Le soleil était à son zenith et resplendissait dans le ciel bleu où aucun soupçon de nuage ne venait entacher cette parfaite toile tendue au-dessus de la sirène. Cela faisait déjà quelques semaines qu’elle avait quitté l’océan et elle escomptait bien l’atteindre dans la journée. Elle était partie de la cité engloutie afin de se rendre dans la forêt des murmures, non pas car elle était en mission pour l’Ot’Phylès Cala’Tiare, l’armée ondine, mais pour trouver des fleurs qu’elle trouvait intéressante pour améliorer son art d’herboriste. Un alfar de là-bas lui avait volé deux manuscrits provenant de leur célèbre bibliothèque de Drosera, contenant des informations précieuses sur l’Artémisium et la Celasum. C’était des plantes qui poussaient dans la forêt des murmures. La première pouvait faire tomber dans la folie celui qui l’ingérait et la seconde, rien qu’en la humant, pouvait faire plonger une personne dans un profond sommeil. La manipulation qu’elle avait opéré sur lui avait été d’un grand succès. Elle avait informé une des Naidès de son départ, mais avait indiqué qu’elle restait disponible pour toute urgence. En effet, Nissa avait mis en place un système postier magique : peu importait à quel moment, dès qu’elle se trouvait près d’une étendue d’eau et qu’une missive devait lui parvenir, elle apparaissait, aussi bien dans une flaque, que dans un lac sans que son contenu n’en soit détérioré. C’était très pratique afin d’être joignable, surtout pour ses supérieurs. L’activité dans les eaux ondines semblait être calme, mais elle avait hâte de rentrer chez elle, dans la cité engloutie, là où elle possédait une maison, afin de retrouver Land et Kimi. Land était un loup, et Kimi une petite orisha, mais ces derniers affectionnaient vivre dans cet endroit. Land pas trop, mais il aimait Kimi et s’était donné comme mission de veiller sur la jeune fille pendant que Nissa était absente, ce qui arrivait de plus en plus souvent. Si elle avait accepté de la prendre sous son aile, les deux colocataires restaient très indépendantes l’une de l’autre.
A l’orée de la forêt des murmures, la jeune femme s’arrêta près d’un ruisseau et s’assit quelques minutes, le temps de boire. Une lettre apparut à sa surface et Nissa s’en saisit en l’ouvrant délicatement. Au bas du mot, se trouvait le sceau de l’Ot’Phylès, c’était donc un message des ondins. Il lui indiquait brièvement qu’une épave se trouvait près de la plage de sable fin et qu’elle devait aller vérifier si rien de précieux ne s’y trouvait avant que des Gaelyan mettent leur nez dedans. La jeune femme se releva et pressa le pas. Si le signalement venait juste d’être donné, elle avait une petite fenêtre pour agir, mais cela serait suffisant. Elle posa le pied sur la première parcelle de la plage, mais celle-ci s’étendait sur plusieurs kilomètres. Elle n’était même pas sûr que cette dernière ne faisait pas le tour d’une large partie du continent naturel. Se trouvant seul dans les environs, elle se déshabilla, prit la précaution de tout ranger dans son maigre sac de voyage et se transforma en panthère noire. Sa foulée féline serait plus adaptée à une marche bipède sur le sol instable du sable. Elle démarra sa course. Sous cette forme, ses sens étaient décuplés, et elle appréciait les sensations nouvelles que ces derniers lui procuraient. Elle avait l’habitude de passer de sa forme d’ondine à humaine, alors apprendre à passer de l’humaine à la panthère avait été rapide et simple. Néanmoins, elle n’avait jamais essayé de passer directement de l’ondine à la panthère.
Une majeure partie de la journée se passa avant qu’elle ne trouve, enfin, l’endroit où l’épave se trouvait. Ce n’était pas un environnement très fréquenté, et cette partie de la plage semblait assez éloignée des habitations et c’était un point positif pour la sirène. Le bateau ne se trouvait pas sur la plage, comme elle l’avait compris dans la lettre, mais il était visible depuis celle-ci mais bien immergé dans l’océan. Nissa, de ses yeux de panthères, dut bien reconnaitre que c’était un splendide bâtiment nautique, à la taille impressionnante. Si il n’y avait rien de précieux là dedans aux yeux des ondins, il y en aurait certainement pour les bipèdes. La sirène se retransforma en humaine et regarda le ciel : la nuit était à quelques heures de se montrer, elle avait encore le temps. Elle se dirigea vers un coin d’herbe et aspira l’énergie vitale de toute la végétation aux alentours en posant sa main sur le sol afin de se redonner des forces. Si aucun problème ne semblait pouvoir montrer le bout de son nez, elle n’était pas à l’abri que la situation s’inverse et mieux valait pour elle qu’elle soit en pleine forme. Sans se rhabiller elle plongea dans l’eau, laissant une queue bleue de la couleur de ses yeux, du même bleue que l’océan apparaitre. Elle emporta son sac avec elle qu’elle déposa plus loin, plus profond, dans une corniche crée par l’érosion de l’eau sur un bloc rocheux, puis prit la direction de l’épave.
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Invité Invité
Mar 29 Nov 2016, 10:42
La curiosité est un vilain défaut
- C’est quoi ce marchandage ? - Venez avec moi, c’est tout ce que je demande… En échange, vous pourrez respirer sous l’eau.
Lilith haussa les épaules. Les bras croisés, elle observait son interlocuteur, tentant d’évaluer si sa proposition avait le moindre intérêt. Tournant en rond autour de lui, comme un prédateur autour de sa proie, la rouquine foulait le sable de la plage. Ces lieux lui étaient désormais terriblement familiers…Combien de fois avait-elle pu faire mouiller le Libertad au large de ces côtes ? Combien de Trésor avait-elle pu trouver ou penser trouver dans la baie ? Trop pour les compter, pas assez si elle s’en référait à sa cupidité et à la soif d’or qui l’habitait. Non pas tant pour l’or en tant que tel. Mais simplement parce que l’entretien du Galion était un véritable gouffre financier. Et puis… Au fur et à mesure du butin amassé, Lilith avait pu constater que le pouvoir de l’argent était un véritable sésame qui déliait n’importe quelle langue et passait sous silence la pire des exactions. Aussi, lorsque le bruit d’un trésor facile d’accès se faisait sentir, la rouquine n’hésitait plus. Quitte à être sur une fausse piste, elle s’y rendait.
Lorsqu’elle avait appris qu’une nouvelle épave était au large de la crique. Comme beaucoup, la Capitaine avait pensé qu’il ne devait s’agir là que de facéties de la part de plaisantins qui avaient un temps de retard. En effet, il n’y a pas si longtemps, c’était bien au même endroit qu’elle s’était rendue, qu’elle avait partagé une nouvelle aventure avec ce vampire, Reddas, à propos d’un navire marchand que les flots avaient refoulé. Et c’était bien là qu’elle avait pu rencontrer l’ondin, Draes, lequel l’avait aidé, plus par intérêt que par réel volonté de soutien, lors du pillage de l’ensemble des autres navires qui venaient des quatre coins du monde pour tenter d’obtenir sa part… Toutefois, peut-être par instinct, la jeune orisha avait persisté à vouloir se rendre ici-même. Et quelle ne fut pas sa surprise de découvrir un gigantesque navire. Il était rare d’en voir de si beau et si grand. A se demander comment il avait pu se retrouver dans cet état là.
Néanmoins, ce ne fut pas le problème premier, en s’approchant du bâtiment, la rouquine en découvrirait peut-être les causes de son ensevelissement, mais surtout… Si elle souhaitait éventrer et savoir ce que contenait exactement la frégate qui gisait non loin de là, cela impliquait une chose : se rendre sous l’eau, et visiter toutes les cabines complètement inondées. Un léger sourire apparut sur ses traits. Sa rencontre avec Draes s’était bien produite exactement dans ces conditions. Et pour cette raison, pour le simple fait qu’elle ne pouvait pas aller respirer sous l’eau et nager à sa guise, la Capitaine avait alors conclu un marché : ce qui était immergé relevait des ondins, ce qui ne l’était pas revenait aux pirates.
A nouveau, la voix de l’individu qui se trouvait à ses côtés sortit la rouquine de ses songes.
- Alors, vous acceptez ?
Lilith pencha la tête. L’étranger était sorti un peu de nulle part alors qu’elle arpentait la plage avec quelques un de ses hommes. Tout de suite, il avait promis de lui fournir la faculté temporaire de pouvoir respirer sous l’eau si l’orisha acceptait de se fouiller et de partager le butin. Il va sans dire que l’idée de partage ne lui avait pas effleurer l’esprit… Quant à ce pouvoir temporaire, la rouquine n’y avait qu’une confiance modérée. Toutefois… Il y a quelques temps, cette nymphe, Nissa, avait fait quelque chose de particulier. Comme un cadeau. La Pirate revoyait encore parfaitement cette bulle d’eau qui lui encerclait le visage sans même qu’elle en souffre… Pourtant, jamais encore la Capitaine n’avait osé prendre les choses à bras le corps et vérifier qu’elle possédait à présent ce don. Au moins, si l’individu tentait de la doubler, Lilith pouvait espérer avoir un filet de secours.. Accentuant son charme pour que ce dernier ne montre pas de résistance, la rouquine lui adressa un large sourire.
- Parfait, tu me conduis sur ta barque le plus près possible de la frégate ? Mes hommes te tiendront compagnie pendant que je fais mon petit tour touristique.
Il n’en fallut pas plus pour que, l’instant d’après, la jeune orisha se retrouve près du bâtiment. Dans un ultime élan pour se donner du courage, elle plongea pour s’enfoncer dans les ondes de la baie. Lorsque l’instant de vérité fut arrivé et que Lilith ne parvint plus à retenir son souffle, une légère appréhension s’empara d’elle, remplacée bien vite par une douce euphorie en constatant la facilité qu’elle aurait à progresser dans l’épave. Pourtant rapidement, cette joie s’effaça, une forme, bien plus agile qu’elle sillonnait les lieux à ses côtés.
A l’approche du bâtiment nautique au fond de l’eau, Nissa distingua nettement les vibrations à la surface entraînées par la progression d’une petite barque de la plage de sable fin au bateau. Si il ne devait pas avoir l’impression de faire de bruit en ramant, chaque pénétration du bois traversant la surf ace de l’eau, créait une oscillation qui résonnait aux oreilles des êtres aquatiques. L’objectif de la destination de la barque était très net. Elle devait se dépêcher. Alors que la barque repartait, l’entrée d’une Gaelyan dans l’océan créa un vacarme qu’elle ne pouvait ignorer. Une jeune femme à la chevelure rousse était entrée dans l’eau tout prêt du bateau. Encore trop loin pour bien la discerner, cette couleur de cheveux flamboyante lui rappela quelqu’un qu’elle ne souhaitait pas du tout croiser sous cette forme et celle-ci l’avait bien repérée, elle aussi. La sirène n’avait plus d’autres choix que d’aller à sa rencontre et de l’éliminer. Elle ne voulait pas que la jeune femme ait le temps de lancer l’alerte à ses collègues restés sur la plage, que ce soit pour les attirer afin qu’ils l’aident à l’attraper, car les sirènes coûtaient chères sur le marché, ou pour l’aider à l’éliminer. D’une impulsion puissante de sa nageoire, elle se propulsa à la rencontre du Gaelyan qu’elle sentait être une femme. En arrivant à sa hauteur, elle reconnut Lilith : la pirate avec qui elle avait traversé le cap des sirènes sur son bateau de pirate. Cette corsaire n’était jamais sans son équipage. Un éclair meurtrier passa dans le regard de Nissa, mais elle se rappelait des sentiments qui habitaient l’orisha lorsqu’elle lui avait simplement indiqué qu’elle était une nymphe. Sa couverture était, désormais, totalement dévoilée aux yeux de la jeune femme : il était évident que la nymphe était quelque chose de beaucoup plus menaçant. Elle sentit une certaine confusion dans l’esprit de la jeune femme, mais elle ne sentit rien de négatif. La dernière fois qu’elle l’avait rencontrée, elle avait davantage eu droit à de la fascination. Elle se stoppa en face d’elle, totalement droite et l’emprisonna grâce à un lien fait d’eau. Il était invisible vu qu’elles baignaient littéralement dedans, mais il maintenait l’orisha afin qu’elle ne puisse pas remuer. « Lilith, si je m’attendais à te rencontrer ici… Es-tu seule ? » Pour une fois, cela l’embêtait vraiment de devoir éliminer une bipède car cette dernière avait su gagner son respect en se démarquant de ses semblables : elle ne détestait pas les êtres de l’océan, savait s’imposer dans un monde d’homme et ne se laissait pas démonter par les épreuves qui se présentaient devant elle. Elle aurait pu être une sirène de par son caractère.
Une fois le moment de la surprise passée, elle relâcha l’étreinte aquatique qu’elle exerçait sur la jeune femme à la chevelure rousse. Elle lui faisait assez confiance pour savoir qu’elle n’ameuterait pas tous les pirates qui l’accompagnaient. De plus, elle était assez prêt pour empêcher toute tentative. « Je suis venue voir ce qu’il y avait sur ce bateau, je suppose que nous ne sommes pas intéressées par les mêmes choses. Nous pourrions y aller ensemble ? Elle aurait pu tomber sur bien pire Gaelyan que Lilith, de plus, elle préférait garder ses ennemis à l’œil. Comment arrives-tu à respirer ? » Nissa avait la capacité de donner ou de priver d’air ceux qui n’étaient pas faits pour vivre sous l’eau, et comme elle n’était pour rien dans le fait que l’orisha puisse respirer sous l’eau, cela l’interloqua. En attendant sa réponse, elle tournait autour d’elle en nageant, exposant ainsi à son regard sa queue de sirène, qui lui donnait un air menaçant : elle était le requin de ces mers, de ces océans. Elle donna une impulsion grâce à sa nageoire et se propulsa en avant, vers l’épave, en faisant signe, d’un coup de tête, à Lilith, de la suivre. Après quelques secondes, elle se tourna vers l’orsiha qui n’arrivait pas à la suivre et retourna vers elle « Tu n’as pas acquis le don de la nage rapide en même temps que la respiration ? Je peux t’aider pour cela. » Un filet invisible, mais non menaçant, enroula les jambes de Lilith et remonta jusqu’à son torse. Cela permit à la sirène d’avoir une prise sur la jeune femme pour permettre de l’emmener plus rapidement avec elle. Néanmoins, elle ralentit le rythme : l’épave avait beau ne pas être loin de la surface, la différence de pression était notable et la rouquine n’avait sûrement pas la capacité d’adaptation d’un poisson à la pression. Elle préféra jouer la sécurité plutôt que de s’amuser à tester les facultés de la Gaelyan. Si son objectif avait été de l’éliminer, peut-être qu’elle l’aurait passé du niveau 0 au fond de l’océan en une seconde afin de voir tous ses vaisseaux exploser à l’intérieur, mais la jeune femme avait la chance de se trouver dans ses bonnes grâces.
