Enfin la bibliothèque avait été atteinte et Helly avait accepté de le suivre dans cette idée folle que de sauter dans un livre au sens propre. Prendre le risque d'en ouvrir la couverture et s'y plonger et y survivre. Récompense à la clé, défi qui n'avait rien d'ordinaire, l'orisha était plus qu'intéressé par cette aventure. Le livre avait toute la liberté de leur assigner un personnage de l'histoire, il en reviendrait à eu de savoir qui ils sont et ce qu'ils doivent faire pour mener à bien le récit et s'en sortir.  Les rumeurs indiquaient que la trame des livres pouvaient avoir de soudaines variante pour déjouer ceux qui connaîtrait trop bien l'histoire, mais y avait-il vraiment des gens qui avait réussi cet exploit que de revenir ? Ethan était songeur, une dose d'hésitation alors qu'il allait se retrouver captif d'une pile de papier relié. Son désir de liberté était à la fois une contrainte et une motivation, le doute d'être captif à jamais ou prouver que la liberté peut vaincre n'importe quoi, même la magie.. La bélua énumérait des titres tandis qu'il glissait les doigts sur d'autres dans le rayon devant lui. Le dernier qu'elle prononça eu un effet de piqûre, d'envie irrésistible de savoir quel est ce conte du chat vampire. L'orisha s'approcha d'Helly qui avait l'ouvrage entre les mains, passant les bras de chaque côté de celle-ci pour poser les doigts sur les siens. Se penchant pour lui murmurer à l'oreille une folie tandis que son torse s'appui contre son dos et ouvrir ensemble le livre la seconde suivante. Pas de marche arrière, le saut était fait, s'assurant par leur proximité et synchronisme qu'il avait imposé, de s'y retrouver tout les deux pour une aventures peu orthodoxe. Aucun retour en arrière possible, ils ne pouvaient se défiler face à ce qui les attends. Pousser le vice du jeu jusqu'à son paroxysme et gagner la partie face au livre, face à la bibliothèque.

Une impression d'être aspiré dans un tourbillon, le duo ne faisant qu'un dans cette chute vertigineuse où le seul bruit était celui d'un froissement de page au gré du vent. Nul cri ni parole, le silence devenant maître puis la brise dans le feuillage d'un buisson, une sensation de chaleur l'envahissant, l'orisha ouvrant les yeux sur ceux d'Helly qui était sous lui dans une robe de soie s'arrêtant aux genoux. Comprenant mieux cette sensation qui le traverse, ne pouvant s'empêcher de détailler ses courbes alors qu'il jetait un oeil à sa propre tenue. Chemise et pantalon ample, un katana à la ceinture longeait sa cuisse gauche, songeant qu'au moins il avait une arme en cas de nécessité. Poursuivant l'inspection, apercevant une pointe de lame sur la cuisse droite de sa partenaire d'aventure qui dépassait timidement de la robe légèrement retroussée dû à la présence de l'orisha. Arrachant un sourire en coin à Ethan qui regarda la position dans laquelle ils se trouvaient avant de rejoindre son regard.
- Je ne connais que peu ce conte... très vague dans la tête de l'enfant que j'étais, une histoire de prince, de femme chat et de sortilège. D'après toi, sommes nous là pour intervenir et briser la malédiction ou en assurer le succès ?
Ethan se redressa lentement puis tendis la main à la bélua pour qu'elle se relève. Observant autour de lui pour espérer trouver un quelconque point de repère.
- Mais d'abord, savoir où nous sommes et qui nous sommes...
Le duo ne pourrait agir sans être en mesure de se nommer, espérant qu'ils soient des gens dans les bonnes grâces du prince pour permettre de l'approcher. Tout comme il leur faudrait reconnaître l'élue princière pour la neutraliser.  Beaucoup à faire sans savoir le temps qui leur était permis pour accomplir leur tâche. Pour l'heure, il comptait sur la bélua pour le guider et l'aider à comprendre. Faire usages des moeurs de l'endroit devenait tout aussi primordial pour la discrétion et la cueillette d'information. S'immerger dans le livre, en faire partie et en atteindre la fin mais ne pas y rester à jamais, tel était la mission à accomplir.

738 mots - post #8

Helly n’avait pas vraiment eu le temps d’agir qu’Ethan s’était approché d’elle figeant ses pensées dans une oppressante proximité qui lui fit rater un battement. Si près d’elle, qu’elle pouvait sentir la chaleur du corps de l’orisha imprégner le tissu fin de sa robe.
Sa peau se perla dans un langoureux frisson alors que le souffle d’Ethan glissait de son oreille à sa nuque et que ses doigts faisaient pression dans le même élan sur les siens pour mieux ouvrir le livre.
Dans l’appréhension de ce moment, comme de l’enivrante sensation qui venait de la troubler, Helly se retourna à peine, arrêtant son regard sur les lèvres d’Ethan.
Troublée et confuse, elle ferma les yeux alors qu’un tourbillon happa leurs corps dans un froissement sourd et frissonnant, les plongeant tous deux dans le coeur du récit.
Le mouvement qu’elle avait amorcé, les avait conduit dans une bien étrange réception. Ethan était à genoux au-dessus d’elle, encadrant son corps dans une vision qui fit emballer son imagination. Cette simple perspective venait d’enflammer son corps, annihilant toutes réponses cinglantes ou geste de recul. Bien au contraire, elle s’avança un peu plus, alors qu’il reculait pour constater sa propre tenue, faisant baisser les yeux de la bélua. Confuse et gênée, de s’être fait prendre au piège, elle détourna son visage et laissa ses cheveux balayer l’échec qui s’était dessiné sous forme de moue sur ses lèvres pincées. Telle une enfant prise en faute, elle tira sur cette nouvelle tenue étriquée et se redressa dans une posture désinvolte avant d’écarquiller les yeux en se retrouvant nez à nez avec Ethan.
Prisonniere de son regard, elle n’écouta que brièvement ses mots, perdue dans les remous des reflets houleux des yeux de l’Orisha. La tête penchée, ses yeux cherchaient à percer les intentions du capitaine. Ils naviguaient tous deux en eaux troubles et plus le temps passait, plus les risques de s’y noyer à jamais sonnaient comme une fin imminente.
Helly prit une grande bouffée d’air et saisit la main que lui tendait amicalement l’orisha.
Le panorama qui les entourait accapara l’attention de l’enfant de Phoebe qui se statufia aux côtés d’Ethan. Son coeur de bélua venait d’exploser dans une sensation étrange proche de l’euphorie. Le souffle du vent faisait danser les branches des cerisiers dans des tourbillons de pétales qui recouvraient le paysage d’un tapis rose lui conférant la beauté d’un monde issue des récits les plus fous.
Helly porta d’instinct ses mains à son visage, laissant le bout de ses doigts à peine occulter le sourire qui venait de fendre ses lèvres carminées.
Elle observa Ethan et étouffa son effarement en laissant tomber ses bras le long de son corps. Elle reprit une posture plus droite et se pencha vers lui en attrapant timidement sa main. Ses doigts se refermèrent lentement sur ses doigts, tirant dessus pour rapprocher leurs corps.

- Merci, souffla-t-elle d’une petite voix en plongeant ses yeux dans les siens. Sans toi… Je n’aurai jamais vu pareil spectacle.
Elle desserra à peine ses phalanges et détourna son regard vers les hauteurs enneigées d’un mont unique qui culminait au-dessus de ce décor merveilleux. Helly ne savait pas où ils se trouvaient. Si cela avait une importance en soi, le fait qu’elle était aux côtés d’Ethan était sa seule préoccupation pour le moment. Intérieurement, cela était devenu sa seule hantise… Le perdre…
Helly baissa ses yeux, balayant le sol de pétales autour d’eux. Son coeur se serra brusquement comme si cette idée venait de l’affubler d’un terrible pressentiment. Elle se figea et dans un long soupir fixa le soleil couchant faire rayonner sur eux les pâles effets apaisant de sa chaleur.
Un attroupement de soldats en curieuses armures arrivèrent vers eux. Les sabots des montures firent s’élever dans le ciel flamboyant des nuages de poussière qui endeuillèrent le coeur d’Helly. Ils n’étaient plus seuls à présent et puis, ils se devaient de remplir une mission…
Un homme les interpella avant de descendre de sa monture et se diriger droit vers Ethan. Il se pencha dans une reverence formelle et se redressa en baissant les yeux.

- Shugo-Daimyo, le shogun et le jeune prince vous attendent… Il se fait tard… Nous devons fermer les portes des enceintes.
Helly arqua ses sourcils face à cette appellation. Sa tête se pencha légèrement sur le côté croisant le regard de l’homme qui lui lança un bref regard avant de relever sa tête.

- Veuillez nous suivre. Un de mes hommes peut conduire votre servante dans le pavillon des invités. Elle préparera votre retour. Mon seigneur a insisté pour que je vous conduise à lui immédiatement.
Helly fronça ses sourcils. Sa main toujours dans celle d’Ethan la fit redouter une faute, l’obligeant à défaire de ce lien dans un réflexe qui manqua de lui arracher le coeur.
Elle comprenait mieux le regard du garde et se demandait s'il se montrerait compréhensif ou bien si cela aurait un futur impact sur la continuité du récit.
Comme pour mieux épouser les formes ou rentrer dans son rôle, Helly se pencha à son tour vers Ethan laissant les pans de ses manches recouvrir ses poings fermés.

- Si le « shogun » Exige de rencontrer le « shugo-daimyō» alors il vaut mieux ne pas retarder cette entrevue.
Il paraissait plus sage, qu’ils s’exécutent. Ethan obtiendrait surement des renseignements et puisqu’il semblait connaitre le récit, il serait le plus à même d’évoluer sans fausses notes. Quant à elle, elle saurait trouver elle aussi des réponses en gardant les distances dues à son rang.
Helly releva son regard sans se redresser espérant trouver dans les yeux d’Ethan son approbation, l’incitant à poursuivre.

- Ayez l’assurance, que vous me trouverez à votre retour. Car telle est ma place…
Le soldat ramena un cheval aux pieds d’Ethan lui confiant les rênes. Son regard se porta brièvement sur Helly encore penchée vers l’Orisha. Il hésita un instant et appela un de ses hommes d’un mouvement du bras. Il l’interpella faisant sursauter Helly.

- Prends le commandement et amène le directement au Shogun. Souffla-t-il en se baissant dans une nouvelle révérence vers Ethan et de reprendre à demi-voix. Recevez l’assurance que je me tiens responsable du sort de votre servante. En mon nom et mon honneur, partez en paix mon shugo-daimyō.
Helly se redressa timidement et observa de côté l’homme qui venait de parler. Elle hésita un instant et se contenta d’éviter de croiser le regard d’Ethan de peur de céder à l’envie de le suivre.
Le cheval gratta le sol dans une impatience certaine obligeant Ethan à prendre une décision…

Le paysage était magnifique, la présence à ses côtés tout aussi appréciable, profitant de cet instant de quiétude qui n'était que le préface de l'aventure dans laquelle ils venaient tout deux de plonger. L'orisha sentant les derniers effets de la bouffée de chaleur qui l'avait envahi quelques instants auparavant, frissons  lorsqu'elle le remercia pour ce spectacle bien qu'il n'avait pas l'impression d'en avoir le mérite.
- C'est toi qui a trouvé le livre, moi je t'ai fait captive pour se lancer dans cette aventure.
La quiétude des lieux fut interrompue par une cohorte de soldats, Ethan glissant sa main sur la tsuka pour être prêt, ne sachant à quoi s'attendre de cette milice qui débarquait ainsi à leurs côtés sans le moindre préavis. La révérence du premier cavalier qui mit pied à terre devant l'orisha rassura ce dernier, réconfort de voir qu'il semblait avoir un certain rang qui ne manquerait pas de lui être utile. Sans s'en rendre compte, il eut réflexe de fermer ses doigts sur ceux d'Helly dont il sentait la main glisser de la sienne comme si une impression de chute lui avait traversé l'esprit. Il ne perçu qu'ensuite le regard du garde, sa tête jonglant encore avec le titre dont il venait d'être affublé pour en comprendre le sens en plus des autres détails.
- Oui oui il est tard, le soleil se couche sur l'horizon, j'aurais bien voulu profiter de ce spectacle en toute quiétude. Mais comme vous dites, les portes doivent fermer pour la sécurité.

Ethan n'avait pas manqué l'expression du visage de la bélua, ne voulant pas plus qu'elle d'être séparé en terre inconnu. Devoir faire confiance à ces hommes, faire confiance aux avantages de son rangs pour assurer le bon soins d'Helly qui venait d'être indiquée comme sa petite protégée. Le shugo-daimyô suivant les consignes pour s'approcher de sa monture tout en voyant son "invitée" lui faire révérence afin de l'inciter à ne pas faire attendre ses hôtes, ajoutant qu'elle serait à l'attendre pendant ce temps. L'histoire de ce récit lui était encore trop vague en tête, mais elle semblait avoir connaissance des eus et coutumes de ce rang de sābanto que l'histoire lui avait attribué.
- J'ai toute confiance en vous ma demoiselle que vous serez là à mon retour et n'ayez crainte de m'informer de tout inconvénient sur la route jusqu'au pavillon.
Se tournant vers l'homme afin de poursuivre.
- J'ai juré à son défunt père de la protéger, ne me faites pas rompre ma promesse soldat sans quoi il en coûtera de votre vie.
Sentant le cheval réclamer mouvement, il regarda Helly une dernière fois puis se laissa conduire vers cette rencontre qui ne pouvait attendre malgré l'heure tardive. Quoi que ce n'était pas pour déplaire l'orisha qui avait une certaine préférence pour les activités nocturnes, souvent bien plus riches que l'empressement de la foule du grand jour.

Chemin faisant, il discutait avec celui qui commandait la colonne, une partie l'escortant tandis qu'une poignée d'hommes était restés en retrait pour la protection de la bélua. Les pauvres ne savaient pas à quel point elle pouvait être sauvage lorsque les circonstances appelait son côté animal à surgir. Passant les portes de l'enceinte, il fut conduit à la demeure du jeune prince où le shogun était déjà présent à ces côtés dans un salon modeste, tout deux installés à une table basse pour discuter. Ethan s'inclinant dès son arrivé devant eux, recevant la politesse, retirant ses chaussures avant de franchir le seuil et rejoindre ses acolytes.
- Que me vaut l'honneur de cette rencontre tardive en votre demeure mon prince ?
- Ma santé me fait défaut, nul guérisseur ne parvient à trouver le mal qui m'accable. Le jour je me porte bien mais dès que la nuit m'emporte dans mes songes et que mon repos est bienfaiteur, je me réveil au matin avec cette mine horrible.
- En quoi puis-je vous être utile dans ce cas ?
Ethan regardait l'un et l'autre de ses interlocuteurs avec politesse, ne comprenant nullement de quel soutien il pouvait être versus le mal qui l'affligeait. Se devait-il de se rendre compte par lui-même de la situation du prince à minuit ? N'était-ce pas le labeur d'un garde de veiller à la protection de la famille royale.
- Trouver une personne  qui est en mesure de ne pas succomber à un sommeil profond sous les effets de...  ce je-ne-sais-quoi qui me ronge.
- Je ferais de mon mieux dans ce cas.
Le mieux de pas grand chose, il n'avait nul gardes à son service outre ceux du dit shogun qui assuraient sa protection. Découvrir les lieux, ses droits, ses privilèges, élaborer un plan, retrouver sa servante pour élaborer des solutions. Tant à faire et peu de temps. Le jeune prince pourrait tenir ainsi combien de temps avec ces visions ? Est-ce que ces douleurs qui l'incombe et l'affaiblit auront raison de son esprit ou de son corps tout entier ? L'orisha aurait besoin de conseil et il ne manquerait pas d'aborder la question avec Helly. Deux têtes valent toujours mieux qu'une pour réfléchir après tout.  Ethan continuait de parler, pêchant le plus d'information possible tout en savourant le saké de façon modéré pour ne pas y perdre la tête. Ne plus être en mesure de réfléchir convenablement ne serait pas un avantage pour lui. La réunion se terminant, l'orisha remerciant ses hôtes avant de rejoindre son pavillon où il fit demander à ce que l'on aille chercher sa servante dans la demeure des invités.

979 mots - post 9

Helly avait laissé filer la procession qui entrainait Ethan vers le coeur du récit. Elle ne doutait pas de n’être qu’un protagoniste de peu d’importance dans tout cela, tandis que le capitaine du Yarmouth en était l’acteur principal. Il connaissait l’histoire, il ne pouvait en être autrement. Toutefois, cela avait quelque chose de passablement triste qu’Helly peinait à comprendre. Habituée aux tumultes de ses doutes et ses éternelles questions, elle ne comprenait pas pourquoi un tel sentiment la saisissait pour si peu de chose. Après tout, elle était passé par des moments plus forts, alors pourquoi une simple distance l’ébranlait de la sorte.
Alors que son coeur se serrait, le garde s’approcha d’elle en inclinant légèrement la tête.

- Permettez-moi de vous accompagner.
La bélua sourcilla et avec une lenteur infinie, se décida enfin à suivre les deux autres gardes laissaient en arrière pour sa sécurité.
Après quelques minutes de marche dans une allée fleurie, Helly finit par oublier les raisons de la mélancolie qui berçait son coeur. Ce monde avait quelque chose d’apaisant. La beauté des lieux persistait dans le moindre détail qui frôlait la perfection. Étrange harmonie qui part un simple regard apaisé son âme. Dans ses lieux, Helly sentaient qu’elle pouvait à jamais s’y perdre et y connaitre la paix.
Alors que ses yeux balayaient les terrasses inondées des collines avoisinantes, elle sentit que le garde se rapprochait d’elle.

- Pardonnez-moi… Mais mon esprit est troublé. Êtes-vous la servante du shugo-daimyō? Vous semblez… Vous… Vous semblez proches.
Helly sentit son corps se tendre à la question du soldat. Sa gêne était visible pourtant, il avait posé la question en toutes connaissances de cause, faisant cogiter la bélua sur la bonne réponse à donner à tout cela.
Elle crispa ses doigts dans une contorsion douloureuse et retourna la question sans quitter des yeux les paysages qui tombaient progressivement dans la pénombre de la nuit.

- Deux personnes se tenant l’une à côté de l’autre peuvent être proches sans jamais se toucher, comme deux corps se mélangeant peuvent n’être jamais que des inconnues… Je ne me suis jamais sentie aussi loin d’une personne et pourtant… Je suis si près…
Le garde détourna les yeux. Il avait écouté avec attention et prenait en considération chacun des mots qu’elle avait prononcés. Elle était différente des jeunes femmes qu’il avait pu croiser jusqu’ici. Pourtant, elle semblait en partager la fragilité qui les caractérisait toutes.

- Je vous prie d’excuser ma maladresse. S’empressa-t-il de clarifier ses propos. Je ne voulais pas alourdir votre coeur.
Helly étira ses lèvres dans un sourire plus franc. La tête penché sur le côté, elle l’observa un moment avant de reprendre.

- Je m’étonne que cela ait de l’importance à vos yeux…
Le garde écarquilla les yeux, obligeant Helly à continuer de peur d’avoir commis une maladresse.

- Mais je vous remercie. Insista-t-elle en se mordillant la lèvre.
Le garde s’étonna de tant de spontanéité, il finit par sourire à son tour. Cet élan sembla le surprendre lui-même, alors qu’il jetait un oeil à ses camarades et se redressait dans une stature plus droite. Une main derrière le dos, il invita de son bras opposé Helly à reprendre le chemin.
Après quelques pas, il se risqua à reprendre la parole.

- Je suis Takezo.
Helly sentit son sourire étirer ses lèvres alors qu’elle baissait sa tête ravie de voir que le garde se montrait plus amical. Elle avait cru un instant qu’il aurait pu être une difficulté mais il s’avérait être tout le contraire. Elle releva son nez en fixant la route et souffla d’une voix fluette.

- Je suis Helly.
- Helly. Repeta t-il plus fort.
Son sourire s’élargit avant que ses mots ne raisonnent aux oreilles de la bélua.

- C’est un très joli prénom.
Helly resta statufier avant de pouffer de rires sous le regard amusé du garde qui continuait d’avancer avec une retenue exemplaire.
Cette façon de faire était décidément bien étrange pour la bélua mais cela avait un certain charme qui ne manquait pas de la faire rougir.
Lorsqu’ils pénétrèrent dans l’enceinte du palais, ils longèrent les bâtiments dans le plus grand silence. Cet ordre et cette discipline avaient quelque chose d’effrayant et de fascinant à la fois. Ce simple contraste suffisait à inspirer à la bélua un respect naturel. Ses gestes trouvaient dans l’écho de tout cela une certaine justesse. C’était facile de se plier au calme apaisant et au rythme lent de chaque cérémoniel. Ces gens transcendaient la simplicité dans un exercice s’apparentant à une forme d’art. Étonnant et captivant, incitant Helly de se gorger de tout cet art de vivre. À chaque pas et révérence, elle se sentait plus forte, comme si faire partie de cette histoire et réussir à se fondre dans les pages rendait honneur à Ethan.
De son côté, elle arrivait à continuer à la bonne suite du récit à sa manière.
Des hommes coururent dans les jardins allumer des lanternes. Le décor changea brusquement pour quelque chose de plus intimiste. Le garde avait pris congé aux portes du pavillon des invités et c’était avec grands regrets qu’Helly l’avait laissé filer. Si leur discussion avait été courte, elle n’en demeurait pas moins réconfortante et prometteuse.
Une femme se présenta à elle, l’entrainant à nouveau dans les dédales des couloirs extérieurs. Leurs pas feutrés ne laissaient derrière elle qu’un léger craquement du plancher. elle l’ignorait où elle l’entrainait mais lorsque la cloison glissa pour dévoiler Ethan, la bélua ne put s’empêcher de sourire.
La jeune femme s’inclina devant Ethan, puis vers Helly, refermant derrière elle la porte de papier.
Helly attendit que les craquements du plancher s’amenuisent avant de se détendre. Elle longea la cloison et fit un rapide tour de la chambre attribuée à Ethan.

- Alors? souffla-t-elle. Qu’as-tu appris?
Elle s’agenouilla lentement devant lui calquant ses gestes sur ceux qu’elle avait pu observer jusqu’alors. C’était amusant et terriblement attrayant de se laisser bercer de cérémoniel, un autre niveau du jeu auquel ils s’étaient prêtés jusqu’à présent.
Avec grâce, elle passa une de ses mèches de cheveux derrière son oreille, renforçant cette retenue par un léger sourire.

- Je trouve ce lieu… Fort intéressant.

Il était installé à siroté un thé, en appréciant le parfum et l'arôme en bouche, une qualité dont il n'avait eu le plaisir de goûter jusqu'à ce jour. Vivre des histoires qui sortaient du monde réel avait ces avantages après tout. Ses pensées se perdaient entre l'inquiétude de savoir si sa servante allait bientôt passer ce mur de papier et comment il serait possible de trouver ce qui se passe dans la chambre du prince à chaque nuit. Ces soldats qui ne se souviennent de rien, qui ont aperçu aucune présence anormale outre le chat du château qui rôdait. Comment un pauvre petit félin pouvait-il être la menace alors que la porte est close et l'empêche de passer jusqu'au prince. Être eux-mêmes sur place serait la meilleure méthode pour apprendre, au risque de sombrer aussi dans l'absence mais le jeu en valait la chandelle. À deux, l'orisha espérait qu'il serait possible de remarquer ne serait-ce qu'un petit détail de plus que les autres pour entamer une piste. Prenant une nouvelle gorgée, le craquement du plancher vint trahir l'approche de deux personnes. «Enfin la voici...» Tournant la tête afin d'observer le panneau qui s'ouvre, rendant la salutation à celle qui avait mené Helly, celle-ci entra puis la porte se ferma. La bélua effectuant une inspection de l'endroit sous le regard attentif d'Ethan qui observait sa démarche féminine et ses mouvements tandis qu'elle vint prendre place devant lui. Un hochement de tête mutuel scellant les retrouvailles en tout respect de traditions et de respect. Elle avait posée une question avant de s'agenouiller pour lui, mais il attendit qu'elle commente l'endroit avant de répondre à son tour.

- Que nous devons trouver ce qui arrive au prince à chaque nuit depuis trop longtemps déjà. Comme si il était vidé de ses forces vitale tel un vampire qui suce le sang mais il n'a pas de marques à son cou.  Des gardes sont posté devant sa porte, à minuit les rapports n'indique plus rien, ils s'endorment tous sans exceptions malgré toute bonne volonté.
Ethan continuant d'énumérer tout les petits détails obtenus, tant par le prince, le shogun et les quelques soldats à qui il avait pu parler durant son raccompagnement à sa chambre. Maigre pitance pour démarrer les recherches mais c'était mieux que rien du tout. Nul doute que la meilleure option serait de prendre ce tour de garde pour savoir si quelque chose d'anormal se passe sur les douze coups de minuit ou juste avant qui aiderait à comprendre.
- Quant à ce lieu, son côté paisible me fait un bien fou. Il en sera presque décevant de quitter le livre une fois cette histoire terminée. Faudrait demander une copie du livre pour revenir et partir à notre guise, qu'en penses-tu ?
Une capacité qu'il avait et dont il n'avait jamais prit la peine de mettre en application, maintenant qu'il y avait été contraint, l'orisha y voyait une panoplie de possibilités. Tout autant de monde à découvrir que de livres existant. Aventures rocambolesques ou paisible île paradisiaque, la seule limitation serait celle de l'imagination.

Levant la seconde tasse qu'il avait devant lui, il regarda la bélua avec un sourire en coin.
- Kenkō!
Ayant opté pour le saké cette fois afin de parfaire la détente du corps et de l'esprit en vue de la nuit de sommeil. La fraiche nocturne traversant sans mal les parois fragile de la pièce, il commençait à avoir hâte de s'allonger sur le tatami pour y apprécier chaleur et bien-être.
- Tu sais qu'il y a juste un lit ? J'espère qu'il te convient de dormir près de moi pour la nuit.
La petite touche d'alcool mélangé à la fatigue offrait une clarté d'esprit plutôt moindre mais il savait néanmoins qu'il avait envie d'être en sa compagnie, apprécier la proximité d'une femme sur l'oreiller. Cet étrange besoin de l'homme d'une touche de douceur pour rendre plus salvateur le repos. Le shugo-daimyô se levant pour tendre la main à la bélua qui avait aussi apprécié les boissons de la place. L'amenant à l'aire de repos, laissant glisser au sol son samue pour être plus confortable. S'assoyant sur le lit dans l'attente de son hôte, ne quittant celle-ci des yeux jusqu'à ce qu'elle s'allonge près de lui après c'être mise à son aise et qu'il l'enlace d'un bras sur son ventre pour la faire reculer jusqu'à son torse. Chaleur mutuelle pour une nuit confortable jusqu'à ce que le soleil appel au réveil.

Ouvrant les yeux, il murmura à son oreille l'appréciation de sa présence, autant pour la nuit qu'à ses côtés dans cette aventure. Laissant ses doigts glisser sur le flanc d'Helly jusqu'à sa nuque alors qu'il se redresse, passant les doigts dans ses cheveux pour un massage bref mais appréciable avant de se lever totalement. Délaissant sa tenue au pied du tatamis pour aller observer le lever du soleil dans la pièce d'à côté, lui offrant le temps d'émerger de ses rêves et son confort. Un craquement annonçant une visite, un petit coup sur la porte qui glissa sans bruit. Une jeune femme apportant le petit déjeuner, récupérant le cabaret de la veille. Absorbée par son travail, elle ne remarqua point que l'homme avait de la visite à la chambre, se contentant de saluer celui-ci qui lui rendit la pareille puis elle quitta sans mot dire. Il prit place à la table basse, posant le regard sur Helly qui s'extirpait peu à peu du lit, Ethan l'invitant à le rejoindre.
- Aujourd'hui nous avons tout le loisir d'explorer les environs et profiter de la beauté du paysage tandis que ce soir nous prendre le tour de garde pour essayer de comprendre.  Cela te convient ?

1017 mots - post #10

Helly écouta avec attention tout ce que lui révélait Ethan, buvant ses paroles tout en s’enivrant de sa présence. Il était facile de se perdre dans la contemplation de l’orisha et de se laisser bercer par sa voix. C’était comme si le monde s’était figé aux portes de cette chambre, les emprisonnant dans une bulle fragile que pour rien au monde, elle n’aurait laissée se briser ou échanger.
Son sourire s’étira encore, empourprant ses joues dans des couleurs plus chaudes. La boisson n'y était pour beaucoup, mais pas que… Elle avait pris gout au jeu, à la façon de faire si agréable d’Ethan qui ne pouvait que lui faire renoncer à s’enfuir. Il la mettait en confiance, faisant habilement lentement sauter toutes ses appréhensions.
Après tout, il n’y avait aucun engagement en jeu… Pourquoi se priver de belle compagnie?
Son assurance perdit quelque peu de sa superbe lorsqu’il mentionna la présence d’un seul et unique lit. Ses lèvres bougèrent lentement dans une légère moue qui pouvait tout aussi bien indiquer une surprise qu’une hésitation. Si la méfiance était de mise, elle disparue lorsqu’elle releva ses yeux vers lui. Elle ignorait comment il s’y prenait pour faire vaciller sa volonté, mais à sa grande surprise, elle sentit son corps répondre de lui-même à cette invitation, dans un infortuné réflexe qui la laissa sans voix.
Pourquoi diable avait-elle saisit sa main?
Le visage écarlate, elle se contenta de baisser là ta tête et faire les quelques pas vers le lit installé à même le sol. Un confort rudimentaire et quand bien même richement paré, de soie et de lin, dans un enchevêtrement de tissu qui n’appelait qu’à la quiétude d’un sommeil réconfortant. Sa dernière vraie nuit remontait à bien trop loin pour qu’elle s’y refuse, malgré la présence d’Ethan et le flou qui entourait pareille entreprise. S’attendait-il à ce qu’elle se donne à lui? Pouvait-elle le faire sans prendre le risque de ne pas se faire prendre elle-même au jeu? De perdre toute envie de fuir à jamais?
Cette seule pensée coupa son souffle et lui infligea une douleur dans sa poitrine. Curieusement cela la mettait mal à l’aise, la clouant devant la couche qu’avait regagnée Ethan.
 Helly était livide, au bord d’un gouffre qui venait de la tétaniser dans l’appréhension d’un tel acte. Les mains crispées dans les pans de ses vêtements, elle observa longuement l’orisha avant de voir la fatigue sur son visage. Il n’y avait aucun signe qui aurait pu lui donner raison de croire qu’il souhaitait d’elle ainsi. Après tout, elle n’était que peu de choses et il était bien naturel qu’il ne soit attiré par elle que pour se distraire…
Helly secoua sa tête en s’agenouillant devant le lit. Elle s’approcha lentement, tel un félin sur ses gardes et glissa avec autant de précautions dans les draps. Son souffle resta bloqué dans ses poumons alors qu’elle sentait le poids d’Ethan ceinturer son corps. Captive de sa chaleur et de son bras, elle se figea un peu plus. Son totem hurlait en elle à une fuite immédiate, percevant dans cette approche une tentative d’apprivoisement. Il était vain d’y résister, comme si son cœur lestait par les contradictions entre son esprit et son corps, ne faisait que s’enfoncer encore et encore. Helly voulait disparaitre, ne plus éprouver cette douloureuse sensation qu’à tout moment, Ethan pouvait la briser. Par le passé, cela était arrivé, l’obligeant à  rester sur ses gardes alors que le capitaine sombrait dans un sommeil profond.
La bélua ne ferma pas l’œil de la nuit, succombant seulement au petit matin la fatigue.
Lorsqu’elle s’éveilla, Ethan semblait debout depuis longtemps la faisant regretter de s’être laissée aller à tant de cogitation. Elle s’extirpa des draps en s’étirant et se redressa en replaçant ses cheveux ébouriffés.
Elle l’observa avec attention et se baissa lentement au niveau de la table.
Son programme était alléchant mais elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver du remords à l’idée de ne pas suivre le cour du récit.
Le piège était peut-être là? Que se passerait-il s'il ne suivait pas les lignes du conte?
Elle passa une mèche de ses cheveux derrière son oreille et huma le parfum des plats amenés par la servante.

- N’as-tu pas peur des conséquences si nous ne trouvons pas d’échappatoire au problème du prince? Qu’adviendra-t-il de nous si nous nous retrouvons bloqués à jamais ici?
Elle avait posé les questions plus pour la forme que pour mentionner une quelconque inquiétude. L’appétit lui était venu tout naturellement en vue des mets exposés sur le plateau et après une brève hésitation, qu’elle marqua par un sourire espiègle, elle vola une portion du bout de ses doigts.

- Je pense… Que nous pourrions trouver ce garde, rectifia-t-elle en mettant la main de vent sa bouche pour minimiser la grossièreté de son geste. Celui qui m’a escortée…  A moins que tu tiennes à profiter de l’hospitalité des lieux… J’ai cru comprendre qu’il y avait des sources chaudes non loin d’ici, glissa-t-elle innocemment dans un large sourire mutin.

Elle n'avait pas répondu à son murmure, peut-être ne l'avait -elle pas entendu. Ni quelconque commentaire sur sa nuit bien que son visage semblait trahir une certaine fatigue. Un doute l'envahissant, avait-il bien fait de s'allonger ainsi près d'elle ? Suscité appréhensions ou craintes d'un abus de pouvoir. Le sujet restait délicat à aborder et l'orisha décida de s'en tenir au silence pour le moment.  
- Pourquoi parler de conséquence de ne pas trouver alors qu'il s'agit de mon offre ? Les problèmes n'arrivent que la nuit venue, dans le jour le prince se porte fort bien.
Il l'a regarda se servir dans les plats, sourire en coin de cette gourmandise tandis qu'elle portait la main à sa bouche pour plus de discrétion alors qu'elle continue de parler. L'idée d'être coincé dans le livre à jamais restait certes une possibilité mais il ne comptait pas atteindre cette voie. Il était là pour vivre cette aventure, un gain promis, apprécier ce monde tout comme la présence de la bélua le temps d'un récit après l'avoir attendu suite à ce bal où le jeu a commencé. Jeu qu'il apprécie, qu'il fait durer, espérant qu'elle y prend tout autant de plaisir que lui. Laissant les choses avancer sans en prédéfinir la trame, le destin saurait guider la suite. Pour l'heure, il fallait voir à cette histoire dont ils peuvent changer le cours à leur façon. Il avait en tête d'en dévier la trame ne serait-ce qu'un instant pour en brouiller les pistes et espérer mieux atteindre la solution. Permettre à l'adversaire de baisser sa garde, lui faire croire qu'il a champs libre pour ensuite mieux l'attaquer et le réduire à l'inaptitude.

- Le garde qui t'a escorté sera surement d'une grande aide mais je dois avouer que la source chaude m'intéresse bien plus pour le moment. Je propose de trouver le garde pour le repas du soir et aviser la suite pour aider le prince. Entre temps, l'hospitalité des lieux réclame que l'on ne passe pas à côtés des attraits.
Ethan se penchant pour attraper une bouchée à son tour, essayant de croiser le regard d'Helly, s'arrêtant à sa hauteur alors qu'il croque dans un morceau de pain. Sous sa tenue digne des coutumes de cet endroit, il avait des frissons qui lui parcourait l'échine, dressant sur ses bras sa pilosité. Elle avait un effet sur lui qu'il ne pouvait d'écrire, un effet agréable sans aucun doute, à la fois naturel et inexplicable. Était-ce leur jeu, l'ambiance, l'idée qu'elle soit sa dévouée servante aux yeux de tous ? Le risque encouru si le shogun apprenait que le shugo-daimyō avait gardé celle-ci sous son toit pour la nuit ? Un mélange de toute ces réponses probablement, l'orisha n'en ressentant aucun remord, vivant librement ce choix qu'il espérait néanmoins agréable pour elle également.

- Dis-moi... Quel est ton avis sur ce qui se passe ? Le prince, la nuit, nos rangs, notre rôle dans tout ce méandre sans réponse ? Je t'ai emporté dans cette folie que de vivre ce livre au sens propre, je ne voudrais point que tu en éprouve de regrets.
Ethan vint glisser les doigts sur la joue de la bélua pour terminer à la commissure de ses lèvres avant de s'enfuir sur son cou puis quitter la douceur de sa peau. L'orisha venant ensuite se placer à genoux devant la table basse pour être face à son hôte. Attendant sa réponse tandis que son esprit cherchait le moindre indice, dans les détails reçus, qui pourrait aider à se lancer sur une piste un tant soit peu solide. La perspective de passer la nuit éveillé s'annonçait de plus en plus l'option la plus plausible. Vivre littéralement la situation au moment opportun, une fois, deux fois, voir plus si nécessaire pour comprendre. La persévérance deviendrait un atout, être deux également. Dualité qui pourrait dans le meilleur des mondes aider à assurer que chacun reste bien alerte pour venir à bout de ce récit. Nul moyen de savoir quel temps leur était alloué pour trouver la solution, combien de temps le prince pourrait-il endurer cette souffrance avant d'y succomber ? Faire dormir celui-ci ailleurs, loin du palais, sans avertir la moindre personne outre le principal intéressé, était-ce là une façon de détourner l'attention de ce mal qui le ronge ?  Faire prendre place à un autre individu sous la couverture, qui serait bien alerte à tout mouvement dans la chambre. Tant de questions et peu de réponses pour le moment, Ethan détestait devoir procéder par essai et erreur mais si c'était nécessaire...  Pour l'heure, son regard vint rejoindre celui d'Helly, profitant de ce matin paisible et sa présence.

Helly avait bien du mal à affronter le regard d’Ethan.
Elle ne s’expliquait pas se malaise et préférait éviter de croiser ses yeux de peur d’y trouver le reflet de son propre doute. Elle se contenta de laisser glisser sur elle les mots de l’orisha dans une écoute attentive et docile, à la hauteur du rôle que les Ætheri lui avaient confié dans ce récit.
Son esprit agité, peinait à formuler ses idées, la clouant à un silence studieux et respectueux, dans l’attente d’assez de force et de réflexion pour formuler une réponse acceptable.
Elle ne voulait pas se montrer impolie, ni même en deçà des attentes du capitaine. Il l’avait amenée ici pensant surement qu’elle était capable de l’aider. Cette simple idée remplissait son coeur d’une chaleur enivrante mais aussi de doutes tortueux.
Comment aurait-elle pu lui expliquer ce qu’elle-même peinait à comprendre?
Dans une bouchée gargantuesque, elle ravisa brusquement sa posture en se raidissant au contact des doigts d’Ethan. Elle manqua de s’étouffer et avala difficilement le contenu du met qu’elle avait ravi par gourmandise.
Ses yeux croisèrent enfin celui de son hôte, faisant inéluctablement rougir ses joues dans des teintes rubescentes.

- Je… Je… Baragouina-t-elle avant de porter sa main à sa bouche.
Elle se recula par réflexe et soupira discrètement en détournant son regard.
Ses doigts se crispèrent dans les plis de sa tenue avant de se contorsionner dans des petits spasmes d’hésitation. La bélua appréhendaient ses prochaines paroles. Elle ne voulait pas se montrer impolie, ni même blessante mais à trop la poussée dans ses retranchements, Ethan risquait de s’entendre dire un flot de paroles sans queue ni tête.
C’était ce qu’il arrivait lorsque ses idées s’emmêlaient, lorsque ses envies et sa raison s’entrechoquaient en elle dans un chaos innommable, l’amenant à regretter d’avoir parlé à la va-vite.
Pourtant, il était là, à attendre sa réponse. Il avait déjà beaucoup trop parlé et son silence pouvait prêter à confusion.
Elle se releva d’un bond et laissa les mots sortir de sa bouche, dans un trémolo d’appréhension.

- Allons aux sources… Je crois savoir où elles se trouvent.
Elle se retourna fumante, au bord d’un malaise et avança maladroitement en s’insultant mentalement.
Helly avait perdu de sa prestance, elle était si gênée à présent que cela en était surement grotesque.
D’un mouvement de bras, elle fit glisser la fine porte de papier de riz, et s’empressa de retrouver l’air frais du couloir extérieur.
Dans une profonde bouffée de courage, elle se retourna vers Ethan et tempera ses paroles dans un sourire d’encouragement.

- Je suis très bien ici… Avec toi… Ne te méprends pas…
Sans un mot de plus, elle s’avança vers les jardins, espérant qu’Ethan la suive.

Après quelques pas, elle sentit l’orisha à ses côtés, forçant son sourire timide à s’intensifier bêtement.
Être si près de lui suffisait à la déstabiliser et cela avait quelque chose d’étonnement excitant et effrayant à la fois. Ce n’est que lorsqu’ils furent loin de l’enceinte du palais, qu’elle se risqua à reprendre.

- Je suis maladroite, se confia-t-elle. Tu dois penser que je suis stupide ou bien… Je ne sais pas, finit-elle par conclure. Ce n’est pas que je n’ai pas d’avis sur ce qui se passe ici… Juste… Je peine à formuler ce qui me passe en tête lorsque je suis… Troublée.
Elle s’arrêta d’avancer comme tétanisée par sa soudaine confession et serra ses poings.

- Je veux dire… Rectifia-t-elle avec méfiance. Tu es… Tu agis si naturellement… Et je trouve cela si normal… Que cela m’effraie…
Son regard se releva vers Ethan dans le secret espoir d’y trouver une réponse. Sa ressemblance avec Kinji était troublante et elle ignorait encore si c’était cela qui les rapprochait ou bien si cela était bien plus complexe.

Le bruit cristallin d’une cascade éveilla ses sens l’obligeant à mettre un terme au supplice du silence qui venait de s’installer.
Elle se contenta de sourire et de montrer le petit chemin escarpé qui se faufilait le long d’une végétation plus dense.

- Je pense que c’est ici… Le mieux est de vérifier.
Après quelques longues minutes où elle ouvrit la marche, ils arrivèrent enfin devant la source chaude enclavée dans la roche. Les lieux étaient déserts propices à une réconciliation et à un dialogue plus ouvert.
Helly ne se retourna pas vers Ethan, préférant se déshabiller sans affronter son regard. La nudité n’était plus vraiment un problème pour la bélua depuis longtemps déjà, mais faire cela ne l’empêcha pas de recourir à divers stratagèmes pour que l’orisha ne voit d’elle que le strict minimum, jusqu’à ce que son corps soit plongé entièrement dans l’eau.

Les vapeurs de la source et la chaleur réconfortante des biens faits de l’eau, finirent par noyer l’impression de malaise qui oppressait son coeur. Elle redressa son regard vers lui et brassa la surface de l’eau en le défiant dans un regard espiègle.

- Tu comptes venir me rejoindre? Après tout c’était ton idée de venir ici… À moins que je n’aie endeuillé ton envie de profiter des bienfaits des lieux… Si c’est le cas, soupira-t-elle, ce n’était pas mon intention… Je voulais être parfaitement honnête… Je suis… Maladroite… Pardonne moi.

Il avait en tête d'à la fois accomplir son devoir au sein de cette histoire mais aussi d'en profiter. Cet éloignement du monde réel était une bénédiction, un échappatoire dans ce monde tourmenté par les guerres de races ou de religions. L'option de la source chaude restait pour lui la meilleur option pour mieux connaître la bélua tout en étant dans un esprit de quiétude et détente. Loin des regards potentiellement accusateur alors qu'elle est sa servante et lui d'un rang plus noble. Titre qu'il s'efforçait de montrer l'honneur mais son esprit libre appelait à contourner les moeurs. Il serait sommes toute facile d'expliquer leur présence commune dans la source en disant qu'elle lui procure un massage du dos dans cet environnement chaleureux. Pour l'heure, un certain malaise régnait dans la demeure, le visage rougeâtre de la bélua, Ethan songeant qu'il avait peut-être été un peu trop naturel dans ses gestes, dans ce contact de ses doigts sur sa peau comme si l'un et l'autre se connaissait depuis assez longtemps pour qu'aucune ambigüité ne sonne l'alerte dans la tête de l'un ou l'autre.  

Un relèvement soudain de la part d'Helly qu'il suivait des yeux, s'éloignant de la table basse, quelques mots explicatifs, comme une nécessité de se justifier de la part de celle-ci. Une fois plus loin, hors de l'enceinte, elle avait relancé la discussion. Expliquant sa maladresse, se questionnant, affirmant un trouble dans son esprit, une crainte face aux actions de l'orisha. Le bruit de la cascade fit tourner le vent, déportant le sujet sur le lieu que tout deux avait choisi de rejoindre pour se détendre. Il suivait ses pas sans mot dire, réfléchissant à ce qu'elle avait prit le temps de lui dire, ce qu'il avait pu faire pour provoquer cette contrariété et incompréhension. Enfin le lieu s'ouvrit à eux, la bélua usant de talent pour se glisser nue dans l'eau chaude jusqu'au cou sans dévoiler plus qu'il n'en faut à Ethan. L'appelant à le rejoindre tout en demandant son pardon. sa tenue glissant le long de son corps pour profiter à son tour de la chaleur, ne pouvant faire autrement qu'être face à elle durant cette procédure avant de s'avancer jusqu'à elle.
- Je serais fou de ne pas vouloir profiter des bienfaits de cet endroit, de profiter de sa quiétude et de ta présence. Tu n'as rien à te faire pardonner, tu es qui tu es, ne change rien pour faire plaisir à autrui. Soi toi-même, sans filtre ni barrière.
S'approchant d'elle, la contournant de près pour attraper sa main et se rapprocher de la cascade pour passer en dessous, y trouvant un fond un peu plus haut qui permet de prendre pieds au lieu de nager, restant plongés jusqu'aux épaules dans la chaleur.
- Je te dois bien un peu de détente pour les tourments que je procure à ton esprit. Ferme les yeux, c'est ton maître qui te l'ordonne.
Sourire en coin, jouant de leurs rôles dans l'histoire pour lui faire plaisir, placé derrière elle, ses mains se posèrent sur ses épaules pour entamer un massage, manipulation habile pour la soulager de toute tension alors qu'il descend progressivement le long de son échine pour atteindre ses reins dans de larges mouvements jusqu'aux flancs. Ses doigts filant sur son ventre pour la faire reculer jusqu'à lui et murmurer à son oreille quelques mots.
- Ta présence me fait du bien, me fait revivre après de longs mois d'errance. J'ai envie d'apprendre à te connaître, explorer ce côté animal qui est en toi, tu sembles empreinte d'une certaine folie contagieuse qui me pousse à foncer dans l'accomplissement de mes rêves. Je t'apprécie beaucoup.
Il relâcha son étreinte, ne sachant si sa liberté d'expression aurait un effet bon ou mauvais sur Helly. Véritable lancé à pile ou face dont la victoire ou la défaite serait connue sous peu par la réponse qu'elle amènerait.

Le duo avait ainsi prit un moment pour discuter dans le confort de la source chaude, mise au point en quelques sortes de ce jeu qui devenait une relation, amicale ou intimiste, le temps ou la folie en apporterait la réponse. Le temps avait passé à la vitesse de l'éclair, faisant regretter à l'orisha de ne savoir arrêter le temps l'espace d'un moment pour immortaliser le présent et en profitant pleinement avant de se lancer à nouveau à la recherche de ce mal inconnu qui ronge le prince. Quittant l'eau après elle, lui laissant le temps de vêtir avant de faire de même et reprendre tout deux la route vers le palais afin d'y trouver le garde qui avait reconduit Helly jusqu'à ses quartiers la veille. Le ton entre eux lui semblait plus léger, espérant que soit réciproque, discutant de tout et de rien, des possibilités à suivre pour comprendre ce qui se passerait durant la nuit près de la chambre du prince.  Atteignant la caserne, il profita de son rang pour demander la présence du concerné et demander sa libération pour l'heure à venir.  Sans mal il obtint ce qu'il souhaita, le garde les menant à un endroit tranquille pour manger où il purent discuter de la situation. Après tout il avait été de ceux qui avait monté la garde sans succès, chaque petit détail pouvait être utile avant de s'y rendre eux-mêmes à la nuit tombé.