Je vivais depuis mon arrivée dans les bras de la rivière éternité. Ici, l'eau y était douce ce qui changeait un peu de l'océan mais cela ne me dérangeait pas. Au contraire, j'avais découvert ici d'autres espèces sous-marine et cet endroit ne comportait pas les nombreux risques de l'océan. J'avais également découvert la présence de nombreuses fées et m'amusait souvent avec elles, même si la malice de certaines était parfois déconcertante. Ainsi, une fois, alors que je m'amusais à ramasser de belles pierres au fond de l'eau, en les plaçant les unes à côté des autres à la surface, un mystère s'était produit : en remontant pour la unième fois, je constatais la disparition de mon trésor.
J'avais toujours eu mauvais caractère, ceci surement dû à mon statut d'enfant unique, fille du chef de ma tribu sous-marine, parfaitement égoïste et égocentrique. En tout cas, j'étais entrée dans une rage folle en constatant cette disparition, remontant à la surface et cherchant le responsable. Parfois, la cohabitation avec les fées était vraiment énervante. En entendant un petit rire raisonner, je sus où était mon ravisseur et j'étais bien décidée à lui montrer de quel bois je me chauffe.

Le problème avec les fées, c'est qu'elles sont toujours plusieurs et que, bien souvent, elles arrivent à bout de leur adversaire sans aucune difficulté. A croire que ce ne sont qu'en partie des êtres bénéfiques, comme si une part d'elle tendait vers le mal. Alors que j'étais en train de passer un savon à cette gourgandine mal éduquée (dire que je faisais la leçon alors que mon cas n'était guère mieux), d'autres fées vinrent et je ne tardais pas à me retrouver sur les fesses, des fées rieuses m'entourant, me tirant les cheveux, me pinçant ici et là et se moquant de moi. Je dois avouer que je l'avais très mal pris, c'était vraiment insupportable de se faire ridiculiser par de si petites choses.

Depuis, je faisais attention lorsque je communiquais avec les fées. J'avais pas contre appris à les connaître et je prenais leurs manières avec philosophie maintenant, sachant très bien qu'une idée malicieuse pouvait germer dans leur esprit à n'importe quel moment. Je me méfiais donc un peu afin que ce genre de choses ne m'arrive plus. Je leur avais raconté que j'avais été au bal du seigneur Dayne, elles en étaient restés très impressionnées. Bien sûr, je ne leur avais pas dit ce qu'il s'y était passé me concernant : en gros, que j'avais pleuré toute la soirée et qu'un jeune homme m'avait consolé. Cependant, je leur avais conté que j'y avais rencontré quelqu'un et que, peut-être, il viendrait me trouver ici dans quelques temps. Les fées s'étaient emballées, jouant à me narguer, chantant en cœur que j'avais un amoureux. Au début, j'avais viré rouge pivoine mais j'avais finalement pris sur moi, m'habituant à leurs jérémiades.

Je pensais à cela, m'amusant à fabriquer un habit à une fée qui avait bien voulu me servir de modèle. C'est que, j'avais entendu parlé du métier de couturier que certaines personnes pratiquaient sur terre et j'avais trouvé que c'était très intéressant, peut-être pourrai-je apprendre? Cela dit, je ne connaissais personne et donc, je ne savais pas où trouver un couturier, ni comment me présenter à lui. Genre « bonjour, je suis Edwina, je voudrai apprendre à fabriquer des vêtements humains... ». Je me doutais que cela ne passerait pas, la personne me regarderait comme une mendiante insignifiante et s'en irait. Après tout, je n'avais pas d'expérience...

Alors que j'essayais de modeler mes bouts de feuille, ayant créé une jupe pour la fée, un haut et finissant le chapeau qui allait avec, j'entendis un bruit dans les feuillages et là, sous mes yeux, un loup terrifiant en surgit. Je pris peur...oui, j'étais paniquée, je ne savais pas quoi faire. Poussant un cri de détresse, je me relevais alors aussi rapidement que je pouvais afin de fuir. Bien sûr, la fée n'avait pas attendu que je réagisse pour s'éclipser, me laissant là comme une vieille chaussette.
Je n'avais jamais vu de loup auparavant mais j'étais terriblement effrayé de ce qu'on m'avait raconté d'eux : il mangeait les enfants et les jeunes femmes seules dans la forêt, surtout celles habillées de rouge et, justement, j'étais habillée en rouge! Je savais que ça n'allait pas avec mes cheveux mais comme j'avais prévu de rester là, je ne voyais pas l'intérêt de m'habiller avec les bonnes couleurs. Et puis, je ne pensais pas non plus qu'il y avait des loups par ici.

L'adrénaline fit battre mon cœur beaucoup plus vite et, d'un bon, je sautais me réfugier dans l'eau, me transformant pas la même occasion en sirène. Ma queue était bleue, comme mes cheveux et dépassait de la robe rouge que je n'avais pas eu le temps d'enlever. Ce n'était pas des plus pratique mais au moins, j'étais saine et sauve...à moins que les loups puissent nager sous l'eau.
Aussi, j'attendis un instant avant de remonter timidement à la surface, faisant dépasser uniquement le haut de ma tête jusqu'à mes yeux et prenant un nénuphar dans le but de me cacher derrière, enfin, essayer du moins. De là, j'essayais d'apercevoir le loup, morte de peur à l'idée qu'il me saute dessus.

Je plissais les yeux en apercevant la personne devant moi. N'était ce pas...si...c'était Iro. Ou peut-être que ce loup était en fait une sorte de métamorphe, pouvant prendre l'apparence d'un être humain afin d'appâter ses proies...
Je décidais donc de rester un moment en retrait, essayant d'analyser la situation et surtout de calmer mon cœur qui bâtait la chamade comme jamais. J'avais vraiment peur et surement que cela se voyait dans mes yeux qui bougeaient nerveusement, fixant l'ex-loup et regardant en même temps autour de moi, comme si je m'attendais à voir surgir de nul part son complice.

Le jeune homme s'excusa mais je n'étais pas vraiment convaincue...enfin, pas tout à fait. J'étais cependant rassurée de voir qu'il n'avait pas l'intention de me manger. Et puis, il fallait dire que sous l'apparence d'Iro, ce loup me faisait un peu moins peur. Il précisa qu'il avait pris l'habitude de cette forme et qu'il ne se rendait pas compte parfois d'être transformé en loup. Ainsi donc, Iro serait-il capable de prendre l'apparence d'un animal? J'étais admirative de ce don que, il fallait l'avouer, j'avais toujours voulu avoir. Ce que je ne savais pas encore c'est que j'étais en quelque sorte douée de ce don également. En effet, je pouvais me transformer en sirène, alors que j'appartenais à la race des magiciens. Je ne le savais pas encore mais cela ne saurait surement pas tarder. Quelque part, au fond de moi, peut-être que j'en avais déjà connaissance, me sentant quelque peu différente des autres ondins, mais peut-être ne voulais-je pas me l'avouer, ou peut-être simplement n'étais-je pas encore prête pour de telles révélations. Un peu comme celles qui m'apprendraient que Frey ne m'aimait pas et que, sans doute, je ne l'aimais pas non plus.

Ma bouche s'ouvrit légèrement lorsqu'Iro se mit à marcher sur l'eau. Décidément, il était impressionnant. Je me demandais même s'il ne faisait pas partie des hauts gradés de sa race. Moi, même si je l'avais voulu, je n'étais pas très puissante parmi les ondins et, sans le savoir, tant que je ne me rendais pas compte de mon rang de magicienne, mes pouvoirs restaient bloqués. J'avais donc l'impression de ne pas avancer, d'être faible et insignifiante. Bien sûr, ma vie actuelle était très loin de celle que je m'étais imaginée auparavant. Je me voyais plus célèbre, au côté d'un homme parfait, belle, riche. En fait, ce n'était que de vulgaires chimères mais tant que j'y croyais, j'avais un but pour avancer dans la vie. Maintenant que ce beau tableau commençait à se flétrir, j'avais parfois l'impression de couler sans n'avoir aucune bouée de sauvetage, ce qui est un comble pour une prétendue sirène.

Bref, la puissance d'Iro me faisait me sentir toute petite par rapport à lui. Après tout, il m'avait aidé lors du bal alors que je pleurai, telle une gamine. Aujourd'hui, j'avais été effrayée de sa présence sous la forme d'un loup et maintenant, j'étais impressionnée par lui. C'était vraiment étrange toute la gamme d'émotions qu'il pouvait me faire ressentir et j'en étais quelque part honteuse.

Il enleva doucement le nénuphar qui me servait de cachette sans que je cherche à résister. Après tout, maintenant qu'il était devant moi, je savais bien qu'il était réellement celui qu'il prétendait être. Je le regardais, un peu intimidée tout de même. Je lui souris légèrement lorsqu'il dit qu'il avait un bon flair. C'est vrai que je n'avais pas été très précise concernant cet endroit et il avait du me chercher longtemps. Je m'en voulais un peu d'être partie comme ça au bal...

Il remarqua la présence des fées. Elles étaient curieuses, c'était un fait, et j'étais sûre que certaines d'entre elles se moquaient de moi. Franchement, il n'y avait pas de quoi. Elles faisaient les malines maintenant puisqu'elles voyaient qu'il n'y avait pas de danger mais j'étais certaine que lorsqu'elles avaient vu le loup, elles avaient toutes tremblées. Enfin, c'était le caractère de ces petites créatures. Lorsqu'Iro les salua, elles se mirent à rire de plus belle puis elles sortirent de leur cachette, voletant vers nous, scintillant de mille feux. Les fées étaient vraiment de jolies créatures, un peu maléfiques sur les bords, mais jolies tout de même.

Je regardais donc Iro, répondant à sa question :
“ Oui, elles vivent près des cascades cristallines. Depuis que je suis arrivée, elles viennent souvent me voir.”

Une fée vint se poser sur ma tête, pensant sûrement que j'étais un canapé douillet. Cela ne me dérangeait pas puisqu'après tout, le poids qu'elle pesait était le même que celui d'un coquillage.
Je regardais donc Iro, ma fée sur la tête, et finis par lui dire :

“Je ne pensais pas que tu viendrais...”

En fait, c'était la vérité, je ne pensais réellement pas qu'il répondrait à mon invitation, qui, il fallait l'avouer, n'en était pas vraiment une...enfin, quelque peu imprécise.
En tout cas, je ne savais pas ce que je préférai : qu'il ne vienne pas, ce qui m'aurait rendu légèrement triste, ou qu'il vienne, ce qui avait pour effet de m'intimider.
Lorsque je lui avais proposé de me rendre visite, c'était pour le remercier de ce qu'il avait fait pour moi lorsque nous nous étions rencontrés. Je voulais lui faire découvrir les fonds marins, mais maintenant qu'il était devant moi, j'avais un peu de mal à entamer la conversation car, il pouvait ne pas s'intéresser à la vie sous-marine. Je tentais tout de même :

“Je pensais peut-être que tu aimerais...que tu aimerais découvrir le monde marin. Mais si tu ne veux pas, je comprendrais, ce n'est pas grave! Je suis désolée de t'avoir embêté avec ça...tu as fais tout ce chemin pour venir me voir, peut-être pensais-tu que j'avais quelque chose d'extraordinaire à te montrer alors maintenant que je t'ai dis ça, tu vas sûrement m'en vouloir de t'avoir fais te déplacer pour rien. Enfin, je m'excuse parce que...”

Si j'avais commencé ma phrase très lentement, hésitante, le reste par contre s'était fait à la vitesse de l'éclair, mes joues rougissant de plus en plus. J'avais maintenant un teint cramoisie pendant que je continuais de parler, m'enfonçant de plus en plus dans des phrases incompréhensibles, qui faisaient rire les fées présentes.

Lorsqu'Iro commença a parlé d'un air renfrogné, je sus que je n'aurai pas du l'inviter. Ou alors, il m'aurait fallu trouver quelque chose de plus intéressant à faire. A quoi avais-je la tête? Il était sûr que si la découverte des fonds marins intéressait les ondins, il en était autrement des êtres terrestres. A quoi leur servirait-il d'admirer des coquillages alors qu'ils pouvaient les voir dans leurs assiettes quand ils le souhaitaient. Je me trouvais vraiment sotte d'avoir cru un instant que l'elemental apprécierait mon cadeau et il s'avérait que cela n'en était même pas un.

Mon esprit pensait très rapidement, comme si un moteur s'était donné comme mission de faire exploser mon cerveau. D'un seul coup, je me sentait de nouveau inutile, comme si ma seule présence était un fardeau pour mon entourage. J'étais une jeune fille décidément bien complexe auquel le moindre mot faisait ressentir tout un tas d'émotions. A vrai dire, avant de rencontrer Iro, je me berçais dans l'illusion que je donnais aux autres, croyant moi aussi être cette lady que tout le monde admirait et qui pouvait se permettre n'importe quoi. Mais maintenant qu'il était entré dans ma vie, je me trouvais face à mon véritable moi : une fille fragile, perdue et timide. Je n'avais pas encore déterminé quel était le meilleur parti : une illusion rassurante ou une vérité effrayante?

En fait, tout cela ne s'était passé qu'en quelques secondes mais je me sentais déjà aussi stupide qu'une feuille morte écrasée sous une chaussure. Soudain, Iro se mit à rire. Franchement, à ce moment là, je ne savais quoi faire, ni comment interpréter ce rire. Se moquait-il de ma stupidité? Rigolait-il parce que j'avais une tête étrange? Le fait que je puisse prendre tout ce qui se déroulait dans ma vie comme des éléments allant contre ma personne était de la folie pure. Qui faisait cela à part moi? J'avais vraiment l'impression à ce moment là que tout le monde était contre moi : Iro qui rigolait et les fées qui se moquaient. Etais-je dans une sorte de cauchemar?

C'est alors qu'Iro se mit à me parler amicalement. Au début, je restais interdite, une expression neutre sur le visage, montrant à quel point j'étais choqué. D'ailleurs, mon rouge pivoine venait tout juste de renaître, au fur et à mesure que je me rendais compte à quel point j'avais pu me méprendre sur cet homme. Etait-ce une maladie que j'avais contracté au détour d'un ruisseau que de tout remettre en question sur de simples paroles?

Lorsqu'il avoua que la découverte des fonds marins lui semblait passionnante, mon rouge était à son comble. Avais-je réellement trouvé quelque chose qui lui plaisait? Je n'en croyais pas mes oreilles, pour une fois que j'avais une idée qui semblait être bonne!

Iro continua en me disant qu'il contrôlait maintenant son pouvoir. A vrai dire, j'étais rassurée car si jamais il avait vu ce qu'il s'était passé dans ma tête quelques secondes plus tôt, il serait probablement partie en courant, s'éloignant au plus vite d'une folle comme moi. Je poussais malgré moi un soupire de soulagement avant de réaliser que, peut-être, il allait mal interprété ce signe. Je voulais m'excuser, lui expliquant que ce n'était pas ce qu'il croyait mais que...mais que quoi? Je ne pouvais pas non plus lui dire le labyrinthe de pensées qui s'était formé dans ma tête...il me prendrait encore plus pour une folle. Je décidai donc de ne rien dire, constatant qu'il venait, de toute manière, de se tourner vers les fées pour leur rappeler qu'il était mal polie de se moquer.

Je lui aurai bien dit que c'était peine perdue mais malheureusement, les fées le lui montrèrent plus vite que moi et Iro se retrouva dessous le liquide dans lequel j'étais actuellement trempée, sous ma forme de sirène. J'essayais de retenir un petit rire mais je n'y parvins pas quand je vis l'elemental remonter à la surface trempé. Les fées l'avaient adopté. L'une d'elle se plaça devant moi et me regarda avant de dire :

"Edwina et Iro ils sont amoureux nananananère!"

Je rapprochais ma main doucement de son petit corps frêle et lui envoya une pichenette. La fée se retrouva à quelques mètres de là ayant laissé une lignée de poussière de fée sur son passage. Elle se retourna vers moi, croisant les bras d'un air boudeur, les joues gonflés. Puis toutes les fées s'y mirent en cœur. Là, je ne pouvais plus lutter, ces petites choses étaient décidément trop maléfiques pour moi. Essayant de les ignorer, toujours aussi rouge, je décidais de parler à Iro :

"Excuse moi, elles sont souvent comme ça, de vraies petites commères..."

Je souris, semblant un peu sortir de ma carapace de timidité. Soudain, j'entendis un wouaf aigu, suivit d'un plouf! Il s'agissait du petit chien que j'avais trouvé à mon arrivée. Il n'avait pas beaucoup grandit depuis lors mais il était adorable. C'était mon seul soutien lorsque j'étais toute seule. D'ailleurs, je n'avais pas rencontré grand monde depuis mon arrivée hormis Lastraé et Iro. Je ne sortais pas beaucoup aussi et puis, à chaque fois que je le faisais, c'était pour chercher Frey.

Le chiot s'avança en nageant vers moi et me lécha goulument le visage avec sa langue, se tournant ensuite vers Iro et s'apprêtant à lui faire la même chose. Aussi, je le retins, me disant que peut être, l'elemental ne trouverait pas cela très agréable. Je décidai d'éclairer mon interlocuteur sur ce mystère :

"Je te présente Wouaf! Je l'ai appelé comme ça parce que je ne sais pas ce qu'est cette créature étrange mais elle fait toujours wouaf. Je pense que c'est son nom..."

Edwina ou, comment se rendre ridicule en cinq secondes. Cependant, sous l'océan, il n'y avait pas de chien et même si cela pouvait paraître étrange, je ne connaissais pas cette race. Bien sûr, je n'étais pas inculte non plus, je connaissais plein d'animaux terrestres comme les loups, les oiseaux, les chats, les pingouins, mais les chiens m'étaient inconnus.

Je regardait donc Iro, les fées cessant peu à peu leurs jérémiades puis reprit la parole :

"Je suis vraiment heureuse de te voir. Si tu veux, nous pouvons découvrir le fond de cette rivière ensemble. C'est vraiment très beau sous l'eau, il y a des poissons colorés, des rochers extraordinaires, des coquillages magnifiques! Et puis, il y a d'étranges sous-terrain que je n'ai pas encore exploré. Ils sont assez lugubres mais peut-être cachent-ils une choses merveilleuses..."

Je réfléchis un instant. Iro ne pouvait pas se mouvoir comme moi sous l'eau, mais peut-être qu'en unissant nos pouvoirs, il pourrait se créer une bulle d'air lui permettant de respirer. Quant à moi, je pourrait l'aider, avec mon contrôle de l'eau.
Je le regardais donc puis lui appris ce que je pensais faire. J'espérais qu'il puisse créer une bulle d'air suffisamment grande autour de lui pour qu'on puisse partir en expédition une bonne heure.

Ce jour là, j'appris ce qu'était un chien. Le fait que je sache maintenant à quelle race appartenait Wouaf me remplit de joie. Je sais que cette découverte pouvait paraître minime à la plupart des gens, que peut être un témoin assistant à la scène se serait moqué de mon bonheur mais pour moi, c'était merveilleux. J'aimais profiter de chaque chose et cette découverte semblait me rapprocher encore plus de Wouaf, comme si une barrière venait de disparaître entre nous. Le petit chien, semblant également ravie de cette découverte, sûrement ressentant ma joie grâce à son empathie, se tourna vers moi et me léchouilla de nouveau.

Je regardai Iro puis lui dit, mon regard plongé dans celui du jeune homme, mes yeux brillants sous le coup d'une émotion qui ne pouvait sans aucun doute être partagée avec Iro, l'elemental me prenant surement à ce moment précis pour une fille un peu trop sensible :

"Merci"

Comprendrait-il à quel point cette information était essentielle pour moi et combien il m'avait aidé depuis que nous nous étions rencontrés? J'en doutais mais j'espérai qu'il prendrai mon merci en lui donnant toute son étendu, toute sa signification même si, à la longue, j'étais consciente que de le remercier tout le temps pouvait être étrange.

Dans tous les cas, j'avais du mal à imaginer qu'un être humain puisse faire du mal à un chien comme Wouaf. Après tout, il était tellement mignon avec ses petites oreilles et sa petite truffe. Certes, je ressemblait fort à une grand mère à chats sauf que je vouais une sorte de culte à mon chien qui était la seule personne à m'être resté fidèle depuis que j'étais arrivée sur ces terres.

Il m'avoua qu'il était heureux de me revoir mais qu'il se demandait, dans le fond, comment je réagirai en vu de ce qu'il s'était passé. Cette question n'avait pas encore été étudiée mais depuis notre séparation, mon état d'esprit avait été très mouvant. Souhaitant qu'il vienne mais changeant d'avis deux minutes après, ressentant de la joie puis de la honte, puis de la tristesse, puis de la joie...mon panel de sentiments n'avait pas cessé d'augmenter au point que j'aurai voulu me retrouver dans une autre dimension, coupée de tout. Finalement, peut-être que j'étais décidément bien sensible derrière mon masque.

Je regardais ensuite Iro créer une bulle d'air. C'était vraiment impressionnant ce qu'il arrivait à faire avec sa magie. En ce qui me concernait, je n'avais pas encore trouvé la force magique qui sommeillait en moi. Hormis mon contrôle de l'eau, je ne maîtrisais rien et au fond de moi, je savais que peut-être il me manquait quelque chose pour que mes pouvoirs se révèlent au grand jour. Le problème c'est que je n'avais aucune idée de ce qu'était cette chose. J'avais beau chercher, je ne savais pas. Désespérée je m'étais même convaincu que mon problème venait du fait que je n'arrivais pas à retrouver Frey, ce qui, il faut l'avouer était une idée bien étrange.

Lorsque l'elemental me proposa d'entrer dans la bulle d'air, j'acceptais sans tarder. Une fois dans celle-ci, ma queue de sirène se transforma en deux jambes, des jambes sans aucun charme, petites, à la limite du mince et du maigre. Iro demanda qu'elle serait la suite des festivités et un sourire mystérieux s'installa presque malgré moi sur mon visage. C'est alors que, contrôlant l'eau qui nous entourait, je me servis de celle-ci afin de plonger la bulle dans la rivière.

Un autre monde s'ouvrit alors à nous, le monde de sous la surface. Le fond de la rivière était magnifique, clairsemé de petits cailloux multicolores sur lesquels se reflétait la lumière du jour que l'eau claire de ce lieu laissait passer. Des plantes de plusieurs couleurs venaient ajouter à ce lieu une allure de forêt merveilleuse, comme si la magie avait aménagé elle même cet endroit pour en faire quelque chose de secret où l'intimité était maîtresse. Des poissons passèrent devant nous, certains semblant étonnés par notre présence alors que d'autre prenaient un malin plaisir à nous ignorer.
Je souriais à Iro, régulant la vitesse de notre bulle d'air avec ma magie. J'essayais de ne pas trop respirer afin de laisser le maximum d'air au jeune homme. Après tout, il en avait plus besoin que moi et puis, l'air était précieux, surtout si je voulais l'amener dans le fameux passage effrayant que j'avais déjà vu plusieurs fois. Le fait qu'Iro soit avec moi me donnait du courage, aussi, je décidais de nous amener au lieu dit. Faisant accélérer la poussée de l'eau, nous nous retrouvâmes bientôt devant l'entrée.

"C'est ici"

J'avançais la bulle d'air dans le passage, quand tout à coup, la pression de l'eau se fit bien plus forte sans que j'y sois pour quelque chose. Nous nous dirigeâmes dans le passage à une vitesse impressionnante. J'avais peur et je me disais que cette idée avait été l'une de mes plus mauvaises...et peut-être ma dernière mais finalement, tout se termina bien et la bulle d'air finit par émerger dans une sorte de lac faisant partie d'une grotte. Ici Iro pourrait respirer. Je regardais le lieu, m'apercevant que des sortes de galeries avaient été creusées dans la roche. Je me demandais si Iro voudrait continuer l'aventure mais en ce qui me concernait, et aussi parce qu'il était à mes côtés, je me sentais pousser des ailes et j'avais vraiment envie de découvrir ce que cachait cet endroit.

J'admirai le fond marin en même temps qu'Iro. Bien sûr, je le connaissais déjà mais il m'émerveillait toujours. Je ne pu m'empêcher d'avoir une pensée plutôt triste car lorsque j'avais commencé à aimer Frey, je pensais que ce sentiment d'amour durerait toujours, m'émerveillerait jusqu'à la fin de ma vie et qu'à jamais, je lui serai liée. Pourtant, aujourd'hui, tout semblait différent et ce lien était brisé bien malgré moi. J'étais fatiguée de le chercher, fatiguée d'espérer puis d'être déçue. Je voulais passer à autre chose et, quelque part, je savais qu'il le fallait car, sinon, j'allais me détruire psychologiquement. Je décidai donc de reporter les sentiments que j'éprouvais pour Frey sur Iro. Choix bien sûr égoïste puisque je savais qu'il ne devait pas m'aimer mais, ce n'était pas grave, je n'aurai cas rien dire et essayait d'avancer jusqu'à oublier totalement cet ondin au cœur dénué de sentiments à mon égard.

Iro répondit à mon sourire et quelques part je me sentais ravie par cette réponse. C'est que, je n'en avais pas eu depuis si longtemps, des gestes d'amitié, qu'il me semblait merveilleux qu'ils réapparaissent enfin. Pourtant, quelque chose me peinait vraiment et je devais passer par une éternelle insatisfaite aux personnes m'entourant. Ce qui me peinait c'est que je n'avais pas trouvé une personne voulant prendre soin de moi autrement que comme une amie ou une petite soeur et, malgré mon jeune âge, j'avais besoin d'être aimée comme une femme, et non comme une gamine bien trop jeune pour ce genre de chose.

Pourtant, l'état actuel de la bulle dans le tunnel me fit oublier mes pensées dénuées de sens pendant un temps et mon manque de contrôle créa en moi un sentiment de peur. J'espérai secrètement ne pas être celle qui par sa soif de curiosité et d'aventure soudaine, allait être responsable de la mort de deux personnes : Iro et moi-même, Edwina Nilsson.
Enfin, il semblait que le jeune homme contrôlait la situation et bien que j'étais toujours morte de peur, nous débouchâmes vers cette fameuse grotte où Iro mit fin à son pouvoir.

Bien qu'appartenant à la race des ondins, la dureté de la terre ferme ne me fit sans doute jamais autant plaisir. Ma peur avait disparus en même temps que l'eau et j'étais maintenant rassurée.
Iro me fit remarqué que le seul tunnel qui semblait mener quelque part était celui qui se trouvait un peu plus loin, devant nous. Je me demandais où est ce que cela allait nous mener mais j’acquiesçais, commençant à marcher, montrant pour une fois que j'étais loin d'être dénuée de courage. Je me tournais vers Iro puis lui demanda, un peu hésitante, quelque chose qui allait sûrement le surprendre. Mais je devais avouer que je me surprenais également en demandant cela :

"Dis, si le lieu où nous nous rendons ne nous cause pas de dommages, est ce que tu pourras m'embrasser?"

J'avais vraiment fait fort cette fois mais je voulais savoir ce que cela faisait et je pensais, dans une sorte de naïveté profonde, qu'un simple baiser n'était pas la mer à boire. En même temps, je n'arrivais pas à déterminer si je voulais être embrasser par Iro ou simplement être embrassée. Cela me troublait et peut-être que la deuxième solution était celle qui était applicable à ce moment là car, après tout, je ne connaissais rien du jeune homme et même s'il m'avait beaucoup aidé, ce n'était peut-être pas une raison suffisante pour lui donner toutes cette attention, même si j'étais résolue à le traiter de la même manière que je l'avais fait avec Frey, en étant moins collante bien sûr.

Nous débouchâmes bientôt sur la fin du tunnel sans pour autant qu'Iro m'ait donné sa réponse. Nous étions plus haut que le paysage qui s'étendait maintenant devant nous : un jardin à la beauté saisissante à la verdure d'un vert incroyable. Une cascade tombait d'une sorte de falaise en face de nous et un court d'eau coulait en plein milieu de ce paysage fantastique semblant avoir son propre ciel. Des animaux parcouraient le lieu et certains buvaient tranquillement dans le cours d'eau. J'en restais sans voix...

Spoiler:

J'étais réellement émerveillée par le paysage qui s'étendait devant moi, un paysage d'une sublime beauté qui resterait à jamais gravé dans ma mémoire et puis, comment pourrais-je un jour réussir à l'oublier? Cela était totalement impossible. Ce qui allait se produire un peu plus tard, jamais je ne l'oublierai non plus.

Je sentis la main d'Iro sur mon épaule, une main douce mais à la fois ferme qui me força à me retourner. Bien sûr, je ne résistais pas, je savais de qui il s'agissait et j'avais confiance dans le jeune homme, même si, à vrai dire, je me demandais simplement pourquoi il ne voulait pas tout simplement m'interpeler. Je supposais que, peut-être, il ne voulait pas troubler toute la majesté de ce lieu par des paroles inutiles...et c'est vrai que les mots semblaient dérisoire face à la grandeur de cet espace, cet endroit dans lequel je ne manquerai pas de revenir dans le futur...ce serait mon endroit, un endroit secret qui ne serait connu que d'Iro et de moi, si bien sûr, le jeune homme gardait le secret, ce qu'il n'était pas obligé de faire par ailleurs. Cependant, je pensais réellement qu'un tel endroit gardait de sa valeur qu'en étant connu par le peu de personne possible car si trop d'êtres le connaissaient et s'y rendaient, il finirait sans nul doute bafoué par des créatures sans foi ni loi.

Alors que mon esprit pensait à cela, les yeux d'Iro vinrent rencontrer les miens et c'est à ce moment là que je compris que quelque chose allait se produire. Bien sûr, naïve comme j'étais, je pensais qu'il avait oublié ma demande car il n'avait pas répondu...peut-être même ne l'avait-il même pas entendu, et je me demandais donc, le souffle court, ce qu'il voulait au juste faire. Il effleura ma joue avec sa main, ce qui eut le mérite de m'étonner, mes yeux s'écarquillant légèrement et ma respiration se coupant tout naturellement sous le coup de la sensation étrange qui m'enveloppait. Quelle sensation? Une sorte d'adrénalyne, comme si je m'apprêtais à sauter dans le vide ou à prendre la parole devant des milliers de personnes. J'étais quelque peu effrayée par le geste d'Iro, par son regard, mais pourtant, j'étais incapable de bouger, comme hypnotisée, sachant pertinamment que j'avais voulu cette situation et qu'il ne serait pas responsable de détourner les yeux ou tout simplement de fuir comme je savais si bien le faire.

Et c'est là que l'évènement se produisit, ce fameux saut dans le vide. Iro s'approcha de moi et posa ses lèvres sur les miennes. Instinctivement, je fermais les yeux comme dans les belles images que je me faisais souvent à ce sujet. Bien sûr, j'avais déjà embrassé quelqu'un avant : Frey, mais cela était différent, oui, ça n'avait rien à voir. A chaque fois, c'était moi qui l'avais embrassé, et par surprise, baiser dont il ne voulait pas, même si à l'époque j'étais bien trop avaugle pour m'en rendre compte.
Le baise d'Iro lui, avait un tout autre goût car c'était lui qui était venu vers moi, de son plein grès et répondant à ma demande. Ce baiser était doux, délicieux et je voulais pleinement en profiter. Les yeux ainsi fermés, je pouvais me concentrer sur le touché, sur cette sensation si étrange qui s'emparait de moi et qui, soudainement, me donnait très chaud. Les souvenirs du paysage qui s'étendait devant nous me revinrent à l'esprit et je finis par comprendre que ce baiser était comme cet endroit et qu'il lui serait à jamais associé dans mon esprit. Mes mains étaient le long de mon corps et, de toute manière, même si j'avais voulu en faire quoi que ce soit, j'en aurai été bien incapable, toujours clouée sur place.

Je décollais alors mes lèvres de celles du jeune homme, le regardant ensuite avant de sentir cette étrange chaleur se déplacer curieusement vers mes joues qui devinrent aussi rouge qu'un champ de coquelicots, plus rouge qu'elles n'avaient jamais été. Je ne les voyais pas mais vu l'intensité de la chaleur, cela ne faisait aucun doute. J'étais réellement gêné car, je sentais bien que, pour lui, ce baiser n'avait rien de si spécial. Iro devait avoir embrassé pleins de femmes avant et puis, ce geste ne constituait qu'une simple réponse affirmative à ma demande, jamais il ne l'aurait fait de lui même. J'étais heureuse mais, en même temps, blessée, plus que je ne l'aurai cru. Ne pouvant pas supporter de faire face au regard du jeune homme, je bredouillais une ébauche de phrase :

"euh..mer...mer..."

Je pivotais instinctivement sur mes talons, faisant maintenant face au paysage et dos à Iro. Je parvins donc à me concentrer de nouveau suffisamment pour formuler une phrase correcte.

"Merci pour avoir respecté ma demande...et si nous descendions maintenant?"

Bien sûr, il n'y avait pas de moyen de descendre et inconsciemment je pensais à un escalier qui se créerait, nous permettant d'atteindre ce qu'il y avait sous nos pieds. A ce moment là, des morceaux de la paroi rocheuse de déplacèrent pour former un escalier qui descendait jusqu'en bas...
Sans le savoir, je venais d'utiliser pour la première fois l'un de mes pouvoirs de magicien. Pour moi, c'était tout simplement le lieu qui était magique...

Spoiler:

Je ne savais pourquoi mais je me sentais de plus en plus gênée en présence d'Iro et des envies inhabituelles s'emparaient de mon corps qui, peu à peu, devenait celui d'une femme. Bien sûr, je n'avais rien de comparable à une femme : j'étais petite, très menue, j'avais une poitrine quasiment inexistante et pour finir, j'avais des traits très enfantins. Pourtant, je me plaisais à penser qu'un jour, je deviendrai une vraie femme, une femme sublime, même si je savais qu'à l'heure actuelle, cela était totalement impossible. Pourtant, je sentais un étrange sentiment naître en moi, comme une pointe de désir envers le jeune homme. J'étais honteuse de cette sensation, terriblement honteuse même. Si j'aimais Frey, jamais je n'avais ressenti ça pour lui auparavant. Certes, j'aimais être en la compagnie de l'ondin, rêvais de me marier avec lui pour rester à ses côtés éternellement et ne pensais que tout au plus à l'embrasser. Cependant, avec Iro, j'avais envi de bien plus et je n'arrivais pas à décrypter les appels de mon corps ou, plutôt, je ne voulais pas comprendre, c'était bien trop humiliant. J'étais innocente et je ne savais pas qu'éprouver ce genre de sensations comme des petits papillons dans le bas du ventre, une envie croissante d'être touchée, caressée, était totalement normal. J'avais très peur en fait de ça et j'étais sûre qu'Iro se moquerait de moi si je le lui disais...ou peut-être ne voudrait-il plus me parler du tout.

Arrivés en bas de l'escalier que je prenais soin de fabriquer au fur et à mesure de notre avancée, découvrant ainsi un pouvoir qui m'était inconnu, des animaux vinrent à notre rencontre, curieux à notre sujet. Je m'imaginais alors, essayant de refouler mes papillons et mes sensations de chaleur, comment ils devaient nous voir, me mettant à leur place. Il est vrai qu'ainsi, peut-être que nous paraissions telles des bêtes curieuses. Cependant, cette idée me plût assez, je ne saurai dire pourquoi. Nous nous dirigeâmes vers un point d'eau, alimenté par un magnifique cascade dont l'eau, sous l'effet de ce soleil étrange, brillait comme des éclats de diamant. J'étais en admiration devant cette lumière semblant provenir des cieux et ce n'est qu'après un instant que je me rendis compte du peu de vêtement que l'élémental avait alors. Je détournais le regard, de nouveau plus rouge qu'un coquelicot à l'apogée de sa vie. Pourtant, je n'avais jamais été aussi gênée par une vue semblable et ne comprenais pas ce qu'il se passait en moi exactement.

Iro m'aspergea en riant, il était vraiment beau à ce moment là. Son expression dégageait le bien être et la joie et je ne pu me retenir plus longtemps de rire moi aussi, enlevant ma robe sans réfléchir pour me jeter moi aussi à l'eau, sans me soucier un instant du fait que seul ma culotte me séparer de la nudité absolue. Heureusement que mes cheveux cachaient mes formes, formes quelques peu inexistante, avouons le. Curieusement, au contact de l'eau, mon corps resta sous la forme d'une humaine et mes yeux s'écarquillèrent d'étonnement. Cela n'était pas normal...c'était dans la nature de chaque ondin de se transformer au contact de l'eau.

C'est donc avec des yeux inquiets que je regardais Iro pour finir par conclure :

"Je crois que l'eau de ce lac est enchantée..."

Puis, doucement, je me dirigeais vers Iro, la tête à moitié dans l'eau. Me redressant soudainement, je lui envoyais un filet d'eau au visage avant de lui sauter dessus, essayant de le couler. Cela dit, quelques secondes après avoir commencé ce geste, je m'écartais de lui soudainement, sentant de nouveau les papillons dans mon bas ventre au contact de la peu du jeune homme. J'avais honte, terriblement honte...