Musique

Ils étaient tous ici à cause d’un professeur d’Histoire, mais est-ce qu’ils connaissaient vraiment celle de Basphel ? On raconte souvent qu’il s’agit d’un ancien avant-poste militaire de rebelles sous la tyrannie de l’Impartiale, progressivement transformé en école d’élite ouverte à toutes les races. C’est un mensonge. En vérité, Basphel est un ancien avant-poste militaire de rebelles sous la tyrannie de l’Impartiale, progressivement transformé en école d’élite ouverte à toutes les races puis en hôpital psychiatrique pour jeunes délinquants. Otobis était apparu ici à sa naissance telle l’aberration magique qu’il était, mais il avait depuis toujours soupçonné que la renommée de cette institution soi-disant prestigieuse n’était qu’une façade saccharine permettant aux « étudiants » pensionnaires d’édulcorer la réalité de leur sordide détention. Quelque chose ne tournait pas rond, entre les murs de cette école, et jamais ce sentiment n’avait été aussi palpable que ce soir. Qui est-ce qui l’avait aidé à confirmer ces soupçons ? Était-ce le garçon déguisé, la brute violente qui se soulageait contre la porte, ou l’elfe goûteur d’urine ? Un peu des trois. Il pardonnait à ce dernier ses excentricités, pour y avoir participé par le passé. Par contre, il n’excusait ni le vacarme ambiant ni l’énergumène qui avait cassé leur seule issue.

Qu’Otoris et les autres cas sociaux soient reclus à perpétuité ici ne constituait pas un problème en soi : au contraire, il ne fallait pas être un génie pour savoir que la société ne pouvait que s’en porter mieux. Par contre, il n’était pas admissible que le clone se retrouve enfermé avec eux. Accoutumé à être ignoré, il savait toutefois qu’il ne pourrait demeurer invisible indéfiniment. Pour l’heure, il se dissimulait loin des regards, mais si sa présence était révélée et qu’Otoris se trouvait à proximité, le château de cartes qu’ils avaient construit ensemble s’effondrerait. Et que leur arriverait-il ensuite ? Est-ce qu’ils seraient attaqués ? Crucifiés et laissés pour morts dans la remise ? Ce destin était tout simplement inconcevable. Et c’était sans parler des messages visiblement factices qui les avaient tous rassemblés dans cet endroit en premier lieu. Cette situation ne sentait pas bon, d’une part à cause de la pisse, mais aussi parce qu’il ne pouvait s’agit que d’un guet-apens. Il devait bien y avoir une autre issue pour sortir de ce bazar, et, si tel était le cas, le sorcier devait à tout prix la trouver.

Alors qu’il s’engouffrait dans le dédale de la remise, un cri vint à son oreille. C’était le début de la fin.

---

Quelle étrange aventure leur était donnée de vivre ! Ils allaient sans aucun doute en tirer de nombreuses anecdotes qu’ils se remémoreraient avec amusement et convivialité à l’avenir. C’était du moins l'attitude qu’Otoris ambitionnait de cultiver, en aidant Marie-Jane à se relever. « Est-ce que ça va ? » Il ne lui avait que brièvement répondu, lorsqu’elle était arrivée, puisqu’il n’avait compris ce qu’elle cherchait à dire. On lui avait parlé de cours particulier, mais pas de travail. « Dis donc… il a invité du monde. Tu sais pourquoi on est là, toi ? » Le magicien avait beau être une lumière de par son enthousiasme, il n’était pas brillant. Pour autant, il savait que ni lui ni Émilie n’étaient venus ici pour la même raison et, à en juger par l’hétérogénéité de l’attroupement ici rassemblé, il se doutait que c’était également le cas des autres. Ce devait être un innocent canular comme il y en avait souvent, mais il était étrange d’imaginer leur professeur complice de ce genre de mascarade. Non, cela ne ressemblait guère à Monsieur Antirrhinum.

Alors que le garçon s’apprêtait à frapper à la porte, un hurlement strident l’interrompit dans son geste.

---

Émilie avait toujours eu une aversion pour les foules, cet un océan de bruits et d’informations qui s’avérait bien souvent trop abondant pour elle. Habituellement, elle supportait ces assauts sensoriels en se remémorant que, confinée entre les murs de Basphel, elle n’avait guère d’autre choix que de voir cela comme une expérience formatrice. Toutefois, sous le poids du stress, cette marée jaune de stimuli malodorants franchissait les digues de sa patience déjà fragilisée. Elle ne pouvait même pas s’entendre réfléchir, ici.

Elle avait lu un traité sur le concept d’intelligence collective, cette idée selon laquelle une équipe de personnes coopérantes est capable de résoudre des problèmes bien plus efficacement que s’ils étaient seuls, mais ses catastrophiques expériences de travail de groupe avaient suffi à lui prouver que « débilité collective » était un terme plus adéquat. Elle devait s’éloigner du groupe pour se sentir ne serait-ce que capable de trouver une solution.

Désarmée mais pas désemparée, la magicienne tendit son avant-bras à Samuel pour qu’il le lui prenne et qu’elle puisse le traîner vers un endroit plus calme. « Viens. » Elle n’avait pas besoin de lui pour réfléchir, mais jugeait sa présence utile au cas où un monstre surgisse d’un coin. Il n’avait pas l’air particulièrement valeureux, mais était silencieux, proche et avait un pouls : il ferait l’affaire. Pourtant, après environ seize pas — elle les avait comptés — elle sentit une résistance. La poigne jusqu’ici délicate du garçon était devenue inflexible. Émilie mit un certain temps, avant de comprendre ce qu’il venait de se passer. Samuel était immobile ; pétrifié de la tête aux pieds, et elle se trouvait captive de ses doigts crispés.

Un cri lui échappa de la gorge.

888 mots. Le premier PnJ a été pétrifié.

Whodunit
Perséphone ; RUPD

☙ Gloria Jones - Tainted Love
Posez pas de question

S'être éloignée de Lorcán n'était qu'une petite étape sur le long chemin qui menait à la tranquillité. Ce soir, elle avait un prix que nul n'avait les moyens de se payer. Cherchant à fuir le nuage de poussière que Zachary semait sur son passage, Perséphone se déplaça encore, tout en gardant dans son champ de vision le Démon torse nu par précaution, sachant combien il pouvait se montrer imprévisible pour avoir partagé quelques sessions de peinture avec lui. Le problème avec cette démarche, c'est qu'éviter tout le monde était une entreprise vouée à l'échec. Avec ses claquements secs, la porte ne cessait de s'ouvrir sur de nouvelles têtes. Et aucune n'était Faust. Elle lâcha un petit soupir, résolue à trouver la force pour endurer ce moment pour le temps qu'il devrait durer. Derrière Rose-Abelle et son annonce des plus curieuses, Alcide venait d'entrer à son tour. Le Magicien subissait les effets des Contes doublement au sein de l'école. On lui prêtait des similitudes avec deux protagonistes, mais quand elle voyait la douceur de ses traits, c'était le trésorier effacé qu'elle reconnaissait plutôt que le géant effrayant de violence et elle ignorait comment certains pouvaient se tromper. Troublée, elle laissa ses yeux errer ailleurs. Son intérêt pour ces livres n'avait germé que parce qu'on disait de Faust qu'il y apparaissait aussi. Pour le reste, et surtout sur cette Ezémone, la Sorcière ne savait quoi en penser. Elle leva les yeux sur une petite silhouette qui voletait au plafond, son attention attirée par l'irisé de ses ailes.

Un cri franchit la cacophonie, glaçant, et mis un arrêt brutal aux bavardages. Comme pétrifiée elle-même, Perséphone fixa durant plusieurs secondes l'étrange spectacle du garçon rigidifié, et de son amie, prise en otage. « ... » Sans qu'elle ne bouge d'un milimètre, ses yeux bondissaient sur chacun de ses camarades et l'onde de choc qui en parcourut certains. La panique n'allait pas tarder à gagner les plus émotionnels du groupe. Par anticipation, la Sorcière recula pour ne pas y être mêlée contre son gré, pour finir par carrément tourner le dos à la scène. Une fois arrivée à la porte, elle s'agenouilla pour récupérer la poignée. Ignorant ce qu'il se passait derrière elle, elle essaya de faire jouer le mécanisme, sans succès. Expirant un petit grognement dépité, elle rejeta la poignée et se tourna vers les autres. « Il faudrait... » commença-t-elle, de sa voix basse habituelle. Elle toussa et reprit, plus fort. « Il faudrait qu'on trouve quelque chose qui puisse faire levier pour forcer la porte à s'ouvrir. » Elle laissa passer un silence. « Sauf si vous voulez attendre ici qu'on soit pétrifiés à notre tour. »

Message II | 468 mots

Whodunit
Lorcán ; RUPD

☙ Lana Del Rey - Season Of The Witch

Réprobateur, Lorcán dévisageait Jezeṃiās. Après une entière minute de jugement, il renifla avec dédain. « Tu n'as jamais songé à rejoindre le dortoir des Evershas chiens ? Vous pourriez apprendre ensemble les manières comme ça. » finit-il par lâcher. « Oh, peu importe. Mais reste loin de moi. » Il craignait que les miasmes du Démon étouffent son parfum et qu'il se mette aussi à émettre une forte odeur de sécrétions.

Interdit, il vit ensuite Sympan fraîchement arrivé s'accroupir pour prélever de l'urine. « J'ignorais que la race des Ygdraë s'était dégradée à ce point. » articula-t-il d'un ton sec. Ce n'est que lorsqu'il se redressa que Lorcán put accuser une ressemblance à laquelle il n'avait jamais prêté attention jusqu'à présent mais qui le frappa comme un coup de couteau. Il n'avait pour ainsi dire jamais vraiment fait attention avant à cet énergumène. Il savait simplement que c'était un Ygdraë, ce qui était un mauvais départ, et qu'il était aussi fade qu'une soupe sans assaisonnements. Autrement dit, il n'avait vraiment rien pour lui. « Oh. » Il cilla, puis finit par se reprendre quand une voix vénéneuse claqua près d'eux avant qu'il ne puisse développer sa réaction. Il fut plus stupéfait encore de découvrir le profil de sa cousine, à un degré dont il ne se souvenait plus, trop peu intéressé qu'il était par les méandres tortueux de son arbre généalogique. La dernière fois qu'il avait pensé à elle, il... Non, il préféra se concentrer sur le moment présent. « Chère cousine, Basphel ne te réussit vraiment pas. Une telle vulgarité dans ta bouche, c'est... J'en suis gêné pour toi. Ce n'est pas parce que nous sommes loin de Drosera qu'il faut se laisser aller. »

Une déclaration passionnée ramena son regard vers la porte. Amusé, il écouta Rose-Abelle et comprit à quoi elle faisait référence. C'était un sujet qui avait nourri quelques bavardages à l'AAAP. Il n'était pas le seul à s'enfoncer dans un malentendu ce soir mais il n'allait pas tendre la main pour en tirer autrui de là, bien au contraire. « Quel dommage, j'aurais bien aimé le rencontrer un jour. On dit de l'Amoureux qu'il les aime roux, je pensais avoir une chance. » lança-t-il, goguenard avant de tourner la tête vers une silhouette remplumée qu'il connaissait bien à force de la croiser au club d'écriture. Ses yeux s'arrondirent et il dû y regarder à deux fois. « Aubépine ?! » Horrifié, il eut un mouvement de recul. Qu'est-ce qui clochait chez elle ? Il n'osa s'approcher des fois que ce soit contagieux. Était-ce un problème de maquillage ? Ses vêtements étaient toujours aussi affreux, mais non, il y avait quelque chose de réellement repoussant sur son visage. Il eut un sourire pincé qui se voulait compatissant. « Aïe aïe aïe... Quoi que tu aies fait, il faut arrêter. » lui conseilla-t-il.

Comme les autres, sa tête pivota vers l'origine du cri quand il perça à travers la remise. Ses deux sourcils se haussèrent en même temps et il marcha jusqu'à sa camarade coincée. Devenu sérieux tout à coup, il cessa de scruter le garçon devenue statut et fixa Emilie. « Du calme. Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Qui a fait ça ? »

Message II | 570 mots

Whodunit
Jezeṃiās ; RUPD

☙ Dead Poet Society - I hope you hate me.

« C'est moi ! J'avais trop envie de pisser ! » lança joyeusement Jezeṃiās à la question du blond nouvellement arrivé. Il ignorait son nom. N'étant à Basphel que la moitié de son temps, il n'avait pu se familiariser encore avec tout le monde.

« Les chiens ? » fit Jezz en se rhabillant. « J'adore les chiens ! » Et ils le lui rendaient bien. De son corps émanaient des effluves de sang qui les intriguaient inévitablement. Ils avaient toujours l'espoir que le Démon aurait une viscère à leur glisser entre les crocs. Mais il n'avait pas encore eu la chance de croiser la variété d'Evershas que Lorcán mentionnait. C'était un tort qu'il fallait vite réparer. Il avait toujours voulu d'un animal de compagnie en plus de Grendel.

« Tu viens de goûter ma pisse ? » demanda-t-il le plus ingénument du monde à la grande perche à côté de lui. « C'est fascinant. Tu sais tout ça juste en ayant goûté ? Dingue ! Tu m'apprendras ? Comment tu t'appelles au fait ? » Il jeta un coup d'œil à l'Alfar qui s'était écarté après avoir échangé avec une de ses congénères. Les deux ne semblaient pas porter Goûte-Pipi dans leur cœur et Jezz eut un élan d'empathie envers lui. « Marrante ta tenue. Y a quoi dans les poches ? Tu vas faire quoi avec ça ? Tu veux ma fourchette ? » Sans attendre de réponse, il la glissa dans une des poches de son nouvel ami. « J'ai d'autres armes dans mon sac. J'ai même chourré le plus gros économe des cuisines, j'espérais qu'on puisse en éplucher quelques uns pendant le jeu... » Il fouilla dans son sac pour exhiber fièrement l'outil précité. « Tu veux que j'essaie sur toi pour qu'on voie si c'est efficace ? File ton bras, on va - hein ? »

Il tourna la tête vers l'origine du cri. Pendant une seconde, il ne comprit pas le problème, puis constata l'aspect singulier du garçon à côté de la brailleuse. « Olala, je crois que ça a commencé ! Je pensais pas que ça démarrerait comme ça, j'imaginais plus une course-poursuite. » confia-t-il à Sympan en marchant vers le pétrifié.

« Ah ouais, t'es coincée. » observa-t-il à voix haute une fois arrivé au niveau de la fille. « T'en fais pas... Emilie, c'est ça ? J'ai exactement ce qu'il faut. » Le Démon fit glisser son sac de son épaule et fouilla jusqu'à trouver le plus gros couteau de cuisine. Il le brandit, manquant d'épingler la narine de son voisin au passage, déposa la lame sur le poignet de pierre et se mit à scier. « Putain, c'est dur ! Ce sera peut-être plus simple si on coupe ton poignet à toi ? La chair, c'est plus simple que la pierre, j'suis bête. »

Message II | 483 mots

Arrêtez-le

Zachary souffla quand il retira le dernier drap qui cachait les meubles. Il n'avait rien découvert de spécial et s'était encombré les poumons de poussière. Jusqu'ici, aucune de ses initiatives n'avait porté ses fruits. Il se retourna vers le centre de la pièce et s'adossa contre une statue, l'air faussement blasé. Bouger n'aidait pas non plus à contrôler sa vessie. *Hm… j'ai pas bien réfléchi à ça…* Il croisa les jambes pour se donner un genre, mais surtout pour contrôler ses besoins, et observa une scène chaotique se dérouler devant lui. Il finit par reconnaître quelques têtes, dont Melissandre. Une sorte de Destin semblait planer sur eux. C'était étrange : à chaque fois qu'ils se retrouvaient, c'était pour résoudre un mystère. Et ils ne faisaient pas vraiment bonne équipe pour le faire. À cette pensée, le Lyrienn décida de rester à sa place au lieu d'aller lui parler.

Mais soudain, un cri strident le fit sursauter si fort qu'il manqua de tomber à la renverse. Le blond se tourna pour découvrir une fille à l'expression horrifiée à côté d'un garçon qui ne réagissait pas. Apparemment, il était pétrifié…? Vraiment, ce mystère prenait un tournant des plus intéressants. Sa surprise fut redoublée quand le gosse turbulent à la pisse malodorante commença à faire des siennes. Et elle fut triplée quand il constata que la personne qui décida de le mettre hors d'état de nuire était Melissandre. D'un côté, il admirait son culot ; de l'autre, il était déçu que la scène se soit arrêtée là, coupant le fil de sa curiosité. Apparemment, le gosse ne se relevait pas. *Ça aurait été l'occasion parfaite de lui pisser dessus, histoire de lui apprendre la vie.* Zachary pouffa à cette pensée graveleuse, puis il se ravisa quand il réalisa que des élèves dans la pièce pourraient réellement mettre ce genre d'idées à exécution. Basphel était un lieu sécurisé, mais il jonchait de sacrés énergumènes. Et sans adulte pour arbitrer la situation, ça pouvait mal se terminer.

Le blond se décida : il fallait vraiment qu'il sorte d'ici. Melissandre s'était éloignée du pétrifié pour se pencher vers un garçon minuscule, recroquevillé dans un meuble. Il était si petit que, de loin, il aurait cru à l'ombre de quelqu'un. Mais lui, ce qui l'intéressait, c'était le garçon pétrifié. Il était grand et lourd. Sa tête était parfaitement contendante. C'était parfait. Zachary inspira un grand coup et se dirigea à côté du garçon. Un cercle s'était formé autour de lui alors que plusieurs élèves marmonnaient des hypothèses. « Il faut faire attention mais quand on est pétrifié, on ne ressent pas la douleur. Faites-moi confiance, je l'ai appris en classe. » Le blond empruntait une voix forte et grave en tournant autour du garçon.

La fille avait réussi à se libérer de l'emprise du malheureux et tremblait à côté de lui. Il bomba le torse pour donner de l'importance à l'idée qu'il allait soumettre à son public. « Nous avons tous un problème : nous sommes coincés ici, avec un psychopathe à terre et une odeur qui va nous rendre fous. » *Et surtout, bientôt une seconde odeur que vous n'avez pas envie de sentir.* « J'ai une idée pour nous sortir de là. Elle peut paraître folle, mais je dis juuuuste qu'on pourrait… essayer. D'accord ? Je propose d'enfoncer la porte en utilisant ce garçon comme bélier. » Non peu fier de son idée, il posa une main sur sa hanche et enroula l'autre autour de l'épaule du pétrifié. Il commençait à comprendre que le groupe faisait l'objet d'une quelque expérimentation, mais il n'avait pas envie de suivre les règles. Il n'avait pas le temps pour ça.

Message II
641 mots

« Quoi ? » Je fronçai les sourcils en découvrant Alcide. Sans lui, cet abruti de sous homme aux vêtements criards se serait pris une salve d’injures. Jamais mon frère ne tomberait amoureux de ce coq multicolore à la senteur aussi douteuse que le pipi. Du pipi fleuri, songea ma mauvaise foi. Jamais mon frère n’aimerait un homme. « Je ne t’ai jamais demandé de venir ! » fis-je savoir au Magicien, ma voix succombant à un excès d’irritation également portée par l’incompréhension. Que faisait-il ici ? Depuis quelques temps, je trouvais qu’il avait changé. Ce n’était pas tant physique que psychologique. Les deux. Tout était devenu étrange entre nous. « Non, je ne veux pas parler d’Érasme. » Ma langue claqua contre mon palais, comme celle de mon père contre le sien lorsqu’il marquait son mécontentement. Je l’aurais bien interrogé mais une fille aussi laide que Muscarine lui agrippa le bras. Je détournai les yeux pour mieux faire face à l’assistance. L’une de mes colocataires était présente. J’avais beau cherché, je ne comprenais pas le fin mot de toute cette histoire. Ma tête pivota de nouveau pour regarder les deux chipies de service. Les filles d’Ajax Borgia. « Vous êtes pourtant dans la remise de nuit, vous aussi. » dis-je, avant l’intervention d’une élève de la Craie. Comme beaucoup d’autres étudiants d’ailleurs.

Le cri me glaça le sang. Je n’allais plus si souvent à Amestris. J’avais pourtant assisté de loin à différentes exécutions. J’avais également eu vent de la crucifixion de mon père. Même en le désirant ardemment, je n’aurais pu passer à côté de l’événement qui avait mis un terme à sa royauté au profit de celle de Cyrius Windsor. La violence faisait partie du quotidien des Sorciers, un quotidien qui, heureusement, ne me parvenait qu’en échos. Depuis que j’étais étudiante à Basphel et que je vivais davantage chez les Magiciens, l’horreur me semblait lointaine, comme si mon cerveau préférait tout oublier. Ce cri me ramena à ma condition. Je me réfugiai dans le mutisme et l’immobilisme. Aider autrui pouvait s’avérer mortel d’où je venais. Il fallait choisir son camp. Si j’aurais tout fait pour préserver Érasme, il était l’une des rares exceptions à Nementa Corum. L'une des rares exceptions tout court. Je ne connaissais pas ce garçon, ni même la fille qui était attachée à lui. Je ne leur dois rien, pensai-je en refusant toute intervention en bloc. Je pivotai vers la porte pour tenter de nous libérer. Je n’avais sur moi aucun outil et n’arrivai à rien, à l’image de la fille qui avait parlé de trouver un outil pour nous libérer. « Sinon il faudra détruire le mur. » J’avais lu un livre dans lequel une porte avait été enchantée par un Mage pour enfermer quelqu’un. Par chance, celui-ci avait oublié de faire de même avec les murs. Le héros avait réussi à fuir en détruisant l’un d’eux. « De toute façon, ils ne veulent certainement pas tous nous pétrifier. Il y a des étudiants importants parmi nous. Ce serait du suicide. » me rassurai-je. Nos parents allaient intervenir s’il nous arrivait quelque chose.

488 mots