même pas à la cheville.
*
-Mancinia ?
Ce n'était pas une question, à peine un appel. C’était davantage un ordre. Il la voulait.
-Neah ? Je suis là.
La voix se répercutait partout sur les murs. Jude était entré dans la salle des glaces, un labyrinthe de vitres et de miroirs.
-Mancinia !
Des rires retentirent. Où était-elle ? Il pivota vivement sur ses pieds. Un mouvement dans un reflet, lui fit tourner la tête. Vite, il s'élança à la poursuite de l'ombre. Gauche. Droite. Gauche. Droite. Jude allait à toute vitesse, au risque de foncer, la tête en premier, contre les parois de verre. Il rattrapa enfin la jeune femme. Il se saisit de son poignet, un sourire victorieux illuminant son être tout entier. Lorsqu'elle se retourna vers lui, il relâcha sa prise comme si cette dernière était un scorpion qui l'avait piqué. Ce n'était pas elle.
-Mancinia ? Demanda un homme derrière lui. Un usurpateur.
N'ayant pas de temps à perdre, Jude se remit en route. Quelques couloirs plus tard, il poursuivait une femme au ruban bleu, se rappela que c'était aussi une fausse. Mancinia avait un ruban mauve. Il avait tendance à l'oublier, trop obsédé par une victoire cuisante et rapide. Ce n'était pas une course ou une chasse ; c'était une guerre. Jude courait à en perdre haleine. Il ressemblait à un chien enragé courant après son os. Il avait trop peur, peur qu'on le la lui arrachât, qu'un usurpateur ne s'empara de sa faveur. Le seul fait d'y penser le rendait fou. Jude savait qu'il n'y survivrait pas. Trouver Mancinia était une question de vie ou de mort.
Au détour d'un couloir, l’homme croisa un alter-ego. Celui-ci allait vite, visiblement sur une piste. Le premier le rattrapa, agrippa son col et le tira vers l'arrière. Il lâcha un râle rauque. Jude le rabattit contre le sol.
-Quelle couleur ?
Le traitre lui répondit par un regard défiant. Ses lèvres restaient scellées dans un sourire sardonique.
-Quelle couleur ?? Aboya Jude.
Il accrut la pression sur son col, mais cela ne fit pas broncher son adversaire. Comprenant qu'il n'en tirerait rien, il poussa un cri de rage et envoya valser le saltimbanque. Il reprit immédiatement la trace de sa nouvelle proie. Retrouver sa personne nécessita de la patience. Les rires et les bruits de pas se mélangeaient. L'homme fit subir le même interrogatoire à un nouvel usurpateur, qui ne lui donna pas davantage de réponses que le premier. Cependant, il nota cela : ils se dirigeaient vers la même piste. La même femme. La bonne. Il accéléra.
Les minutes s'égrainaient sans que le loup ne perdît son rythme. Son flair lui indiquait qu'il s'approchait, mais il sentait également l'odeur nauséabonde d'une meute. Son excitation s'intensifiait, mélange de soulagement, d'impatience et de colère, mais une seule pensée : il allait l'avoir.
Il allait l'avoir.
Le décor se dégagea soudain, les corridors de verre et de mercure s'élargirent, débouchant sur une pièce dans la pièce : le cœur du labyrinthe. La clef de voûte. Six passages menaient à celui-ci. L'étincelle dans les yeux de Jude se ranima. La jeune femme était là. Elle était belle. Magnifique. Elle le subjuguait tant qu'il doutait qu'elle fût réelle. Ses pupilles coulèrent sur son bras jusqu'à son poignet, à la recherche du ruban. Mauve. La bouche entrouverte, il voulut dire quelque chose mais resta muet. Son souffle était court. Il était fébrile. Elle était là.
-Mancinia.
Il devînt de marbre. Quatre voix avaient retenti en même temps que la sienne. Jude dévisagea une à une ses copies. Sa bouche se déforma en grimace sous l’effet de la haine. Ça n'allait pas se passer comme ça.
-Mancinia, c'est moi. Commença l'un. Viens, c'est moi qui...
Sa mâchoire se déforma et craqua sous l'effet de l'impact. Le faux prétendant se courba et poussa un grognement de douleur. Jude délia son poing.
-Mancinia, n'écoute pas ce fou, c'est... !
Le deuxième se cambra vers l'arrière. D'une poigne puissante, Jude le tenait par les cheveux. Il l'entraina à sa suite jusqu'à un miroir et écrasa son crâne contre celui-ci. Le verre vola en éclats dans une pluie d'étincelles pourpre et dorées. Jude pivota.
-Fuis, Mancinia.
Il n'aimait pas qu'elle vît ça. Il préférait qu'elle partît tandis qu'il s'occupait de leurs cas. Il devait les tuer. C'était nécessaire. Ensuite, il la retrouverait. Et elle ne serait rien qu'à lui.
Èibhlin avait toujours eu du mal à trouver sa place au milieu des conversations féminines. Du moins, lorsqu'elles abordaient la question de l'amour et des projets familiaux. « Johan est si drôle. » - « Arthur est si intelligent. » - « Roman est si sexy. ». Sauf qu'elle, elle ne trouvait pas Roman "sexy", juste charmant. Elle ne trouvait pas Arthur "intelligent", simplement instruit. Elle ne trouvait pas Johan si "drôle", mais plutôt bête. Si elle devait faire un commentaire, ce serait plus « Constance est si belle. » ou « Isabelle est si douce. » ou encore « Susanne est si divertissante. ». Parfois elle l'exprimait, avec des congénères qui partageaient ses ressentis. Seulement avec elles. Si personne n'était dupe quant à l'orientation sexuelle de certains, d'où elle venait, il n'était jamais des mieux vus de proclamer avoir des sentiments avec le même sexe. Alors, et même en se trouvant en un territoire plus libre, elle se taisait, par habitude. Elle rangeait ses sentiments dans un coffre qu'elle drapait de mensonge et cachait dans les tréfonds de son âme, de sorte que personne ne le vit. En public, elle critiquait la toilette de Léanore et trouvait le sourire d'Armand à tomber. Puis, une fois rentrée chez elle, elle jetait ce drap dans un coin, sortait son coffre, et l'ouvrait pour laisser ses véritables sentiments vivre. Armand n'était pas mieux qu'un gallinacé que l'on aurait plumé, prêt à être rôti. Léanore, elle, avait la grâce du cygne et le chant apaisant des rouges-gorges. Et pourtant c'était un autre oiseau qu'elle désirait avoir pour elle. Plus ténébreux. Plus discret. Mais assurément fascinant. Elle aurait tout fait, même le pire, pour que Thessalia lui accordât ses faveurs. C'était d'ailleurs la raison de sa présence ici.
D'une œillade qu'elle voulait discrète, elle détaillait la silhouette de celle qu'elle souhaitait voir devenir sa moitié. Probablement ne pourrait-elle jamais rentrer chez elle si elle arrivait à ses fins. Peut-être ne pourrait-elle jamais quitter cette terre, tout simplement. Mais ça lui allait. Tant qu'elle pouvait demeurer auprès de celle qui faisait vibrer son âme, ça lui allait. « Prêt ? ». Èibhlin s'empara des pans de sa robe, pour la soulever, prête à suivre les pas de la blanche. « Groupe un, partez ! ». Groupe un, celui des poursuivies. Et déjà la silhouette de Thessalia disparaissait dans les ombres des arbres de la forêt. L'Alfar sentit son cœur s'emballer. S'il avait été doué de vie, il n'aurait pas attendu le top départ de son groupe pour cavaler à la recherche de ses désirs, et elle l'aurait laissé s'arracher à sa poitrine même en considérant les risques qui accompagnaient tel geste. Mais il s'avérait que, enfermé derrière sa cage thoracique, il ne pouvait pas faire grand-chose sinon simplement s'affoler. « Groupe deux, partez ! ». Èibhlin ne tarda pas plus. Elle se précipita dans la forêt, en direction de celle qu'eut prise Thessalia quelques secondes plus tôt, et s'y enfonça sans réfléchir dans ce qu'elle espérait être la direction à suivre.
À mesure qu'elle s'enfonçait dans la forêt, la Sarethi ralentissait le pas. Elle avait laissé ses sentiments, trop souvent contenus, la guider et ils avaient fini par déborder et submerger sa raison. Mais maintenant que la nature l'encerclait totalement, que le chant des oiseaux et le murmure du vent avaient pris le pas sur le rire des participantes, ses espérances commençaient à être emportées par l'assèchement de cette crue. Alors elle s'arrêta, le cœur serré. Le problème ne venait pas de la nature omniprésente Au contraire. Elle appréciait sa musique. Elle était sincère et sans faux-semblants. Ce qui la tourmentait, c'était d'ignorer si elle se rapprochait ou non de Thessalia. C'était de se retrouver seule dans ce jeu censé unir. Et pourtant, elle ne serait même pas étonnée de cette tournure. La vie ne s'était jamais écoulée en son sens. Chaque fois qu'elle prenait une direction, elle s'embourbait dans les problèmes et devait lutter sans succès contre un courant contraire. Alors, fatiguée, elle finissait par se laisser porter. Elle avait eu conscience, en choisissant de participer au jeu, qu'elle s'engageait là aussi dans quelque chose de compliqué. Que là aussi, peut-être, elle en viendrait à devoir se plier à la norme et faire une croix sur sa volonté initiale. Finalement, elle prit une longue inspiration et chercha en elle une motivation qui s'était égrenée avec la solitude. Minutieusement, elle détaillait son environnement, à la recherche d'une piste, songeant grandement qu'elle ne serait pas contre un indice de quelque sorte que ce soit. C'est en contournant un large ligneux, ancestral à en voir sa taille, qu'elle le découvrit, son indice. Une fleur aux pétales bleutés, émergeait du sol, luminescente, à quelques pas de sa position. Un peu plus loin, la même fleur s'épanouissait dans l'humus. Et une autre encore après. Et ces fleurs lui traçaient un chemin à suivre, celui qu'elle avait perdu plus tôt dans sa précipitation. La tension de ses muscles se dissipa et à nouveau elle vit clair. La forêt était son amie, et elle l'aiderait à se frayer un chemin jusqu'à l'objet de son désir.
Après plusieurs minutes à suivre cette piste, les fleurs se dispersèrent en une envolée azurée, leur tracé remplacé par le son des voix. Parmi elles, elle put reconnaître la tessiture de celle de Thessalia. Mais elle n'était pas seule. Son sang ne fit qu'un tour et elle ne tarda pas plus pour se diriger en cette direction, brûlante de la peine d'arriver trop tard et de la rage de s'être potentiellement faite devancer. Les arbres n'étaient plus un obstacle à sa course. Au contraire. Elle plongea dans l'un d'eux et ne fit plus qu'un avec lui. Son corps se mêlait au bois et à la sève. Elle usa de nombreuses ramifications des corps racinaires pour rejoindre les ligneux voisins. C'est au sein de l'un d'eux que sa volonté fusionna avec celle du hêtre. Une racine surgit du sol et s'enroula sur la cheville de la prédatrice qui trébucha, l'œil horrifié en constatant ce qu'il venait de se passer, et se retrouva le visage enfoncé dans la terre et la poussière. Un sourire satisfait prit naissance sur le visage de l'Alfar lorsqu'elle s'extirpa de l'arbre, à l'abri du regard de sa victime. Elle ne laisserait personne approcher la blanche aussi impunément et les ceux qui s'y essaieraient terminerait comme cette folle, prisonnière de la nature.
Une nappe de brume s'installait dans la forêt, sinuant entre les racines et les feuilles en volutes flegmatiques. Le brouillard était tombé brutalement, sans signe annonciateur de sa venue. Et pourtant, jamais un environnement n'avait paru si doux aux yeux d'Èibhlin. Maintenant qu'elle connaissait le chemin et qu'elle savait Thessalia à proximité, elle avait entrepris de la rattraper sans pour autant se précipiter. C'était ce qui l'avait perdue plus tôt, et elle ne comptait pas réitérer son erreur. À portée de regard, elle devint papillon, et voletait à présent à travers les filaments de nuages, au rythme de son coeur palpitant d'impatience. Silencieuse, elle était certaine que la blanche ne s'enfuirait pas à son approche de cette façon. Elle la remarquerait trop tard. Elle avait pourtant la sensation que sa présence ne lui avait pas échappé, qu'elle ne faisait que leurrer l'ignorance de son arrivée. Doucement, elle se posa sur l'épaule de son élue. Puis elle reprit son vol pour lui chatouiller le visage de ses ailes avant revenir dans le dos de son aimée. Là seulement elle reprit forme humaine. « J'ai gagné. » sourit-elle en détachant d'une main le ruban noué autour de la tresse de la Vampire. Dans un même temps, elle emmêla les doigts de sa main libre avec ceux de Thessalia. Là, elle y porta le ruban qui se noua autour de leurs poignets. Alors elle s'appuya contre le dos de sa partenaire, la tête reposant sur son omoplate. Elle était sereine. Elle était heureuse. « Il me semble que j'ai le droit à une faveur. » fit-elle sans se détacher d'elle, les yeux fermés. Elle ne savait pas quoi demander exactement cependant. Tout se bousculait en elle et ses songes n'avaient plus rien de logique. « J'aimerais que tu restes avec moi. » souffla-t-elle enfin.
Une tâche opalescente se découpait sur l'océan ténébreux de la nuit. Battre des cils me demanda un effort colossal, comme un bras de fer avec la mort et l'impossible mais je réussis et la silhouette floue gagna en acuité. Son sourire éloigné était frangé de dents effilées, tordues de crocs minuscules mais que je savais capables de déchirer facilement les chairs. Ça ne faisait rien, les ronces n'avaient plus de peau sur laquelle s'accrocher à présent. La mienne avait séché et s'était envolée quand elle n'avait pas été tout simplement rongée par les nécrophores. Mon squelette luisait doucement sous la clarté lunaire. Les éléments l'avaient jauni mais c'était tout ce qu'il me restait, ça et mon esprit détaché de tout. Il m'arrivait fréquemment de débuter une pensée puis de l'oublier en chemin, pour la reprendre quelques années plus tard dans un regain de lucidité.
Il me semblait que j'avais froid mais je n'en concevais aucun inconfort. Ce n'était qu'une observation secondaire, à laquelle je ne pouvais rien faire. Je me sentais incapable de bouger, mes membres cloîtrés dans une rigidité anormale. Le sang avait cessé d'y circuler depuis trop longtemps pour leur redonner la souplesse propre aux vivants. Privés du liquide vital, mes muscles étaient devenu aussi secs que du lierre ancien.
Une éternité passa à reculons. Je n'étais pas vraiment conscient, les âges se succédaient au gré des saisons. J'étais le spectateur impassible du lever de soleil à l'ouest et de sa descente à l'est. Les pluies franchissaient le dense cocon de mon linceul de ronces, roulant sur mes joues mâtinées de sang bruni et sec. Ma peau elle-même avait la consistance d'un vieux parchemin craquelé. Je ne craignais pas la morsure des rayons de l'astre du jour, il n'y avait rien qu'ils puissent me faire qu'on ne m'avait déjà fait. Au moins, s'ils pouvaient me réduire en cendres, ce serait une échappatoire comme une autre, il suffirait d'un coup de vent pour m'extirper de mes liens.
Puis, une nuit survint, apparemment semblable à toutes les autres, si ce n'est que mon corps avait gagné en chaleur. C'était à peine décelable, comme une petite bougie au creux de ma poitrine mais j'y attachai une attention croissante comme si l'ignorer pouvait la faire disparaître. Et elle crût. Elle se répandit en une marée constamment montante. Je fus à nouveau capable de prendre conscience de mon enveloppe corporelle à un niveau douloureux. Chacun de mes maux était répertorié, puis accentué pour me réintégrer de force dans l'étau de la vie. Mes os étaient de nouveau enveloppés des couches réconfortantes de chair et je n'avais plus froid. En fait, j'avais même trop chaud sur le haut de mon torse. Je savais qu'une lame argentée y était plantée jusqu'à la garde. Mon coeur s'était recroquevillé autour sur un dernier battement. Mais peu à peu, il fut persuadé à fonctionner à nouveau. Erratique, comme à ses premières secondes et les sensations jaillirent. Mon univers se para de couleurs vives, m'arrachant au tableau en noir et blanc où j'étais englué. Un hoquet creusa mon abdomen.
Une longue respiration sifflante m'écorcha la gorge en descendant dans mes poumons, c'était ma dernière et elle était aussi désagréable que la première à ma naissance. Une autre suivi, plus rapide, comme alarmée, comme pour freiner le glas de la mort si elle se montrait plus véloce. Je vivais mes dernières secondes et la panique referma son poing sur moi. Je n'avais pas envie de mourir. Pas comme ça, pas déjà. Mes ongles s'enfoncèrent dans la terre, je luttais désespérément pour m'arracher aux ronces qui me ligotaient et des fleurs écarlates germèrent sur mes vêtements quand les épines pénétrèrent ma peau. Une écume de sang frais ourlait ma bouche, le mien, recouvrant celui d'une autre. Son ombre était au dessus de moi, masquant l'orbe pâle de la lune. Ruisselant autour de son visage fin, ses cheveux luisaient comme un voile translucide, comme les plumes d'un Ange même si elle n'était rien de tel. Une graine mauvaise acidifiait sa langue perfide et empêchaient son coeur d'être honnête. Je devais admettre que mon comportement n'aidait pas à faire naître autre chose chez elle. Elle devait avoir horreur des sentiments qu'elle me nourrissait et je m'en réjouissais. Son dégoût était un vin du plus grand cru, car elle n'y pouvait rien. Elle pouvait se débattre et nier, elle se flagellait toute seule.
« Alors, heureuse ? » Lançai-je dans une ultime provocation. « C'est ce que tu voulais, non ? » J'allais disparaître de sa vie, et j'espérais qu'elle allait souffrir mille agonies par mon absence. Elle se pencha et soudain, le poignard se retrouva dans sa main. Les ronces s'étaient évanouies, pas encore appelées par l'Alfar. Libre de mes mouvements, j'étais debout, la dominant de toute ma taille. Mes lèvres luisaient de son sang. Je l'avais mordue non par faim mais pour sceller un accord où son consentement n'était pas prévu. J'avais obtenu son ruban, non ?
« Reste avec moi, pour toujours. Quitte les tiens, je quitterai les miens. Mieux, tuons-les tous. C'est leur faute si tu es comme ça, je les tuerai si c'est ce qu'il faut. J'ai déjà commencé. » Les corps des autres prétendants n'avaient été que la suite logique du génocide qui avait frappé son entourage. J'avais frappé à plusieurs reprises, dans l'anonymat. S'était-elle doutée que j'étais à l'origine du meurtre de ses proches ? Il était temps de tomber le masque, et apprendre à nous reconnaître sans cette façade factice. « On disparaîtrait ensuite. Je pourrais te transformer pour que la vieillesse ne te touche jamais. On régnerait sur Issë. Tu m'épouserais, cette fois pour de vrai. » Mon pouce relevait son menton vers moi. J'avais avancé sur elle et mes mains étaient autour de son cou, précédent ma bouche. Son pouls frappait follement mes doigts comme pour refléter la folie de mes mots. J'exultais sans savoir que ma faveur allait provoquer ma chute.
Dans mes mains, le ruban en satin céruléen qui avait été noué précédemment à son poignet enlaçait mes doigts. Un air victorieux tranchait mon visage d'un sourire qui en faisait trois fois le tour. « Tu as une faveur à m'accorder, je crois. » Susurrai-je. Elle avait la lèvre fendue de la gifle dont je l'avais gratifiée plus tôt pour l'assommer à moitié le temps de lui prendre ce qu'elle refusait de me donner. Je ne lui avais pas laissé le temps de s'échapper dans un arbre, ni de courir très loin. Je n'avais pas été d'humeur à la course-poursuite. En un autre temps, je l'aurais laissée courir entre les haies taillées d'un labyrinthe pour le simple plaisir de faire naître la peur chez elle. Ça ne m'amusait plus, j'avais un autre objectif et j'avais dépensé trop d'énergie à l'isoler.
Froidement, je relâchai ma dernière victime qui s'effondra sans vie à mes pieds, aux côtés des autres cadavres. Je n'avais pas la patience de m'occuper d'adversaires qui chercheraient à mettre la main sur Èibhlin. Le jeu final pouvait commencer, elle avait pris suffisamment d'avance.
Les filles s'étaient éparpillées comme des moineaux dès le signal de départ. Je jetais un coup d'oeil à notre groupe après avoir promené un regard circulaire sur les lieux. Nous étions environnés de toute part par des arbres aux troncs sertis de mousse et aux branches basses. C'était sur cela qu'elle allait compter pour m'échapper. Je devais l'attraper avant qu'elle atteigne ce refuge familier.
Quand j'arrivais sur les lieux, les mains enfoncées dans les poches de mon pantalon, un souffle de lassitude teintée d'agacement se bloqua à mi-chemin quand j'aperçus le profil d'une Alfar. Entourée d'autres filles, elles s'entraidaient pour nouer des rubans de toutes les couleurs à divers endroits. Le sien servait à dégager son visage des mèches qui tombaient habituellement sur ses tempes. Quand je vis que je n'étais pas le seul à la regarder, je pris une décision.
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Persée ~ Génie ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 218 ◈ YinYanisé(e) le : 04/11/2022
Allongé sur un banc, j'observai le jeu des sphères aux motifs célestes dérivant au plafond au gré d'une brise invisible. J'étais dans ma salle de méditation, pas par choix, mais parce que telle était ma place à cette heure précise. Il me restait encore du temps avant que l'aiguille frappe un nouveau chiffre mais j'avais fait le tour de mes pensées et j'avais des fourmis dans les jambes. Déambuler dans Basphel était aussi terrifiant qu'exaltant. Je croulais parfois sous le poids de l'immensité des possibilités et seule la maigre endurance de ma magie était là pour me harponner de retour dans ma prison pour y reprendre des forces. Je l'exécrais. J'étais l'esclave de cette routine imposée. Je m'étais persuadé que c'était ainsi que cela devait se passer et c'était supportable quand Perséphone était emprisonnée. J'étais moins seul de savoir que ma peine était partagée. Depuis que sa chambre avait été pulvérisée par les déchets de la Lune Noire, notre relation s'était détériorée. Ma présence n'était plus nécessaire, il ne restait que la fragilité de notre amitié pour l'encourager à faire appel à moi. Combien de temps pour que sa tendresse ne s'étiole et que je plonge dans les oubliettes ? Une autre réflexion avait planté son dard dans mon âme. J'étais un rappel de son ancienne vie et je voyais parfois l'éclat de ses iris s'éteindre quand elle m'accueillait.
J'ouvris les yeux en entendant le bruit caractéristique de gouttes d'eau. De larges rides troublaient le miroir en sphères concentriques. Je vis mon visage se déformer, échouant à représenter la surprise qui peignait mes traits. Des gouttes d'écrasèrent ensuite sur mon visage et soudain, je vis un visage s'écraser de l'autre côté du miroir. Sous le choc, je me redressai sur mes coudes. L'air amène, l'inconnu avait de longs cheveux laiteux qui ondulaient dans son dos comme s'il était sous l'eau. Il frotta l'aire en plissant les yeux et je notai les écailles de nacre qui couvraient ses bras. « Salut ! »
Muet de stupeur, je ne répondis rien. Les yeux gros comme des soucoupes, pas un de mes muscles ne tressautait. Il fronça les sourcils et la queue de poisson derrière lui fendit l'air. J'avais entendu parler de cette espèce, il y avait des Ondins à Basphel. Mais je n'étais pas à Basphel. « T'as mangé ta langue ? » Son large sourire exhiba des dents pointues. « Euh... » « Ah ! Ouf ! J'ai eu peur que ce soit déjà trop tard pour toi ! J'ai entendu des histoires affreuses sur des Sylphes qui étaient tellement désorientés qu'ils s'isolaient dans un coin perdu à l'abri de tous et l'éternité finissait par les avaler et ils cessaient tout simplement d'exister. Horrible, non ? Mais je comprends, c'est pas drôle d'être Sylphe. Enfin, moi, je l'ai bien vécu. Et toi ? » « Euh... » Désemparé au delà des mots, j'avais envie de disparaître des yeux de l'adolescent.
La malice creusait des fossettes dans ses joues et il repoussa mon trouble en enchaînant sans s'occuper de mon absence de réponse. « Moi, j'pense qu'on devrait s'entraider. À plusieurs, on est plus forts. Peut-être même qu'un jour, on pourra retrouver Somnium comme c'était avant ! J'ai pas connu mais les vieux Génies avec qui j'ai parlé m'en ont tellement parlé que même moi, je m'en sens nostalgique. Bref, avec les copains, on voulait aller à la foire des Rêves parce que c'est rigolo et que Somnium, c'est juste la déprime avec tous ces bâtiments qui s'effondrent. » Il me jeta un coup d'oeil et le spectacle de mon expression lui arracha un gloussement. « Tu ne comprends rien à ce que je dis, hein ? » Je secouais la tête de droite à gauche, une boule dans la gorge. « Commençons par les présentations, je m'appelle Cocci ! Comme Coccinelle ! Et toi ? » « Persée. » Réussis-je à articuler. « C'est ton vrai nom ? » Instantanément, je me raidis et mes lèvres se scellèrent. Il me sembla que l'abeille jonglant entre mes omoplates brûlait ma peau bien que celle-ci soit à peine plus tangible qu'un cumulus. Il ricana. « Je rigole, je rigole ! Bon tu viens ? On parlera en chemin et je t'expliquerai quelques trucs de base. T'as l'air super paumé. » « Mais je ne peux pas sortir. » Piaulai-je en ramenant mes genoux contre moi. J'avais envie de pleurer, sans savoir pourquoi. « Comment ça, tu peux pas sortir ? » Soit il était idiot, soit j'étais l'idiot. Ne voyait-il pas que j'étais détenu à jamais dans cette Tour ? Est-ce qu'il se moquait de moi, lui qui était libre ?
« Mais gros bêta, il suffit de sortir. Viens, essaie, tu verras. » Méfiant, je me dépliai et me libérai du poids de la gravité pour flotter jusqu'au miroir qui n'en était plus un. Cocci m'encourageait mais je ne me déridai pas pour autant. Avec l'impression d'être le dernier des imbéciles, je tendis un index fébrile vers la surface. Au lieu d'une vitre, c'est un contact liquide et frais qui accueillit ma phalange et bientôt, ma main disparut à travers. Je retins mon souffle, le coeur dans la gorge. « Continue ! » M'exhorta l'Ondin et un instant plus tard, les yeux fermement serrés, je me trouvais de l'autre côté. « Tu vois, c'était facile ! Ça fait longtemps que t'es là ? » Je ne répondis pas, légèrement vexé de la simplicité avec laquelle je venais de quitter ma prison. Je pivotai pour observer la Tour de l'extérieur. Ses briques brillaient d'un rouge comme repeint de frais. « Vite, hâtons-nous ! Tu vas adorer, j'en suis sûr ! Laisse-moi faire et détends-toi. » Un pli de concentration apparut sur son front. Après quelques secondes, des arbres surgirent autour de nous, immenses. En moins de temps qu'il ne m'en fallait pour le penser, le paysage s'était métamorphosé en une forêt à l'aspect peu engageant. Un vent froid soufflait l'humidité des sols dans mes narines.
Je sursautai quand une voix stridente agressa mes tympans. Cocci gloussa. Il paraissait s'amuser comme un fou. « Où est-ce qu'on est ? » Murmurai-je, à ça de succomber de terreur. « Dans un Rêve. » Répondit-il légèrement mais je le soupçonnais de prendre en réalité plaisir à me voir aussi désorienté. De nouvelles imprécations jaillirent et cette fois, j'en repérai l'origine. Une petite brune ailée menaçait un insecte d'un bâton. « Elle n'a pas l'air contente... On devrait peut-être s'éloigner ? » Fis-je d'une voix mal assurée. « Oh ne t'en fais pas, elle ne peut pas nous voir, sauf si on commence à traficoter son Rêve et qu'on décide d'apparaître. Mais attendons de voir ce qu'il se passe déjà. » J'acquiesçai avec ferveur, pas pressé d'être visible. « Ou, attends une seconde, tu vas voir c'est drôle. » Il se concentra à nouveau et un instant plus tard, la branche dans la main de la brune se transformait en fouet lacérant la pauvre bestiole qui lui faisait face. « C'est toi qui a fait ça ? » Soufflai-je, estomaqué. « Et ouais ! Tu veux essayer ? » « Euh... » « T'inquiètes pas. Tu me diras quand tu voudras, c'est pas très compliqué. Il n'y a qu'ici qu'on soit super forts, il faut en profiter. »
Je marquai un silence tandis que la Rêveuse se rendait jusqu'à son foyer. Cocci m'enjoignis de la suivre et nous fûmes à l'intérieur de sa sombre tanière. « Qu'est-ce que tu es ? » Lui demandai-je en profitant qu'elle était occupée. Il haussa un sourcil interrogateur. « Tu n'es pas un Ondin. » Exposai-je prudemment. « En effet. » Confirma Cocci, hilare. « Qu'est-ce que tu es alors ? » « Comme toi ! » « Quoi, comme moi ? Je ne sais même pas ce que je suis ! » Ma voix augmenta d'un octave. Son attitude de je-sais-tout commençait à me porter sur le système. Je ne voulais plus rester dans l'ombre de mon ignorance pendant qu'il se gaussait. « On est des Génies. Je suis le premier que tu rencontres ? Enfin, le premier dans cette vie. » Je songeai à la rousse qui se faisait appeler l'Esprit des Rêves et j'eus un hoquet de stupeur. « Je ne crois pas, non. » Je fourrai mon visage dans mes mains. « Je ne comprends rien. » Gémis-je.
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Merci Jil :
Kitoe ~ Démon ~ Niveau II ~ ◈ Parchemins usagés : 1741 ◈ YinYanisé(e) le : 09/11/2016
Helsinki cligna des yeux plusieurs fois, comme éblouie par l'aveu de sa nouvelle rencontre. Ce havre de paix n'appartenait à aucune Fae ? Comment cela était-ce seulement possible ? L'endroit avait pourtant tout d'un nid douillet pour s'établir. Elle sourit. Oriane était donc une voyageuse, comme elle. Cela la rendait enthousiaste.
-J'espère que personne ne nous en voudra. Répondit-elle sur un ton taquin, similaire au sien.
Toutefois, elle se préoccupait réellement de la propriété des lieux. La blonde s'en voudrait terriblement de mettre le désordre chez une comparse qui n'avait rien demandé.
Elle fut entrainée par Oriane dans une folle odyssée entre les feuilles et les fleurs. Un long moment, elle regarda leurs mains jointes. Helsinki n'était pas habituée aux contacts physiques, mais elle aimait beaucoup celui-ci. Alors qu'elle avait eu si peur de déranger la rousse un peu plus tôt, elle comprenait qu'il n'en était rien et qu'au contraire, celle-ci l'appréciait déjà. C'était réciproque. Les joues de la Fae avaient rosi au premier contact et son cœur s’était emballé. Elle ne décelait pas tout à fait ce qui était à l'origine de ces sensations. C'était à la fois nouveau et extrêmement naturel, comme si elle venait de déterrer en sentiment oublié depuis des lustres. Comme si Oriane avait déjà fait partie de sa vie et que leurs retrouvailles ravivaient un feu rassurant, si longtemps éteint qu’elle n'y avait pas fait attention.
-Maître Cerisier ? Répéta Helsinki quand sa compagne s’arrêta.
Elle leva le nez à la verticale pour comprendre de qui elle lui parlait.
-Waouh !
L'arbre était en effet aussi majestueux qu'un roi. Il trônait en maître au centre de cette prairie sauvage, lui rendant grâce par ses pétales qui donnaient à l’endroit toute sa poésie.
-C'est donc lui le propriétaire de ce jardin !
Impressionnée, la blonde s'inclina profondément face au végétal.
-Bonjour Maître Cerisier, merci de nous accueillir !
Elle écouta frémir à ses salutations et sourit, satisfaite de la douce réponse. Helsinki fit vrombir ses ailes et rattrapa sa camarade.
-Non, je n'en ai pas. Je ne sais pas vraiment d'où je viens. Ses souvenirs étaient flous. D'aussi loin qu'elle se souvenait, elle avait toujours voyagé. Je ne veille sur aucun Élu non-plus.
Elle fit un tour dans les airs, tourna autour de la rousse. La vue était belle d'ici, imprenable.
-C'est peut-être un peu égoïste. Mais je ne sais pas vraiment ce que je veux faire. Dit-elle en faisant une moue songeuse. Je crois que j'aime juste voyager.
Les mains dans le dos, elle revînt près d'Oriane tandis que celle-ci lui montrait le ciel. Helsinki ouvrit grand ses yeux. Elle non-plus n’avait pas vu le temps passer. Elle admira le ciel déclinant tout en écoutant Oriane. Ce qu’elle disait était très beau.
-Waah !
Elle approcha son nez de sa paume. Avant de prendre l’étoile entre ses mains, elle demanda l'autorisation d'un regard, puis la colla devant ses yeux avec l'émerveillement d'un enfant. Elle la contempla tellement longtemps que lorsqu'elle releva les yeux, Oriane avait disparu. Heureusement, elle n'eut pas besoin de céder à l'inquiétude : dans les airs se dessinait un chemin scintillant laissé par la concernée. Helsinki déploya ses ailes et la rattrapa. Elle découvrit alors un nouveau paysage. La nuit tombait définitivement et l'unique point de lumière émanait de la Fae en contrebas.
-C'est sublime. Dit-elle en atterrissant à ses côtés. Je pourrais rester ici des jours.
La main d'Oriane glissa dans la sienne. Une vague de chaleur envahit tout son corps et cela la fit rougir davantage que précédemment. En se tournant vers elle, Helsinki joignit leurs autres mains.
-C'était une très belle journée. J'aimerais que cette nuit soit similaire.
Des papillons s'affolaient dans son ventre. Sa tête bascula en arrière et elle se perdit dans le plafond, qui s'était vêtu de ses dernières étoiles.
-Essayons de les atteindre. Proposa la blonde.
Sans la lâcher, Helsinki entraina Oriane dans l’ascension. Ensemble, les deux Faes formèrent une lente vrille s'élevant toujours plus en direction de la voûte céleste. Une trainée de poussière les suivait, des paillettes dorées et argentées, parfois rosées ou bleutées. Helsinki ne quittait plus sa partenaire des yeux. Elle ressentait pour elle une profonde affection. Elle souhaitait que ce moment magique ne se terminât jamais.
-Oriane... Est-ce que... est-ce que je peux te prendre dans mes bras ?
Elle voulait la sentir contre elle et ne plus jamais la quitter.
Je me sentis glisser petit à petit. Les mots sur le livre que je devais recopier me paraissaient de plus en plus flous. « Ne vous endormez pas. » me reprit Val’Aimé. Mon dos était en sang. Je tremblais et, surtout, j’étais nu. Mon regard remonta vers lui. J’allais le tuer. J’allais le tuer tellement fort qu’il exploserait. Ma magie, pourtant, venait soutenir la sienne, l’embrasser. Il y avait quelque chose entre lui et moi que je n’expliquais pas. Au-delà de la souffrance qu’il me faisait endurer, je sentais un écho de mon être résonner en lui. Pourquoi ? « Recopiez. » ordonna-t-il. Ma Lux in Tenebris le menaça. La sienne s’y allia et l’engloba, comme une vieille amie. Je soupirai. Le livre était sans aucun doute interdit. Il s’agissait d’un ouvrage érotique entre deux hommes. La raison qui poussait le Chef des Armées à me le faire lire et écrire se passait de commentaire. Mon pénis était entouré d’un dispositif en fer sur lequel étaient fixées plusieurs aiguilles dirigées vers l’intérieur. La moindre réaction physiologique illustrant un quelconque plaisir finissait dans la souffrance. Je ne pouvais pas bouger, je ne pouvais pas m’en défaire. J’avais déjà essayé. La magie de Val’Aimé était plus puissante que la mienne. « Duc Taiji… je suis épuisé. » lâchai-je. Il y avait quelque chose entre nous, une chose qui restait latente et que je n’avais jamais remarquée avant. Je me redressai légèrement sur ma chaise et posai mon crayon. Je joignis mes mains et plantai mes yeux dans les siens. Il m’avait toujours inspiré la peur mais plus cette peur se consommait et plus j’avais envie de me rebeller et de le détruire. Peut-être que Cyrius avait raison depuis le début : personne ne tenait face à un agacement perpétuel. Lorsque je pensais au pipeau qu’il m’avait confié et duquel je m’étais servi enfant pour faire sortir de leurs gonds les domestiques, j’imaginais une sorte de pipeau d’un autre genre, spécial pour le Bras Droit de l’Empereur Noir. Il pouvait me fouetter, me frapper, m’obliger à rester debout des heures durant, me forcer à regarder des contenus érotiques en punissant chaque réaction de mon anatomie, il pouvait me faire pleurer et crier, j’étais à peu près certain qu’il ne pourrait pas m’empêcher de lui taper sur les nerfs si je commençais à le faire. La question était : comment ? Comment faire, tout en évitant de finir le crâne fracassé contre un mur ? « Pourquoi est-ce que vous faites ça ? Mon père le sait ? » « Votre père m’a confié votre éducation. » dit-il, d’une voix ferme, comme s’il était évident qu’il disposait d’un pouvoir irréfragable. « Quant au reste, ça s’appelle du conditionnement. » Me conditionner à ne plus désirer les hommes. Cette pensée me fit baisser les yeux. Quelques secondes plus tard, mes lèvres s’étirèrent. Je ris, fébrile. « Vous croyez que ça me fait plaisir d’être comme ça ? » « Vous n’êtes pas comme ça. Vous avez été corrompu. » Je ris encore. « C’est ça. » soupirai-je. « Je ne vous connais pas beaucoup mais ce que je sais, c’est que vous savez très bien que je suis comme ça. Autant m’émasculer directement parce que je ne vais pas changer. » Je relevai les yeux vers lui, mon instinct de survie ayant décidé de partir loin. « J’aime les hommes. » articulai-je distinctement, un air de défi un peu fou sur le visage. Il n’apprécia pas et les minutes qui suivirent furent les pires de ma vie, si bien que mon esprit se réfugia dans l’inconscience.
____
Les vêtements que je portais étaient frais. L’impression de propreté était étrangement prégnante. Ma peau était lisse, sans la moindre plaie, sans le moindre hématome, sans la moindre éraflure. La pensée me percuta puis s’évanouit sur la silhouette du rouquin. Un frisson désagréable se cacha dans le désir que sa silhouette fit germer en moi. À côté de lui, il y avait des garçons sans importance. Ils me semblèrent rapidement flous. Il aspirait tout. Il était étincelant, comme un soleil inévitable. J’allais brûler en toute connaissance de cause. Je déglutis. Je ne serais pas le seul à lui courir après. Sur ma ligne, nous étions plusieurs. La silhouette de Val’Aimé prenait place et il ne faisait aucun doute qu’il désirait, lui-aussi, saisir son ruban. Il faudrait pourtant que ce fût moi. Je le rattraperais et lui avouerais mon amour. À genoux devant lui, je ferais disparaître le moindre doute de son esprit.
La petite Dürdane se prélassait tranquillement sur l'herbe verte d'une plaine fleurie. La rosée traversait ses vêtements légers mais cela ne dérangeait pas la Fae. Elle se sentait bien et apaisée et profitait de la quiétude du moment en contemplant les nuages blancs passer dans le ciel d'un bleu éclatant tout en mâchonnant un brin de blé.
– Oh ! Regarde, une tortue ! s’enthousiasma la jeune fille en pointant la forme nuageuse du doigt.
– Et là, c'est un lapin ! lui répondit Pivoine, sa compagne de détente sur qui Dürdane était allongée.
Pivoine était un joli petit veau rose et blanc au pelage duveteux dans lequel Dürdane aimait se pelotonner le soir venu.
La jeune fille se mit à ce moment-là à rire gaiement en imaginant le lapin et la tortue faire la course sur la voûte céleste mais elle ne sut jamais qui aurait gagné car les deux bêtes moutonneuses se délitèrent face aux assauts d'un vent impétueux qui se répercuta dans la plaine, faisant ainsi onduler les brins d'herbes qui titillèrent les pieds nus de la petite Fae et voleter ses boucles rousses. Lorsque la bourrasque s'estompa, les deux amies retrouvèrent un silence complice de rêverie.
Des oiseaux passèrent alors dans le champ de vision de la jeune fille qui murmura distraitement :
– J'aimerai tellement voler, moi aussi...
– Mais Dürdane, s'exclama Pivoine, toi aussi tu peux voler, tu as des ailes !
La nouvelle paru abasourdir la jeune fille qui se releva subitement sur ses pieds et tournoya plusieurs fois sur elle même dans l'optique de voir son dos. Cependant, l’exercice ne fut pas concluant car elle s’emmêla les pieds et retomba sur les fesses. Sa comparse rit de bon cœur en voyant la mine déconfite de l'adolescente mais consentit finalement à l'aider.
– Là, tu vois ? demanda Pivoine en attrapant délicatement la fine membrane d'une des ailes de Dürdane dans sa bouche avant de l’étendre jusqu'à la main de cette dernière.
La jeune fille l'attrapa délicatement et se perdit pendant un instant dans le touché soyeux que cela provoquait.
– J'ai... des ailes... souffla Dürdane qui avait encore du mal à se remettre de cette révélation.
La petite vache motiva son amie à les tester en la poussant du bout du mufle.
– Ah ! Arrête Pivoine, tu me chatouilles ! s’écria la jeune fille joyeusement en se tordant dans tous les sens pour se soustraire à la langue râpeuse que son amie à quatre pattes venait de faire apparaître. C'est bon, c'est bon ! Regarde, je vais les utiliser !
Satisfaite, Pivoine se recula et laissa Dürdane se remettre debout. Cette dernière contracta alors tous ses muscles, ne sachant pas encore très bien comment faire fonctionner ses appendices dorsaux, jusqu'au point de devenir toute rouge. Mais la jeune fille n'abandonna pas et ses petites ailes aux couleurs chatoyantes se mirent enfin à vibrer, entraînant Dürdane à quelque pas du sol.
– Je vole ! Je... ah bah non, je ne vole plus ! remarqua l'adolescente en touchant de nouveau l'herbe avec ses pieds.
Étrangement, cet échec ne la frustra pas et elle n'eut pas à se faire prier pour retenter l’expérience. Ce deuxième essai l’amena plus haut et plus loin mais elle une fois de plus elle retomba au sol en trébuchant. De nombreuses tentatives suivirent ensuite, mais invariablement la petite Fae voletait sur quelques mètres puis finissait par retrouver le plancher des vaches avec plus ou moins d’équilibre.
Dürdane s’étala même une fois de tout son long dans une motte de terre humide qui barbouilla l'ensemble de son corps et de sa tenue.
Voyant que son amie ne bougeait plus après sa chute, Pivoine se précipita avec inquiétude vers la jeune fille, mais cette dernière en profita pour l'attaquer sournoisement avec une boule de terre. La petite vache colorée trouva cela parfaitement inadmissible et le fit savoir en mâchouillant les cheveux de la Fae. Les deux compagnes rirent de cette plaisanterie et s’écroulèrent au sol. Dürdane, fatiguée par son hilarité et ses diverses tentatives de vol, s'endormit comme une bienheureuse contre son amie bovine.
– Au secours ! Que quelqu'un m'aide, s'il-vous-plaît ! furent les paroles qui réveillèrent Dürdane de sa sieste bienfaitrice.
Tous ses sens se mirent en alerte mais elle n’aperçut rien venant troubler la quiétude de sa plaine fleurie.
– Tu as entendu ça ? demanda-t-elle alors à Pivoine en la secouant sans ménagement pour la tirer du sommeil elle aussi.
Celle-ci meugla son mécontentement de se faire réveiller aussi brusquement avant de répondre à la jeune Fae par la négative, puis elle posa sa tête de l'autre côté de ses pattes pour de nouveau refermer les yeux sans plus se soucier de son amie. La sieste était une activité sacrée.
– Aidez-moi ! Un méchant poisson me retient prisonnière !
L'appel à l'aide retentit de nouveau dans les oreilles de Dürdane qui n’hésita plus une seule seconde. Elle se mit debout et fit battre ses ailes avec fougue. Il était de son devoir de faire quelque chose, elle le ressentait intensément au fond de son cœur.
– Oh, c'est magnifique ! prit tout de même le temps de noter la jeune fille qui s’élevait bien haut dans le ciel pour la première fois.
La plaine en dessous d'elle ressemblait à présent à une flaque verte parsemée de milliers de tâches de couleurs et Dürdane, avec allégresse, adressa de grands signes de la main à son amie Pivoine qu'elle distinguait à peine. Toutes les fibres de son être lui disaient qu'elle avait fait le bon choix en se dirigeant vers la voix inconnue.
Le paysage ondoya tout autour de la Fae et en un battement de cils elle était ailleurs sans qu'elle ai eu l'impression de bouger.
Battement de cils. Une montage enneigée.
Battement de cil. Un lac aux eaux bleu turquoise.
Battement de cil. Une forêt profonde.
Battement de cil. Et ainsi de suite jusqu'à ce que Dürdane, tout en faisant du sur place, arrive devant un gigantesque poisson volant qui portait sous lui une cage en bois dans un ciel nocturne.
– Je suis là ! s’époumona la prisonnière lorsque Dürdane approcha. Il s’agissait d'une jolie et jeune Fae qui ne laissa pas l'adolescente indifférente.
– Je viens t'aider ! s'exclama Dürdane en remarquant l’accélération de son rythme cardiaque et les drôles de picotements dans son ventre. Un vague sentiment de familiarité l’étreignit également mais elle n'y prêta pas attention. Sa priorité était d'aider sa consœur.
Le poisson geôlier ne sembla même pas avoir remarquer sa présence, il continuait à se mouvoir avec nonchalance, emportant sa prison derrière lui. Dürdane se précipita alors vers la porte et essaya de l'ouvrir de toutes ses forces, malheureusement, elle ne réussit qu'à à faire tanguer la cellule, ce qui la déséquilibra et la projeta dans le vide. L'adolescente se rétablit en ouvrant grand les ailes puis elle fit un looping pour se replacer face à la Fae captive. Dürdane tenta alors de s'en prendre aux barreaux en voletant de l'un à l'autre. Elle les tirait et les poussait sans ménagement – au point que même de la poussière tomba de ses ailes à cause de l'effort – mais aucun n'accepta de bouger ne serait-ce que d'un pouce.
Dürdane souhaitait tellement venir en aide à cette Fae qui avait ravit son cœur en un instant sans qu'elle ne s'en rende seulement compte. Une fois libérée, peut-être que sa camarade inconnue accepterait de la rejoindre dans sa plaine fleurie ; et alors elles pourraient s'allonger toutes les deux dans l'herbe humide et profiter du spectacle des oiseaux s’égaillant dans le ciel.
Devant son échec précédent, la jeune fille décida alors de changer de stratégie. Elle s’éleva bien haut, presque au point de toucher le ventre poisseux du poisson pachydermique, puis elle replia ses ailes afin de fondre en piqué sur la cage, les pieds en avant. Juste avant l'impact, la porte de la cage s'ouvrit d'elle même, délivrant ainsi la jeune Fae qui sortit en déployant ses fines ailes membraneuses. Dürdane eut tout juste le temps de modifier sa trajectoire par une pirouette acrobatique pour ne pas lui rentrer dedans.
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Vœu : - Que l'autre Fae soit libre
Dürdane Bēkara ~ Eversha ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 191 ◈ YinYanisé(e) le : 09/01/2022◈ Activité : Boulangère [Rang I]
Sam 25 Mar 2023, 19:50
Mots 2348 - sans le paragraphe bis (t'as vu Mitsu, j'ai pensé à mettre le nom du duo <3) avatar : Nibelart