Le repentir est bon, mais pas autant que l'innocence

Partenaire : Styvan
Intrigue/Objectif : Styvan et Lhænore se rencontrent lors d'une partie de chasse dans la forêt de Myngrimu. Ça tourne mal. 8D

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Elle King - Baby Outlaw

Les deux Vampires marchaient depuis des heures. Elles étaient parties tôt ce jour-là. La Rahzden pensait que sa créatrice l’emmenait chasser dans la forêt qui entourait leur demeure. Découvrir un paysage nouveau – tout comme traverser le portail en soi – fut une surprise. « Où sommes-nous ? » demanda Lhænore, tournant sur elle-même le regard ravivé d’intérêt. « Nous sommes sur le continent dévasté. » répondit la mère, sans interrompre sa marche. « D’accord, mais encore ? Où est-ce qu’on va ? » La nouvelle née s’impatientait. Eurielle n’avait pas daigné lui adresser la parole sur le trajet autrement que pour lui rabattre les oreilles sur la conduite qu’elle attendait d’elle pour cette excursion. « Je me suis dit que tu devais commencer à te lasser du Fjörd. » Ah, enfin ! pensa la jeune femme. « Il est temps de changer de cadre. Tu apprendras mieux ainsi. » Lhænore croirait presque entendre Raoul. En plus poli. Son aîné n’avait, après tout, pas manqué une occasion de se moquer d’elle, clamant à leur mère qu’elle avait traumatisé la faune de la forêt où ils avaient pris l’habitude de chasser. Elle n’avait débordé qu’une fois, par Aylidis ! Une fois. Puis, la gorge de ce lièvre aurait de toute manière fini par rencontrer ses crocs. Le souvenir avait ravivé la sensation du sang coulant dans sa gorge. Elle avait soif.

« On arrive bientôt ? » demanda la Rahzden, le regard braqué sur le feuillage épais qui remplaçait désormais le ciel. « Encore quelques minutes. Nous ne sommes qu’à la lisière. J’aimerais que nous nous enfoncions un peu plus avant de commencer. » La nouvelle née roula des yeux. Fjörd ou non, finalement, la chasse ne changeait pas. Lhænore s’interrogeait tout de même sur la raison de leur venue. Celle qu’Eurielle lui avait donné lui semblait un peu légère pour entreprendre pareil voyage. « Et donc… Tu nous as traînées ici parce que tu pensais que je m’ennuyais au Fjörd ? » l’interrogea-t-elle de son impertinence habituelle. La créatrice sourit en silence. Elle avait passé beaucoup de temps – la plupart en fait – aux côtés de la nouvelle née, depuis son réveil. Elle avait fini par connaître son manège comme si c’était une chose qu’elles partageaient, une passion commune, en somme. « Qu’y a-t-il là-bas qui pourrait possiblement m’ennuyer ? Notre forêt à mille facettes est formidable. Je me sens dépaysée ici. » finit-elle par piquer avec une ironie attendue. « Toutes les forêts ne ressemblent pas. Si je te laisse ici et te demande de retrouver ton chemin, t’en sentirais-tu capable ? » rétorqua la mère, effaçant l’amusement du visage de son enfant. « Tu n’as pas de repères ici. Ça peut changer beaucoup de choses lors d’une chasse, tu verras. » - « J’en suis sûre. » soupira Lhænore. « Mais nous sommes vraiment venues jusqu’ici uniquement pour la chasse ? » Elle n’en démordait pas. Ce prétexte lui semblait toujours bien trop maigre. « Oh Lhænore, quand tu insistes ainsi j’ai toujours l’impression de décevoir tes espérances. Ça me fend le cœur, car parfois, je ne pense qu’à ton plaisir et rien d’autre. » Le ton qu’Eurielle empruntait l’agaçait. Probablement car elle le reconnaissait. « Je pense qu’on peut s’arrêter ici, qu’en penses-tu ? » proposa l’aînée, balayant brièvement l’endroit du regard. La Rahzden l’imita avec peu d’entrain. « Je te laisse prendre l’initiative à partir d’ici. Tu ne seras pas seule, rassures-toi, mais je ne t’aiderai pas. » La nouvelle née s’attarda sur une clairière à quelques pas, dubitative. Sa soif s’était estompée avec la marche, et avec elle, toute motivation. Même le bruissement des feuilles qui étaient parvenus à ses oreilles lui avait à peine fait presser le pas. L’entrain naissant fut étouffé dans la collision qui l’attendait, dissimulée sournoisement derrière l’arbre qu’elle venait de passer. « Ah, bon sang ! » grogna la Rahzden, se détachant du feuillus contre lequel elle s’était appuyée pour reprendre l’équilibre. « Qu’est-ce que… » Son corps entier s’était figé en découvrant l’arbre qu’elle pensait avoir percuté. Il était bien vivant, et ce n’était pas un arbre. « C’est un enfant… » balbutia-t-elle, complètement décontenancée. Lhænore s’était tournée vers sa créatrice en quête de réponse, mais elle non plus ne semblait pas les avoir pour une fois. Elle s’était néanmoins avancée entre sa protégée et le garçon. Elle ne pouvait prévoir le comportement d’un inconnu. Encore moins un aussi jeune. Mais elle savait les jeunes vampires instables et n’était pas prête à courir un risque en laissant sa Rahzden prendre les devants. « Jeune homme, que fais-tu ici ? C’est un endroit dangereux…- » commença-t-elle, avant de s’interrompre en voyant une seconde silhouette se détacher d’entre les arbres. Il n’était visiblement pas seul.

791 mots

Elle sent bon mais je la sens pas.

Styvan, complétement blasé par son train-train habituel d’apprenti vampire, gesticulait de frustration sur une chaise en bois qui lui donnait l’impression que des lames étaient plantées dans son petit postérieur. L’air ambiant profitait d’une légère effluve de sang de lapin tant le blondinet soupirait à répétition, comme pour faire comprendre sa contrariété à sa manière. Gabor, Vlad… L’adolescent ne saisissait rien à ce charabia, pourquoi une race dominatrice devait à ce point être divisée en plusieurs lignées ? Ce n’était pas de la mauvaise volonté, mais être assis devant un bureau et entendre des domestiques lui apprendre des choses d’adultes illogiques ce n’était pas spécialement sa tasse de thé. L’apprentissage de la langue et de l’histoire de sa nouvelle race commençait franchement à lui concassé le peu de cellules grises attentives qu’il lui restait en un guacamole de cervelle. Lilia perpétuellement aux petits soins pour son bébé, avait bien noté ses petits regards évasifs vers les fenêtres du manoir. Après tout, cela faisait déjà un moment qu’il ne s’était pas dégourdi les gambettes en allant chasser le gibier. « Que dirais-tu de sortir un peu ? » demanda-t-elle. L’excitation avait annexé le corps de son fils qui ressemblait bien plus à un berger allemand fou de joie de faire sa balade nocturne qu’à un ado de seize ans apte à devenir un vampire de renommé. « Merci Lilia, après pro-mis je me remets dans les études ! » « Allez viens ! » dit-elle en entamant un sprint dans les escaliers menant à la porte d’entrée. C’était à se demander lequel des deux étaient le plus heureux à l’idée de quitter cette salle de classe lugubre.

Les fredonnements enjoués du garçon sautillant dans un sentier de la forêt bourdonnait à répétition dans le crâne de sa créatrice qui désapprouvait déjà sa stupide idée. Son fils avait le don de lui faire regretter ses choix instantanément. Le jeune vampire pouvait se montrer très lucide puis d’un coup devenir agaçant de gaminerie. Le cerveau en bouilli par les inepties que les soubrettes lui avait rabâchées depuis son réveil, il ne fallait pas compter sur lui pour être sérieux le restant de la journée. Le marmot se retourna vers sa mère, la poire éblouissante de gaieté. « Je peux partir devant ? Tu me surveilles de loin » proposa-t-il. « Je ne sais pas, je trouve la forêt bien agitée aujourd’hui. » mais son hésitation n’avait pas pu lutter très longtemps face à la frimousse de son protégé. « D’accord, mais si ça craint, tu me laisses gérer le problème ». Le blondinet hocha la tête verticalement avec un large sourire lui chatouillant légèrement les oreilles avant de prendre ses guibolles à son cou. Maintenant seul, du moins en apparence, le garçon rêvassait tout en avançant dans un sentier parsemé de gigantesques troncs si propre à cette somptueuse forêt qu’il commençait à bien connaitre. Il repensa à sa rencontre avec son cousin, sa première traque ou il était parvenus à ôter une bouloche du chandail en laine de sa mère. Des bons souvenirs qui lui avaient accaparé toute son attention. Le garçon était tellement perdu dans ses pensées qu’il n’avait même pas flairé l’odeur des deux suceuses de sang qui arrivaient à contresens.

Un choc soudain avait eu le mérite de le ramener à la raison. « Aie, mais séri.. » le garçon agacé, sans s’en rendre compte, venait de heurter une femme à l'odeur agréable qui faisait au moins une tête de plus que lui. Avant qu’il ne trouve le courage de s'excuser poliment, une deuxième personne s’était interposé. Décision fatale qui avait profondément braqué l'adolescent, prêt à bondir sur la première qui ferait un mouvement brusque. En position d’animal bipède sur ses appuis, il se contentait juste de les observer sans même prendre le temps d’écouter ce qu’elles étaient en train de lui raconter. Sa mère venait de sortir des buissons qui se tenait derrière le chaton agressif. « Et vous, que faîtes vous ici ? Deux vampires âgées de la trentaine qui ne sentent pas un gamin à quelques mètres ? ». Elle marqua un temps d’arrêt dans le but d'observer de plus près leurs expressions.  « J’espère que vous avez seulement le nez bouché et que vous ne faites pas parties de cette lignée de cinglés qui boivent le sang des nôtres. » exprima-t-elle en posant sa main dans la chevelure blonde de son fiston toujours aux aguets. « Comme vous pouvez le constater, même si c’était le cas, mon petit tigre ne se laissera pas faire. » le garçon avait fléchi les genoux en acquiescement.

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Le repentir est bon, mais pas autant que l'innocence

Lola Blanc - Here Come The Wolves

Les épaules d’Eurielle s’affaissèrent dans un soupir silencieux. Le court échange de regard qu’elle avait eu avec sa Rahzden n’avait en revanche pas suffit à éteindre ses craintes. Elle s’y attendait. Lhænore n’avait après tout pas revu une seule âme – du moins autre que celle de Raoul et la sienne – depuis sa transition. « Nous ne sommes pas de Thanos, rassurez-vous. » Le soulagement qu’elle ressentît avait permis un sourire timide. « J’en déduis que vous non plus, vu la vive réaction que les membres de cette lignée suscitent chez vous. » supposa-t-elle, masquant son amusement par sa cordialité. Son regard les déshabilla de haut en bas. Non, ils étaient trop jeunes. Eurielle avait déjà eu l’occasion de rencontrer des membres de leur lignée, même si ce n’était pas la plus courante. Pour la nouvelle née, en revanche, c’était une première. Une première de tout, en fait. Elle était persuadée – jusqu’à aujourd’hui – que la lignée de Dalemir n’était qu’une sorte de croque-mitaine que l’on avait inventé pour donner une raison de plus aux enfants de ne pas suivre le gentil monsieur avec de longues dents. Il fallait après tout être sacrément tordu pour transformer un enfant, et en faire une habitude, au point qu’une lignée se forme à partir de leurs travers. Et ils se comportaient en vierges effarouchées quand il était question des tares de Thanos ? Quelle bande d’hypocrites. Son regard s’attarda un instant sur le gamin qu’elle avait eu le malheur de percuter. Elle n’arrivait même pas à estimer son âge. Il devait à peine être plus jeune qu’elle lorsqu’elle avait quitté la Cité Engloutie. Elle toisa pensivement sa créatrice. Si elle l’avait rencontrée à l’époque, elle ne serait probablement pas devenue ce qu’elle était aujourd’hui. Non, sa jeunesse l’emplissait encore trop de fierté pour envisager d’abandonner tout ce qu’elle avait toujours connu. Elle en avait fait du chemin, depuis. Plus littéralement qu’elle ne l’avait voulu d’ailleurs.

La révérence courtoise – quoique quelques peu théâtrale – qu’Eurielle venait de tirer la rappela soudainement à la réalité. « J’en oublie mes manières. » Par ses propos, sa mère entendait que c’était plutôt ces gamins mal élevés qui avaient oublié leurs manières, à les harceler de questions et insinuer des choses avant même de s’être présentés. « Eurielle Nadej, de la lignée de Gabor. » Elle sourit. « Et voici Lhænore. Ma plus jeune. » La sensation de cette main glissée dans son dos et l’invitant à rejoindre la conversation lui était désagréable. Pourtant, elle savait que sa mère ne lui laissait pas le choix. « Un plaisir. » lâcha-t-elle alors, s’armant d’un sourire crispé. Si Lhænore pensait être lasse de l’isolement qui lui avait été imposé depuis son réveil, se retrouver face à ses gamins impertinents lui avait fait passer ce désagrément. Ce n’était pas que de leur faute pour tout dire. Elle n’avait jamais aimé les gens, et devoir leur faire la conversation avait toujours été l’épine dans son pied. La Rahzden avait pourtant toujours préféré la compagnie des plus jeunes, comme tout Dalemir semblait-il. Il était plus simple de leur soutirer des informations. Il suffisait de céder à un caprice ou deux, d’accepter de jouer un peu avec eux, et le tour était joué. Avec des gens de son âge, c’était plus complexe. Il fallait être subtil et s’armer de patience. Hélas, Lhænore ne possédait qu’une seule de ces deux qualités. Parfois, cela ne suffisait pas, et il fallait alors être prêt à donner plus. Le plus souvent, c’était trop. Les jeux des adultes étaient après tout bien différents de ceux des enfants, et plus éloignés encore de leur innocence, puisqu’ils impliquaient parfois de vendre son corps. Non, jouer avec les enfants était plus simple. Quelqu’un ressortait toujours victorieux de leurs jeux. Et le plus souvent, ce quelqu’un était Lhænore. Sensible à la réticence de son enfant, Eurielle reprit les rênes : « Quoi qu’il en soit… Nous nous excusons si nous vous avons surpris. J’ai laissé mon enfant prendre l’initiative de cette chasse et je suis restée en retrait. Nous n’avons donc pas pu sentir votre enfant venir. » expliqua-t-elle alors. « Elle est encore très jeune et inexpérimentée. Le vôtre aussi, non ? Cela se voit. » Son sourire s’était attendri lorsque son regard s’était posé sur le blondinet. « Ce n’est pas facile au début, n’est-ce pas ? » déclara l’aînée, s’adressant autant au jeune vampire qu’à sa créatrice. « La mienne peine encore un peu. » La Rahzden sentit son dos chauffer sous la paume de sa mère. Ses marques d’affection l’agaçaient le plus souvent, mais elle ne disait rien. Elle était sûre qu’Eurielle n’arrêterait pas, même si elle le lui demandait de toute manière. « Elle n’est pas très motivée il faut dire aussi. » Le manque d’intérêt flagrant que son enfant portait à la chasse n’échapperait pas au plus gros des idiots. « Mais peut-être qu’elle manifesterait plus d’entrain si elle avait un compagnon de chasse de son âge ? » Le sourire que sa créatrice arborait lui faisait déjà regretter cette conversation. Elle n’allait pas aimer où elle allait les mener, cela ne faisait aucun doute. « Qu’en pensez-vous ? Quitte à chasser, autant chasser ensemble. Nous ne risquerons pas de marcher sur nos plates-bandes respectives au moins. Et puis nos enfants apprendraient sans doute mieux ensemble, vous ne croyez pas ? Peut-être même qu’ils se sentiront l’esprit compétitif pour une petite chasse amicale. » Elle savait son enfant fière comme un paon. Elle ne refuserait pas un défi.

918 mots
Post II

Oopsie.

Depuis que sa mère était intervenue, le blondinet s’était légèrement détendu. Son regard évasif dirigé vers le sol témoignait de la concentration sans faille dont faisait preuve l’adolescent afin de se remémorer quel pouvait être le foutu nom de cette lignée de vampire s’attaquant à ses égaux. Lorsque l’inconnue prononça le nom de Thanos, ses yeux s’émerveillèrent et le poids sur sa langue avait enfin décampé. Lilia, escortée de son faux sourire cordial, écoutait patiemment ce qu’avait à leur raconter les deux étrangères. Mission difficile tant les critiques à leurs égards fusaient dans la tête de la débutante silencieuse. Pour qui se prenait-elle ? La garce pensait qu’elle avait choisi son fils uniquement parce qu’il était enfant ? Quelle arrogante persuadée de tout savoir. Même s'il restait jeune, il était spécial à ses yeux. Après une frivole hésitation, elle soupira. La vampire avait décidé de laisser coulé. Après tout elle avait tout l’air d’être une Radzhen comme son fiston. Fiston qui d’ailleurs fixait toujours scrupuleusement le sol, confus, car au seul moment où il avait décidé de relever ses yeux, son regard en rencontra un autre bien observateur. Pourquoi la regardait-il ? Quelle était cette tension dans l’atmosphère ? Personne n’avait l’air de vouloir être ici et surtout pas lui. Après tout, la seule chose que le garçon désirait à ce moment même était une bonne dose d’hémoglobine fraichement arrachée du cou d’un gibier apeuré. Un léger fil de bave essaya de s’enfuir de sa cavité buccale, mais le vif affamé l’aspira avant de se faire repérer.

Son répit cérébral fut court face à la présentation d’Eurielle. Un nouveau bourreau allait venir lui torturer l’esprit pendant de longues minutes. Son regard refixa le sol monotone. Ga… bor… c’est qui eux ? répéta-t-il frénétiquement dans son esprit. « Gabor ? On dirait bien que vous êtes au bon endroit alors. » le regard de sa créatrice décortiqua les deux femmes de haut en bas. « Eurielle. Lhænore. En voilà de beaux prénoms. Lilia Khanis… » elle regarda Lhænore puis esquissa son sourire spécial de vipère « … de la lignée de Dalemir. Et voici mon seul fils. » expliqua-t-elle en inclinant la face de son enfant vers l’avant. « En… enchanté. Styvan Khanis. Lignée de Dalemir également. » bafouilla le discret vampire, qui venait tout juste de finir son combat intellectuel contre son tortionnaire. Les excuses d’Eurielle avait l’air sincère pour le garçon qui amorça un léger sourire, consolé de ne pas finir en ragout au diner de deux vampires. « Oui, il est très jeune et manque cruellement d’expérience. » sa mère ajouta « Oh, mais ne vous en faites pas, il se peut que j’aie légèrement surréagi. Je suis un peu trop mère poule quelquefois. Je suis surprise que mon fils ne vous ai pas flairé, il a un brillant odorat. Et il adore l’arôme des fleurs qui plus est. N'est-ce pas Styvan ? » Il est vrai que les deux femmes jouissaient d’une odeur que l’adolescent adorait, mais beaucoup trop réservé pour leur en faire part, il se contenta simplement d’un hochement de tête furtif en réponse. Après un léger silence, les mots composant l'interrogation que lui avait demandé l’inconnue lui planta une flèche pleine de bienveillance en plein cœur. Même s'il ne doutait pas de la bonté de la question, "pas facile" restait un doux euphémisme. Le garçon avait encore eu envie d’en finir deux semaines plus tôt. Il n’était pas évident d’être un suceur de sang, encore plus si jeune. Mais une fois de plus, il réaffirma juste le balancement de sa poire en acquiescement.

Petit à petit, le Rahzden se détachait de plus en plus de la conversation et humait désespérément l’atmosphère à la recherche d’une proie à traquer. Il était devenu complètement accroc à cette nouvelle activité. En tant qu’enfant unique, c'était sa manière à lui d’évacuer tout le poids que sa mère lui mettait sur ses frêles épaules. Alors, lorsque Eurielle proposa un duel entre Styvan et Lhænore, ce dernier avait explosé d’excitation et aboyait intérieurement à sa génitrice d’accepter. « Quelle formidable idée Eurielle. Je peux voir se dessiner la joie sur le visage de votre enfant, c’est… touchant. » Lilia n’aimait décidément pas cette mioche qui avait l’air d’avoir continué de cracher son venin tout le long de la discussion. « Tout cela tombe bien puisque j’ai justement un petit quelque chose sur moi qui pourrais nous faciliter amplement la tache. Enfin, cela appartient à mon frère, mais il ne m’en voudra sûrement pas vu le contexte. » sa main creusait les différentes poches de son blazer et arracha une petite marionnette en bois de sa robe. Un sourire machiavélique se crayonna sur la frimousse du rejeton qui se pressa de l’asphyxier. Trop tard, le regard de l’autre génitrice l’avait discrètement feuilleté. Ce petit mannequin, il le connaissait très bien. Il était sa proie préférée quand il s’entrainait. « Voilà la cible. » exprima-t-elle en tenant arrogamment la petite entité dans sa main. Avant que les deux femmes n’eurent le temps de demander ce que pouvait être cette chose se tenant dans le creux de sa paume, elle planta son ongle dans son poignet. Le sang qui coulait, glissait sur le bois composant la peau de la cible à chasser. « Je vous présente la cible. Une création de mon frère qui tient une scierie dans ces bois. » expliqua-t-elle alors que la minuscule marionnette gonflait grâce à l'hémoglobine, atteignant la taille d’un mètre quatre-vingt-dix environ à sa pleine croissance. « Ne vous en faites pas. On ne dirait pas, mais sa peau est moelleuse comme du coton, et elle détient du sang de sanglier. Pas très noble comme nectar, mais cela fera l’affaire comme récompense pour le vainqueur. Non ?» elle hocha discrètement la tête à son bébé avant de siffler. Le bourdonnement avait fait fuir la créature dans la forêt, suivi de Styvan qui avait dévalé aussi vite qu’il pouvait le sentier qui les entourait en criant de joie. « Oups, ils sont partis. » le sourire de vipère avait fait son grand retour.

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Le repentir est bon, mais pas autant que l'innocence

Mr Gabriel - Tambourine

Eurielle ne se défaisait plus de son sourire. Elle retrouvait beaucoup de ses enfants chez cette créatrice de Dalemir, avec peut-être l’entrain dont elle faisait preuve en moins pour Lhænore. « Qu’est-ce que tu attends ? Allez, file. Ta proie va s’échapper. » lança-t-elle à sa fille qui l’interrogeait du regard. Une lueur d’agacement passa sur le visage de la Rahzden avant qu’elle ne s’élance sur la piste que sa proie – et son concurrent – courraient. Eurielle, quant à elle, la regardait partir satisfaite de la tournure des événements. « Qu’est-ce qu’on ne fait pas pour nos enfants, hm ? » souffla-t-elle à l’intention de Lilia. « Vous avez de la chance. Le vôtre a l’air plus docile. » Le caractère de feu la sirène la chagrinait parfois, quand il ne la divertissait pas. Eurielle se doutait que la transformer n’y changerait rien. Et à présent qu’elle tenait le taureau par les cornes, elle souhaitait que ce fut le cas. La transition n’était pourtant pas réputée pour apaiser les âmes fougueuses. « J’aurais pensé que se nourrir serait une motivation suffisante. Il faut croire que non. » soupira la mère. « Enfin… Allons-y. Nous ne voudrions pas nous faire distancer. » Elle ne voulait pas perdre son enfant de vue. Elle ne lui faisait pas suffisamment confiance pour la laisser chasser seule avec un autre jeune. Ce n’était pas qu’elle craignait pour la vie du gamin, non. Elle ne craignait raisonnablement pas non plus celle de sa Rahzden – quoi qu’au moins un peu – c’était sa fille après tout, et quelle mère n’avait pas peur pour son enfant ? Mais avec les jeunes vampires, le vent pouvait bien vite tourner.

La Rahzden serrait les dents, le regard braqué sur la silhouette menue du moutard qui courait quelques mètres devant elle. Elle détestait ce jeu. Elle détestait sa mère pour l’avoir suggéré. Elle détestait cette déséquilibrée de Dalemir pour avoir accepté. Et elle détestait ce gamin qui courait plus vite qu’elle. Lhænore avait plusieurs fois contemplé l’idée de lui jeter une pierre ou une branche pour lui faire perdre son avance. Et si elle le blessait ? Sa folle de mère rappliquerait sûrement pour arracher la tête de la bougresse qui avait touché son chéri. Elle n’était même pas sûre qu’Eurielle la défendrait, qui plus est. Non cette idée était bonne à jeter. Il allait falloir jouer franc-jeu. Et puis, il ne pouvait pas attendre ce gosse ? Qu’est-ce qui lui avait pris de partir ainsi ? Il avait si soif que cela ? On ne lui avait jamais appris les bonnes manières ? Probablement pas. Cette désaxée avait probablement planté ses crocs dans son cou avant qu’il ne puisse le faire. Et dire qu’on l’avait traitée de folle quand elle avait demandé à être transformée. C’était sa décision au moins. Un luxe auquel ce petit con n’avait sûrement pas eu droit. « Hé ! » héla la Rahzden, à bout de souffle. Comment il s’appelait déjà ? «  Petit ! Tu ne veux pas ralentir un peu ? » Quelle éloquence Lhænore. Tu vas vraiment le convaincre comme ça. La Rahzden leva les yeux au ciel, exaspérée. Eurielle lui avait toujours dit de garder un œil sur son environnement et sa proie. L’arbre qu’elle avait bien failli percuter dans ce moment d’inattention fit un meilleur travail d’imprimer cette leçon dans le crâne de la jeune vampire. « Par Aylidis ! » soupira-t-elle, sans interrompre sa course. « Et Lubuska… » Elle voulait remporter cette chasse après tout. Et il fallait croire que la déesse – du moins l’une des deux – l’avait entendue. Elle avait presque rattrapé le gamin. Il était presque à portée de main. Comme pour vérifier la chose, la Rahzden avait levé le bras, et d’un coup sec, tira sur le col du vêtement du blondinet. Sa chute l’avait surprise et elle avait bien failli lui rentrer dedans, encore. Lhænore souffla, soulagée, puis jeta un regard par-dessus son épaule. Son coup fourré lui avait donné une avance considérable sur le rejeton de Dalemir. Un sourire naissait au coin de ses lèvres. La chasse était décidément bien plus drôle quand ce n’était pas elle qui mangeait la terre par les narines. Elle n’avait à présent plus qu’à attraper cette… chose. La Rahzden repensait à la création de la créature avec un frisson. Elle espérait que cette Dalemir ne lui avait pas menti sur la consistance de leur proie. Elle n’avait pas envie de laisser ses crocs sur sa carcasse.

747 mots
Post III

Alors toi, ne bouge pas.

À ce moment précis, rien n’était plus rassasiant que le regard consterné de la prétentieuse, dégoutée de devoir se prêter à cette chasse. Sa mère avait-elle intentionnellement jouer le jeu ? Lilia exulta de joie devant la réponse parfaite de sa consœur et regarda Lhænore s’éclipser avec l’élégance d’un marcassin. Son regard chavira vers Eurielle dont la poire rayonnait de bonheur. Elle prenait à ce point du plaisir dans le fait de voir sa fille dans le mal ? Compréhensible, elle aussi adorait voir son rejeton dans un contexte discréditant. « Oh, il est docile. Du moins quand il ne chasse pas. Allons-y. Je ne voudrai pas que nos enfants tombent sur un animal dangereux. ». Il était évident que devant le danger que représentait deux jeunes vampires imprévisibles la faune de cette forêt n’avait pas à être jalouse une seule seconde. Alors la jeune mère adapta sa foulée à la créatrice de Gabor et suivit les chasseurs. Après un ridicule temps pour rattraper leurs mioches, les deux génitrices se tenaient assez loin pour ne pas déranger l’affrontement de leurs marmots, mais suffisamment proches afin de pouvoir intervenir en cas de danger mortel. « Elle risque de se faire rapidement surprendre par la flore envahissante de ces bois.  C’est sa première fois ici, à Myngrimu ? » demanda-t-elle en prenant appui sur la racine d’un arbre. Elle tâtait clairement le terrain pour évaluer le pourcentage de chance que son fils avait de remporter ce duel. Même si ce dernier était amical, elle restait compétitive quand il s’agissait de son enfant. Hors de question qu’il perde face à une peste qui ne connaissait même pas cette forêt. Si cela venait à arriver, le blondinet allait devoir se coltiner des séances d’entrainements intensives.

Les oreilles du jeune vampire sifflaient. Était-ce à cause de sa mère qui imaginait un possible fiasco ou à cause de la Zvezda le chaperonnant de près qui devait surement être en train de l’insulter ? En tout cas, il adorait ce foutu jeu. Il adorait cette vampire de Gabor pour l’avoir suggéré. Il adorait sa mère pour avoir accepté. Mais il détestait cette stupide garce qui tentait de lui voler son casse-croûte. Cela faisait partie des règles, celui qui triomphe boit. Quelle stupide règle. Si jamais il venait à perdre… Il agita sa tête dans le but de calmer son angoisse. De toute manière, contre son cousin Herman il gagnait à chaque fois. Ce n’allait pas être une inconnue, une fille qui plus est, qui allait le battre. Alors qu’il continuait nonchalamment sa course, la légère voix de la future perdante venait de parvenir à ses oreilles, que pouvait-elle bien lui vouloir ? Qu’allait-elle être la première chose que cette sotte allait lui dire en personne ? Le Rahzden gloussa devant sa grotesque demande, comme s'il allait lui laisser la moindre chance de l’emporter. Ce sang est à lui et à personne d’autre. Tout en calculant ses prochains appuis, le vampire se retournait de temps en temps pour évaluer la distance qui le séparait de son adversaire. À chaque aller-retour, la distance se rapetissait de plus en plus. Devait-il lui faire un coup bas ? Contre son stupide cousin, il n’avait jusqu’alors jamais hésité. Donc pourquoi il n’y avait pas encore pensé contre elle ? Sa timidité lui faisait-il défaut ? Était-ce parce qu’elle était une femme ? Ou peut-être, car son parfum était semblable à celui de sa grande sœur magicienne ? Avant qu’il ne trouve une solution à son blocage, un léger poids s’agrippa à son col. « Qu’est-ce que… ? » il dégringola sur plusieurs mètres se butant la tête contre un rocher par la même occasion.

« Oh mais… » le vampire se priva de conclure sa phrase par politesse. Mécaniquement, son corps se redressa et ses fourches se mirent à galoper. Les deux silhouettes qui menaient le peloton de course étaient bien loin en face de lui. Comment avait-elle osé ? Son regard était devenu noir. D'accord, il avait démarré en partant sans rien dire et il avait songé à la faire tomber également, mais tout de même. Maintenant, il se retrouvait en mauvaise posture. Cette tricheuse n’était vraiment plus très loin de mettre la main sur le butin. « Hors de question que je perde contre elle. Réfléchi Styvan ! » se martelait le garçon chagriné à l’idée de voir tout ce sang lui filer entre les doigts. Il devait bien y avoir un moyen, il connaissait la forêt et la créature par cœur contrairement à son adversaire. S'il y a bien une chose dont le garçon avait hérité de sa génitrice, c'était ce léger sourire de satisfaction apparent quand son imagination venait lui susurrer un plan odieux. Il prit une éternelle inspiration avant de hurler un mot en kazakh dont lui-même n’en comprenait pas le sens. Tout ce qu’il savait, c'est que ce mot prononcé par sa mère lors de ses entrainements déclenchait un écran de fumée affaiblissant du corps de la créature. Sans même prendre le temps de réfléchir, il se précipita dans le brouillard, au risque de se fatiguer également. Il aperçut la silhouette de son adversaire et fonça épaule la première tel un bélier enfonçant la porte d’un château fort. Son corps avait percuté de plein fouet le dos de la vampire. Même si le choc l’avait fait chuter aussi, cela en valait la peine. Question de fierté. « Bien fait ! Tu n'avais qu'à pas tricher je l'aurais eu sinon ! » hurla-t-il dans la direction de Lhænore. Il se tenait debout devant elle. C'était à se demander s'il n'était pas prêt à passer à un autre type de duel. Cependant, l'appel du sang devenait trop puissant et il avait réenclenché sa course. Lilia rigolait à chaud de larme devant l'affrontement de ces deux Rahzdens. « Ahah ils semblent coriaces nos petits. Je commence à comprendre ce que tu lui as trouvé à celle-là ! »

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Le repentir est bon, mais pas autant que l'innocence

Bahari - Savage (Bitmastr Remix)

Eurielle ne put s’empêcher de grimacer en voyant son enfant renversée par la progéniture de la Dalemir. « Eh bien ! Il a du mordant ce petit ! » s’exclama-t-elle, admirative. « Il doit commencer à s’habituer à son environnement. » Ses lèvres se pincèrent tandis que son regard repassait à sa fille qui luttait pour se relever. « Ça lui fera un bon exercice pour une première fois, oui. Je ne voulais pas qu’elle s’habitue trop au Fjörd. Elle a tendance à se lasser assez vite, qui plus est. » Un sourire illumina son faciès lorsque la Rahzden avait enfin repris du poil de la bête. « Et la voilà repartie. » souffla-t-elle, pas peu fière. « Comme je vous le disais, une vraie battante. » L’aînée suivit les jeunes du regard un court instant avant de leur emboiter de nouveau le pas.

« Ce sale mioche ! » pesta la nouvelle née, entre deux quintes de toux. Elle savait qu’elle aurait dû se méfier de cette créature. Evidemment que cette teigne l’avait trafiquée. Elle n’allait pas se contenter que de le faire tomber cette fois-ci. Sa patience avait atteint ses limites. Elle avait fini d’être gentille. Lhænore redoublait d’efforts et d’aplomb dans ses foulées, ignorant la douleur que sa chute lui avait laissé. La Rahzden trouvait même du réconfort dans l’idée que d’ici quelques minutes, ce serait le gamin qui souffrirait. Elle allait lui rendre la monnaie de sa pièce à ce morveux. Le rattraper ne serait pas une mince affaire, cela dit. Son petit tour lui avait offert le double de l’avance qu’il avait au départ. Et ce foutu brouillard ne lui faisait-il rien ? La Rahzden pourrait jurer que ses poumons étaient encore en train de brûler tant sa respiration se faisait difficile. Qu’avaient-ils bien pu mettre à l’intérieur ? Elle espérait que ce n’était pas trop toxique. Non, probablement pas. Le moutard devait aussi en avoir au moins respiré un peu. Il ne prendrait pas le risque de se tuer pour une simple chasse, même si leur honneur avait été mis en jeu. Lhænore releva le nez avec difficulté. Sa peau brillait faiblement, même sous la couverture que le feuillage épais lui faisait. Comment allait-elle le rattraper à présent ? Elle sentait ses forces s’amenuirent au fil des minutes. Elle ne voulait pas perdre. Encore moins face à ce chiard. Elle ne s’en relèverait pas. Non elle ne le pouvait simplement pas. Lhænore était désespérée. Et à problème désespéré, solution désespérée. La Rahzden ne pouvait pas dire qu’elle appréciait son frère. Il était doué à la chasse, mais c’était tout ce qu’il avait pour lui. Heureusement pour elle, Lhænore n’avait pas besoin d’autres qualités pour renverser la situation. Que ferait Raoul ? s’interrogea-t-elle avec réserve. Elle était un peu surprise. Elle ne pensait pas en arriver là un jour. Et dire qu’elle pensait avoir touché le fond. Bon ! Concentrons-nous. Que ferait Raoul s’il se faisait distancer par un mioche ? La nouvelle née fronça les sourcils au bout de quelques instants de réflexion intense. Pour autant, Lhænore pouvait ne pas aimer la réponse qu’elle s’était trouvée, mais elle savait que son aîné ne se serait jamais laissé dominer par un gosse. « Bectar ! » grogna-t-elle dans sa frustration.

Une odeur envoûtante vint chatouiller les narines de la Rahzden alors qu’elle œuvrait à réduire la distance qui la séparait de son concurrent. Lhænore sentit presque immédiatement sa salive se ramollir alors que ses sens étaient capturés un à un. Naturellement, la nouvelle née commença doucement à dévier de sa trajectoire à mesure que sa concentration cédait du terrain à une frénésie qu’elle ne connaissait pas suffisamment pour en reconnaître les signes. Des signes qu’une vampire plus âgée comme Eurielle ou Lilia n’aurait aucun mal à déchiffrer. La créatrice de Gabor se mit à humer l’air en voyant son enfant se désintéresser de la proie qu’elle poursuivait depuis plusieurs minutes. « Nous ne sommes pas seuls. » déclara-t-elle, en cherchant le regard de Lilia. « Je vais la suivre. Je vous laisse vous occuper du vôtre. » Eurielle s’élança après sa fille la peur au ventre. Il ne manquait plus que cela. L’imprudent qui s’était aventuré dans la forêt ne s’en doutait pas, mais il était déjà devenu la proie de deux Rahzden assoiffés et bien incapables de se contrôler. Il fallait qu’elle la rattrape avant qu’elle ne l’atteigne. « Lhænore ! Arrête-toi ! » s’écria-t-elle en l’apercevant. Sa progéniture courait une trentaine de mètres devant elle. Elle l’avait probablement entendue, mais la chasse devait déjà lui être montée à la tête. Même Eurielle salivait alors que l’odeur du sang remplissait ses narines. Mais elle ne pouvait pas la laisser faire. Elle n’était pas prête. Elle ne savait pas qui elles allaient trouver au bout de cette course folle. Ces bois n’étaient pas sans danger. Même les Vampires n’y étaient pas parfaitement en sécurité. La peur lui retournait l’estomac alors qu’elle songeait aux périls qui guettaient son enfant. « Lhænore ! » s’égosilla la mère. « Lhænore ! Arrête ! » Rien à faire. La Rahzden n’en démordait pas. « ARRÊTE-TOI JE TE DIS ! » sa voix avait changé. C’était du moins l’impression que Lhænore avait eue. Puissante. Martelante. Abattant les cloisons que la soif avait dressé dans son esprit. Elle ne pouvait pas désobéir, même si elle l’avait voulu. Son corps avait refusé de poursuivre sa course. L’arrêt avait été si soudain que la nouvelle née avait manqué de tomber. En rattrapant sa fille, Eurielle avait découvert son visage plongé dans la plus grande confusion. Ses mains tremblaient. Sa respiration était saccadée. La sueur perlait sur son front à grandes gouttes. La mère entoura le visage son enfant, plongeant son regard dans le sien. « Tout va bien. Regarde-moi. » souffla Eurielle, caressant ses joues de ses deux pouces. « Concentre-toi sur moi. Je sais que tu as envie d’y aller, mais tu ne peux pas. Tu ne peux pas. Tu n’es pas prête pour ça. » sa voix était douce, bien que toujours secouée par l’effort. Des voix s’élevaient d’entre les arbres, à quelques pas d’elles. « Ta mère va me tuer dès qu’elle va savoir ça. » Un homme entraînait un enfant – le sien probablement – par la main. « Je t’avais dit de faire attention ! On fait comment si tu t’es cassé la cheville, hein ? On était même pas censés venir ici. Comment je vais lui expliquer ça ? Rah elle va m’arracher la tête. Je suis fini. « - « J’avais pas vu la racine, papa. » Eurielle ne décolla pas ses prunelles de celles de son enfant. Elle n’avait même pas daigné se retourner. « C’est un enfant. » murmura-t-elle simplement. « Rien qu’un enfant. »

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Post IV

Il aurait gagné.

Frustration et gourmandise, en voilà un fâcheux cocktail. Le garçon désirait réellement son repas, mais sa force n’arrivait plus à suivre sa détermination. Ses bronches sifflantes l'imploraient d’abandonner cette chasse. Devait-il renoncer pour autant ? C’était bien l’une des deux possibilités qu’il avait, l’autre étant de s’évanouir de fatigue. Le choix allait rapidement devoir être fait, car ses cannes allaient bien à un moment donné refuser de continuer dans ces conditions. Seul son esprit faisait en sorte de maintenir à flot le paquebot perforé qui lui servait de corps. Il faut croire que cette stupide fumée qu’il avait inhalé avait suffisamment saboté sa traque. Quelle idée de con. Non, cela restait toujours mieux que de voir l’autre vieille peau gagner. Par fierté, il continuait tout de même de poursuivre cette stupide marionnette en bois qui lui servait de souffre-douleur. Mais qu’en était-il de Lhaenore ? Le garçon se retourna prudemment, un geste trop brusque l’aurait surement envoyé au tapis pour le restant de la journée. Les prunelles de Styvan s’écarquillèrent, cette garce le suivait toujours. Pourquoi était-elle à ce point obstinée à lui rendre la vie si compliquée ? C’était incompréhensible. Ce n’était pas comme si elle s’amusait. L’idiote de Gabor n’avait pas montré un seul soupçon de plaisir depuis le top départ. Cela se voyait à des kilomètres qu’elle ne voulait pas participer à cette chasse, c’était même à se demander si elle affectionnait vraiment cette pratique. Ce pressentiment le frustrait encore plus. Il était inconcevable pour lui et son amour-propre de lui offrir cette proie. Mais malgré sa bonne volonté, il n’allait plus pouvoir continuer très longtemps. Un nouveau persécuteur venait de s’allier à la douleur et allait surement tenter de lui porter le coup de grâce. Cette ennemie, le garçon la connaissait bien. La soif. Lequel de ces deux monstres allait réussir à lui faire la peau ? La souffrance ou l’envie de sang ? Son ventre était presque aussi creux que son esprit était dilapidé. Tellement ses intestins gargouillaient, son adversaire avait surement dû fuir en croyant qu’un loup grognait dans l’obscurité. À chaque appui, son abdomen lui hurlait de trouver quelque chose à bouffer et vite. Sa tête pirouettait à cause des nombreux vertiges dont il était victime. Il n’avait absolument aucune idée de comment ce duel allait bien pouvoir se conclure, mais une chose était sûre : il n’allait pas le terminer en un seul morceau.

Pendant ce temps-là, une effluve d’un nectar délicieux se promenait innocemment non loin des deux concurrents et n’allait pas tarder à les intercepter. Cette dernière chatouilla le groin du jeune rahzden. Un frémissement traversa l’entièreté de son être. Les poils de son corps se tenaient aux aguets, lui donnant un air de gallinacé. Ce n’était évidemment pas un frisson de terreur, mais bel et bien d’excitation. Quelle pouvait être cette sensation ? Cette ardeur était semblable à celle qu’il ressentait lors de ses tout premiers repas, une rage indépendante qui le faisait agir sans la moindre illusion de contrôle. Tout semblait noir. De légère microseconde de conscience l’aidait à comprendre ce qu’il s’apprêtait à faire. Il était en train de courir vers ses désirs. Apparemment Lhænore faisaient de même puisqu’il voyait sa silhouette agaçante devant lui. Il n’arrivait même pas à s'arrêter. Du moins, le voulait-il sincèrement ? Ou bien était-ce simplement une manière d’essayer de se raccrocher à sa vie paisible d’avant ? Celle ou il passait ses vacances scolaires chez sa grand-mère à faire des gâteaux avec le pâtissier de son village. Celle ou il n'était qu’un simple magicien orphelin apprenant des sortilèges de guérison. Celle ou il courrait avec sa grande sœur dans la magnifique forêt du continent naturel dans le seul but de s’amuser. Au lieu de cela, il pourchassait un inconnu qui venait de se blesser dans une foret lugubre du continent dévasté. Quelle vie merdique menait-il à présent. Ses larmes coulaient presque autant que la bave qui dégoulinait de ses babines. Alors qu'il démontrait par sa salive plus présente que ses sanglots que le monstre avait devancé l'innocence, Lilia effectuait le galop de sa vie pour arrêter son enfant. « Styvan ! Arrête-toi, tu peux le faire ! » c’était sa mère qui essayait de le stopper. Évidemment qu’elle n’allait pas le laisser foncer sur un innocent. Même si elle pouvait le rattraper relativement facilement, elle voulait tenter de le faire revenir à la raison par les mots. « STYVAN ! » son fils ne l’entendait pas. Était-ce à cause de la folie ou parce que l’autre créatrice hurlait le nom de sa gamine inutile au même moment ? C’était à se demander si elle ne le faisait pas exprès. Lilia, agacée, abandonna l’idée de le faire revenir calmement à la raison. Il était évident qu’il n’était tout simplement pas encore prêt à combattre la soif. La jeune mère avait l’air d’avoir oublié qu’elle pouvait toujours lui ordonner de s’arrêter, son lien de soumission lui aurait épargné des gouttes de transpiration inutiles. De toute manière, elle l’avait rattrapée. « Je suis désolée pour toi mon chéri. » murmura-t-elle, les yeux humidifiés, avant de l’assommer d’un coup sec derrière la tête. Si elle n’avait pas été là, son fils aurait vidé un enfant de son sang. Il ne se serait jamais pardonné. Portant son gamin endormi dans ses bras, elle se dirigea vers Eurielle qui avait l’air de réconforter sa fille. « Bon, ce n’était peut-être pas la meilleure idée » dit-elle derrière les deux vampires de Gabor avant de se servir de ses doigts pour siffler. Des bruits de plus en plus fort retentissaient, la créature en bois était en train de revenir. Elle lui murmura du Kazakh, avant de commencer à rebrousser chemin. Elle s’arrêta quelques secondes. « Tu as eu de la chance aujourd’hui. Mon fils aurait gagné. Mais je vous le laisse, elle doit en avoir besoin actuellement. » expliqua-t-elle alors que le mannequin s’allongeait à côté des deux femmes. « Nyd din mad. » furent les mots qui avaient précédé son départ.

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