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 | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas |

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Seiji Nao
~ Orine ~ Niveau I ~

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Seiji Nao
Mer 31 Mai 2023, 11:51

| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 9 Wpw2
Image : Artiste inconnu
Les Portes : L'arrivée à Narfas

Seiji dans le rôle de Wesphaline De Narfas:


L’animosité affichée de Garance et la froideur polie de Lambert ne parvinrent pas à tirer la souveraine de ses réflexions. Bien entendu, la tension de la première rencontre risquait de les amener à prendre des décisions inconsidérées ; toutefois, elle n’y prêtait que peu d’attention. L’esprit en avant, la réunion ne tenait déjà plus que du souvenir. Une intuition palpitait dans sa poitrine, entre l’excitation et la nausée : le moment était venu. En réponse, une agitation minutieuse déferlait sur ses méninges, la rendant sourde aux bruits du monde. Ce fut la voix de Jésabelle qui l’en tira.

« Tu as raison. Mais ce n’est pas surprenant. Les femmes sont toujours plus dangereuses que les hommes. »

Gratifiant sa sœur d’un regard entendu, elle acquiesça à sa remarque suivante. Comme le sel qui saturerait un verre d’eau et masquerait sa véritable nature, noyer le poisson sous des clauses nombreuses et rivalisant d’absurdité lui semblait une excellente idée. Il suffirait d’invoquer la religion pour justifier les plus excentriques. Consciente qu’édulcorer le traité ne plairait pas au Grand-Prêtre, elle jugea bon de rappeler que les écrits ne constituaient qu’un versant de la colline.

« Il ne sert à rien de traumatiser ces jeunes femmes plus qu’elles ne le sont déjà. Plutôt que d’écrire noir sur blanc les conditions susceptibles de susciter un refus, passons sous silence certaines pratiques. Permettons déjà aux femmes enceintes de conserver leur progéniture. Et lorsque les enfants naîtront, s’il y a des filles, nous devrions pouvoir en échanger quelques-unes avec les garçons nouveau-nés de nos sujets. Bien sûr, il faudrait se limiter en nombre, pour ne pas éveiller les soupçons. »

Se tournant vers la blonde, elle lui accorda un sourire sensiblement plus chaleureux que tous ceux esquissés jusque-là, un sourire qui ne devait rien à la politique mais tout à l’affection qu’elle lui portait. Du moins, en apparence.

« Tu as toute ma confiance, Jésabelle. Je souhaite seulement que l’accord, dès qu’il sera accepté, soit rendu public, et affiché partout. Que personne n’ignore la générosité de la royauté et de l’église. »

Que personne n’ignorât que l’une comme l’autre se montraient plus douces et conciliantes avec les étrangers qu’avec les siens. Il suffisait d’un rien pour embraser une forêt : Wesphaline comptait bien semer une pluie d’étincelles dans le royaume.

« Adoucis le texte de sorte à ce qu’ils ne puissent que l’accepter. Les lois sont loin d’être le seul moyen de parvenir à nos fins. Plus nous serons généreux, plus ils devront l’être en retour. »

Il existait, aux yeux de la Violette, des réactions universelles : quiconque recevait un verre d’eau après avoir connu trop longtemps le soleil du désert découvrait en lui une reconnaissance si brûlante que son envie de rendre la pareille s’en trouvait naturellement décuplée. Cependant, la nature humaine ne se manœuvrait pas aussi froidement que la logique ; c'était là tout l'intérêt d'occuper sa position.

~ . ~

La réunion achevée, chacun retourna à ses petites occupations. Malgré l’envie pressante de retrouver son fils et d’écouter le fabuleux récit de ses aventures auprès des réfugiés, elle parcourut les couloirs à la recherche d’un homme qu’elle avait nettement moins envie de serrer dans ses bras.  

« Grand-Prêtre, puis-je me permettre de prendre un peu de votre temps ? »

Se portant à sa hauteur, elle fit quelques pas à ses côtés, ralentissant le rythme pour ne pas arriver trop vite à la porte qui les séparerait. La mine soucieuse, elle lui confia ses royaux tracas.

« Vous n’êtes pas sans savoir que l’arrivée des réfugiés, au-delà des négociations qu’elle soulève, questionne le peuple. Je crains que leur dévotion n’en souffre. »

Se gardant bien de mentionner l’état de la sienne, elle cessa de marcher, tournant la tête vers le plafond, et vers l’horrible figure qui siégeait au-dessus.

« Quand les temps sont durs, c’est vers le Très-Haut que se lèvent les regards. Je crois qu’il serait bon d’organiser un discours ou une cérémonie pour raviver la foi des nôtres, que vous mèneriez vous-même. Sa Majesté pourrait se joindre à vous. »

Se hissant sur la pointe des pieds pour atteindre l’oreille de l’Ecclésiastique, sa langue de serpent s’enveloppa de miel pour une confidence des plus indécentes.

« Pour une mission d’une telle importance, je ne peux compter que sur vous. »

En présence de tout autre homme, la souveraine aurait probablement accompagné sa confession d’un clin d’œil d’une complicité coupable. Toutefois, elle conserva un visage impassible. Les hommes d’Eglise montraient un penchant prononcé pour la sévérité et les expressions solennelles.

« Pour le contenu… Je fais confiance à votre sagesse. Vous trouvez toujours les bons mots. »

Achevant leur conversation par un hochement de tête décidé, elle reprit son chemin, disparaissant dans les ombres du couloir.

~ . ~

Parvenue à ses appartements, la souveraine congédia vigoureusement ses servants, prétextant une migraine, et demanda à l’un d’eux un linge frais et une bassine. En réalité, elle ne souffrait de rien, à l’exception d’une pointe d’agacement que la vision de son époux ravivait chaque fois, comme une plaie refusant de cicatriser. Il s’agissait d’un subterfuge dont elle se servait de temps en temps ; ledit serviteur, enfant des rues, lui servait tour à tour de messager et d’espion. Par sa bouche, elle entendait les pensées du peuple, celles trop violentes ou trop hérétiques pour être proférées en public, et, par les mêmes lèvres, elle faisait courir un florilège de rumeurs. À peine eût-il franchi la porte qu’elle l’informa de ses projets.

« Je veux que tu portes un message à Garance de Lieugro et Lambert d'Eruxul. »

La stratégie de Wesphaline reposait sur des mécaniques aussi simples que subtiles. Pour mener à bien ses objectifs, il lui fallait manœuvrer à mi-chemin entre la prudence et l’audace. Sa position, hélas, ne lui permettait pas de se montrer trop hardie ; elle n’ignorait pas que dans l’ombre, certains nourrissaient de noirs desseins à son encontre. C’était le lot de toutes les têtes couronnées.

« J’aimerais aussi que tu fasses courir une rumeur auprès du peuple : les femmes de Lieugro n’auront aucune obligation natale, et garderont leurs enfants pour elles, si elles en ont. »

Si le racontar ne s’avérerait pas, les négociations offriraient à ces dernières une situation bien plus enviable qu’à leurs sœurs de Narfas. Simples réfugiées mieux traitées que le peuple dont elles jouissaient de l’hospitalité, elles attiseraient la colère. Suffisamment pour déclencher un brasier. Les initiatives de Gaspard _ et d’autres évènements innocents dont elle se réservait le secret _ ne feraient que jeter de l’huile sur le feu.

Un plan parfait, ponctué de petits riens. En théorie. D’un air distrait, la Reine s’épongea le front, consciente que rien ne se passait jamais comme prévu. C'était plus fort qu'elle : l'inconnu et le danger la faisaient jubiler.

~ . ~

Drapé dans la tenue du parfait gamin des rues, Landéis se rendit d'abord dans une taverne où les on-dits se propageaient plus vite que la syphilis dans une maison close. Sa première mission remplie, il rejoignit les réfugiés, clamant qu'il portait un message, refusant de dévoiler son employeur. On lui refusa d’abord l’entrée. Toutefois, à force de douceur et de patience _ et lorsque sa maladresse factice démontra qu’il ne représentait pas un danger _, il obtint ce qu’il était venu chercher. Se présentant devant Garance et Lambert, il s’inclina presque jusqu’au sol.

« La Reine vous informe que vous n’aurez pas à respecter l’accord. Elle se débrouillera pour le rendre invalide d’une façon ou d’une autre. Il faudra seulement que vous donniez le change quelque temps, en respectant les... Clauses farfelues. Elle a dit quelque chose à propos de femmes enceintes qui devront porter du rouge, je crois. Elle regrette la discussion de tout à l’heure, mais elle se doit de suivre les volontés du Roi. Il n’est pas si bête qu’il en a l’air. »

Dans ses mots se mêlaient la bonne volonté d’un garçon qui cherche à se rappeler les termes qu’on lui a soufflés, et la gravité de celui qui a conscience qu’il vaut mieux ne pas échouer. Landéis vouait à Wesphaline une loyauté sans faille, et une certaine admiration. Non contente de l’avoir tiré de sa misère, elle se montrait bien plus généreuse avec lui que ne l’exigeaient les circonstances. En outre, elle représentait le meilleur moyen d’échapper à sa condition d’homme.

« Elle m’a envoyé pour vous assurer que vous êtes les bienvenus à Narfas, et qu’elle ne tolèrera pas que le Grand-Prêtre profite de votre situation. Elle a marmonné quelque chose comme « Les miens souffrent déjà assez de ses délires ». »

La perplexité sur les traits, il secoua la tête, comme si sa mémoire, lui jouant un vilain tour, le rendait incertain des paroles qu’elle avait prononcées. Pas le moins du monde impressionné par les gens auxquels il s’adressait, il se frappa soudain le front, se tournant vers Lambert.

« Oh, j’allais oublier ! Elle a dit qu’elle voulait vous voir dès que possible, monsieur, pour discuter de vous savez-quoi. »

Depuis son perchoir céleste, le Très-Haut devait certainement se goinfrer de pop-corn.

1 472 mots

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Priam & Freyja
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Priam & Freyja
Mer 31 Mai 2023, 23:40



Unknown

Les Portes – Chapitre V

En groupe | Dastan


Rôle :


De l’avis de Ludoric, la lionne ressemblait plus à un roquet mal peigné. La moindre contrariété constituait un prétexte pour beugler plus fort que cela était permis et pour trépigner jusqu’à devenir une petite boule de nerfs plus irritante que pertinente. « C’est sûr. » répondit le roux, le regard rivé sur Zébella et l’aura enragée qui l’entourait. En aurait-elle été capable ? Sans doute. Les Uobmab n’étaient pas connus pour leur tempérance, et le comportement de la bleue ne laissait pas présager qu’elle en possédât ne serait-ce qu’une goutte. Son frère était fait du même bois. « Comme si on était responsables de ce qui t’arrive. C’est toi qui as fait la maline à vouloir sortir en pleine tempête alors que tu ne sais pas tenir à cheval. Si je n’avais pas été là, tu te serais sans doute pris un arbre sur la tête et on n’aurait plus jamais entendu parler de toi. » soupira-t-il, en trempant une main dans l’eau, l’autre toujours en appui sur le rebord. La mauvaise foi de Zébella était usante. Non. Elle était usante tout court, dans son intégralité. « Quoi ? » Sa tête pivota vers Clémentin, une expression incertaine plaquée dessus. Ses yeux bronze parcoururent son visage avec la volonté de le décrypter. Son sourire espiègle encouragea les délires de son cœur, et le fit battre un peu plus fort. « Je dois déjà surveiller Zébella. » répondit-il, embarrassé. Il détourna le regard, puis se projeta en arrière, désireux de fondre sa gêne dans l’eau claire du bassin. Le roux s’immergea. Dans le silence assourdissant, il n’entendit pas le brun se jeter sur la Princesse. Le calme l’entourait, et dans son immensité, son trouble se dissipait.

Lorsqu’il revint à la surface, il eut juste le temps de placer ses mains devant sa figure pour éviter d’être aspergé par les éclaboussures provoquées par le saut du brun, les bras chargés de l’odieux paquet. La manœuvre le fit sourire ; son amusement s’épanouit d’autant plus quand le visage recouvert de cheveux bleus de Zébella s’extirpa de l’eau et que le rire de Clémentin résonna. Il avait un rire agréable, léger et franc, joyeux comme un chant d’oiseau. Pas étonnant que Rosette fût tombée amoureuse. La pensée de la rousse le renfrogna autant qu’elle le rassura. À chaque fois qu’il posait les yeux sur lui, il craignait de devenir comme son père. De ne jurer que par l’appel de la chair. De trahir l’être aimé. C’était une peur irrationnelle, infondée ; parce qu’il aimait trop Placide pour lui planter ce couteau dans le dos. Cette attirance n’était qu’une épreuve ; elle ébranlait les fondations pour tester leur solidité. Il n’éprouvait aucun doute sur la force de son amour et sa volonté d’être aux côtés du blond. Il était amoureux de lui depuis des années, et il s’imaginait à ses côtés pour des siècles encore. Il retourna près du rebord et replaça ses bras dessus.

Ses iris se posèrent sur Clémentin. Avoir envisagé de tuer Merlin était-il courageux ou sombrement stupide ? Peut-être qu’il y avait toujours un peu de stupidité dans le courage, ou au moins un peu de folie, et peut-être que c’était admirable pour cela, pour cette déchéance si risquée de la suprématie de la raison. Son regard descendit malgré lui de ses yeux à ses lèvres, et de ses lèvres à son torse. Sentant le rouge lui monter aux joues, il se détourna, et appuya solidement son menton sur ses avant-bras joints. Il n’était pas question de retourner à Lieugro. C’était trop tard, désormais, et quand bien mêm- « Woh ! » Déstabilisé, Ludoric dut prendre appui sur ses mains pour se rééquilibrer. Son cœur, lui, s’écrasa lamentablement sur le rebord du bassin, éclaté par la profusion de sang bouillonnant soudainement dans ses veines. Instinctivement, ses mains quittèrent le muret pour se refermer sur ses cuisses. La brûlure n’en fut que plus cuisante. La peau du bâtard était maudite ; mais le pire, le pire, ce fut lorsque son odeur embrasa ses narines. Elle remonta dans sa trachée et enflamma ses poumons déjà asphyxiés. Lentement, elle infusa dans tout son corps. Le soldat veilla à demeurer bien près du muret qui délimitait le point d’eau, inquiet des réactions naturelles qu’une telle proximité pût provoquer. Son anxiété était si haute qu’il doutait de pouvoir éprouver quoi que ce fût, mais la crainte lui labourait trop le ventre pour qu’il se révélât capable de l’écarter. Rendu aussi muet et désuet qu’une carpe, il lui fallut quelques secondes avant de réaliser que Clémentin s’adressait à lui. « Placide ? » Le rouge lui monta aux joues. « Je n’en sais rien… Oui, sans doute. Il voudrait venir avec moi. » balbutia-t-il, avant de lancer à la bleue, avec plus d’aplomb : « Hé. » Il aurait bien aimé lui envoyer une réplique acerbe pour défendre le blond, mais sur le moment, rien ne lui vint. Clémentin ne l’aidait pas à réfléchir. « Arrête de raconter des conneries. » Sourcils froncés, il la fixait. Depuis qu’ils étaient partis de Lieugro et qu’il fréquentait plus de soldats que de nobles, son vocabulaire s’était enjolivé de mots fleuris. Le récit de la d’Uobmab était perturbant. Il l’avait déjà entendu une fois ; l’entendre le répéter accentuait son trouble. Disait-elle la vérité ? « De toi ou ton frère, il y en a aussi un qui n’est pas le véritable enfant de Judas, et pourtant vous prétendez tous les deux au trône. » Ou avez prétendu, apparemment. Il n’allait pas la plaindre. « De toute façon, l’ascendance de Placide n’a aucune importance. Qu’il soit le fils biologique de Montarville ou non, il a été élevé comme tel, et surtout, il a été éduqué pour devenir roi. Et puis il n’y a plus ni Adolestine ni Coline pour assurer la succession. Il est le seul héritier légitime connu. » Il mentait. Si Alembert disposait de peu de crédibilité – il n’était que le fils de la sœur du Roi –, Clémentin avait pour lui les faveurs du sang. Elle n’avait pas besoin de le savoir. Il jeta un coup d’œil à la soldate qui les surveillait. Elle non plus. Il valait mieux que le maximum de gens demeurassent ignorants, tant pour l’ascension de Placide que pour la sécurité de Clémentin.



Le cri de Zébella lui fendit le cœur. La détresse qui y perçait était douloureuse. En tant qu’homme et en tant qu’homosexuel, il ne serait jamais confronté à ce problème. Il n’aurait jamais à affronter le regard d’une femme porteuse d’une grossesse indésirée. Durant une fraction de seconde, il fut presque soulagé pour Déodatus que celui-ci eût déjà été tué. S’il avait encore été en vie, la bleue lui aurait sans aucun doute fait subir les pires des tourments. Il les aurait très certainement mérités, eu égard au contexte de la conception de l’enfant, mais cela ne les rendait pas moins répugnants. Le roux déglutit, peu à l’aise face aux larmes de la jeune fille. Il détourna le regard un instant, puis s’approcha. « Excusez-moi. » dit-il à l’intention de la docteure, le plus poliment possible. Il avait lui aussi subi un examen, mais bien moins intrusif. « À qui faut-il s’adresser, dans de tels cas ? » - « Je vais faire remonter l’information et je vous tiendrai au courant. » Ludoric fronça les sourcils. « La Princesse préfère peut-être que cela reste confidentiel. » - « Je comprends, malheureusement, je suis chargée d’écrire un compte-rendu détaillé. Il n’est destiné qu’à un cercle restreint. » Elle se leva et posa une main pleine de sollicitude sur l’épaule de la d’Uobmab. « Ne vous en faites pas. On fera ce qu’il faut. » Le soldat la regarder s’éloigner, les yeux plissés. Dès que la porte se referma, il focalisa son attention sur Zébella. « … ça va ? » Non, évidemment. Il se racla la gorge. « Melchior… Il a plein de plantes, pour ses thés. Il y en a bien une qui… Enfin, on pourra regarder, si tu veux. » proposa-t-il, d’une voix douce. Malgré tout l’agacement qu’elle avait récemment attisé en lui, à cet instant, elle lui faisait de la peine. Il n’aurait pas supporté d’être à sa place, enceinte de l’homme qui l’avait violée. « Tu- » On frappa à la porte. « Entrez. » La silhouette d’une militaire se découpa dans l’embrasure. Elle les salua tous les deux, puis s’avança. « Dame Jésabelle de Narfas m’envoie. Elle souhaite vous rencontrer. » apprit-elle à Zébella. Comme ni l’un ni l’autre ne bougeait, elle insista : « Maintenant. » - « J’assure la garde de la Princesse. Je dois l’accompagner. » - « Ce ne sera pas nécessaire. La sœur de la Reine souhaite la voir seule à seule. » Sans être tranchant, le ton était ferme. Ludoric toisa la soldate, qui lui rendit son regard. S’il persévérait, il risquait de créer un incident diplomatique. « Très bien. Envoyez-moi chercher dès que l’entrevue sera terminée, s’il vous plaît. » Comme son vis-à-vis acquiesçait, il la laissa s’en aller avec sa prisonnière. Après ce qu’elle venait de vivre, il espérait que la de Narfas ne la malmènerait pas trop. Dès qu’elles furent sorties, il poussa un long soupir, puis se passa une main dans les cheveux. Son stress retombait d’un coup. Sans Zébella, il était libre de ses faits et gestes. Après une brève pensée pour Clémentin qui ne se trouvait probablement plus dans les bains, il décida de partir à la recherche de Placide. Il avait envie de le serrer contre lui, pour oublier ses tourments d’adolescent.



Message VII – 1599 mots




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Priam & Freyja
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Priam & Freyja
Jeu 01 Juin 2023, 21:40




Les Portes – Chapitre V

En groupe | Yngvild


Rôle :


La réponse d’Anthonius surprit Rosette. Derrière ses airs enfantins se cachait un esprit étonnamment ferme. Elle ne s’était pas attendue à ce qu’il s’exprimât avec autant de clarté et de conviction. Il avait déjà l’air certain de ce que devait être un souverain. Elle adhérait en partie à sa vision, à la nécessité d’agir pour le bien du plus grand nombre ; mais elle récusait sa conception désindividualisée et si ordonnée de la nation. Les requêtes des uns et des autres devaient être entendues, prises en compte, parfois même servir de supports à des réflexions approfondies ; il ne fallait pas mépriser l’individu, au risque de perdre l’adhésion du collectif. Si on négligeait les aspirations et les ambitions de tout un chacun, alors on creusait le terreau propice à une révolte. Écouter n’avait pas pour but de rendre sympathique, mais d’instaurer un climat de confiance et de reconnaissance mutuelle. Elle se figurait que, dans un tel contexte, débusquer les traîtres était peut-être plus simple. La rousse pinça les lèvres, incertaine. Elle s’était souvent intéressée au travail de son père, mais toujours de loin. Elle se promit qu’à l’avenir, elle l’interrogerait, l’écouterait et le regarderait agir avec plus de minutie. L’idée de voir son paternel, cependant, lui crispa le ventre. En imaginant ses iris céruléen posés sur elle, stupéfaits, scrutateurs et déçus, un frisson glacé dévala son dos. L’adolescente peinait à réaliser et au fond, elle espérait que le médecin se fût trompé. Avait-elle rêvé ce moment ? Ses prunelles voltigèrent jusqu’à Adolphe. Il ne lui semblait pas. Et ce garçon savait. Bien qu’il eût demandé au docteur de ne rien divulguer, il pouvait choisir de ne pas l’imiter, et répandre la nouvelle parmi le convoi de Lieugro et les nobles de Narfas. Le déshonneur s’abattrait sur elle, et sur son père. Certes, il avait eu un fils avant le mariage, mais c’était différent. Il n’avait jamais rien su de son existence jusqu’à récemment. Et c’était un homme – cela changeait tout. On ne leur disait jamais rien ; on les encensait pour leurs conquêtes, on les encourageait à séduire et à charmer, on ne les accusait de rien. Ils vivaient l’insouciance ; celles qui payaient le tribut de leurs folies communes, c’étaient les femmes. La jeune fille voyait là une injustice, mais elle n’était pas certaine de détenir les clefs pour s’en insurger de manière convaincante. Elle serra les dents, les bras croisés sur sa poitrine.

Elle ne les dénoua et ne se raccrocha à la conversation que lorsque Placide s’approcha suffisamment pour lui prendre la main. Ses lèvres formèrent un sourire hésitant. Une part d’elle se réjouissait qu’il fût si déterminé à reconquérir Lieugro ; l’autre s’inquiétait. Que ferait-il de Clémentin ? Le considérait-il comme un nuisible ? Un imposteur dont il devait se débarrasser ? S’il devenait Roi, lui refuserait-il la possibilité de vivre à la cour ? Le repousserait-il dans la fange populaire ? Était-elle amourachée – et enceinte – d’un homme à qui l’on fermerait toutes les portes ? Qu’avait-elle cru, quand elle était tombée dans ses bras ? Il n’était, à l’époque, qu’un palefrenier – elle se jetait dans une histoire vouée à mourir, à laquelle elle voulait croire parce que la jeunesse avait la vigueur et la virulence nécessaires à toutes les révolutions, parce que les poèmes de Clémentin avaient, des mois durant, enflammés son cœur d’une douce torpeur. Ce n’était que quelques temps plus tôt la possibilité que le brun devînt Roi l’avait effleurée. Elle était convaincue que, par certains côtés, il ferait un bon souverain ; mais elle était aussi persuadée qu’il ne désirait pas ce titre et les responsabilités qui lui incombaient. Avec un enfant au creux du ventre, les perspectives d’avenir s’avéraient encore plus angoissantes. L’adolescente tenta de masquer son trouble, avant de répondre : « Je vous remercie pour l’éloge, je ne sais si je la mérite. » Considérant son attitude à risque, probablement pas. Elle n’avait rien d’une sage. « Je serai ravie de vous apporter mon aide, en temps voulu. » Hormis l’ancien palefrenier, seul Alembert pouvait prétendre lui faire de l’ombre. En tant que neveu de Montarville, après ses enfants, il était l’héritier direct. Elle lui jeta un coup d’œil. Oserait-il réclamer le trône ? S’il nourrissait autant d’ambitions que sa mère, sans doute. « Oui, c’est une bonne idée. » L’envie d’y participer lui faisait défaut. Abandonner Anthonius et tous les autres pour rejoindre Clémentin en toute hâte aurait été particulièrement mal venu. À l’inverse d’Adolphe, elle n’avait aucune raison valable de prendre congé. Pourtant, c’était ce qu’elle mourait d’envie de faire. Les adultes n’avaient pas l’apanage de la maîtrise de leur destin. Ils avaient chacun un rôle à y jouer, et elle comptait bien s’investir dans le sien. Retrouver Clémentin. Lui annoncer la nouvelle. Aviser. Dans sa poitrine, son cœur battait un rythme aussi affolé que déterminé. À la question de Placide, elle se concentra sur le Prince de Narfas. « Quitte à jouer, autant être nombreux. » abonda-t-elle. Pivotant vers le soldat, elle ajouta : « Votre invitation est adorable. Nous essaierons de vous rejoindre tous ensemble ce soir, avec Ludoric. Je suis certaine qu’il sera ravi de rencontrer d’autres militaires. » Elle coula un regard vers le Prince de Lieugro, avant de basculer vers leur hôte. « Peut-être pourrions-nous aller chercher Ludoric et Clémentin nous-mêmes, et en profiter pour visiter un peu votre cité ? Ils ne doivent pas être très loin, et je suis curieuse de la découvrir. » Et terriblement impatiente de retrouver le brun, à mesure que les secondes s’écoulaient. D’ici quelques minutes, elle redouterait le face à face et, quand viendrait le moment d’avouer son secret, elle regretterait de l’avoir rejoint.



Message VII – 949 mots




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Zeryel
~ Ange ~ Niveau I ~

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Zeryel
Ven 02 Juin 2023, 12:53

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Les Portes V - L'arrivée à Narfas
Lorcán, dans le rôle d'Ivanhoë




Rôle - Ivanhoë Emmog:

Primaël ne se trompait pas. La vie avait tout d'une pièce de théâtre quand on la vivait avec l'intensité que les deux hommes embrassaient. Avec de tels enjeux, la réussite les porteraient aux nues tandis que l'échec les projetterait au sol sans pitié mais Ivanhoë ne laissait jamais le doute le ralentir : ils étaient trop excellents acteurs. En virtuoses accomplis, ils se mouvaient d'un acte à un autre avec la finesse d'un duo rôdé et complémentaire. Le magnétisme de son amant aspirait à lui toutes les lumières et personne n'avait jamais su percer le voile des déguisements du roux quand il endossait la peau d'une femme. Si tragédie il devait y avoir, ce serait pour les autres.

Ivanhoë n'allait pas mentir. Il avait perçu l'étincelle de panique dans les yeux du bleu quand il l'avait privé de son oxygène, et il en avait tiré une jouissance qui avait exacerbé celle naissant de leurs corps imbriqués. Il ne prenait pourtant aucun plaisir à tuer quand cela arrivait, mais savoir que la vie et la mort dansait juste au bout de ses doigts selon son bon vouloir aurait intoxiqué n'importe qui. Souvent, savoir qu'on était capable de quelque chose suffisait pour passer à l'acte. C'était se retenir d'agir qui était difficile. « Ne t'inquiètes pas. Si quelqu'un doit prendre le rôle de la Reine, ce sera moi. » Souffla-t-il. « Sois prudent quand tu parleras à Tamara. Je me méfie de son impulsivité, et faire entrer son fils dans l'équation est à double tranchant. Je ne souhaite pas apprendre qu'elle t'a démembré. Je serais obligé ensuite de la tuer et je ne suis pas certain que mes compétences surpassent ce monstre. Or, je n'ai pas envie de mourir, pas plus que je n'ai envie de continuer tout ça sans toi. » Il le ferait, mais sans l'esprit affûté de Primaël, il perdrait son gouvernail et qui savait où le vent le mènerai alors ? Et leur révolution, même si elle réussissait, aurait moins de saveur en solitaire.

Délicatement, il se souleva et se releva ensuite avec l'aide du bleu. Une légère pointe de culpabilité fouaillait ses entrailles. Ses doigts se refermèrent doucement sur les siens. « Excuse-moi. Je n'allais pas te tuer. » Tout simplement parce qu'il ne prévenait jamais avant de frapper. Alarmer la victime était inutile, voire compliquait les choses. L'enfant du spectacle appréciait naturellement les mises en scène, mais l'efficacité demeurait sa meilleure compagne pour mener à bien ses funèbres besognes. « Je n'ai pas de raison de le faire. Quel gâchis ce serait. » Assis sur le canapé, un demi-sourire taquin crochetant les commissures de ses lèvres, il accueillit avec plaisir le contact renoué. Ses mains repartirent à l'assaut de son corps, avec douceur pour lui faire oublier les menaces dont elles avaient été porteuses plus tôt mais ce fut une tierce personne qui décida de les interrompre. Avec un râle agacé, Ivanhoë renversa la tête en arrière. Ses dents attrapèrent sa lèvre inférieure alors qu'il réfléchissait aux arguments glissés entre deux soupirs. Lieugro en alliés était un pari risqué. Valaient-ils mieux que Narfas ? Les nobles étaient tous taillés dans le même bois. On les berçait de leur importance depuis l'enfance, ils n'étaient dignes de confiance que dans la mort. Il comprenait pourtant son raisonnement puisque c'est parmi eux que tout le talent de Primaël s'exprimait. Ils cédaient tous à son charme sans savoir qu'il n'avait de noble que l'âme, mais ses racines, elles, étaient ancrées profondément dans la boue des bas-fonds.

« Excellent. Espérons que leurs egos continuent de ralentir leur coalition. Idéalement, s'ils pouvaient même s'entretuer, nous n'aurions plus qu'à balayer les restes ensuite. » Attiser leurs désaccords pour mieux les monter les uns contre les autres. Initier un contact avec Lieugro devenait nécessaire. « Je m'en occupe. » Il savait déjà comment approcher la Régente ou n'importe qui évoluant autour d'elle. « Je peux t'emprunter un de tes jeux de tarot ? » Il avait appris à dire la bonne aventure au contact d'une prétendue voyante travaillant au cirque. Attiré par le mystère, le public raffolait de cette pratique et il savait pouvoir pénétrer au palais aisément sous cette couverture. À la cour, ils craignaient tous l'infidélité ou aspiraient au pouvoir. En échange de brumeux conseils, il se ferait introduire et parviendrait jusqu'aux réfugiés.

« Pour moi ? » Haussant un sourcil, Ivanhoë s'apprêtait à déplier le papier mais se figea à la révélation de Primaël. « Tu - » La gorge nouée par l'émotion, il se tut et le papier trembla dans sa main. Il ne s'était pas aperçu immédiatement de la disparition de sa mère, habitué à ce qu'elle vaque à ses occupations et lui aux siennes. Un léger malaise teintait souvent leurs retrouvailles, ce qui les rendaient de plus en plus éparses. Le cirque avait comblé les gouffres laissés par ses absences et avec le temps, il avait forgé des liens plus forts avec les autres artistes qu'avec elle pour qui il avait le sentiment d'être un fardeau dont elle se serait bien délesté. Cependant, trop de mois s'étaient écoulés depuis la dernière fois qu'il l'avait vue et quand certains de ses amis l'avaient approché pour l'interroger en ne la voyant plus, l'inquiétude avait commencé à germer dans son coeur. Même s'ils n'entretenaient pas la plus tendre des relations, elle l'aurait prévenu avant de partir vers une nouvelle vie qui lui sourirait davantage.

Dans un silence tendu, il déplia le papier et parcourut les informations brèves y étant griffonnées. Sa bouche s'assécha et les mots dansèrent devant ses pupilles troublées. « De Tuorp. » Souffla-t-il. Ses sourcils se froncèrent. L'individu portant ce nom parmi les réfugiés n'était pas Gustave. Il avait peu d'informations sur Ludoric, sinon qu'il s'agissait d'un jeune soldat. Les questions foisonnaient dans sa tête comme des mauvaises herbes, trop de questions, trop d'un coup. Il se dressa d'un bond comme si un coup de fouet avait claqué près de lui. Sans regarder le bleu, à gestes saccadés, il s'habilla. « Il faut qu'il soit à la soirée. » S'entendit-il dire. « Il faut que je lui parle. » Il avait un frère. Il pouvait remonter jusqu'à son père et enfin mettre des couleurs sur le portrait de l'inconnu qu'il n'avait pu qu'imaginer. Sa mère refusant catégoriquement d'en parler avait généré une immense frustration qui avait perduré jusqu'à aujourd'hui. Comme beaucoup d'autres choses, il s'en était confié à Primaël sans se douter qu'il irait mener ses propres recherches. Il fit volte-face pour le regarder. « Tu n'avais pas à faire ça. Pourquoi ? » Il fut le premier surpris de la froideur dans sa voix. « Merci. » Ajouta-t-il avec retard. « Tu m'as pris de court. Je ne pensais pas que tu chercherais ça. » L'amertume se diffusait en lui. Il lui semblait que le joueur lui avait coupé l'herbe sous le pied en prenant des initiatives qu'il ne lui avait pas demandé. C'était son sang, son père, il aurait aimé être celui qui découvrirait la vérité. Pourquoi Primaël avait-il toujours un coup d'avance, dans tous les domaines ? Il termina de nouer son pantalon. « Tu vas parler à Tamara alors ? Je vais passer chez moi me changer et inviter les réfugiés à notre petite fête. » Il avait besoin de changer de sujet, de se raccrocher à ce sur quoi ils étaient toujours d'accord, de se retrouver seul, le temps de digérer la nouvelle.

Message III | 1307 mots


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Kyra Lemingway
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Kyra Lemingway
Ven 02 Juin 2023, 17:48


Les Portes V

Pénélope appliqua un pinceau fin dans le pot de rouge et en couvrit avec soin ses lèvres. Suite à l'altercation avec la soldate et les migrants de Lieugro, elle avait préféré quitter les lieux pour rejoindre une amie de longue date, elle aussi enlevée à un autre royaume dans la même période que la d'Esirec. Une des rares qui n'avaient pas fini dans les mêmes draps que Gao également. À son retour chez elle, quelques heures plus tard, elle avait découvert que les jumeaux avaient décidé de laisser l'habitation aux mains des étrangers et la laisser seule avec eux. Alors, en lisant le message d'Adolphe, elle n'avait pas réfléchi trop longtemps. Plutôt un tête-à-tête avec ce garçon plutôt que demeurer ici au milieu de ces envahisseurs. Mais, au-delà d'un rendez-vous, la raison pour laquelle elle s'apprêtait ainsi était bien plus personnelle. Fiancée jeune et dès son arrivée sur les terres de Narfas, elle n'avait eu que bien peu d'occasions de vivre ce genre d'événement, et ce n'était pas Gao qui allait lui faire cet honneur. À l'heure actuelle, il devait déjà être en train de sauter une de ces putes au sang bleu. Cette simple pensée eut l'effet négatif d'enserrer son estomac d'un lien imbibé de colère. Avec une lenteur mesurée, elle reposa le pinceau comme elle se pinçait les lèvres. Puis, avec un mouchoir, elle estompa le surplus de maquillage avant le délaisser sur le côté, puis se saisir de la flasque de khôl. D'un trait noir, elle souligna son regard avant de se fixer dans la glace. Elle n'avait jamais vraiment aimé ses yeux et sa bouche. On distinguait à peine ses iris de ses prunelles. Quant à ses lèvres, elles étaient bien trop sombres. Elle avait l'impression de n'être qu'une façade fade et sans reliefs avec sa peau noire, sa chevelure de jais et son regard d'ébène. Elle enviait les lippes rosées qui ressortaient sur la peau blanche et les iris colorés qui attiraient irrémédiablement l'oeil. Elle exhala un soupir désespéré avant de se redonner contenance devant son reflet pour finir ses préparatifs en un peu de parfum dans le cou et au creux du poignet. Après une courte hésitation, elle en imprégna également le mouchoir qu'elle abrita contre son cœur. Enfin elle quitta la coiffeuse et attrapa un voile qu'elle posa sur ses épaules en même temps qu'elle dépassa une domestique. « Si mes frères vous demandent où– ». Face à la demoiselle, Pénélope marqua un temps. « Non. Oubliez ça. C'est inutile. ». La remarque avait claqué avec le fouet de sa rancœur. Jamais Gao ne s'en souciera. Quant à Melchior, elle serait étonnée s'il interrogeait le personnel à ce sujet malgré ses sentiments. « Et pour les réfugiés ? » - « L'armée est là pour s'occuper d'eux. Et je ne vais pas m'empêcher de vivre à cause de ces gens. » grogna l'enlevée avant de quitter les lieux.

La brune avait décidé de marcher ce soir-là. L'air était agréable et le restaurant non loin. Songeant au rendez-vous, elle esquissa un sourire amusé. Adolphe n'était plus tout à fait un enfant, mais pas encore un adulte. Un âge où la raison hibernait pour laisser les commandes aux hormones. Demeurait que l'initiative qu'il eut prise était étonnante pour son âge. Là était une raison supplémentaire l'ayant décidée à accepter son invitation. Elle voulait savoir ce qu'elle valait pour l'adolescent, pour qu'elle raison il avait mis les formes pour échanger avec elle. Elle avait toutefois une première idée de cela. Après tout, en s'engageant dans l'armée, il faisait irrémédiablement une croix sur une vie parentale. Lorsqu'elle se présenta au restaurant, on la mena à une table où le jeune soldat l'attendait déjà, ce dernier faisant preuve d'une galanterie que l'on ne voyait que peu à son âge. En remerciement, elle lui sourit. « Mes... Frères ont vaqué à leurs propres affaires sans avoir jugé nécessaire de m'entretenir à ce sujet ni de s'inquiéter de quelle façon j'allais passer ma soirée. ». Elle marqua une courte pause, le temps d'avaler une gorgée. « De toute façon, s'il en ait un qui devait s'inquiéter, ce ne sera pas Gao. » ajouta-t-elle, amère, avant de mordre à son tour dans une chips de légumes, dévoilant malgré elle une grimace à la mention des immigrés. Ne pouvait-elle pas passer un moment sans qu'il ne soit question d'eux ? Son irritation disparut cependant bien vite, remplacée par la surprise en entendant la proposition du garçon. Difficilement, elle retint un rire qui s'exprima tout de même par un large sourire qu'elle masqua derrière une serviette. C'était donc bien ça. Certaines choses sont si prévisibles concernant le sexe opposé. Elle n'avait cependant pas songé qu'il se montrerait si audacieux. L'éducation de Tamara devait y être pour beaucoup. Elle n'avait pas vraiment la réputation d'être un modèle de chasteté. Pénélope ne répondit pas immédiatement, interrompue par un serveur venant saisir leur commande. « Vous avez bien de la chance d'avoir pu profiter ainsi de votre journée. C'est loin d'être mon cas. » soupira-t-elle ensuite, s'adressant à lui comme elle se serait adressée à un adulte. « C'est à peine si je me sens encore chez moi avec ces nouvelles présences. » continua-t-elle sa plainte. C'était peut-être exagéré bien que tout à fait volontaire. « Votre proposition est donc la bienvenue. Il est agréable de savoir qu'un toit nous est offert si la situation devait réellement devenir insupportable. » ajouta-t-elle, sans relever le sous-entendu qui lui fut fait. Toutefois, elle prit réellement en considération ses mots. Il y avait peut-être là une opportunité à saisir et la possibilité de découvrir la réaction de l'un et l'autre de ses frères si elle devait commencer à passer son temps loin de leur demeure. On apporta les plats. « Alors dites-moi. Qui sont ces personnes qui sont censées nous rejoindre plus tard ? » questionna-t-elle son vis-à-vis sans toucher à son assiette, s'accoudant plutôt à la table pour croiser les doigts devant elle et y poser le menton, son attention pleinement concentrée sur Adolphe. « Des amis à vous, j'imagine ? ». Dans une telle situation, il était probable qu'elle abandonne les lieux. Elle n'avait pas prévu de passer sa soirée à s'occuper d'enfants.
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Post VI | Mots 1038
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Kaahl Paiberym
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Sam 03 Juin 2023, 14:07



Les Portes : L'arrivée à Narfas



« Complémentaires ? » J’aurais volontiers ri à gorge déployée aux propos de la brune si elle ne les avait pas prononcés avec tant de sérieux. En quoi les hommes et les femmes étaient-ils complémentaires ? Passé le sujet de la reproduction, qui n’était en rien une nécessité dans une existence épanouie malgré les mœurs de Narfas, la complémentarité n’existait plus. Les femmes et les hommes pouvaient parfaitement vivre les uns sans les autres, parfois même mieux. J’aimais m’envoyer en l’air mais je n’attendais d’aucun homme qu’il fût mon complément. Je me suffisais à moi-même et préférais de loin vivre entourée de femmes qu’entourée d’hommes. Mon fils était la seule exception à la règle, parce qu’il était mon sang, ma chair, mon trésor. À l’écoute de tels propos, je m’attendis presque à une suite dans un style poétique ou mystique, où les hommes seraient comparés au soleil et au feu et les femmes à la lune et à l’eau. Certaines personnes rivalisaient d’imagination pour trouver des liens là où il n’en existait aucun. « Vous êtes bien naïve. » finis-je par dire, sur le ton du constat. Néanmoins, je ne m’épanchai pas en commentaires. Elle était encore jeune et découvrirait d’elle-même que la vie n’est pas une histoire pour les enfants et que les Dieux ont une notion particulièrement subjective de l’égalité. Personne ne pouvait être égal, parce que des particularités intrinsèques aux individus entraient en jeu, tout d’abord, mais également parce qu’il y aurait toujours un système, une pensée, un dogme, qui ferait en sorte que l’égalité n’advînt pas. Elle était impossible dans les faits, quoi qu’en dissent le droit, les discours ou les délires. Surtout, au-delà de la théorie, il suffisait de vivre pour s’en apercevoir. Que valait la vie d’un autre face à la vie de mon fils ? Rien. Je tuerais pour lui, qu’importât que celui qui lui voulût du mal eût raison ou tort. Nous nous targuions bien trop souvent d’être des êtres de raison là où nous n’étions que des bêtes, comme les autres, à agir sous l’impulsivité de nos émotions. Les véritables stratèges étaient rares car les sentiments venaient toujours se mêler à la raison. Pour moi, ils étaient ce qui faisaient la vie. Le véritable lien qui existait entre les gens, qu’ils fussent hommes ou femmes, était ce lien émotif. Je protégeais certaines femmes parce que, au fond de mes entrailles, une rage sourde face à l’obligation nataliste brûlait. Je protégeais mon fils parce que je l’aimais de toute mon âme. Balthazar me faisait mouiller, tout comme Gao. Rien n’était explicable par la raison. La raison ne faisait que perdre pieds face à la palette émotive. Ainsi, j’étais convaincue qu’il fallait être un humain atrophié pour ne rien ressentir et resté campé sur une position ou en adopter une après un calcul froid de la situation. Ces gens là me paraissaient idiots. La seule question que je désirais leur poser était celle-ci : êtes-vous véritablement heureux ? Néanmoins, je n’avais pas besoin de le faire, car je savais déjà la réponse négative.

Le discours de Luthgarde avait tendance à m’amuser autant qu'il m’exaspérait. Faire don de son corps. Je ne faisais don de rien du tout, si ce n’était d’un peu de mon temps. Porter un enfant était un don du corps. Chevaucher une queue était une simple activité. Plaisante, certes, mais ça s’arrêtait là. « Vous parlez de sodomie ? » demandai-je, pas certaine de comprendre. Pourquoi donc ce besoin de toujours édulcorer ? Sur cette pratique, si j’en voyais l’intérêt entre hommes, je la trouvais plus douteuse anatomiquement parlant pratiquée sur une femme. Il fallait apprécier la simple sensation de déféquer. Néanmoins, la légende voulait que certaines aimassent ça et, puisque je n’avais jamais essayé moi-même, le jugement était sans doute hâtif. Il n’en restait que, présentée comme elle la présentait, il me semblait plutôt qu’il s’agissait d’un moyen de supprimer la frustration des hommes plutôt que de plaire aux femmes. À moins qu’elle ne parlât, par autres voies, de sexe oral ? Si le bain avait été plaisant à un moment, ce n’était plus le cas. Je me battais pour les femmes. Entendre des récits comptant les grossesses indésirées de mes semblables ne me plaisaient pas. Je n’avais jamais voulu tomber enceinte de Judas. Pourtant, j’avais consenti à ses assauts. J’avais assumé ma folie, bien que j’eusse pensé à de nombreuses reprises à me débarrasser du fœtus avant sa naissance. C’était aussi pour cette raison que femmes et hommes ne pouvaient être égaux, pas sur tous les aspects. C’était aussi pour cette raison que nous n’étions pas complémentaires. Notre capacité à donner la vie était notre plus grande force, une force qui ne cessait d’être instrumentalisée. Par les hommes, mais également par les femmes. Qui maintenait les exigences natalistes, si ce n’étaient la Reine et la Grande Prêtresse ? Des femmes, pour asservir d’autres femmes.

Quand elle parla de Gaspard, je décidai qu’il était temps de rejoindre des occupations plus excitantes. La simple pensée de mon frère suffisait à me donner des envies de meurtre. « J’espère pour vous que sa main restera dans sa poche, et que le reste restera dans son pantalon. Vous devriez plutôt le faire avec un homme de votre âge. » Ses phrases étaient bien trop ambiguës. Peut-être ne parlait-elle pas d’elle et de Gaspard dans un lit, mais je l’avais compris ainsi. « Merci pour la toilette. » dis-je, en direction de Lénora, avant de me redresser, de sortir du bassin et d’attraper une serviette. Je devais savoir comment les entretiens s’étaient déroulés. Il me fallait donc revoir Balthazar. Demander au Grand Prêtre ne me serait d’aucune utilité tant il passerait son temps à s’autosucer.

______________

Plus tard, après avoir écrit une lettre à mes sœurs et écouté les bruits de la ville, je me dirigeai de nouveau vers les appartements royaux, en tenue officielle. Cette fois, ce n’était pas pour écouter les râles de plaisir de Sa Majesté. Une fois introduite et seule avec lui, j’amorçai la conversation. « Comment s’est passé l’entretien ? » Balthazar montrait un intérêt restreint pour la politique. Il semblait suivre les ordres de Wesphaline, ce qui avait le don de m’agacer. Souvent, j’imaginais que le Roi nourrissait des desseins différents et qu’il se montrerait bientôt plus responsable et ferme, qu'importât la Religion. Abandonnant totalement le vouvoiement, je me servis un verre et lui en proposai un. « Parfois, je me dis que si tu le voulais, ta femme perdrait tous ses pouvoirs. Le monde voit en toi le Roi légitime. Le peuple voit en toi le Roi légitime. Les nobles ne sont qu’une poignée de dégénérés qui pensent que ce même monde leur appartient. » murmurai-je. J’avais vu trop de rapts pour être insensible à la souffrance du peuple. Des familles décimées, des enfants violées, des femmes gâchées. Pourquoi restait-il là, à ne rien faire ? Pourquoi ne faisais-je pas plus ? J’avais peur pour Adolphe. Je l’aimais tellement qu’il était un véritable fardeau. Il grevait mon courage. « Aider les réfugiés te serait facile. Il suffirait de contacter tes alliés. De nombreux royaumes craignent Judas. En s’unissant, récupérer Lieugro serait facile. De toute façon, quoi ? Vous avez tous l’air de penser que le tyran restera dans son coin. Ces dernières années nous l’ont bien montré : si on ne bouge pas, il bougera avant nous et on se retrouvera encerclés. On l’était déjà à l’ouest. On l’est à présent à l’est. Balthazar… » La politique nataliste était ridicule. « … les femmes de ton peuple souffrent autant que les hommes qui le constituent. Cette situation n’est pas tenable sur le long terme et je pense que tu le sais. En ne faisant rien, toi comme moi sommes complices de la chute qui finira forcément par arriver. » Le peuple parlait déjà, de la fête qui aurait lieu mais surtout des réfugiés, de l’opportunité qu’ils représentaient, des différences de traitements qui risquaient d’avoir lieu. « Si tu ne veux pas les aider, fais en sorte qu’ils s’en aillent. Si tu veux les aider, fais le bien. » Je le fixai. « Tu sais ce que les nobles disent de toi ? Que tu n’es qu’un larbin. » C’était cru mais c’était vrai. « J’espère que tu sauras les détromper parce que j’aurais en horreur de me rendre compte que j’écarte les cuisses pour un larbin. » Peut-être que, finalement, il me faudrait m’occuper de politique.

1385 mots
Eméliana - Tamara:

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Kaahl Paiberym
Sam 03 Juin 2023, 18:17



Les Portes : L'arrivée à Narfas


« Et alors, qu’est-ce que j’y peux, moi, si tu vois des trucs chez les gens qui n’existent pas ? » Depuis que je l’avais jetée dans l’eau, je la trouvais plus amusante. Peut-être était-ce à cause de cette mèche de cheveux qui lui retombait sur le museau ? « Franchement, je pensais que Montarville le punirait… » Lorsque je l’avais dénoncé, j’avais cru que le Monarque ferait quelque chose, qu’il le bannirait ou, au moins, enquêterait. Au lieu de ça, il m’avait confié la surveillance de Zébella et d’Adolestine, surveillance que je n’avais pas menée à bien. C’était risible. Mon père ne m’avait jamais rien demandé avant et j’avais désobéi à sa seule requête. Je ne savais simplement pas qui il était à ce moment-là. Si je l’avais su, je n’aurais probablement pas fait mieux. Je ne regrettais pas d’avoir passé une grande partie de la soirée avec Rosette. Si je l’avais laissée seule, peut-être aurait-elle été violée à la place de la Princesse d’Uobmab par Déodatus. Je les savais proches. « Quoi ? Je ne suis pas fiable ? Tu ne m’as pas laissé le choix. Soit j’acceptais, soit tu allais faire de ma vie un enfer. Sur le moment, je t’ai dit oui simplement pour que tu me lâches la grappe. Faut pas croire tout ce que disent les gens hein. »

Perché sur ma monture rousse, je souris à la remarque de Ludoric sur le fait que Placide le suivrait probablement. Je n’avais aucune idée du fait qu’ils s’aimassent. J’avais entendu quelques rumeurs mais beaucoup circulaient sur le Prince, des plus probables aux plus farfelues. Le fait que le soldat et lui fussent en couple n’avait pas spécialement retenu mon attention. Je les savais simplement proches et, par conséquent, répondis  avec un air complice. « Je vois, amis pour la vie hein ! » Je remontai le nez vers la fille de Judas. « C’est pas parce qu’il est frêle qu’il ne ferait pas un bon Roi. Tout le monde n’a pas besoin de ressembler à un taureau. En plus Ludo est là pour le protéger ! » J’avais raccourci son prénom, pris dans mon élan. Bientôt Zébella serait Zézé si je continuais. « La tête et les muscles. » Je ne savais pas ce que Placide avait dans la tête. Je ne le connaissais pas assez pour dire. « Même si je ne doute pas que tu en aies dans la tête aussi. » rassurai-je le rouquin, en tapotant l’une de ses épaules. La suite du discours de la Reine des Boudeuses me surprit. Mon « Quoi ? » fit écho au « Hé. » de Ludoric. Mon trouble se lut jusque dans la forme de mes sourcils. La suite de la conversation me tint coi un certain temps. La soldate devait être aussi étonnée que moi.

Je finis par descendre du dos du garçon pour m’approcher de la fille. « T’inquiètes pas, moi aussi je fais genre que j’ai une poussière dans l’œil quand j’ai envie de pleurer. » la taquinai-je. Puis, je me penchai un peu vers elle, en prenant garde de rester à une distance raisonnable, des fois qu’elle cherchât à m’attaquer. « T’es chiante mais je t’aime bien. Puisque t’as l’air seule et que t'es peut-être une bâtarde sans avenir, on peut sans doute devenir amis, tu ne crois pas ? » Pour donner plus de poids à mes mots, j’interrogeai l’autre baigneur. « Hein Ludo ? J’ai jamais eu une amie capable de m’arracher la tête avec ses cuisses, et je suis sûr que toi non plus, donc c’est décidé. » Elle n’avait pas dit oui et, si je la soupçonnais d'être sur le point de s'illustrer en matière de grognements, ça m’était égal. « J’ai hâte de parler de toi à mes autres potes. Tu vas devenir une légende dans le milieu des chiens de mon espèce. » Je ris et sortis du bain pour me sécher. Puis, la serviette autour du bassin et mes vêtements sur les épaules, je me tournai vers eux. « Mon offre de tout à l’heure tient toujours. » Celle d’aller tuer Merlin directement dans son repaire.

_____________

Mon épaule entra dans celle de Ludoric. « Alors ? On part sans ses amis ? Elle est où Zébella ? » demandai-je à la chaîne, tout en faisant mine de la chercher à droite et à gauche. Mes yeux partirent en exploration jusqu’à trouver ceux du rouquin. Je lui souris. « Je ne te suis pas, t’inquiète. Je suis parti chercher Rosette et je t’ai vu. » Je ris. « Ne me prends pas pour un taré qui te suivrait partout. C’est pas trop mon genre. » Même si j’avais écrit des poèmes à Rosette durant plusieurs mois et que j’étais du genre têtu et acharné quand je le voulais. « Oh regarde ! Des briouates ! Attends, je vais en acheter ! » Lambert m’avait donné un peu d’argent.

De retour, j’en tendis un au garçon. « Ils sont aux amandes et au miel. C’est un peu gras par contre. » dis-je, après avoir croqué dans l’un d’eux avec appétit. « Je boirai des tonnes de thé quand on retournera chez Melchior. De toute façon, faut bien que je les goûte si je veux travailler avec lui. Le commerce, y a que ça de vrai pour être au courant de tout ce qu’il se passe quelque part. » Je lui fis un clin d’œil, avant de me calmer et de redevenir plus sérieux. « Alors ? T’es soldat depuis quand ? » Je finis mon gâteau et fourrai un à un mes doigts dans ma bouche pour tenter d’en retirer le gras. « Maintenant qu’on peut parler, je vais pouvoir te dire un secret. » ajoutai-je, une fois qu’il m’eut répondu. « J’en peux plus de tourner et retourner ça dans ma tête et je n’ai pas envie d’en parler à Rosette pour l’instant. Elle n’a pas l’air bien depuis quelques temps. Toi tu dois avoir l'habitude des secrets à force de côtoyer la Royauté. » Je m’approchai, jusqu’à être assez près pour lui murmurer quelque chose à l’oreille. Comme un enfant, je portai ma main entre sa tête et ma bouche, afin de couvrir le mouvement de mes lèvres. « Je crois bien que le Roi de Narfas est à la tête d’un trafic d’esclaves. Je l’ai découvert la première fois que je suis venu. C’est pour ça que je n’ai pas envie de rester ici. Qui sait ? Il pourrait s’en prendre à nous. » Je m’écartai et le regardai. Si Placide lui faisait confiance, et il avait l’air, je pensais pouvoir miser sur lui à mon tour. Je ne savais pas ce qu'il pensait de moi mais peut-être le découvrirais-je comme ça. « Tu ne diras rien, hein, promis ? » Je lui tendis mon auriculaire. « Toi et moi, on est dans la même barque maintenant. J'espère que tu sais ramer. » plaisantai-je, pour détendre l'atmosphère. Allait-il saisir mon doigt avec le sien ? Allait-il le répéter ?

1111 mots
 | Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 9 943930617
Erasme (Clémentin):

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Sam 03 Juin 2023, 21:09



Les portes : L'arrivée à Narfas



Enfant d’abord et adolescent ensuite, mon instinct avait joué un rôle central dans mes relations avec autrui. Plusieurs fois, je n’avais pas senti tel ou tel client. La sensation était subtile, elle prenait naissance à la naissance de ma nuque. Suivait un malaise vague mais bien présent, une sorte de retenue, de « non, n’y vas pas » de l’esprit. De temps en temps, malgré tout, j’étais allé à l’encontre de cet instinct et, toujours, je m’en étais mordu les doigts. Certains s’étaient amusés à brûler ma peau avec leur cigarette, d’autres à me frapper. Un adolescent grassement payé pour du sexe était encore plus excitant une fois soumis pour bien des hommes. J’avais suffisamment trainé dans les bas-fonds pour savoir que certains parents se faisaient payer par des détraqués afin de violer leurs enfants devant eux. Sur cinq enfants, au moins un était victime d’abus sexuels, quelle que fussent les milieux sociaux. Parmi les cinq, j’avais été celui-là. Très tôt, mon instinct était intervenu. Plus tard, la drogue l’avait affaibli mais il avait toujours persisté. Lorsque j’avais rencontré Ezidor, ce même instinct m’avait mis en garde. Quelque part, j’avais toujours été convaincu qu’il finirait par causer ma perte. Pourtant, la curiosité et l’attachement m’avaient maintenu à ses côtés jusqu’à son départ de Lieugro. Puis j’étais devenu plus grand et plus fort que lui. Mon instinct de survie s’était éteint en sa présence. Ne restait que le reste, des sentiments flous et ambivalents. Une obsession.

Aujourd’hui, dans la salle du trône de Narfas, la même sensation qui m’avait pris plusieurs fois naquit à l’arrière de ma nuque. J’avais côtoyé de tous les styles. Garance n’était pas une femme facile. Elle était stratège et prête à tout mais avait au moins une cohérence d’ensemble. Elle désirait quelque chose et allait en ce sens. Devant ces quatre-là, je me mis à craindre pour nos vies. Ils me semblaient être complètement fous. N’avaient-ils donc pas discuté entre eux avant cet entretien pour se synchroniser ? Leurs attitudes et propos semblaient être discordants. La manipulation n’avait pas sa place dans une telle discussion à mes yeux. Nous venions trouver refuge chez eux parce qu’ils avaient accepté notre présence. Un refus aurait mené nos pas ailleurs. Nous étions prêts à parler en alliés en arrivant alors pourquoi toute cette mise en scène, ces paroles menaçantes d’abord puis apaisantes ensuite ? Souffler le chaud et le froid ? Ils me faisaient penser à des pervers narcissiques, à des parents abusifs, à des instables, aux mêmes fous qui battaient leur femme avant de tenir de grands discours sur l’égalité. Ils nous traitaient en parias, menaçaient notre intégrité physique et avaient en plus le culot de parler d’alliance ? Le fait que je le pensasse, moi qui avais commis des horreurs, n’allait pas en leur faveur. Pour qui nous prenaient-ils ? Des lapins de deux jours ?

Je ne m’inclinai pas en sortant. J’étais le soldat. Je devais rester droit. Ne pas sombrer dans la perversion. En tant que soldat, la Justice devait compter bien plus que le reste. Je n’avais donc pas à courber l’échine face à des individus de leur trempe, qu’importassent les conséquences. Ne pas plier face à l’immoral. Il valait mieux pour eux, car si je commençais à céder aux pulsions qui me parcouraient, nous aurions tous un gros problème. Certaines substances se trouvent partout et, si j’avais réussi à violer Garance pendant la traversée alors qu’elle était la personne la plus puissante du convoi, qui sait ce que je serais capable de faire à ces quatre-là ? Dans l’inconscience, personne ne parle, tout le monde subit. La mort est facile à offrir.

_____________

Une fois dans les appartements de Garance, je l’écoutai, les yeux fixés sur une carafe. Dans l’eau clair qui s’y trouvait, je voyais des volutes sombres, celles en provenance de mon esprit. Les discussions s’avéraient parfois longues et inutiles. Les enfants de Wesphaline n’étaient pas sur place, à l’exception d’Anthonius. Personne, donc, ne pourrait prétendre au trône si un drame devait survenir. « Mes propos n’engagent que moi mais, si nous restons, je pense qu’il faudrait éliminer le quatuor de tête avant que l’inverse ne se produise. Dans le cas où nous déciderions de partir, je doute fort qu’ils nous laissent faire sans rien dire. Je préconise le départ de quelques-uns de nos sujets pour qu’ils expliquent aux autres Royaumes le traitement que nous avons reçu s’il venait à nous arriver quelque chose. » Je réfléchis. « Ils ne semblent pas avoir accepté de nous héberger par gaieté de cœur. Ils veulent violer nos femmes et les obliger à porter leurs enfants. Ces gens sont infâmes. » Tout comme moi, lorsque j’avais livré ma propre sœur à Ezidor. Je les comprenais mieux que personne. Ils avaient probablement l’impression d’être au-dessus de tout, de pouvoir tout se permettre. À moins qu’ils ne fussent totalement désespérés ? À la recherche d’une substance semblable à la drogue que je désirais autrefois, à la recherche d’une substance vitale. Mais ça ne justifiait pas leur comportement. Les effets du manque de substance étaient bien plus pernicieux que la conscience d’une démographie sur le déclin. Ils poussaient les individus à toutes les folies. Eux avaient bien d’autres options que de pousser des personnes qui se trouvaient sans Royaume dans leurs retranchements. Ma conclusion était donc la suivante : ils étaient juste fous. Quatre fous à la tête d’un Royaume. Ce que je savais sur les fous, c’est qu’ils étaient aussi dangereux qu’imprévisibles. L’intervention du messager ne me fit pas changer d’avis, bien au contraire. Wesphaline voulait-elle nous faire croire qu’elle était battue ? Sous le joug d’un mari omnipotent ? J’avais vu bien des femmes soumises et elles ne ressemblaient pas à l’image que donnait la Reine au monde. Surtout, Batlhazar avait eu l’air d’être le moins idiot des acteurs de cet entretien par sa retenue et son ton mesuré, ce qui donnait aux paroles du messager une dimension grotesque. J’inspirai, saisis la carafe tranquillement et fis mine de partir à la recherche d’un verre. La vaisselle termina sa course sur la face du parleur. Mes doigts s’enroulèrent ensuite autour de ses cheveux et je lui éclatai la tête sur la table d’un mouvement puissant et vif. Puis, je me tournai vers Lambert, en le regardant d’une telle façon qu’il semblait clair qu’il serait le prochain à rejoindre l’inconscience s’il ne s’expliquait pas tout de suite. J’étais certain de pouvoir venir à bout de lui. C’est qu’il commençait à prendre de l’âge, lui-aussi. Quant au messager, je ne craignais aucun courroux. Soit il s’agissait d’un clandestin et, auquel cas, le Roi n’était pas au courant des manigances de sa femme qui ne manquerait pas de se taire pour éviter le courroux de son mari pas si bête, soit il n’en était pas un et les deux têtes couronnées agissaient de concert dans l’objectif de nous manipuler. Cette dernière option signifiait que nos vies étaient de toute façon déjà en danger dès notre arrivée.

1074 mots
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Tekoa - Childéric:

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Image : 2ha - Mo Ran to the Underworld by Lisa Buijteweg
Les Portes : L'arrivée à Narfas
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Rôle - Balthazar De Narfas:


À quoi est-ce qu'elle joue? Depuis la fin de notre entretien avec les réfugiés, qui s'était conclu sur une note aussi sinistre qu'à son commencement, la question tournait et se retournait sans cesse entre mes deux oreilles. Comme des pensées parasites, les paroles de Wesphaline se répétaient en boucle dans ma tête, alors que je m'efforçais à trouver un sens à ses agissements inconsidérés. À quoi avait-elle pensé en clôturant ainsi la rencontre, avec des menaces à peine voilées et une opposition indirecte à mon autorité? N'était-ce pas mon rôle d'agir en tant que Roi suprême à la fois devant notre nation et le reste du monde? Pourquoi avait-elle décidé, sans préavis, d'aligner son discours à celui de Gaspard, au lieu de miser sur une approche plus modérée, semblable à celle qu'elle m'avait commandé d'adopter? C'était ridicule, mais surtout dangereux. S'il m’avait été encore possible de justifier les écarts du Grand Prêtre sous le couvert d'un zèle religieux incontrôlé, nous aurions pu avoir une chance de réparer les pots cassés avec nos invités, et ce, malgré sa mise en bouche coupable d'une franchise aberrante. Or, en favorisant l'emploi de la provocation abusive au détriment de la compassion, la Reine avait définitivement brisé la moindre illusion d'unité au sein de la Cour Royale, minant notre crédibilité déjà mise à mal par l'intervention de l'ecclésiastique. À présent, j'ignorais comment nous étions censés remontrer la pente après un premier contact qui avait immanquablement donné mauvaise impression. La confiance que les rescapés portaient envers nous avait sans doute été complètement anéanti dès l'instant où ma femme s'était permise d'intervenir. Si la dureté contenue dans les paroles de Garance avait constitué un indicateur clair, les réactions de Lambert et de Childéric avaient été tout aussi criantes. Peu importe comment les prochaines discussions se dérouleraient – si dialogue constructif il y avait, je doutais que nous parvenions à obtenir notre gain de cause sans recourir à des méthodes plus fermes, ce qui risquerait de créer davantage d'instabilité au sein de la Cour. Le climat était assurément propice à engendrer des conflits qui, selon la façon dont les différents acteurs se décideraient à résoudre leurs problèmes, pouvaient aisément prendre des proportions inégalées. Même si la politique occupait une place secondaire en termes d'intérêts personnels, supplantée par les autres affaires que je gérais dans l'ombre, je n'étais pas spécialement favorable à la position derrière laquelle Wesphaline avait opté pour se ranger, notamment parce que ses propos odieux finiraient par m'être imputables. Est-ce donc cela, son but? Me faire paraître incompétent afin que mon pouvoir soit contesté? Ou s'agissait-il d'autre chose? Je m'étais pourtant conformé à ses instructions, tel un chien obéissant. Nos relations étaient peut-être mauvaises, mais jusqu'ici, elle avait toujours semblé apprécier ma docilité. Cela dit, il n'était pas impossible que, dans les coulisses, elle cherchât sérieusement à me nuire. Quelles que soient ses intentions, je devrais rester prudent, ne serait-ce que pour éviter de connaître un destin tragique. En intervenant, la Reine avait – intentionnellement ou non – menacé de révéler le secret que nous gardions précieusement : une erreur que nous serions sûrement amenés à regretter plus tard.

Lorsque les gardes chargés de la surveillance de mes appartements m'annoncèrent la présence de Tamara, qui patientait derrière les portes closes, je l'autorisai aussitôt à entrer. Dès que le bruit des verrous tinta à nos oreilles et que nous fûmes certains d'être seuls, la Cheffe des Armées s'empara immédiatement de la parole. Debout près de la fenêtre qui ouvrait sur la vue de la Cité en contre-bras, je braquai mes iris céruléens en direction de son visage pour écouter son message. Un soupir quitta machinalement la commissure de mes lèvres à l'instant où elle posa sa question à laquelle je me contentai de répondre un simple : « Très mal. » Pressentant son besoin d'entendre de plus amples explications, je lui résumai brièvement le déroulement tendu de la réunion. « Votre frère s'est particulièrement illustré en tenant des propos sans demi-mesure. » lui informai-je. « Jésabelle et moi avons essayé de calmer le jeu, mais le mal était déjà fait, d'autant plus que Wesphaline a cru bon de clôturer la rencontre de manière peu délicate. » Quand la rousse me tendit le verre, je l'acceptai sans hésiter. L'alcool était un bon moyen pour se détendre les nerfs, bien que je n’eusse pas l'intention d'en abuser. Me décalant de la vitre, je gardai le silence pendant toute la durée de sa tirade, nullement étonné par son contenu qui s'alignait amplement avec les idées peu conventionnelles que je lui connaissais si bien. Son opinion plus nuancé sur les différents enjeux auxquels était confronté notre Royaume lui attirait depuis longtemps l'antipathie de ma femme, qui abhorrait son excentricité. Néanmoins, je devais admettre que la de D'Epilut se montrait rarement aussi franche et directe en ma présence. Elle ne mâchait certainement pas ses mots et appréhendait sans doute encore moins les conséquences que ses paroles, rapportées à une oreille indiscrète, pourraient éventuellement lui coûter. Seulement, elle avait raison sur un... non, sur de nombreux points. Le peuple de Narfas était sans conteste en train de craquer sous la pression exercée par nos politiques natalistes. Il ne fallait que constater la quantité de groupes contestataires ou masculinistes, qui ne cessaient de se multiplier à travers la ville, transportant un vent de rébellion qui soufflait dangereusement entre les murs de certains réseaux souterrains. Grâce aux contacts que je détenais sur le marché noir, il m'était facile de me renseigner sur les nouvelles qui agitaient la population, dont celles qui s'avéraient plus sensibles. Parfois, j'ordonnais à mes hommes de capturer quelques figures-clés de ces cercles illégaux afin de les vendre à des acheteurs éloignés. Évidemment, cela n'était pas suffisant pour freiner complètement l'essor des mouvements révolutionnaires que je laissais en quelque sorte fleurir pour ne pas éveiller des soupçons sur mon travail annexe.

Pensif, je fis glisser mon index sur le rebord de ma coupe sans toutefois avaler une gorgée du breuvage qu'elle contenait. « Je suis parfaitement au courant des diffamations qu'ils chuchotent derrière mon dos, soufflai-je doucement, mais si j'agis autrement, ils m'accuseront de contrevenir au Livre Sacré. » Plus que Wesphaline ou Jésabelle, c'étaient mes croyances religieuses qui influençaient ma conduite. Il me paraissait insensé d'aller à l'encontre des préceptes que j'avais appris à intérioriser depuis la défaite cuisante de mon père, mais d'un autre côté, je savais également que la situation actuelle ne pouvait perdurer sur la longue durée. Tamara s'attendait essentiellement à ce que je me positionne soit en faveur du conformisme, soit en faveur du devoir qui me liait inexorablement au peuple dont le bien-être était compromis par des inégalités et une pauvreté rampante chez les classes moins nanties. À nouveau, je soupirai, incapable de résoudre ce dilemme. « Cependant, je doute que les nobles aient conscience de l'insatisfaction qui gronde au sein du peuple, ou bien ils en minimisent l'ampleur. C'est la même chose avec Uobmab. Après tant d'années à profiter d'une paix éphémère dans l'enceinte de ces murs, ils sont nombreux à se croire invincibles. Certains s'imaginent même que Narfas soit à l'abri de tous dangers, mais ils ont tendance à oublier les menaces qui se cachent entre leurs propres murs. » C'était la raison pour laquelle Lieugro était tombée : Montarville avait laissé le loup entrer dans la bergerie et il en était mort de façon atroce. Nous devions à tout prix éviter de reproduire les mêmes erreurs qui lui avaient coûté la vie, mais nous n'étions malheureusement pas mieux partis. « Je ne suis pas opposé à les accueillir sur nos terres, mais le problème provient de nos conditions d'asile. » Plus précisément, celles que voulaient imposer la Grande Prêtresse et la Reine. Il était évident que cette dernière manigançait quelque chose, mais quoi? « Nous sommes censés leur faire signer un accord, mais je doute qu'ils soient disposés à se montrer coopératifs... » La régente ne m'apparaissait pas comme une femme à se laisser marcher sur les pieds sans broncher. « ... pas après une réunion pareille. » complétai-je d'une voix ferme. C'était partiellement de ma faute. J'aurais eu avantage à intervenir pour faire taire Wesphaline au lieu de ne pas l'interrompre. « Il serait peut-être plus judicieux de contacter l'un de nos alliés afin qu'ils puissent les recueillir à notre place. Sinon, je crains que les prochains jours s'avèrent... difficiles. » Pas seulement pour eux, mais pour nous également. Les éloigner du palais avant que la situation ne dérape complètement était sans doute le choix le plus prudent, mais aussi le plus risqué, puisque je devrais désobéir directement aux ordres de la Reine. C'était une décision difficile à prendre, mais peut-être nécessaire à la lumière de tous les problèmes qui ne manqueraient pas de s'accumuler sur mes épaules.

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Dim 04 Juin 2023, 12:24

| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 9 Wpw2
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Les Portes - Chapitre V - L'arrivée à Narfas



Rôle:

« Ne t’en fais pas. Il y a toujours de fascinants spectacles ici. » Comme ces deux hommes plus loin qui n’en étaient plus à de chastes baisers ou cet homme et cette femme qui semblaient prêts à en venir aux mains. Gao ne se donnait que très rarement en spectacle. Il le faisait assez dans son métier. Quand il venait ici, il observait et écoutait, à l’affût de nouvelles qui auraient pu servir son commerce. Heureusement, il ne recherchait que des enfants mâles. Aucun parent digne de ce nom n’aurait abandonné sa fille. Il ne s’était jamais penché sur la question mais peut-être qu’un tel acte était puni par la loi. Dans tous les cas, les fillettes ne seraient pas restées bien longtemps dans les rues. Les garçons non plus, d’où le fait qu’il dût agir rapidement pour les récupérer. Les femmes s’accaparaient parfois des enfants qui n’étaient pas à elles afin de tromper les statistiques et de s’éviter des grossesses supplémentaires. Néanmoins, la plupart du temps, les enfants connaissaient des destins bien plus lugubres que le sort qu’il leur réservait lui-même. Au moins, avec lui, ils avaient un foyer et une possibilité de toucher la Beauté du doigt. En étant semenciers, ils acquéraient un statut et côtoyaient un monde qu’ils n’auraient jamais connu autrement. Certes, il se faisait une marge sur les bénéfices mais ces enfants, une fois devenus adolescents puis adultes, gagnaient bien leur vie. Ses pensées volèrent jusqu’à Primaël. Tous ses petits ne rêvaient que d’une chose : être comme lui, évoluer, organiser des soirées pour la noblesse, devenir riche et connu. Gao les y encourageait dès qu'il le pouvait, tentant toujours d’effacer de sa mémoire tout ce qui n’avait pas été professionnel entre Primaël et lui. Il ne servait plus à rien d’y repenser à présent. Sa main se posa pourtant sur son ventre, au niveau de sa cicatrice. Il avait dû mentir pour justifier la blessure. Il ne l’avait jamais dénoncé. Peut-être ne le ferait-il d’ailleurs pas si l’un de ses enfants s’en prenait à lui ainsi. Ils étaient une sorte de famille.

Gao posa de nouveau sa main sur la table et écouta son frère. Ils n’avaient pour ainsi dire jamais parlé de cette façon, assis l’un en face de l’autre, dans un sous-sol clandestin. C’était une nouveauté et, quelque part, il espérait ne pas avoir à regretter cette entrevue. Si sa voix semblait assurée, son langage corporel était fuyant. Était-ce lui ou cet endroit qui le mettait mal à l’aise ? À moins que le fait de parler de son commerce en fût la cause ? « Et alors ? » l’encouragea-t-il. Il avait vaguement l’impression de se retrouver devant l’une de ces nobles qui n’osait pas demander ce qu’elle désirait, en plus de sa semence. « Oh… Intéressant. » Un aphrodisiaque, en quelque sorte. Joueur, Gao se demanda si son frère avait trouvé ça désagréable parce qu’il avait habituellement un balai dans le cul. Il semblait tout miser sur une forme de vie fade et répétitive. Seules ses idées politiques embrasaient ses joues. Pénélope s’occupait probablement d’embraser autre chose. Il n’en avait pas la certitude absolue mais disons que certains actes, regards et mots ne trompaient pas. Maintenant que le brun savait qu’il avait le champ libre, le blond espérait qu’il en tirerait parti, et qu’il tirerait tout court. Avec un peu de chance, il deviendrait plus détendu et amusant.

« Pourquoi pas. » finit par lâcher Gao après avoir réfléchi. Surtout, si la fameuse Tisane de Madame agissait véritablement comme Melchior le disait, rien ne l’empêcherait d’en confier un peu à ses poulains. Son frère n’avait aucune idée du nombre de clientes qu’il avait et ne serait pas en mesure de quantifier les doses. « Donc… si je récapitule : tu me donnes gratuitement de cette fameuse tisane afin que j’en fournisse à mes clientes et en échange je vends d’autres de tes thés et tisanes, tout en te faisant de la publicité ? » Parce qu’il lui semblait étrange que son frère voulût s’arrêter à la simple Tisane de Madame. Qu’aurait-il eu à y gagner sinon ?

Au fil de leur conversation, une rumeur commença à enfler Chez Clithère, celle d’une soirée organisée par Primaël, chez lui, en l’honneur de la venue des réfugiés de Lieugro. Gao avait tendance à tendre démesurément l’oreille dès qu’il était question de l’homme que l’adolescent qu’il avait connu était devenu. Les invitations se feraient vraisemblablement de bouche à oreille. Un sourire ourla ses lèvres. Cela faisait longtemps qu’ils ne s’étaient pas revus. Jusqu'ici, il avait évité scrupuleusement de le croiser, ne sachant pas ce que son image raviverait en lui. Il était peut-être temps d’être fixé. « Je ne sais pas si tu connais Primaël. » lança-t-il à Melchior. « Mais étant donné qu’il fait une soirée, tu pourrais sans doute y écouler une masse importante de tes breuvages. Tu pourrais le contacter ou aller directement le voir de ma part, il accepterait sans doute de t’acheter ta marchandise. » C’était même sûr mais il ne voulait pas paraître trop certain de ses dires. « En plus, tu as un apprenti à présent, il pourrait t’aider à tout transporter sur place. » Il se pencha vers son jumeau. « Et ce serait l’occasion d’essayer la Tisane de Madame discrètement sur les femmes de la soirée. » Si la Reine venait, il pourrait probablement l'approcher afin de lui offrir ses services dans le dos de son mari.

886 mots
 


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Orenha
Dim 04 Juin 2023, 14:05


Images par wlop
Les Portes V - L'arrivée à Narfas
Orenha dans le rôle de Luthgarde

Rôle:
«Il est vrai que j’ai encore beaucoup à apprendre… je vous remercie pour votre prévenance, Dame d’Epilut. Je suis trop jeune pour prétendre être avisée, mais je ne souhaite rien d’autre que d’avancer sur le chemin de la sagesse, pas à pas.» répondit l’étudiante sans se départir de son sourire, pas une seconde ébranlée par la froideur affichée par son interlocutrice. Les leçons d’humilité étaient toujours bonnes à prendre et elle les accueillait avec une sincérité non feinte, surtout quand elles provenaient d’une figure aussi importante que la Cheffe des Armées de Narfas. Cependant, elle n’osa pas pousser l’audace jusqu’à lui demander d’expliciter son clair désaccord sur la question, pas plus qu’elle ne lui fit remarquer que le Royaume d’Erréil était sans nul doute bien au-devant de celui de Narfas – et de bien d’autres - en termes d’égalité des individus. Le terrible fléau qui s’abattait sur les terres de ce dernier et les mesures qui étaient prises pour le contrer n’étaient-elles pas la preuve qu’un tel déséquilibre entre les sexes était à éviter à tout prix ? Le Grand Prêtre, Lui, l’avait bien compris, mais peut-être que sa sœur s’accrochait encore à des considérations un peu désuètes.
Si le but premier de la présence de la jeune Etnias ici était de vivre de l’intérieur la culture de ses voisins, il faisait aussi partie de ses devoirs de faire en sorte que ceux et celles qu’elle rencontrerait sur son chemin puisse autant apprendre à son contact qu’elle apprendrait au leur, et elle était toujours disposée à éclairer la lanterne de son prochain – surtout quand celui-ci ne possède qu’une allumette maigrichonne pour dissiper la pénombre.
Mais le péché d’orgueil rôde dans l’ombre de celui qui cherche à dispenser son savoir sans prendre en compte la disposition à l’écoute de son interlocuteur et de toute évidence, la flamboyante femme rousse qui lui frottait le dos à l’instant même ne semblait pas être d’humeur à bavarder ; sans doute était-elle trop lasse de son quotidien de combattante pour s’adonner à des passes d’armes verbales lors de son bain journalier.
La franchise crue de la D’Epilut dérouta un peu la jeune fille. Considérant les mœurs de ce pays, il aurait été logique de penser que les actes intimes ne pouvant aboutir à une conception naturelle soient peu pratiqués. Pourtant, la Cheffe des Armées n’avait pas semblé embarrassée un seul instant. « Eh bien, oui, entre autres… » Elle se pencha en avant, l’air conspirateur. « J’espère ne pas vous choquer en parlant de ça, mais… il paraît que les hommes qui sont disposés à la recevoir en jouissent parfois bien plus que les femmes ou ceux qui la donnent. N’est-ce pas merveilleux, ce que le corps humain peut receler comme secrets ? » gloussa-t-elle en se laissant aller de nouveau dans les eaux chaudes et savonneuses. Ses doigts tressaient distraitement la chevelure sombre de Lénora. Elle passait un bon moment, finalement.
Du moins, c’était ce qu’elle pensait jusqu’à ce que la bombe soit lâchée.
« Mais enfin, je… Sa Sainteté et… moi ? Jamais... » bégaya-t-elle, complètement horrifiée par le sous-entendu. Non pas qu’elle n’ait jamais imaginé… elle n’était qu’une femme mortelle, après tout. Lorsqu’elle pensait à Sa Sainteté, la vive ferveur que son admiration pour Lui faisait naître en elle se confondait parfois avec l’appel de la chair que toute jeune personne ressent depuis la puberté. On lui avait appris à ne pas en avoir honte et à l’accepter comme étant une chose normale et saine, tant que l’on ne laissait pas ce genre de pulsions dicter sa conduite. Mais il s’agissait là d’un Envoyé de Dieu sur terre et elle craignait que de telles divagations libidineuses frôlent l’hérésie. Comment avait-elle su… ?
Elle se reprit lorsqu’elle réalisa que la maîtresse de maison était sur le départ. « C’était un plaisir- » elle se stoppa d’elle-même dans son élan quelque peu tardif ; la porte s’était déjà refermée sur la D’Epilut. Luthgarde se redressa à son tour, tout bienfait délassant de son bain chaud définitivement évaporé.
« Hm… je vais aller visiter la résidence et manger un morceau. Et n’oubliez pas, chère Lénora : le monde est vaste et les cœurs à prendre nombreux ! Ne vous découragez pas ! » balbutia-t-elle avec un entrain un peu forcé à l’intention de Lénora, avant de quitter la salle d’eau à son tour.


~~~ ~~~


Luthgarde leva le nez des papiers répandus en pagaille sur ses genoux. Une brise légère venait rafraîchir la chaleur pesante qui faisait trembler la ligne d’horizon et recouvrait sa peau d’une pellicule moite. Elle ferma un instant les paupières et se concentra sur sa respiration, espérant ralentir un peu les battements de son cœur. Depuis qu’elle était arrivée, l’excitation ne l’avait pas quittée d’une semelle, et il lui avait été difficile de se concentrer sur ses notes. Pourtant, en avait-elle des choses, à écrire ! De la nourriture qu’on lui avait servi aux vêtements qu’on lui avait prêté, en passant par l’architecture du manoir et les espèces de plantes locales ; c’était une chose d’en apprendre les détails sur des parchemins et des dessins, c’en était une autre de le voir de ses propres yeux. Elle avait déjà noirci un carnet entier avant d’en entamer un autre, et ce alors même qu’elle n’avait pas quitté la résidence. On lui avait proposé un peu plus tôt de faire un tour en ville et elle avait poliment refusé, prétextant la fatigue et le besoin de se concentrer sur ses écrits ; ce n’était que la moitié de la vérité, l’autre étant qu’elle espérait secrètement rencontrer le Grand Prêtre – pour des motifs tout à fait honorables, bien évidemment. Lorsqu’elle avait audacieusement formulé le vœu de présenter ses hommages à Celui qui l’accueillait en Sa demeure, on l'avait informée qu’Il n’était pas présent actuellement, mais qu’on lui ferait savoir s’Il souhaitait s’entretenir avec elle une fois rentré. Depuis, elle prenait son mal en patience. Elle avait tenté d’ouvrir la discussion avec quelques domestiques, mais tout le monde semblait très affairé avec l’arrivée des réfugiés et elle avait fini par se replier dans le jardin pour y consigner l’agencement de ce dernier et faire quelques ébauches des fleurs qui y poussaient.
Une bourrasque la sortit brusquement de sa tentative de médiation : dans un bruissement de papier, les feuilles volantes se dispersaient au gré du vent et elle bondit de son banc pour tenter de les rassembler, brassant l’air de ses bras comme des brindilles sèches, ses bracelets carillonnant à ses poignets. « Oh non, non, non ! »

Message Ⅲ | 1093 mots

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Avatar : "Chrysalis" de ameliaclairearts
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Jil
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Jil
Dim 04 Juin 2023, 14:11


En quelques phrases, le prince de Lieugro semblait déjà asseoir son futur règne avec assurance. Quel que soit l’imbroglio généalogique dans lequel ils étaient empêtrés, Placide l’écartait avec une confiance inébranlable, comme s’il avait d’ores et déjà tranché la question. Il se montrait peut-être un peu trop reconnaissant avec chacun, saluant les réponses et les avis qui lui avaient été lancés : il y avait fort à parier que ce que trois enfants avaient réussi à pondre en quelques minutes ne pesait pas grand-chose face à ce que des millénaires de philosophie martiale et politique avaient pu décanter. Même s’il était prêt à développer davantage son opinion, Anthonius savait pertinemment que sa mère aurait pu, juste pour s’amuser, démonter jusqu’à la moindre inflexion de son argumentaire. Mais après tout, c’était une rencontre diplomatique comme une autre, ils étaient supposés se congratuler, discuter et planter les graines de leurs relations à venir. S’il espérait devenir un bon roi, il y était préférable pour Placide qu’il ne tienne pas compte, d’ici les années qui le séparait de son accession au trône, des avis de trois jeunes nobles.

Anthonius jeta un œil par-dessus le parapet qui leur offrait une vue dégagée sur les rues de la cité, quelques mètres en contrebas. Un jour, après avoir voyagé au-delà de ces murs, par-delà la mer, après avoir vu de ses yeux les immensités sauvages et les cités abandonnées du passé, peut-être que ses conseils porteront un sens nouveau, et plus de légitimité qu’actuellement. À voix basse, Placide s’approcha pour le remercier, et il se contenta d’un petit signe de tête à son encontre. Encore une fois, la diplomatie faisait son œuvre. Même s’il n’avait pas été de sang royal, il aurait été très malpoli – ou volontairement méprisant – de la part d’un prince de souligner l’erreur d’un invité.

Quelque chose qu’Anthonius n’aurait pas hésité à faire si son interlocuteur avait été Adolphe par exemple. Après que le prince de Lieugro eut proposé de s’adonner à un jeu, le fils de Tamara fut prompt à s’excuser – il était probable et logique qu’il ait à faire. Ce qui n’était ni probable, ni logique, en revanche, fut d’enchainer en proposant à leurs invités de « découvrir nos spécialités et notre culture ». Anthonius, habilement caché derrière un sourire ravi, fumait. De deux choses l’une : soit il était atteint de démence extrêmement précoce, soit il oubliait sa place, parlant et se paradant comme s’il possédait les lieux, alors qu’il n’apparaissait probablement sur aucun registre mentionnant le terme « royauté ». Après ses exactions dans le salon, son comportement cavalier avec l’une de leurs invitées, et maintenant ça, il apparaissait maintenant évident qu’il n’avait pas été correctement formé à ce genre de rencontre – ou qu’il accordait si peu de respect à son prince qu’il pensait pouvoir l’ignorer ouvertement. Quoi qu’il en soit, aucune de ces raisons ne lui éviterait une remontrance. Pas par Anthonius, lui n’avait le temps ni l’envie de lui expliquer le pourquoi du comment. Non, il avait davantage de le démonter, comme elle le faisait d’habitude avec ses meubles. En revanche, elle comptait sur sa mère pour aller en toucher un mot à Tamara – Tamara qui, elle, n’avait jamais fait preuve d’autant d’audace en présence ni de la reine, ni de sa fille. Tout en commençant à réfléchir à la manière dont elle allait présenter ça à Wesphaline, le prince Narfien hocha aimablement la tête :

— « Quand j’était petit, j’avais l’habitude de jouer à cache-cache avec mes frères, mais honnêtement, j’ai peur que nos parents ne souhaitent pas avoir à nous trouver si le besoin de nous parler venait à surgir. À la place, que diriez vous de découvrir l’un de nos jeux ? Je vous en expliquerais la teneur après avoir trouvé vos amis. »

Il fit un signe de main discret, qui signifiait à l’un des gardes qui les suivait d’un peu plus loin de s’approcher. À voix basse, il lui demanda de lui indiquer la direction des baraquements désignés pour les réfugiés de Lieugro, et de s’y rendre en avance pour éviter tout problème. Il ne pouvait pas, malgré l’apparente entente qui commençait à se développer entre Placide et lui, ignorer la possibilité d’une embuscade. Elle attendit que le garde ne s’éloigne un peu, avant de proposer à ses invités d’avancer d’un geste de la main :

— « Allons-y, voulez-vous ? »

Puis, après quelques pas, elle interrogea Placide :

— « Et vous ? Nous avons répondu sans vous laisser l’occasion de nous exposer votre point de vue ; quelles sont les qualités que vous estimez nécessaires pour devenir roi ? »

Résumé et mots :


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Les Portes - Chapitre V - L'arrivée à Narfas



Rôle:

Fatigué, Lambert resta debout contre un mur, les bras croisés sur le torse. Plusieurs éléments le troublaient et la situation semblait sur le point d’éclater, tant elle était tendue. Il avait l'impression de se trouver dans une impasse diplomatique et il abhorrait ce genre de situations. En tentant de garder ses facultés intellectuelles intactes – ce qui signifiait se débarrasser d’émotions parasites et du jugement qu’il n’avait pas manqué de faire des quatre protagonistes – il réfléchissait à un moyen d’adoucir les angles et de sauver ce qu’il y avait encore à sauver. La colère qu’il avait ressentie plus tôt était inhabituelle chez lui. Il savait garder son calme le plus souvent. Néanmoins, il était aussi père. Imaginer sa fille aux griffes d’un de leurs semenciers ou subir un mariage forcé avec un étranger avait de quoi lui retourner l’estomac. L’imaginer marcher de nouveau dans le désert ne lui plaisait pas non plus mais entre la chaleur et le viol, le choix était vite fait. Jesabelle et Balthazar avaient tempéré les propos du Grand Prêtre mais Wesphaline s’était montrée sous un jour qu’il ne lui avait jamais connu. Cependant, elle lui avait menti à l’époque et les années s'étaient écoulées depuis. Le temps pouvait assécher bien des cœurs et mener bien des esprits vers des pentes tyranniques. « Il se peut que Narfas finissent par virer comme Uobmab à ce rythme. Pas pour les mêmes raisons, certes, mais les raisons des invasions ne sont jamais valables. » L’ancien conseiller de Montarville se disait que si les discussions étaient à ce point tendues, et le besoin de femmes à ce point préoccupant, alors Narfas ne tarderait sans doute pas à vouloir conquérir ses voisins. Plusieurs petits Royaumes ne pourraient pas résister à l’assaut. C’était une certitude. « Peut-être même que rien n’a été fait jusqu’ici par peur des représailles de Judas. Deux conquérants sur l’échiquier mondial poseraient forcément des problèmes. L’un finirait par manger l’autre et Uobmab a pris beaucoup d’avance. » Sans parler du fait que l’armée de Judas n’était pas composée de femmes et d’eunuques. Lambert restait sceptique quant à ce choix de composition. « J’ai aussi été marqué par la distribution des rôles. Je ne m’attendais pas à ce que Jesabelle et Wesphaline parlent, en dehors de mots strictement protocolaires. » Lorsque Déliséa prenait la parole, il s’agissait de souhaiter la bienvenue ou d’assurer de l’amitié du Royaume de Lieugro pour leurs invités. Elle avait plus d’une fois adouci le discours ou proposé à des moments stratégiques des collations. Le reste se passait en privé, entre Montarville et elle. Ils discutaient et Lambert l’avait toujours su. Son ami demandait des conseils à sa femme, comme il lui en demandait également. Néanmoins, en public, il n’y avait qu’un Souverain. Un unique Souverain pour une unique Voix. Les désaccords ne regardaient pas les invités. « Il me semble que chercher à les contrôler est risqué. Malgré tout, nous restons en situation de faiblesse. »  

Les propos de Childéric furent moins mesurés que ceux de Lambert. Le conseiller le regarda, songeur. Il avait vu le manque de déférence du Chef des Armées en sortant de la salle. Il ne lui en avait pas voulu, bien que son action l’eût interrogé. Après tout, n’était-il pas celui qui avait failli ordonner au soldat de tordre le cou de leurs hôtes ? Il comprenait sa colère. Quelque part, il trouvait même qu’il avait raison. Néanmoins, le blond était le genre à penser que chaque situation pouvait s’améliorer avec un peu de tact et beaucoup de communication. Ce serait difficile dans le cas présent, voire impossible. Il en avait conscience mais il détenait plusieurs cartes maîtresses dans son jeu. Le D’Eruxul regarda Garance. « Je suis en partie d’accord avec lui mais un départ de Narfas nous fragiliserait en termes de légitimité par rapport à notre peuple. Même si nous expliquons correctement la situation et que nous réussissons à sortir de Narfas sans encombre, nous pouvons nous attendre à quelques mécontentements et déserteurs. Le mieux resterait de réussir à redresser la situation pour qu’aucune femme n’ait à subir d’agressions sexuelles et de grossesse non désirée. Peut-être qu’en parlant directement avec le Roi, sans sa clique, nous aurions plus de chance d’obtenir un accord mesuré ? Ce serait d’ailleurs mieux que vous y alliez seule. » dit-il, à l’attention de la régente.

Lambert se tut à la venue du messager. Il n’était pas très âgé, ce qui l’étonna. Il le regarda et l’écouta en silence, tout en réfléchissant aux tenants et aux aboutissants d’une telle intervention. S’il nota le déplacement de Childéric, il ne s’en méfia pas, surtout lorsque la dernière phrase du gamin résonna. Elle le surprit malgré lui. Tout compte fait, il aurait préféré enterrer cette histoire et qu’elle ne s’en souvînt pas. Il n’y avait que ça pour justifier qu'elle voulût le voir, de toute façon. Le fracas le tira de ses pensées. Son anatomie se tendit. « Mais c’est qu’un gosse ! » s’exclama-t-il. Pourtant, le regard du Chef des Armées le coupa net dans son envie de continuer à défendre l’évanoui. Il espérait qu’il n’était qu’évanoui mais, de là où il se trouvait, il ne pouvait pas vérifier. Le garçon aurait pu croupir dans une mare de sang qu’il n’en aurait rien su. Le comportement de Childéric l’étonnait. Il était calme en temps normal. Un faux calme visiblement, ce qui ne faisait que le conforter dans les a priori qu’il avait toujours eu à son sujet. Il avait cru qu’ils étaient en partie dû au fait qu’il avait quelques soupçons sur la relation qu’il entretenait avec Garance. Enfin… il avait surtout cherché à expliquer cette inimitié de cette manière-là. Au fond, il savait qu’il le trouvait louche. Il n’avait simplement jamais eu d’arguments logiques pour justifier ses sentiments. Tendu, il finit par expirer vivement. « Quoi ? Vous me prenez pour un traitre ? » Ses yeux se plissèrent. Il ne devait pas montrer que son interlocuteur l’impressionnait. Ils n’avaient pas le même âge et, même si Lambert gardait une certaine force, un calcul rapide le plaçait automatiquement en perdant d’une joute. Ce ne serait pas Garance qui pourrait intervenir entre eux physiquement. Il n’était pas sûr, en plus de cela, qu’elle chercherait à les calmer. « Je comprends que la situation vous déplaise mais ne vous trompez pas d’ennemi Childéric. » Lentement, tout en restant sur ses gardes, il tira une chaise de la table et s’assit. En faisant ça, il se plongeait lui-même dans une situation désavantageuse – il valait mieux être debout qu’assis pour se battre – mais il espérait que le mouvement convaincrait de sa bonne foi et briserait la tension, tout en envoyant un message au brun : celui qui disait qu’il n’avait pas peur de lui et restait en maîtrise. C'était faux mais il devait le croire.

Il joignit ses mains devant lui. Elles ne tremblaient pas, ce qui était déjà une bonne chose. Son cœur, lui, détalait dans sa poitrine. « Je suis venu ici par le passé, sur les ordres de Montarville. J’étais chargé de conclure quelques accords commerciaux avec le Roi. Durant mon séjour, j’ai rencontré Wesphaline et nous avons passé du temps ensemble. » Il se demanda s’il était obligé de raconter la suite en détails. Peut-être pas. Il n’avait pas à se justifier et, surtout, il n’avait pas l’intention de parler de sa vie privée devant Childéric. « Le fait est que j’ai été surpris de la croiser tout à l’heure puisqu’elle ne m’a jamais dit qu’elle était la femme de Balthazar. C’est la seule raison pour laquelle elle désire me voir. » Il avait appuyé sur la seule. « Je vous prierais donc de ne plus douter de ma loyauté à l’avenir. » asséna-t-il, en articulant bien chaque syllabe. Il laissa son dos retomber sur le dossier, sans que l’air qui habillait ses traits ne le quittât pour autant. « Cependant, je sais autre chose, quelque chose de plus intéressant dont je voulais justement discuter avant que vous n’assommiez ce pauvre garçon. » Lambert inspira. « Lorsque Luce D’Uobmab a réussi à accaparer une partie de Narfas, il semble qu’il ait été aidé. Je n’ai pas de certitudes puisqu’il s’agit du rapport des espions de la Couronne qui, bien que professionnels, ne sont pas à l’abri d’erreurs. Néanmoins, il semble que l’information soit plus que probable, bien que Montarville n’ait pas souhaité l’utiliser. Nous étions jeunes à l’époque. Bref, il ressort de ces rapports que Jesabelle serait à l’origine de la victoire de Luce. L’échange de bon procédé plaçait Luce à la tête de la partie lointaine de Narfas et Jesabelle obtenait le soutien nécessaire pour modeler la société comme elle l’entendait, notamment la Religion. Je connais mal cette dernière et ses préceptes mais ce qui semble clair, et l’entretien nous l’a, semble-t-il, confirmé, c’est que Balthazar ne détient pas la totalité du pouvoir. Jesabelle semble avoir plus de poids dans la balance. Quant à Wesphaline et Gaspard, je n’en sais pas plus. Les rouages du pouvoir de Narfas sont nébuleux mais cette trahison pourrait nous être utile. »

À un moment, Lambert finit par se lever. « Je vais répondre aux attentes de la Reine et essayer de comprendre le fin mot de cette histoire. » affirma-t-il. Il n’avait pas besoin d’obtenir l’accord de qui que ce fût. En passant devant Childéric, il prit son courage à deux mains et lui adressa un ordre. « Veillez à régler les conséquences de votre débordement avant mon retour. »




Quand il fut introduit auprès de la Reine, il garda le silence, attendant qu’elle ouvrît le bal. Lui faire face était déjà assez pénible comme ça. Cette histoire était stupide mais il en gardait un souvenir vivace, aussi vivace que la panique qui l’avait saisi quand elle s’était montrée plus entreprenante et que son propre corps avait voulu y répondre. Malgré la situation, il craignait que le désir ne resurgît. Il lui devait peut-être quelques explications mais il n’était pas le seul. Couchait-elle souvent avec d’autres hommes que son mari ou était-il le seul qu’elle eût souhaité avoir ? L’alcool avait peut-être aidé, en plus de leurs discussions habituelles. Il n’en démordrait pas : elle aurait dû le lui dire dès le début. Si elle l’avait fait, il aurait gardé ses distances.

1695 mots



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| Les Portes Chapitre V - L'arrivée à Narfas | - Page 9 Js9b

Les Portes V


Rôle :

« C’est dommage. »

Le départ d’Adolphe signifiait un joueur en moins. Il devait néanmoins avoir un emploi du temps chargé. Ludoric avait eu beaucoup à faire durant la traversée jusqu’à Narfas. Parfois, son absence me pesait. C’était disproportionné car nous n’avions jamais été autant ensemble. Avant, nous ne vivions pas au même endroit. Nos parents savaient que nous nous voyions de temps en temps mais nous ne pouvions pas passer toutes nos journées tous les deux. En plus, même si c’était toujours le cas, nous devions faire attention à ne pas nous faire surprendre. Nous étions restés longtemps à éprouver des choses l’un pour l’autre, à le savoir pertinemment, sans pour autant nous confier nos sentiments. C’était implicite et tout ce qui n’était pas prononcé nous semblait alors moins effrayant.

J’acquiesçai dans le sens de Rosette, sans savoir si nous pourrions le rejoindre ou non. Partir à l’aventure me paraissait tentant mais si je pouvais être seul avec Ludoric, je choisirais cette dernière option.

« Oui c’est exact. C’est lui. Il est très prometteur. »

J’avais essayé de contrôler le vibrato de ma voix. Quand je parlais du roux, mon cœur s’emballait et j’avais tendance à ne plus vouloir lâcher le sujet. J’aurais pu le complimenter durant des heures. Quand il me manquait, c’était pire. Un rien me faisait penser à lui et son visage était comme gravé sur ma rétine.  

« Je jouais aussi beaucoup à cache-cache avec mes sœurs. »

Je souris au Prince. La perspective de le faire avec lui un jour m’enchantait. Bientôt, nous n’aurions plus le loisir de nous adonner à ce genre de pratiques. Surtout moi. Il lui restait de nombreuses années devant lui, surtout s’il n’était pas destiné à régner.

« Parfait. »

Au moins, tout le monde était tombé d’accord sur le fait de trouver Ludoric et Clémentin. Une part de moi jalousait un peu ce dernier et Rosette. Même s’il n’était que palefrenier aux yeux des autres, il n’en demeurait pas moins le fils de mon père. Tout semblait s’arranger au mieux pour eux deux. Ce n’était pas le cas de mon couple. Tout me paraissait compliqué. Si je voulais le trône, Ludoric devrait se contenter d’un second rôle. Je devrais me marier, avoir des enfants. Il vivrait son statut d’amant et d’amoureux depuis l’ombre. Si je choisissais le trône, et je l’avais choisi, je n’étais pas sûr de supporter de le voir n’exister que dans le secret. Et lui, le supporterait-il ? Il valait mieux ne pas y penser, rester à l’abri de cette réalité qui adviendrait un jour.

Quand Anthonius me retourna la question, je réfléchis. Ce n’était pas évident. Je trouvai cependant une porte de sortie.

« Je pense qu’il faut être bon comme mon père l’était, tout en étant craint comme le Roi d’Uobmab. »

Tout en cherchant toujours à être une meilleure version de soi-même chaque jour. Ne jamais se reposer sur ses lauriers. Ma définition aurait peut-être pris plus de temps à développer mais, en marchant, mon regard finit par tomber sur une crinière rousse, accompagnée d’une brune. La cour impériale n’était pas si grande que ça. Si j’avais bien compris, tous les nobles y logeaient dans des appartements ou des immeubles qui formaient un tout. Cela signifiait aussi qu’ils étaient probablement à la disposition de Sa Majesté. C’était très différent de Lieugro où chacun avait une propriété bien à lui, avec des terres, parfois même une forêt ou un bout de rivière. Les serfs travaillaient directement sur ces terres. À Narfas, le peuple se trouvait derrière le mur qui séparait la noblesse du reste. Ça m’avait choqué à mon arrivée. C’était comme si la noblesse était un diamant intouchable… ou comme si elle avait peur du monde extérieur.

J’abandonnai pourtant vite mes pensées architecturales en constatant la proximité qui semblait s’être installée en peu de temps entre Ludoric et Clémentin. À quoi jouaient-ils ? Surtout, à quoi le roux jouait-il ? Je me rassurai en songeant que, peut-être, ce dernier faisait une tentative de rapprochement avec l’ennemi afin d’en savoir plus sur lui et percevoir ses intentions. Elles n’étaient claires pour personne. Déjà, beaucoup ignoraient qui il était. Ensuite, il ne semblait pas parler de ses projets ouvertement. Rosette savait-elle ? S’ils voulaient se marier, il faudrait qu’il se fasse reconnaître. Elle n’allait pas épouser un paysan…

« Prince Anthonius, il semblerait que nous ayons retrouvé ceux que nous cherchions. »

Je me voulais assuré mais le fait que Clémentin ait murmuré des mots à l’oreille de Ludoric et qu’il lui tende à présent son petit doigt me travaillait. Le roux ne me trahirait jamais, surtout pas pour… ça.

« Je vais vous présenter si vous permettez. »

Je me dirigeai vers les deux garçons. Heureusement, Clémentin n’était pas Childéric.

« Justement, nous vous cherchions. »

J’envoyai une œillade à Alembert qui n’avait pas spécialement accepté la recherche mais qui avait suivi docilement.

« Je vous présente le Prince Anthonius de Narfas et vous connaissez déjà Alembert, le fils de Garance. Inutile de présenter Rosette. »

Je souris et regardai Anthonius.

« Prince Anthonius, voici Ludoric de Tuorp, un soldat très prometteur. Il a été dévolu à la garde de Zébella d’Uobmab et m’accompagne également loyalement depuis longtemps, en tant que protecteur et ami. Et voici… »

Je perdis mon regard sur Clémentin. Comment le qualifier ?

« Il s’agit de Clémentin, le palefrenier du château de Lieugro qui a su charmer le cœur de ma cousine. »

Il fallait bien justifier qu’il soit avec nous et, de toute façon, les deux n’avaient jamais été discrets.

Je me tournai vers les garçons.

« Le Prince allait justement nous expliquer l’un des jeux de Narfas. Nous vous cherchions pour que vous puissiez participer. »

Je les regardai, avant de demander.

« Et vous ? Que faisiez-vous ? Je ne savais pas que vous vous connaissiez si bien. C’est une aubaine. »

Pas du tout. J’espérais que Ludoric serait capable de me donner des explications en privé. En attendant, en public, il devrait se débrouiller pour trouver de quoi répondre à mes questions.

1018 mots

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Siruu Belhades
Dim 04 Juin 2023, 18:54


Oh, Gao. Un homme éternellement à l’aise. De temps à autre, il arrivait que Melchior imagine son jumeau succomber à des supplices innommables. Un plaisir coupable, bien sûr, mais il ne le contrôlait pas. De toute façon, il suffisait d’une simple pensée pour faire cesser les rêveries et le ramener à la réalité : même au fond de l’océan, enchaîné à un fardeau, Gao aurait l’air dans son élément. C’était sans doute ce qui faisait tout son charme. Le semencier était difficile à détester et, visiblement, Melchior avait pris cela comme un défi. Ces derniers temps, il essayait de changer sa perspective, et d’ignorer son affect pour se concentrer sur ce qui comptait vraiment. Par exemple, leur accord venait d’être conclu.

« Oui, vendre mes thés me semble être une contrepartie tout à fait raisonnable, et c’est dans tes cordes. » Ce n’était pas son objectif principal, bien sûr, mais il ne pouvait pas dévoiler ses plans à son jumeau. Il aurait pourtant aimé obtenir conseil. « Et puis, tu soutiendrais un petit commerce familial. C’est important, tu sais. » Il fit un sourire narquois, dans un élan de sarcasme qui ne lui était
pas familier. « D’ailleurs, si certaines clientes particulières nécessitent un petit quelque chose en plus, fais-moi signe. Je peux toujours altérer la recette. » Des fruits de bois-jolis par ci, quelques feuilles d’ifs par là. Melchior n’était pas aussi inculte qu’il en avait l’air. Tout ce temps passé sous la gouvernance tyrannique d’Usélianne l’avait encouragé à développer ses connaissances dans divers domaines.

« Enfin bon. Tu me donneras les quantités requises, et je te fournirais tout… dans la mesure du possible s’entend. » Il ne doutait pas un instant d’avoir accumulé suffisamment de matières premières pour tenir au moins une poignée de cycles lunaires. Plus il écoulait son stock, mieux ce serait. De toute façon, il pouvait toujours passer commande chez certains de ses contacts. Il lui faudrait payer le prix fort pour être livré à temps, mais l’époque où Melchior avait à compter chaque sou était révolue. Tandis que Gao s'imposait chez les semencier, lui s'était attelé à revitaliser le commerce familial.

La rumeur circula avant même que leurs verres ne soient à nouveau remplis. Melchior s’offusquait presque d’apprendre la nouvelle dans de telles circonstances. Après des mois à régulièrement assister aux réunions clandestines, il aurait au moins espéré recevoir une invitation personnelle en avance. Et maintenant, on lui demandait s’il connaissait Primaël ? « Bien sûr ! » Il prit note de ne pas montrer autant d’enthousiasme, la prochaine fois que quelqu’un abordait ce sujet. « Enfin, pas personnellement, mais de nom, oui », marmonna-t-il pour se rattraper. En vérité, il ne tenait pas ce personnage en haute estime. Toutefois, leurs intérêts politiques convergeaient.

« Excellente idée. J’irais le contacter. » Melchior se reprochait presque de ne pas y avoir pensé à l’instant même où ce bal avait été mentionné. « Par contre, si je mets ma marchandise dans les mains de Clémentin, je dois être prêt à ce qu’elle disparaisse. Il a l’air si distrait. » Malgré ses paroles, sa véritable opinion du garçon était toute autre. Il estimait en avoir vu assez pour considérer qu’il serait un apprenti débrouillard. De toute façon, il allait avoir besoin de main d’œuvre. Fier de sa plaisanterie, son regard remonta sur Gao. Il essayait en vain de se rappeler de la dernière fois où ils avaient pu s’entretenir de la sorte. Leurs engagements professionnels respectifs leur prenaient beaucoup de temps.

Il avait envie de mentionner Pénélope, leurs parents, le décès de Quentine et d’Usélianne. Non, il avait envie de parler de leurs désaccords philosophiques, de leurs multiples disputes, de leurs choix de vie différents et de toutes ces interactions qui, au fil du temps, les avaient façonnés en des individus aussi distants que distincts. Il avait envie de pointer du doigt l’ironie du destin qui avait fait d’eux des jumeaux à la naissance alors que, désormais, ils ne partageaient pas même une couleur de cheveux. Il avait envie d’avouer qu’il ignorait lequel d’entre eux était le plus responsable de cette cassure dans une relation qui aurait pourtant dû être fusionnelle. Oui, il avait envie de dire tout cela à la fois, au point de ne pas savoir par où commencer. Cela ferait trop d’abcès à crever, et il valait mieux ne pas prendre le risque d’infecter leur conversation. Alors, il optait pour une réponse simple. « Merci, en tout cas. C'est toujours un plaisir de faire affaire avec toi. »



Le marchand était assis, à son bureau. La boutique n’avait pas ouvert ses portes, aujourd’hui, mais il avait dû faire exception pour un client particulier. Godefroy, un ancien employé désormais occupé à servir des personnes de haut rang, l'avait interpellé sur le chemin du retour. Pour plus de confidentialité, ils s'étaient isolés dans le salon de thé. Ou plutôt « Le bazar de Balthazar », baptisé ainsi en l’honneur d’un ancien roi droit et charismatique. Le Balthazar actuel avait le charisme et la droiture d’une nouille humide mais, puisque le nom d’enseigne avait été décidé à une époque lointaine, le propriétaire actuel n’avait eu d’autre choix que de le préserver.

Toujours est-il que Godefroy avait une requête et, Melchior, une réponse. « Je te prie de ne plus jamais me sauter dessus au beau milieu de la rue. » Il tentait de contenir son agacement par un soupir. « C’est bien parce que c’est toi que je tolère ce comportement. » Le marchand griffonna quelques notes, puis lever les yeux pour contempler la silhouette frêle du garçon. « Il faut que tu en parles aux autres, et que tu me donnes des noms. »« C’est promis… »« Les promesses, ça ne vaut rien. Je te fais énormément de faveurs, et je n’en attends pas moins en retour. Tiens, commence par ça. « Il tendit le papier à Godefroy. C’était un message destiné à Primaël. Il n'y avait rien de compromettant, simplement une invitation à une discussion, en tête-à-tête ou en présence de son apprenti.

1010 mots.
Rôle - Melchior:


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