L'Indésirable du Marquisat
de Nylmord

Ambiance

— Je me demande ce que c'était, reprit Neah en se massant la joue. C'est vraiment très efficace. J'ai cru que j'allais mourir et ...

Mancinia se retournait violemment vers lui pour venir se précipiter dans ses bras. Si devant la Démone, elle avait paru implacable, elle tremblait désormais sous son étreinte.

— Ne refais plus jamais ça. Plus jamais ...
— ... Merci de m'avoir sauver la vie, répondit-il en caressant ses cheveux.

L'Ange ne pouvait en rien le lui promettre. C'était un Soldat. Et surtout, un Gardien. Elle comptait plus à ses yeux que sa propre vie et il venait de le prouver par des actes. L'Humaine s'écartait de lui, soulagée, tandis qu'il vint saisir ses lèvres.

— Tu vois que tu fais le Bien.

Évidemment, cette salissure immonde n'avait aucun antidote sur elle, probablement n'y en avait-il aucun. Les Démons n'étaient pas connus pour épargner leurs victimes après des tortures. Par contre, il y avait encore quelques contenants de cette mixture dans leurs affaires. Neah ravalait sa salive en les voyant, le souvenir de cette sensation d'être étranglé dans son propre corps ne le quittait pas, mais il se chargeait néanmoins de les transporter. C'était aussi dangereux que précieux, car ils devaient déterminer l'origine de leur provenance. La Paire s'assurait que rien ne les trahirait, car toutes les vérités n'étaient pas bonnes à dire. Sur le chemin du retour, ils avaient de quoi être moins prudents. Le Gardien avait cependant laisser Mancinia en arrière, d'un accord commun, allant chercher du secours vers le village voisin en volant au-dessus des arbres. Les habitants du hameau avait été choqués de découvrir la Marquise blessée par des Vils qui se cachaient sous les traits de paisibles voyageurs, son Ange n'étant pas en meilleur état, mais semblait s'être remis à l'aide de sa magie. Blessés, ils avaient été soignés sur place, les corps des Démons avaient également été ramenés. Elle voulait au moins les enterrer. Humaine malgré tout. Si cet acte lui donnait des allures de Noble, sans doute n'auraient-ils pas eu la même idée quand elle avait prit sa lance pour s'entailler les bras et les cuisses de blessures qui se voulaient superficielles ...

De retour au Domaine Qisar, le Capitaine avait retrouver ses hommes, ceux-ci avaient été assez inquiets de le voir blessé, mais soulagé de voir que ce n'était rien de grave. C'était un tableau très touchant, mine de rien. Ils avaient tous adhérer que les Démons ne s'étaient pas laissés soumettre. Monika ayant été d'autant plus troublée devant les marques de la Marquise, ainsi que ses vêtements abîmés de sang, lui arrachant quelques larmes mêlant soulagement et tristesse. La Fougueuse était décidément une Camériste bien dévouée, Mancinia l'ayant rassurée pendant quelques instants. Élinor lui avait ensuite proposer de vérifier l'état de ses plaies, malgré ses compétences propres, l'Humaine avait acceptée par pure politesse. Neah observait sa Protégée, un léger sourire aux lèvres. Finalement, les choses s'arrangeaient.

L'Ange était venu voir comment elle allait avant d'aller se coucher. Ses bandages donnaient illusions, mais ses chairs étaient guéries. Mancinia était allongée et l'avait convié à ses côtés, où il s'était installé sans mot dire. En conversant sur le liquide noir qu'ils avaient ramenés, ils ébauchaient quelques théories sur les dires de ces Démons, dans leurs derniers instants de vie. Ces informations, Mancinia les remonteraient dans sa hiérarchie et lui-même se chargerait de la sienne. Elle voulait vérifier avec des médecins l'origine du produit et enquêter sur ces personnes qui figuraient sur une liste, retrouvée dans leurs affaires, peut-être des victimes potentielles. Sa Protégée avait néanmoins piqué du nez au milieu de la conversation, reposant sa tête contre son épaule, vivement fatiguée et certainement amoindrie de sa condition féminine. Sans doute aurait-il dû mettre un coussin et s'en aller dans sa propre chambre, mais il n'y parvenait pas. Neah observait le corps étendu de l'Humaine à ses côtés. Elle était si belle dans sa tenue de nuit. Nulle envie ne le saisissait à son encontre, seulement de l'Amour. En baissant ses paupières sur ses yeux, il imaginait une vie à ses côtés. Une vie merveilleuse. En rouvrant les yeux vivement, comme si quelques instants s'était passé et contemplant la pièce plongée dans la pénombre après que la mèche de la bougie se fusse éteinte, l'Ange était saisi d'une pression glacée.

Sans qu'il n'en comprenne la raison, certains propos tenus par l'un de ses plus proches amis, autrefois mentor, lui revenaient en mémoire.Les Humains restent des tentations pour leurs Gardiens. Ils sont leur partenaire bien-aimé, mais exacerbe souvent les risques de la Déchéance. Sois très prudent quand tu es avec elle. Elle peut tout donner et tout te reprendre. Sans doute avait-il rit. Sans doute ... Qu'est-ce que c'était que ce sentiment qui lui broyait la poitrine subitement ? Cette ... chose. De la crainte ? De la haine ? Son regard se tournait vers Mancinia, endormie paisiblement dans ses bras. Son Amour était un sentiment qui cristallisait toutes ses peurs, tous ses espoirs. Un rien pouvait tout anéantir. Il le savait. Il se souvenait de sa longue traversée dans le noir ... De ne pas la savoir là. Mancinia allait le détruire si elle restait ainsi. Oui. Gilgamesh avait raison. Elle était une faiblesse. La sienne. Il devait éliminer cette faiblesse. Il le devait vraiment. C'était ce qu'il devait ... Non. Si. Bien sûr que si. Regarde ce qu'elle est devenue. Regarde-là vraiment, ce n'est même pas une Humaine normale. Elle est cassée. Sa place n'est plus chez eux. Et si ... Elle devenait une Ange ? Oui ! C'est une si bonne personne, elle reviendrait certainement ... Nous pourrions alors reconstruire ensemble. C'est ça. Il suffit d'éliminer la faiblesse de son humanité et ensuite ... Il n'avait même pas encore compris pourquoi ses pensées se retrouvaient en train de se bousculer dans sa tête que sa main avant saisi sa dague de manche, pour la lever au-dessus d'elle.

Ce n'était qu'un seul coup.

Ensuite, elle serait morte. Son bras tremblait, comme désireux de résister à ses pensées étranges qui l'assaillaient. Elle était si belle, si innocente. Il devait la tuer, maintenant ! Non ! Et comme une Malédiction dont on parvient à s'extraire, son bras partait en arrière, laissant ses doigts s'ouvrirent avant que l'arme ne dégringole de sa main, heurtant le sol dans un bruit mat. Comme dans un sommeil léger, ce tintement éveillait la Marquise endormie. A moins que ce ne soit les tremblements de son corps ?

— ... Neah ?

Mancinia voyait clairement le regard de son Gardien se troubler. Cette réaction attisait sa curiosité, mais également son inquiétude, surtout lorsqu'il se dégageait de leur étreinte, la laissant de nouveau dans une ambiance austère et glaciale. Qu'avait-il à la rejeter ainsi au grès de ses envies ? Cela aurait dû la mettre en colère, mais sa réaction la perturbait, alors elle passait outre. C'était évident que son partenaire n'allait pas bien, elle le ressentait avec une telle précision. Ces sentiments contraires la déroutaient d'autant plus. Le Capitaine lui tournait le dos, le visage entre ses mains. Avait-il fait un cauchemar ?

— Neah, hey, dit-elle en posant ses mains sur ses épaules. Qu'est-ce qu'il t'arrive ?

Mancinia relevait son regard. Elle avait compris. Elle n'osait y croire.

— Neah, tu ...

Cette dague, au pied même de son lit ...

— Neah, pourquoi tu ... cette ... arme ? ...

Jamais une arme ne se serait retrouvée là par hasard. Est-ce qu'il avait envisager de se blesser ? Non ... Non, ce n'était pas cela. Il se retournait dans sa direction. Son regard était si dur. Si glacé. Il ... Qu'avait-elle fait ? Par les Aetheri, qu'avait-elle fait pour mériter cela ?!

— Tu me déteste tant que ça ? ...

Sa voix était brisée. Des larmes s'étaient mises à couler, comme si ses nerfs ne pouvaient le supporter. En voyant son état, c'est comme si elle l'avait ramenée de ses songes labyrinthiques. Il eu un sursaut en réalisant ses actes et saisit ses épaules, la regardant droit dans les yeux.

— Non ! Je t'aime ! Je t'aime à en crever !
— Mais, alors, pourquoi ? ...

Les mots manquaient. Sa voix s'était éteinte, se rendant compte de l'expression de son Gardien qui s'assombrissait, son regard qui fuyait ses yeux implorants. Devait-elle réellement mettre des mots elle-même là-dessus ? Neah était néanmoins conscient que ce qui venait de se passer n'était pas normal. Il ne comprenait pas lui-même ce réveil brutal, tous ces sentiments qui ne lui appartenaient pas.

— Je ne sais pas ... Je ne comprends pas ! Je n'y arrive plus ...

Son visage, dès lors, se décomposa complètement. Ses joues rougirent et des larmes se mirent à couler de ses joues. Instantanément, comme s’il s'était retenu tout ce temps. Celles de Mancinia s'apaisèrent, comme si sa douleur n'équivalait pas la sienne.

— Je n'en peux plus. Ça suffit. Je t'aime. Je t'aime tellement ... Je veux seulement être avec toi, tout le temps, constamment ! Reste avec moi !
— Je suis avec toi ! répliqua-t-elle. Pourquoi, si tu m'aimes, me menaces-tu d'une arme ? C'est ça l'amour pour toi ?!
— Non, bien sûr que non ... Tu ne comprends pas, c'est normal ... Si tu étais morte, la Grâce d'Ahena t'aurait touchée, c'est évident.
— Tu ne me veux pas comme Humaine ? l'interrogea-t-elle, interloquée.
— Si tu étais une Ange, nous pourrions être ensemble.
— Nous sommes ensemble, Neah !

Quelque chose martelait son esprit qu'elle serait mieux morte. Cette voix persifleuse le dérangeait. Mancinia mis sa main contre sa poitrine pour se désigner ouvertement.

— Si tu veux absolument épouser une Ange, fais-le, mais sache que moi, Mancinia Leenhardt, je suis Humaine ! Je suis fière ! Tu peux me transformer en tout ce que tu veux, cela ne changera rien ! Je suis et je resterais !

Ses yeux humides avaient laisser désormais place à une tempête. Jamais. Jamais elle ne le laisserait dire qu'elle serait mieux en Ange. Ce n'était pas ce que les Aetheri avaient voulus. Son devoir était de servir son peuple, c'est tout. Neah eu un sourire si tendre qu'il en était déroutant, l'Humaine ne savait plus si elle devait lui pardonner ou le chasser.

— Je sais. Nous sommes une équipe. Je ne veux pas que tout cela change. Je sais que les Humains ont besoin de toi. Je ne comprends plus ... C'est ...
— Mais qu'est-ce qu'il t'arrive ? demanda-t-elle, troublée.
— Je t'aime ! dit-il en la prenant dans ses bras. J'aime tout ce qui fait de toi une Humaine !

Mancinia eu un sursaut en le voyant agir, mais ne pu repousser son étreinte malgré la plaie béante dans son coeur. Ses paroles étaient si décousues, son comportement si étrange ... Il la voulait Humaine, mais l'imaginait Ange. Il l'aimait, mais il voulait la tuer. Son regard passait de tour à tour du froid, à l'effarement, à la colère et à la désolation. Ça n'avait pas de sens ... Elle repoussait délicatement ses bras.

— Neah ... Je ne connais pas très bien les moeurs angéliques dans leur ensemble, mais nous sommes des alliés, vous avez veillé sur nous en devenant nos Anges Gardiens, cette condition est respectée par tes semblable, alors pourquoi vouloir m'éliminer ? Pourquoi des Gardiens pointeraient leurs armes sur leurs Protégés, pourquoi me dire que tu es mon égal si tu veux me voir avec des ailes blanches ?

Il y eu un silence, l'Ange ne savait pas quoi lui répondre et pourtant, il cherchait.

Post XVI - 1910 mots

L'Indésirable du Marquisat
de Nylmord

Ambiance

— Qu'est-ce qui vous a pris de partir s'en en avertir personne, Capitaine ?

Dans le bureau du Commandant de la Compagnie de Yürell, Neah se sentait comme absent. Il savait la raison de sa présence, des conséquences qui pourraient en découler, mais cela ne semblait pas l'inquiéter, comme si son esprit n'était plus capable de le mesurer. Il soutenait le regard de son interlocuteur, contrairement à sa dernière venue en ces lieux, où il avait dû s'expliquer sur la disparition d'une Déchue venue causer de l'embarras entre leurs murs. Ce n'était pas pour les mêmes raisons et la honte le saisissait de manière bien moindre.

— C'est délicat de devoir expliquer le lien qui m'unis à ma Protégée, Commandant. J'ai seulement ressenti qu'elle avait besoin de moi.

L'Ange eu un petit sourire qui ne trompait personne sur la tendresse qui lui portait, même s'il n'était pas tout à fait honnête, dans la mesure où c'était lui qui avait eu besoin d'elle. Il n'était néanmoins pas assez idiot pour croire sincèrement qu'il allait s'en tirer aussi facilement, dans tous les cas.

— Je comprends. Elle a été absente très longtemps et vous souhaitiez l'aider dans le cadre de ses charges.

Le Commandant était bien conscient de ce Lien. Combien d'Anges n'avait-il pas vus être détruit de cette brisure lors de la perte de leurs Humains ? Certains remontaient la pente après plusieurs années, d'autres encore plus longtemps. Et les derniers n'y parvenaient pas. Il était à même de se souvenir de cette Recrue courageuse, mais qui errait comme une âme déchirée devant l'absence de sa Protégée. Elle n'était pas morte, seulement absente. Ce devait être encore plus tragique de ne rien pouvoir faire et d'attendre. Yüerell avait été, pour bien de ses membres, un moyen de retrouver un équilibre après l'immense cruauté qui s'était abattu sur les terres du Yin et du Yang lors de l'ère précédente. C'était ce dont le Captaine Katzuta avait besoin, un nouvel équilibre en ses devoirs envers la Compagnie et envers la Kaaezi Leenhardt.

— Avec votre respect, Mancinia n'est pas seulement une guerrière émérite chez les Humains, c'est aussi la Marquise de Nylmord et c'est à ce titre qu'elle m'a demandée de l'aide. Une menace pesait sur le marquisat et son rôle est d'en prendre soin au nom de l'Ultimage. Absente comme elle l'a été ces dix dernières années, elle avait besoin d'une aide et c'est naturellement que j'y suis allé. Sans doute n'aurais-je pas dû le faire sans vous en avertir, mais ...

Le Commandant levait sa main pour l'interrompre. Ce n'était pas la peine de lui dire des évidences, surtout quand les sentiments s'y mêlaient. L'Imperator n'était pas aveugle à ce point.

— La Matasif est une amie de longue date de notre peuple. Traquer les Démons au sein du territoire Magicien est un moyen de nous offrir l'opportunité d'également les remercier de leur hospitalité.

Le Capitaine acquiesçait, silencieux.

— Avez-vous au moins trouvé quelque chose ?
— Oui, tenez.

En cherchant dans sa poche tout en se rapprochant du bureau de son supérieur, Neah sorti de celle-ci une fiole où gargouillait un liquide flasque et noir de jais, qu'il posait sur le bois. Il ne le relâchait pas immédiatement.

— Soyez très prudent, Imperator. Nous ne savons pas ce que c'est et ce liquide est agit très rapidement.

Neah retirait ensuite sa main pour remettre ses membres supérieurs dans son dos.

— J'ai transmis les autres échantillons au Capitaine Brayan. Son équipe va se charger de son analyse. Quelques autres sont chez les Humains.
— Vous avez été toucher par ses effets, c'est cela ?
— En effet, c'est ma Protégée ... qui m'a protégé, répondit-il dans un sourire.

Son visage se crispait. Avant que tu échoues à la tuer. Non, ce n'était pas parti. Qu'est-ce qu'il avait mal au crâne.

— Nous n'avons pas pu procéder à un interrogatoire. Seulement, au cours de notre combat, nous avons eu droit à quelques propos quant au Monarque Démoniaque ... L'un nous a dit que la mauvaise herbe avait été éliminée. Nous avons découvert une liste comprenant plusieurs noms, certains rayés. La Matasir Leenhardt l'a conservée avec elle pour enquête, mais elle m'a tout de même promis de nous transmettre une copie.

Il y eu un silence.

— Nous pensons qu'Azmog purge chez ses héritiers pour choisir son successeur. Ce qui engendrerait une déstabilisation. Peut-être même une guerre de succession ... Ce qui nous laisserait plus d'opportunités pour sauver d'éventuels prisonniers sur la Terre Blanche.

Ce n'était pas vraiment quelque chose de confirmé, mais cela s'avérait nécessaire d'être honnête. Si leur territoire pouvait être dépouillé d'une de quelques contingents pour maintenir une pression en Enfer, ce serait des moments décisifs sur leur avenir à tous.

— Imperator, c'est ...
— Oui, Capitaine ? l'encourageait-il.
— Nous devrions ... Poursuivre ce qui a été entreprit, sans délaisser ce que nous accomplissons maintenant. S'il y a vraiment quelque chose qui déstabilise les Démons, nous devrions en tirer profit.

Ils se regardaient durant quelques secondes, avant que le Commandant ne reporte son intention sur la fiole entre ses doigts.

— Bien, ce sera tout. J'attendrais votre rapport écrit. Passez aussi à l'Infirmerie pour constater que vos blessures ont bien été soignées.
— Oui, Imperator.

Neah s'abaissait en signe de respect, avant de pivoter sur lui même et de sortir de cet endroit. C'était vraiment impressionnant de voir à quel point l'air lui-même semblait plus léger lorsqu'il ressortait. Il prit une profonde inspiration avant de suivre le couloir. Oui, il aimait Mancinia. Alors pourquoi avait-il prit une dague pour essayer de la tuer ? Mancinia l'avait regardé ... Pouvait-il vraiment essayer de réparer cette erreur ? Cette scène repassait en boucle dans son esprit. Lui-même n'y comprenait rien.

— Quelqu'un t'en a donné l'ordre ?

Qui aurait pu donner un ordre aussi cruel ? Cette idée même avait de quoi glacer n'importe qui.

— Non ! protesta-t-il vivement. Je ne sais pas ce qu'il m'a prit ! C'est comme si le Diable était venu prendre possession de mon esprit ! Je ... Je ...

Neah mit une main contre son visage, les larmes ne cessaient de couler. C'était incontrôlable. Sa maîtrise réduite au néant le plus absolu.

— Ne me déteste pas, souffla-t-il en tremblant.
— Je ne te déteste pas. J'en suis incapable ! ... Je suis simplement furieuse ! Furieuse et blessée ! Pourquoi, Neah ?!

Comment pouvait-il répondre ? Elle le repoussait ensuite brutalement.

— Laisse-moi seule.

Neah l'observait quelques minutes, blessé de cette situation, se redressant la mort dans l'âme, après l'avoir regarder longuement, tandis qu'elle détournait le regard. Sur le pas de la porte, la main sur la poignée, il se retournait dans sa direction, alors qu'il ne pouvait voir que son dos.

— Je ...

Elle ne le regardait même pas.

— Je suis désolé.

Elle le savait.

— Hum ?
— Oui ?

Neah était assis sur un tabouret du centre de soins, sans doute était-il amorphe, perdu dans ses pensées comme il l'était et cela surprenait le médecin qui l'auscultait ? Ce dernier passait ses mains dans son dos, insistant bien sur des points précis de ce dernier sans que son patient n'en comprenne la raison. Loin d'être inquiet, il se demandait néanmoins ce qui rendait le praticien si circonspect.

— Vous avez été blessé à cet endroit ?
— Non.
— Vous avez mal quand je vous touche, ici ? dit-il en appuyant deux doigts le côté haut de son dos.
— Non.
— Vous pouvez déployez vos ailes, s'il vous plaît ?

Neah eu un mouvement de l'épaule pour se retourner légèrement vers le médecin, c'était à son tour de se poser des questions sur son état. Avait-il vu quelque chose ? Pourtant, même si Mancinia l'avait soignée, aucun de ses adversaires n'avait atteint ses côtés dorsaux. Le médecin reculait en raclant le sol de son tabouret pour lui laisser de l'espace, le Capitaine retint un soupir d'agacement avant de laisser ses ailes apparaître. Elles étaient toujours aussi belles, ivoirine et clairsemé d'or. Magnifiques, mais à quel prix ? Il détournait son regard, sentant les mains du médecin les parcourir avec précaution.

— Vous savez les bouger ?

Pour toute réponse, Neah les battait avec une certaine douceur durant un temps régulier, trois à quatre fois.

— Pas de douleurs non plus ?
— Non. Qu'est-ce qu'il se passe ?
— Eh bien ... C'est étrange, vous avez des marques dans le dos qui donnent l'illusion qu'elles sont abîmées.
— Comment ça ? C'est visible depuis l'extérieur ?
— Normalement, non. Mais vous avez des marques comme si quelque chose devait sortir de votre dos pile à l'endroit d'émergence. Une trace rouge et une trace grise. C'est assez troublant. Peut-être des marques de blessures antérieures ?
— C'est probable ... Je suis un Soldat.

Le médecin restait assez suspicieux, avant de rendre les armes en haussant les épaules. L'Ange rentrait rapidement ses ailes dans un lieu où il ne le verrait pas, tandis qu'on vient observer ses bras, clairsemés de cicatrices et de petites coupures. Le Don de Mancinia était incroyable. Tout avait disparu. Sa douleur, sa fatigue ... Cette sensation atroce de mourir, prisonnier de son propre corps. Ce n'était décidément pas n'importe quoi, ce qu'elle avait dans le creux de sa main. Le praticien se rapprochait de lui, prenant son visage entre ses mains, posant ses pouces en dessous de ses yeux, observant jusque dans le fond de ses pupilles. Neah conservait son oeil aveugle. Est-ce que le Don de Mancinia avait ses limites, ou elle ne pouvait soigner que ce qu'elle connaissait ? Non. Probablement avait-elle tout concentrer sur le poison de son corps. Cela l'épuisait grandement, rapidement. Cela lui faisait peur. A quels conditions pouvait-elle s'en servir ?

— Vous avez affronter des Démons, c'est bien cela ?
— Oui.
— Est-ce que vous en avez regarder un longtemps dans les yeux ?
— Je ... Je ne suis pas très sûr.

Son interlocuteur retirait ses mains, l'observant quelques instants pour le préparer à une nouvelle à laquelle il ne s'attendait pas.

— Vous êtes sous l'emprise d'un sort d'hypnose, Capitaine.

La stupéfaction l'empêchait de parler.

— Vous n'avez rien eu d'étrange ces derniers temps ? Quelqu'un vous aurait fait remarquer un changement d'habitude ou de comportement ?
— ... Non. Rien de particulier.
— Tant mieux, reprit le médecin en soupirant. Sans doute êtes-vous assez résistant pour ne pas succomber. En tout cas, c'est assez élaboré ... Allongez-vous, nous allons briser l'enchantement.

En sortant de la salle de soins, Neah se sentait bien mieux, presque léger. L'étau au-dessus de son esprit semblait s'être relâchée. Il avait moins mal à la tête, respirait sereinement, ses pensées étaient plus claires. C'était donc la raison de son mauvais comportement envers la femme qu'il aimait ? ... C'était atroce. Qui lui avait mit cela dans la tête ? Jamais elle ne le croirait. Jamais elle ne le lui pardonnerait. Seulement, un ombre demeurait dans son esprit tandis qu'il parcourait les couloirs de la Caserne. Si Mancinia avait une antimagie aussi puissante au point que les Démons n'avaient sût utiliser leurs sortilèges contre eux ... Comment avait-il pu être sous l'emprise un sort d'hypnose ? ...

Post XVII - 1823 mots | Fin