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 Pillons la plage [Solo]

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Dim 18 Déc 2016, 19:31

Silo et moi marchons en silence le long de la Plage de Sable Fin. Il doit être aux alentours de midi, nous n’avons pas dormi ni mangé depuis la veille.
Les mains serrées autour des lanières de mon sac, je ne lève pas le nez du bout de mes bottes et j’essaie de me concentrer exclusivement sur l’effondrement léger du sable sous mon poids à chacun de mes pas et le fourreau de mon épée qui m’effleure les mollets par moments. Mais contre mon gré, d’autres images viennent flotter devant mes yeux.
Kobalt qui chute au ralenti vers le sol. La tache de sang à l’arrière de son crâne.
La culpabilité, que j’ai réfrénée pendant tous ce temps, monte soudain en moi et menace de m’étouffer. J’inspire profondément, en quête d’air.
Silo tourne brièvement les yeux vers moi. Je me refuse à lui rendre son regard. La honte est trop grande. Tellement grande que je m’étonne de pouvoir mettre un pied devant l’autre avec tant de facilités, alors que je devrais être clouée au sol par le poids de mes actes.
À ce moment, la rumeur de voix me parvient. Je tends le cou. Devant nous, les pieds nus trempant dans les vagues ou s’enfonçant dans le sable meuble, des gens s’agitent sur la plage. Ils sont nombreux et ils semblent tous scruter le sol, car ils sont penchés en avant et marchent avec la lenteur de ceux qui cherchent quelque chose.
-Qu’est-ce qu’ils font ? je marmonne.
Le son de ma propre voix sonne étrangement à mes oreilles. Je réalise que depuis la nuit précédente, où nous avons quitté précipitamment la maison, je n’ai pas prononcé un mot.
-Je ne sais pas, répond Silo dont la voix est elle aussi un peu enrouée d’être restée silencieuse pendant si longtemps. Mais je pense qu’il vaut mieux ne pas trop se faire remarquer.
Je ne sais pas s’il dit ça parce qu’il ne veut pas être identifié en tant qu’Ange ou parce qu’il a peur qu’on voie le meurtre sur mon visage. Sans doute y a-t-il un peu des deux.
Mon regard est attiré par le bord de mer. Le reflux apporte avec lui une grande quantité d’objets naufragés et les abandonne sur la plage. Il y a surtout du bois flotté, mais je crois aussi apercevoir des grands morceaux de tissu, des pièces de porcelaine et même des bijoux.
Je pense comprendre à quoi se consacrent tous ces gens qui se sont agglutinés sur la plage.
Je m’arrête et tire Silo par la manche.
-Regarde, je lui dis en pointant du doigt les rejets de la marée.
Silo tourne ses yeux bleus dans la direction de mon doigt et il semble saisir ce que je lui signifie. Il secoue la tête.
-Ce n’est pas une bonne idée, Anîhl, déclare-t-il en me regardant. Il faut qu’on avance. Je ne veux pas m’attarder ici, c’est trop risqué.
Je l’affronte du regard. Je remarque que le sien est un peu éteint. Ma gorge se serre. Néanmoins, j’insiste :
-On peut trouver des choses utiles. Peut-être même des trésors.
Silo hoche à nouveau négativement de la tête.
-Regarde tout le monde qu’il y a, argumente-t-il en faisant un geste vers les Réprouvés qui se consacrent à leur chasse au trésor.
-Justement, je m’obstine. Dans la foule, on passera inaperçus. Tu ressembles à n’importe qui, ici.
Cette fois, l’Ange garde le silence. Je sais que j’ai gagné, même s’il désapprouve. Sans demander mon reste, je me mets à fouiller le sable du regard et du pied. Silo soupire, puis il se joint à moi.
Nos premières trouvailles sont en-deçà de mes attentes. Nous ramassons essentiellement des objets qui ne paraissent réutilisables qu’à première vue. La plupart sont à jamais détruits par l’eau salée.
-Pourquoi est-ce qu’il y a autant de débris, tu crois ? je demande à l’intention de Silo, qui cherche à quelques pas de moi.
-À mon avis, ce sont les restes des bateaux d’exploration pour Taelora, répond-il après réflexion. Beaucoup ne sont jamais revenus.
Je médite ses paroles. Les catastrophes naturelles qui ont déferlé en chaîne sur les Terres se sont calmées il y a peu seulement. Bouton-d’Or a été partiellement détruit par les inondations et les tremblements de terre. Depuis mon isolement, j’ai suivi seulement de loin la découverte de Taelora, le nouveau continent.
Silo m’appelle et me tire par la même occasion de mes pensées. Je lève le nez. Il agite un bout de tissu sombre à bout de bras d’un air content. J’abandonne mes propres recherches et m’approche en trottinant.
-C’est quoi ? je demande en arrivant à sa hauteur.
-Une cape, répond-il avec le premier sourire depuis la veille. Elle m’a l’air dans un état correct, je pourrai la porter pour me dissimuler dans les territoires Réprouvés.
Ce disant, son sourire disparaît aussi vite qu’il est apparu. Je mords violemment le piercing de ma lèvre inférieure, parce que je déteste savoir qu’il fait tout ça pour moi et qu’il en souffre.
Nous avons décidé de nous rendre à Sceptelinôst. Initialement, Stenfek se présentait comme une option plus simple en raison de sa proximité à Bouton-d’Or, mais les récents événements nous ont dissuadés de nous y rendre. Si l’on en croit les dires, la ville est à moitié en ruines. Sans parler du fait que Silo se ferait épingler dès l’instant où il mettrait un pied chez les Réprouvés.
Sceptelinôst est loin, mais nous espérons que les habitants y sont plus tolérants étant donné que c’est un lieu de passage. Je m’entête à croire que même un Ange a sa place à Sceptelinôst.
Mais d’abord, Silo a décidé de passer à la Citadelle Blanche, le temps de récupérer ses propres biens et surtout, son argent. Aucune chance que nous survivions autrement. Je vais devoir attendre toute seule sur la Plage de Sable Fin le temps de son aller-retour. La perspective ne me plaît pas du tout.
Nous reprenons nos fouilles en silence. J’essaie d’éviter tous les autres explorateurs qui sillonnent les dunes. À deux ou trois reprises, j’assiste de loin à des affrontements virulents entre des individus qui se disputent une trouvaille. Les gens sont comme des bêtes lorsqu’il s’agit de leur avidité.
Précisément au moment où j’ai levé le nez pour observer deux femmes tirer vigoureusement de chaque côté d’une grosse boîte à grands renforts de cris furieux, mon regard est attiré par un éclat brillant sur ma droite. Je baisse les yeux. À moitié enfoui dans le sable, un objet doré reflète les marbrures mouvantes de l’océan. Je m’approche, avec la certitude d’être tombée sur un gros butin.
Je ramasse ma trouvaille et en époussette les grains de sable. C’est un diadème richement orné de perles et de diamants. C’est comme si la noyade et le sel n’avaient eu aucun effet sur lui, car il brille sous les rayons du soleil, intact.
Il pourrait me rapporter une somme colossale si je le revendais.
-Silo, j’appelle sans détacher mes yeux du bijou.
C’est une autre voix qui me répond :
-Qu’est-ce que tu as trouvé là, mademoiselle ?
Je tourne la tête. Un homme solide s’avance dans ma direction, suivi à quelques pas de distance par deux de ses homologues. Inutile de cacher le diadème, c’est précisément la raison pour laquelle cet individu m’a accostée.
Je décide de ne pas lui répondre. Je peux me douter qu’il en veut à mon butin.
-Ce bijou est très beau, commente l’inconnu, concrétisant mes doutes.
Il s’est arrêté à ma hauteur et ses deux acolytes l’ont rejoint.
-Et alors ? je grince.
-Ça te dirait de nous l’échanger contre certaines de nos propres trouvailles ? tente de m’amadouer l’homme.
Ce disant, il fait un signe de tête à l’un de ses amis, qui ouvre le sac qu’il a à la main. J’entends des objets qui s’y entrechoquent.
-Pas intéressée, je réplique en serrant un peu mes doigts autour du diadème.
Mes interlocuteurs commencent à m’agacer. J’espère qu’ils n’ont envie que de marchander et n’envisagent pas de recourir à la manière forte. Même si mes propres phalanges me démangent de frapper ces hommes, ceux-ci sont chacun deux fois plus épais que moi.
Où est Silo ? Il est plus doué que moi pour parlementer. Un rapide coup d’œil à droite et à gauche m’apprend qu’il n’est pas dans les parages, je vais devoir me débrouiller sans lui. Comment se comporterait-il dans cette situation ?
-Je suis désolée, messieurs, dis-je en faisant de mon mieux pour adopter un ton poli. Votre marché ne m’intéresse pas.
Mais les hommes semblent faire la sourde oreille à mes efforts, car le premier prend le sac des mains de son camarade et élargit l’ouverture pour m’en montrer le contenu.
-Regarde, ma jolie, m’encourage-t-il d’un ton faussement jovial qui me hérisse les poils. On a plein de belles choses. Tu veux des assiettes ? Elles sont en porcelaine et à peine ébréchées. Des couverts ? Je peux t’assurer que c’est de l’argent.
Je grince des dents et je fais de mon mieux pour retenir la colère qui me grimpe le long de la gorge. J’envisage brièvement l’option de casser le nez à cet individu mais l’image du corps de Kobalt étendu sur le sol qui surgit brutalement dans mon esprit me coupe dans mon élan.
-Tu m’écoutes, mademoiselle ? lance l’homme en agitant une assiette ornée d’horribles peintures roses et vertes sous mes yeux.
Je lui jette un regard plein de dégoût.
-Je vous ai dit que vos trucs ne m’intéressent pas, je rétorque avec l’intention de tourner les talons face à ce trio insistant.
-Attends, ne pars pas si vite ! s’exclame l’homme et il m’attrape par le bras pour me retenir.
Automatiquement, mon poing encore serré autour du diadème part en direction du visage de l’individu. Sous le cri de surprise de ses acolytes, je sens les ornements pointus du bijou entrer en contact avec la tête de l’homme. Ce dernier crie à son tour, de douleur. Il me lâche et porte les mains à son faciès ensanglanté.
Je recule d’un pas. Je ressens une satisfaction sauvage d’avoir enfin donné une leçon à cet importun, mais je regrette déjà d’y être allée aussi fort.
-C’était un réflexe, j’assure sans grande conviction à l’intention des amis du blessé qui sont venus l’entourer.
Ils me jettent des regards haineux qui en disent long sur leur ressentiment. Incapable de m’enfuir, je vois l’homme que j’ai attaqué révéler son visage sous ses mains. Il est altéré par plusieurs entailles sanguinolentes. J’ai failli toucher son œil droit.
-Tu vas le payer, petite garce, siffle-t-il d’une voix qui trahit sa douleur.
Je sens mon estomac se contracter. Je me demande un instant si je n’aurais pas plutôt dû leur céder le diadème, mais ma fierté balaie aussitôt mes doutes. Ces charognards ne méritent rien d’autre qu’une bonne raclée.
En attendant, je suis seule contre trois.

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Dim 18 Déc 2016, 21:12

Pillons la plage [Solo] 418895SiloDès que le soleil l’eut séchée, Silo enfila la cape sombre qu’il avait trouvée sur la plage, avec le sentiment soulagé de ne plus être la cible de tous les regards. En fait d’attention, l’Ange n’avait rien attiré de plus que d’occasionnels coups d’œil vitreux de la part des hommes et des femmes qui croisaient sa route, confirmant la croyance d’Anîhl qu’il passerait totalement inaperçu au milieu des Réprouvés. Néanmoins, Silo accueillit l’anonymat de la cape avec joie ; il se détendit.
Le jeune homme avait laissé son chemin s’éloigner de celui de sa sœur quelque temps auparavant, aiguillé par ses recherches. Au bout de quelques heures d’errance, il avait ramassé, en plus de la cape, deux couteaux de chasse un peu rouillés mais encore utilisables, des couverts, trois chemises et un pantalon. Les vêtements avaient des trous par endroits mais Silo comptait les réparer dès que possible. Avec regret, il avait dû laisser à leur place des objets plus volumineux tels qu'une caisse dans un état tout à fait correct ; impossible d’emporter avec lui tout ce qui ne rentrait pas dans son sac de voyage. Une boule se forma dans sa gorge à la pensée qu’il ne retournerait sans doute pas chez lui, à la Citadelle Blanche, avant longtemps.
Il avait pensé à laisser Anîhl se débrouiller seule, bien sûr. Les risques énormes qu’il prenait en restant à ses côtés lui donnaient le tournis à chaque fois que ses pensées s’égaraient dans ce coin de sa tête. Partout où Anîhl serait en sécurité, Silo ne le serait pas. Et hors de question d’amener la Réprouvée dans sa maison de la Citadelle Blanche. La simple formulation de cette idée lui paraissait suicidaire.
Néanmoins, Silo ne pouvait penser à ces scrupules sans éprouver une vive culpabilité. Depuis la première fois qu’il avait vu Anîhl, il avait su qu’elle passerait avant le reste dans sa vie. Il en allait de son devoir de grand frère d’être à ses côtés lorsqu’elle était dans le
besoin. Et même : lui-même ne pouvait s’imaginer tourner simplement le dos à la jeune femme. Rien que les six mois qu’avaient duré le service militaire de cette dernière, au cours desquels il n'avait pas pu la voir, lui avaient paru interminables.
Il l’amènerait jusqu’à Sceptelinôst, où il s’assurerait qu’elle s’y établisse bien. Puis, il verrait.
Silo en était à ce point dans ses pensées lorsqu’il prit conscience du soleil qui déclinait déjà dans le ciel. Absorbé dans ses recherches, il avait quitté Anîhl depuis plusieurs heures. Sans parler de tout le temps perdu dans leur progression. Avec un pincement au cœur, il se demanda si la mort de Kobalt avait déjà été constatée. C’était peu probable : personne ne venait jamais jusqu’à la ferme perchée au sommet de sa butte. Et, quand bien même quiconque remarquerait l’absence du Réprouvé, il reposait déjà six pieds sous terre derrière la maison, enterré par les soins d’Anîhl et de Silo lui-même avant de partir. L’Ange eut une pensée soudaine pour les animaux de la ferme. Ils mourraient probablement de faim, à présent que la main nourricière qui leur rendait visite quotidiennement n’était plus. Silo sentit la culpabilité étreindre sa poitrine.
Il se contraignit à chasser ses sombres pensées de son esprit et tourna les talons, rebroussant la route hasardeuse qu’il avait tracée jusque-là. Il espérait retrouver sa sœur au plus vite sur cette vaste plage.
Le déclin de la luminosité entraînait peu à peu les explorateurs de bord de mer vers le chemin du retour. Silo vit les visages fatigués et brûlés par le soleil, les yeux brillants de tous les trésors amassés pendant la journée ou au contraire assombris par la déception de n’avoir rien trouvé. Lui-même continua de longer la mer, perché sur la crête de la dune la plus proche de l’eau pour laisser porter son regard le plus loin possible d’un côté et de l’autre.
Silo avala au moins deux kilomètres, surpris d’avoir parcouru autant de chemin en sens inverse, jusqu’à ce qu’il reconnaisse, au loin, la longue chevelure noire de sa sœur. Le soulagement qu’il éprouva fut de courte durée, car il remarqua bien vite qu’elle n’était pas seule ; et il fut pris d’épouvante car Anîhl était en train de se battre contre les trois hommes qui l’entouraient.
Sans réfléchir plus longtemps, Silo dévala la dune en glissant à moitié dans le sable instable et se précipita vers le lieu de l’affrontement. Les cris que poussaient les adversaires enflèrent jusqu’à ce que l’Ange arrive à la hauteur de sa sœur. Cette dernière, à l’image des trois hommes qu’elle défiait, était trop occupée à décocher des coups et ne remarqua pas la présence de Silo. Ce dernier cria :
-Anîhl !
Elle tourna vivement la tête vers lui, surprise. Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais à ce moment, un coup de poing percuta sa mâchoire. Silo entendit le grognement de douleur que poussa la jeune femme et une colère aiguë s’éleva en lui.
-Stop ! rugit-il de toute la force de sa voix.
Les trois hommes, de massifs individus bien plus musclés que Silo, s’immobilisèrent le temps de tourner le regard vers ce dernier. L’un d’eux avait le visage complètement tailladé.
-Tu es qui, toi ? gronda celui avec les plaies sur les joues.
Silo, ignorant ses jambes qui tremblaient un peu, s’avança aux côtés d’Anîhl.
-Je suis le frère de cette jeune femme, répondit-il du ton le plus maîtrisé dont il était capable en cet instant.
Il était extrêmement furieux contre ces hommes, au point qu’il aurait eu envie de les frapper comme l’avait fait Anîhl ; mais il se doutait que calmer les esprits leur donnerait une meilleure chance, à sa sœur et à lui, d’en rescaper aussi indemnes que possible. Il respira profondément pour se calmer.
À ses côtés, Anîhl faisait mine de vouloir reprendre le combat.
-Laisse-moi leur casser la bouche, grogna-t-elle avec hargne.
-Tu ne casses la bouche de personne, répondit-il sèchement.
Puis il se tourna vers trois hommes, qui semblaient ronger leur frein autant que sa sœur.
-Pourquoi vous battez-vous ? s’enquit-il auprès d’eux.
-C’est ta sœur qui a commencé, dit le plus amoché d’entre eux, celui avec le visage en sang. Elle m’a agressée.
-Ils en voulaient à mon butin ! s’échauffa aussitôt Anîhl avec un mouvement en avant.
Silo la retint par le bras, ce qui lui valut un regard brûlant de rage de sa part. Il fit de son mieux pour demeurer impassible.
-Qu’est-ce que tu as trouvé ? demanda-t-il à l’intention de sa sœur.
Cette dernière tendit la main, que de toute la bagarre, elle semblait ne pas avoir décrispée autour du diadème qu’elle lui montra. Silo resta muet devant la richesse du bijou. Il comprenait mieux les raisons de l’assaut. Il mâchouilla nerveusement sa langue. Anîhl voyait évidemment dans ce diadème l’opportunité de gagner leur pain pendant un certain temps, ce qui leur serait très utile. Seulement, sa manière de négocier passait par les poings ; Silo imaginait bien comment avait pu déraper la situation.
Néanmoins, même à deux, ils n’avaient pas la moindre chance contre ces mastodontes. Défendre leur butin se solderait uniquement par des blessures, si ce n’était pire. Silo détestait l’admettre, mais céder le diadème à leurs opposants serait plus sûr pour Anîhl et lui. Tant pis pour l’argent. Ils auraient de toute façon assez pour un certain temps avec les économies que l’Ange irait récupérer à la Citadelle Blanche.
Au terme de cette rapide réflexion, Silo se tourna vers sa sœur.
-Donne-moi le diadème, murmura-t-il de façon à ce que leurs adversaires ne puissent l’entendre.
-Mais… voulut protester la Réprouvée en ouvrant grand ses yeux transparents.
-Fais-moi confiance, la coupa Silo.
Il planta son regard dans celui d’Anîhl. Cette dernière sembla plongée dans une grande lutte intérieure, serrant toujours sa trouvaille au creux de sa main écorchée. Puis, la mâchoire serrée, elle finit par déplier ses doigts dans la paume tendue de Silo. Ce dernier sourit faiblement à sa sœur, conscient de l’immense effort qu’elle faisait en cet instant sur elle-même.
-Merci, souffla-t-il, puis il se tourna à nouveau vers les trois hommes qui renâclaient dans leur coin.
-Qu’est-ce que tu vas faire maintenant, gamin ? demanda celui au visage tailladé d’un ton agressif.
-Je vais vous donner le diadème, répondit l’intéressé. À condition que vous nous laissiez partir en paix, ma sœur et moi.
Les hommes se jetèrent des coups d’œil consultatifs et acquiescèrent.
-Marché conclu, grogna leur porte-parole.
Silo tendit le bras, le diadème brillant au bout sous les derniers rayons ensanglantés du crépuscule. Il sentait Anîhl, un peu en retrait et sur les charbons ardents, se retenir d’intervenir. L’un des hommes s’approcha et s’empara du trésor, l’avidité brillant au fond de ses prunelles sombres. Lorsqu’ils furent tout proches l’un de l’autre, néanmoins, Silo vrilla l’individu de ses yeux bleus et dit d’une voix basse et froide :
-Vous vous en sortez avec le butin, mais vous auriez mérité de prendre quelques coups de ma sœur en plus.
L’homme plissa les yeux. Silo crut qu’il avait déclenché un nouvel affrontement, mais son interlocuteur se contenta de hausser ses larges épaules et de tourner les talons vers ses camarades, qui l’accueillirent à grands renforts de cris de triomphe. Silo les observa brièvement jubiler autour de leur fortune, puis il se retourna à son tour vers Anîhl. Le regard de cette dernière luisait de rage. Il soupira et s’approcha d’elle.
-Allez, viens, murmura-t-il gentiment. J’ai trouvé plein de choses qui nous seront utiles.
Anîhl s’arracha à la contemplation de ses adversaires vainqueurs et leva les yeux vers son frère. Sa colère sembla refluer un peu et elle acquiesça. Tous deux s’éloignèrent du lieu de la bagarre.
-Comment vont tes plaies ? demanda Silo au bout d’un moment de marche silencieuse.
Anîhl haussa les épaules.
-Ils y sont pas allé très fort, répondit-elle en montrant néanmoins ses mains sanguinolentes.
Silo se doutait que la plupart des blessures provenait des coups que la Réprouvée elle-même avait donnés.
-T’as de la chance, j’avais emporté quelques onguents au cas où pour ma traversée, annonça-t-il en faisant basculer son sac devant lui pour fouiller dedans.
Anîhl demeura songeuse. Silo trouva les flacons d’onguents et en appliqua sur les doigts de sa sœur, qui se laissa faire en silence. Silo savait qu’elle ne se laissait traiter ainsi que par lui. Même Kobalt devait renoncer à tout contact physique avec elle. Le souvenir lui arracha une grimace. À ce moment, Anîhl sortit de son mutisme et dit d’un ton fermé :
-Ils auraient pu me faire bien plus mal s’ils avaient voulu.
Silo interrompit le mouvement de ses mains autour de celles de la jeune femme et leva les yeux vers cette dernière. Il réfléchit.
-Je pense qu’ils n’étaient pas fondamentalement méchants, avança-t-il doucement. C’est l’appel de l’or qui les a rendus méchants.
Anîhl détourna le regard et ne répondit rien, mais Silo savait qu’elle méditait ses paroles.
-Restons ici pour la nuit, décréta-t-il une fois qu’il en eut fini avec les mains de sa sœur. Je partirai demain matin pour la Citadelle Blanche.

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