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 [Q] - Ceux qui conspirent dans l'ombre

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Ezechyel
~ Ygdraë ~ Niveau IV ~

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◈ Parchemins usagés : 838
◈ YinYanisé(e) le : 27/08/2014
◈ Âme(s) Soeur(s) : Mircella Rumblee
◈ Activité : Stratège
Ezechyel
Sam 26 Mar 2022, 16:46

[Q] - Ceux qui conspirent dans l'ombre N-i-x-10
Crédit : B L U. E by N I X E U
Ceux qui conspirent dans l'ombre


Rp précédent : Entre deux mondes

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Intrigue/Objectif : L'enquête interne des Enfants de Yanna bat son plein. Alors que les preuves ne cessent de s'accumuler, l'hypothèse d'un complot devient de plus en plus crédible. Ce n'est qu'une question de temps avant que la vérité ne soit révélée au grand jour.





Je jaugeai la pièce d'un œil critique. Lorsque Kana m'avait invité à entrer, je m'étais attendu à découvrir un bureau pourvu d'un intérieur sobre et épuré, à l'image des autres lieux que j'avais eu l'occasion de visiter à bord de l'Auroræ. Pourtant, cet endroit correspondait à tout, sauf au modèle d'ordre et de simplicité auquel je m'étais accoutumé durant mon séjour sur le navire. Ne sachant vers où se diriger, mon regard verdoyant s'était finalement arrêté sur la pile de papiers entassée sur le meuble qui occupait le centre de la pièce. Emportées par le courant d'air que j'avais accidentellement soulevé en ouvrant les battants de la porte, plusieurs feuilles jonchaient à présent sur le plancher, n'attendant qu'à être ramassées par les doigts experts de la Maître d'Équipage qui, en constatant le chaos auquel son invité était exposé, s'empressa de récupérer les documents qui étaient tombés. « Désolée pour le désordre. » s'excusa-t-elle après avoir récolté tous ses papiers. Afin de s'assurer que ceux-ci ne glissassent pas hors de ses mains, elle les avait serré contre sa poitrine, retenant maladroitement les quelques feuilles rebelles qui menaçaient de se dérober à son emprise. « Nous n'avons pas l'habitude de recevoir des invités. » Par politesse envers ma future partenaire, je me gardai d'émettre le moindre commentaire, mais le soupir que je laissai discrètement filer entre mes lèvres parla pour lui-même. Heureusement, la Lyrienne ne sembla pas s'en rendre compte – ou fit mine de ne pas l'entendre, déposant les dossiers qu'elle tenait sur la pile qui ensevelissait son bureau. Celui-ci était à peine visible sous la montagne de parchemins qui s’entassait à sa surface, comblant tout l’espace libre que la détective aurait pu utiliser afin de placer ses documents. Par faute d'alternatives, elle avait opté pour rallonger son monticule de papiers, visiblement peu inquiète à l'idée que sa construction précaire et branlante ne s'effondre en un seul coup de vent. La façon dont elle avait aménagé son lieu de travail n’était probablement pas étranger à la confiance qu’elle plaçait dans ses méthodes de rangement plutôt douteuses. Outre les trois chaises qu’elle avait spécialement réservé pour cette rencontre, c’était tout son mobilier qui subissait les effets de sa désorganisation. Des étagères aux classeurs, en passant par les tables et les armoires : rien n’avait été épargné par la tempête qu’elle et son collègue avaient déchaîné entre ces quatre murs. Qu’importe la direction vers laquelle mes mires se braquaient, les feuilles trouvaient constamment le moyen de s'incruster à travers mon champ de vision, débordant des tablettes et des compartiments sur lesquels elles étaient supposément rangées. Il était difficile de croire qu'il s'agissait là de l'œuvre des meilleurs détectives que l'Empire avait à offrir, d'autant plus que leurs services avaient été sollicités pour régler une affaire aussi sensible que celle sur laquelle nous étions amenés à collaborer au nom de nos peuples respectifs. Néanmoins, j'étais tout de même prêt à leur donner le bénéfice du doute, ne serait-ce que par respect envers ma supérieure, qui semblait entretenir une opinion favorable à leur égard.

J'étais bien placé pour savoir à quel point il était ardu de répondre aux attentes des Cyraliels, surtout lorsqu'on n'était pas un Ygdraë. Si ces deux détectives étaient parvenus à réaliser le miracle de se bâtir une telle réputation aux yeux d'un membre de ce clan, alors j'avais tout intérêt à ne pas me fier aux apparences – du moins, pas avant de constater par moi-même leur niveau de compétence. Certes, la propreté n'était pas l'un de leurs points forts, mais quand était-il de leur habileté à enquêter? De toute évidence, la Lyrienne ne semblait pas importuner par le chaos et l'inattendu : au contraire, elle paraissait même à l'aise de travailler dans des conditions insalubres, savourant un confort que je n'arrivais tout simplement pas à ressentir. À cause de ma grande taille, j'avais l'impression d'étouffer dans cet espace exigu qui éveillait en moi une sensation de claustrophobie à chaque fois que j'avais le malheur de contempler un mur. S'accoutumer à ce petit espace qui me ferait office de lieu de travail pour les prochains jours, voire les prochaines semaines, me demanderait sans doute un certain temps d'adaptation. Avec un peu de chance, j'apprendrais à vivre dans mon nouvel environnement sans trop de difficultés. Je n'avais pas d'autre choix. Il était trop tard pour revenir sur ma décision, surtout après avoir persuadé le Conseil des Sages de me laisser participer à cette investigation, en dépit de leur opposition initiale. Jamais je n'avais été aussi déterminé à accomplir une mission. Quels que soient les obstacles auxquels je ferais inévitablement face, j'étais prêt à tout afin de lever le mystère sur les événements qui avaient failli me priver à tout jamais de mon fils. Ce n'était donc pas l'étroitesse d'une pièce qui réussirait à ébranler la conviction infaillible qui m'animait depuis ces trois derniers jours.

« Assieds-vous, je vous en prie. » m'invita la Lyrienne en me désignant l'un des sièges vides d'un geste de main. Je délaissai le tas de feuilles que j'observais avec un mélange de curiosité et de découragement avant de prendre place à l'endroit désigné. « Votre collègue n'est pas encore arrivé. » constatai-je en glissant mes doigts sur les accoudoirs. Suivant mon initiative, la détective se cala sur la chaise qui traînait derrière son bureau. « Il aura un peu de retard. Une affaire urgente l'a retenu à Mégido – une affaire de famille. » précisa-t-elle. « J'ai envoyé quelqu'un le chercher. Il ne devrait pas tarder à arriver, mais nous pouvons commencer sans lui. Je lui ai déjà transmis les informations que je m'apprête à vous révéler. » Sans aucune hésitation, elle plongea ses mains à l'intérieur de la pile de papiers et se mit à fouiller à travers ses différents dossiers, à la recherche d'un document bien précis, maugréant entre ses lèvres pincées : « Où est-il... Où est-il... » Après plusieurs secondes de recherche infructueuse, elle finit par mettre la main sur l'objet désiré, annonçant sa victoire par une exclamation suraigüe. « Le voilà ! » Excitée comme une puce, Kana reporta son attention vers moi en me gratifiant d'un sourire éclatant. « Voici donc où nous en sommes dans l'enquête. » commença-t-elle en se lançant directement dans le vif du sujet pour éviter de faire planer le suspense. À moins qu'elle ne fût trop fébrile pour songer à le faire? « Nous savons que nos douze malfaiteurs appartiennent à la Maison Merynla. Certains sont des membres connus du mouvement contestataire ; les autres ne sont que des sous-fifres sans importance. Néanmoins, ils ont tous des antécédents judiciaires. La plupart ont déjà été accusés ou incarcérés pour des crimes mineurs, mais seulement deux d'entre eux ont déjà commis des crimes majeurs – des meurtres et des viols essentiellement, mais jamais rien d’aussi sophistiqué qu’un attentat. » - « Donc, il s'agit à première vue de l'œuvre d'un groupe d'amateurs. » Elle opina de la tête. « En vous basant sur leurs capacités individuelles, croyez-vous qu'ils auraient été capables de planifier une telle attaque, sans aide extérieure? » J'en doutais sérieusement, mais j'étais curieux d'entendre l'avis de la détective. « Probablement pas. Certains possèdent de bonnes capacités intellectuelles, magiques ou physiques, mais je doute que ça aurait suffi pour assurer la réussite d'une opération aussi complexe, surtout avec si peu de ressources matérielles et financières à leur disposition. » - « Vous êtes déjà parvenue à faire une estimation sur les fonds auxquels ils ont eu accès? » Elle sourit en me dévoilant toutes ses dents. « Bien sûr ! » - « Comment ? » - « C'est très simple : en examinant leur équipement. Premièrement, les bombes qu'ils ont utilisées étaient de piètre qualité. S'ils souhaitaient causer le plus de dégâts, ils auraient eu intérêt à en utiliser de plus puissantes. Cependant, les explosifs de qualité sont assez rares. Les matériaux qui servent à les confectionner sont difficiles à obtenir et à raffiner, d'où leurs coûts excessivement élevés sur le marché. C'est sans doute la raison pour laquelle ils n'ont pas réussi à s'en procurer en grande quantité. Bref, à en juger par les bombes elles-mêmes, je peux conclure que l'argent leur faisait cruellement défaut. » Songeur, j'insérai son mentor au creux de ma paume. « Est-il possible qu'ils aient pu mettre la main sur des explosifs produits directement par la Maison Merynla? Ou qu'ils aient pu les fabriquer eux-mêmes? » La Maître d'Équipage secoua la tête. « C'est impossible. Les explosifs manufacturés par la Maison Merynla sont facilement reconnaissables. Quant à l'usage de bombes faits maison, il est possible qu'ils aient pu tenter de fabriquer leurs propres explosifs, considérant leur fonds monétaire limité, mais si c'était le cas, les résidus laissés par chaque explosif auraient été plus variés en termes de composition. Or, ce n'est pas ce que mes analyses préliminaires ont démontré, ce qui me laisse supposer qu'ils se sont procuré leurs explosifs chez le même manufacturier. »

« Hum... » Je devais l'admettre, mais j'étais impressionné par son talent d'investigatrice. En à peine trois jours, la Lyrienne était non seulement parvenue à récolter des échantillons des substances explosives et à les analyser, mais aussi à en tirer des résultats plus que satisfaisants pour la progression de notre enquête. Désormais, je comprenais mieux pourquoi la Dagmar Borghild leur faisait autant confiance, à elle et son collègue. « Néanmoins, il y a encore un détail qui m'échappe. » Tiré de mes pensées par l'aveu de ma partenaire, je relevai la tête. Au fond, je savais exactement de quoi elle parlait. « Vous vous demandez comment une bande de douze amateurs aux ressources soit-disant limitées est parvenue à s'infiltrer sur six navires sécurisés sans que personne ne s'en aperçoive? » La détective accueillit mon intervention en tapant jovialement des mains, à la manière d'une enfant à qui l'on venait d'offrir une friandise. « Exactement ! C'est pourquoi je pense qu'il est peu probable que l'attaque ait été le fruit de leur propre initiative. Quelqu'un a forcément dû leur ordonner de le faire. Quelqu'un de suffisamment riche et influent pour verser des pots-de-vin aux vigiles de chaque navire et acheter des droits de passage à ses douze brutes, à l'insu de tous. » - « Je vois que vous avez déjà mené une enquête de ce côté-là. » Elle acquiesça. « Je n'ai aucune preuve pour le moment, mais c'est la seule explication logique ! Entrer clandestinement sur des Vaisseaux aussi sécurisés que ceux-là comportent beaucoup trop risques, d'autant plus pour des amateurs. Leur seul moyen de contourner ce problème était donc d'emprunter un accès officiel. Sauf que chaque visiteur est tenu de se soumettre à un contrôle pour pouvoir entrer dans l'un de ces navires, en vertu des mesures auxquelles ils sont assujettis par le traité qu'ils ont signé avec les vôtres. Par conséquent, il leur était indispensable d'assurer la coopération des vigiles afin de pouvoir mettre leur plan à exécution. Sans quoi, ils n'auraient jamais eu l'occasion d'utiliser leurs bombes sur qui que ce soit. Qu'en pensez-vous? » Je fis mine de réfléchir. « Cette hypothèse se tient. S'il l'on tient compte de fait que nos douze assassins ne possédaient pas l'argent nécessaire pour se payer des explosifs de qualité, alors que je doute qu'ils avaient les moyens de s'acheter en plus le silence de plusieurs contrôleurs. » Plus nous en parlions, plus j'étais convaincu que nous avions raison. Cependant... « Cependant, s'ils bénéficiaient vraiment du soutien d'un donateur, pour quelle raison ce dernier se serait-il contenté de verser des pots-de-vin? Pourquoi ne pas financier l'équipement de sa troupe également? » La Lyrienne haussa des épaules, incertaine. « Peut-être qu'il en avait plus les moyens, ou qu'il désirait simplement couvrir ses traces. Pour être tout à fait honnête, sans le témoignage de nos détenus, nous n'avons aucun moyen de prouver cette hypothèse. » - « Dans ce cas, qu'attendons-nous pour leur demander? » Comme un seul homme, nous nous retournâmes pour identifier la source de la voix : il s'agissait d'un homme de grande taille, à la peau basanée, qui affichait un sourire amusé, presque moqueur, sur la commissure de ses lèvres. Dans une entrée inattendue, le dernier membre de notre équipe était arrivé.

✠ 2 043 mots

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Ezechyel
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Ezechyel
Ven 06 Mai 2022, 04:44

[Q] - Ceux qui conspirent dans l'ombre N-i-x-10
Crédit : B L U. E by N I X E U
Ceux qui conspirent dans l'ombre
Voryva - Dzivia


« Gleinn ! » Tel un ressort, la Lyrienne se propulsa hors de sa chaise pour se jeter dans les bras de son collègue, renversant l'assise sur laquelle elle était installée. Emportée par son mouvement irréfléchi, elle faillit me percuter de plein fouet en passant son chemin. Heureusement, grâce à un réflexe dicté par des années d'expérience en tant que militaire, je parvins de justesse à éviter la collision, reculant vivement mon siège au moment où la détective s'était ruée dans ma direction. Pris au dépourvu, le dénommé Gleinn n'eut pas la même chance que moi : il fut beaucoup trop lent à réagir. Il eut à peine le temps d'ouvrir ses bras pour rattraper la jeune femme que cette dernière était déjà sur lui. Si leur différence de taille n'avait pas été aussi significative, il aurait sûrement été projeté vers l'arrière, entraîné dans une inévitable chute vers le plancher. Néanmoins, il fut suffisamment prompt pour initier un geste de recul qui lui permit de repositionner son corps, juste à temps pour recueillir celui de sa fidèle partenaire de travail. Avisant la déroute qui maquillait son visage, Kana ne put contenir son éclat d'hilarité. Mélodieux, son rire emplit toute la pièce, chassant le silence par des notes gaies et amusées, tandis que le jeune homme tentait de reprendre contenance, son regard violacé s'étant brièvement arrêté dans le mien. « Hé, Kana ! » s'exclama-t-il en reposant la concernée au sol. « Toujours aussi énergique, à ce que je vois ! » Un sourire insolent fleurit sur les lignes de ses traits. « Et toi, toujours aussi inattentif. » Reculant de quelques pas, elle agita sous le nez de son collègue  une feuille de papier froissée qu'elle avait visiblement dérobé de ses poches. Étonné, ce dernier plongea instinctivement les mains dans les poches de son uniforme, fouillant à l'intérieur de celles-ci comme si sa vie en dépendait, dans l'espoir d'y retrouver le document qu'elle avait potentiellement volé sous son nez. Lorsqu'il constata que ses doigts ne faisaient que s'agiter dans le vide, il soupira. « Ce n'est pas drôle Kana. » Sans contenir la moindre trace d'ire ou de panique, sa voix n'était qu'un puit sans fond de lassitude et d'ennui. De toute évidence, ce n'était pas la première fois qu'il devenait la victime de ce genre de farce. Vexée, la détective fit la moue. « Ce n'est pas qu'un jeu, tu sais. Combien de fois t'ai-je répété de faire plus attention en transportant des documents confidentiels? » - « Je sais, je sais. » souffla-t-il en ouvrant la paume de sa main pour la convier à lui redonner ce qui lui appartenait. Dans un soupir, la Maître d'Équipage remit la feuille de papier entre ses doigts. « Merci. » Notant la déception qui tirait son expression faciale, il rajouta plus sereinement : « Je ferais plus attention la prochaine fois, promis. » Les poings sur les hanches, la Lyrienne le toisa sans prononcer un mot, peu convaincue de la sincérité de sa promesse. En vérité, ce n'était pas la première fois qu'elle était forcée de le ramener à l'ordre. Bien que ses aptitudes en tant que détective frôlât le génie, il manquait sérieusement d'expertise dans le domaine, puisqu'il occupait son métier depuis moins d'un an. Si la Seigneur de Smara semblait avoir de grandes attentes envers lui, allant même jusqu'à le recommander à la Reine D'Avada afin qu'il puisse prendre part à cette enquête, Kana demeurait plus sceptique. Certes, elle avait eu l'occasion d'évaluer son potentiel, étant donné qu'ils travaillaient ensemble depuis plusieurs mois. C'est pourquoi elle savait également qu'en dépit de son génie, il n'avait pas encore développé toutes les compétences essentielles à la réalisation de son emploi. Seul le temps et l'expérience sauraient corriger ses défauts, mais ce fait ne devait pas pour autant justifier un manque d'encadrement. C'était son devoir de le pousser dans la bonne direction, au risque de le voir s'enfoncer dans la médiocrité.

« On s'en reparlera plus tard. » finit-elle par déclarer. « Tu as ce que je t'ai demandé? » Gleinn acquiesça d'un signe de tête. « Bien sûr. Mais avant, aurais-tu la gentillesse de me présenter à notre invité? » Pivotant sur elle-même, la détective se retourna juste à temps pour assister à mon avancée, son regard électrique croisant brièvement le vert du mien. « Ah ! Mais où sont donc mes bonnes manières? » Lorsque je fus suffisamment proche, la Lyrienne débuta sans tarder les présentations, invitant son collègue à venir me serrer la main. « Gleinn, je te présente Ezechyel Valärunkar. C'est lui, le représentant que le gouvernement de Melohorë a envoyé pour nous assister dans l'enquête. Sire Valärunkar, voici Gleinn, mon partenaire. » acheva-t-elle en retrouvant sa bonne humeur. Après m'avoir examiné de la tête aux pieds, ce dernier me gratifia d'un léger sourire. « Enchanté. » À l'instar du Matelot, je lui fis également part d'une marque de politesse, répondant à ses salutations par une courte révérence. « Assez papoter ! Il est temps de passer aux choses sérieuses. » Impatiente et fébrile, l'annonce du Maître d'Équipage mit officiellement fin aux présentations : d'un même mouvement, Gleinn et moi reportâmes notre attention sur elle, à l'attente d'une décision de sa part. Le sourire aux lèvres, la Lyrienne ne laissa pas le silence planer bien longtemps, trop excitée pour songer à tergiverser inutilement. « Grâce aux renseignements de Gleinn, nous avons presque fini de récolter toutes les preuves dont nous avons besoin. Tout ce qui manque, ce sont les témoignages de nos douze prisonniers que nous nous apprêtons à aller interroger. » Malgré nos avancées significatives, les zones d'ombre demeuraient nombreuses sur la nature même du complot. De toute évidence, la détective était convaincue qu'en soutirant les aveux des suspects, ils seraient en mesure de mettre la main sur les pièces manquantes du puzzle. « Si vous êtes prêts, je suggère que nous commencions les interrogatoires maintenant. » D'un geste unanime, ils acceptèrent mon offre.



Quelques jours plus tard

Dès qu'il entendit le son des verrous cliqueter à ses oreilles, Zénias Sieg s'agita sur sa chaise. Visiblement nerveux, il regarda à tour de rôle les trois individus qui venaient d'entrer dans la salle d'interrogatoire en portant une attention particulière à leur visage. Lorsque son regard affolé croisa celui de l'Ygdraë, son faciès perdit instantanément ses couleurs, la panique cédant progressivement le pas à la peur, à mesure qu'il associait les traits de l'homme à ceux d'une personnalité connue. Un frisson courut sur la ligne de ses vertèbres. Qui avait autorisé à un Soldat de l'Armée elfique de pénétrer dans une zone restreinte? Et pourquoi? Ses questions ne restèrent pas en suspense bien longtemps, tant la réponse lui parut évidente. Sa présence ne pouvait signifier qu'une seule chose : le Vaisseau-Roi s'était finalement décidé à le jeter en pâture aux autorités sylvestres. Il était très probable que ses collègues aient déjà été mis au courant de cette nouvelle. À moins qu'il ne fût le premier à se faire interroger? Si ses calculs étaient bons, il avait passé une semaine entière, voire deux, à croupir, seul, au fond d'une misérable cellule que la lumière du jour était incapable de toucher. Il avait attendu, et attendu, que les enquêteurs chargés de l'investigation daignent pointer le bout de leur nez, mais le temps d'attente lui avait paru excessivement long, d'autant plus qu'il avait toujours eu conscience de l'inévitabilité de cette confrontation. Néanmoins, cette anticipation ne le rendait pas moins nerveux, surtout en présence de l'Elfe qui monopolisait toute son attention. Comme un oiseau de proie, il suivit attentivement la trajectoire du Soldat jusqu'au siège dans lequel il s'installa, sans accorder le moindre intérêt aux deux personnes qui l'accompagnaient. Le silence s'abattit à l'instant où les chaises cessèrent de grincer contre le plancher. Sentant la pression monter, le corps du détenu se crispa. Des sueurs froides se mirent à couler de son front et de ses mains, humectant l'acier des menottes qui enserraient ses poignets. Le moment fatidique était tout près. Seul le silence l'en séparait désormais.

Pourtant, à sa grande surprise, ce ne fut pas le représentant du peuple des forêts qui prit la parole en premier, mais plutôt le second homme du groupe qui s'était assis à sa droite. Ce dernier ne tergiversa pas longtemps sur les présentations. Une fois qu'il eut fini d'introduire ses collègues, il se jeta aussitôt dans le vif du sujet. « Zénias Sieg. » Bien que sa voix ne contînt aucune trace d'animosité, entendre son nom être prononcé de la sorte le fit frissonner. « Les chefs d'accusation qui pèse contre vous sont graves, mais si vous acceptez de coopérer, il se pourrait que le juge en tienne compte pour alléger votre peine. » C'était le discours qu'il rabâchait depuis que nous avions commencé l'interrogatoire des suspects, il y a environ deux semaines. Les mots quittaient à présent ses lèvres avec une fluidité qui trahissait l'usage de la répétition. Contrairement à ses suppositions, le Sieg n'était pas le premier prisonnier à se faire questionner, mais le septième. Ce qu'il ignorait néanmoins, c'était que ses complices n'avaient pas hésité à le dénoncer après des heures de questionnement, leurs aveux le marquant comme une personne d'intérêt dans le déroulement des opérations qui avaient transpiré quelques semaines plus tôt. Sans le savoir, il s'apprêtait à marcher sur du verre, inconscient de l'orage qui se profilait à l'horizon. « Dîtes-nous tout ce que vous savez, à commencer par le nom de vos fournisseurs. » Le cœur du prisonnier rata un battement. Ils sont déjà au courant. Anxieux, il déglutit péniblement. « Je sais pas de quoi vous parlez. » L'homme à la peau basanée soupira. « Vous avez du courage de mentir à un Orisha. » intervint la Lyrienne. « J'ignore si vous vous rendez compte de la gravité de votre situation, mais sachez que nous n'hésiterons pas à recourir à des moyens plus... déplaisants pour vous tirer les ficelles du nez. Vous seul pouvez décider de la façon dont vous souhaitez conduire cet interrogatoire. » À l'amiable ou sous l'effet de la torture, conformément à la coutume codifiée dans le Code de Maglalia en cas de haute trahison. Le prisonnier trembla. « Je sais pas qui c'est, je vous le jure! Il m'a donné un nom, mais c'est sûrement un faux. Personne le connait. » Par réflexe, la détective jeta une œillade en direction de son partenaire. Sans même la regarder, l'Orisha secoua légèrement de la tête, confirmant que Zénias mentait. « Ça ne sert à rien de mentir. » reprit la Maître d'Équipage en croisant les doigts. « Nous savons que vous détenez des informations qui pourraient nous aiguiller sur l'identité de cet individu. » poursuivit le Matelot de Smara. « Parlez, avant que nous vous forcions à le faire. » Le Sieg se recroquevilla. Contre un Orisha, il n'avait aucune chance de dissimuler la vérité, d'autant plus que sa Magie était bloquée à cause de ses liens, le rendant plus vulnérable aux intrusions magiques. Il pouvait toujours refuser de parler, mais ce faisant, il s'exposerait à la torture, une alternative peu enviable qu'il préférait éviter à tout prix. Qui sait combien de temps il pourrait abuser de la patience de ses interrogateurs avant que ceux-ci ne décident de changer de tactique? Relevant craintivement la tête, il examina brièvement le visage des deux détectives, essayant de lire leurs pensées derrière leurs masques d'impassibilité. Avait-il atteint un point de non-retour? Est-ce que le prochain mensonge qu'il inventerait marquerait la fin de leur amabilité? C'était impossible à dire, et pourtant, cette incertitude le convainquit de tout avouer, sans omettre le moindre détail.




Dans un claquement sonore, Kana referma la porte derrière elle, puis s'affaissa sur la chaise la plus proche. Imitant son geste, l'Orisha et moi prirent place sur un siège au hasard, mais avec une plus grande réserve. Nous étions de retour dans le bureau que nous occupions depuis des semaines pour mener l'investigation. Après avoir fait pression sur le suspect, l'interrogatoire de Zénias Sieg s'était déroulé sans accroc. Sous la menace de la torture, l'ancien Matelot de Merynla s'était livré à nos questions, répondant à chacune d'elles en toute sincérité. Au total, ses aveux avaient duré un peu plus d'une heure. Cependant, les informations qu'ils nous avait fournies s'étaient révélées précieuses dans la progression de notre enquête, compensant largement la courte durée de cette entrevue. À présent, nous nous apprêtions à faire le point sur tous les renseignements que nous étions parvenus à récolter, à commencer par l'identité de l'individu qui avait financé les opérations du groupe extrémiste. « Clarence Valmont. » commença Gleinn en se calant davantage contre sa chaise. « C'est la première fois que j'entends ce nom. » - « Moi aussi. » admis-je à mon tour. Je pivotai la tête en direction de la blonde. « Et vous? » La détective leva le regard avant de le planter dans le mien. Ses traits étaient durcis par le mécontentement et une once d'irritation. « Ce nom ne m'est pas inconnu. Il m'est même très familier, malheureusement. » Le Matelot haussa un sourcil. « Vraiment? Explique. » Exhalant un soupir, la jeune femme se redressa. « Tout d'abord, il est le principal suspect d'une enquête externe toujours en cours. » Autrement dit, il était recherché, mais pas par les forces de l'ordre de l'Empire. Sa tête était mise à prix par les autorités lyriennes d'Aeden pour avoir orchestré le pillage d'un petit village côtier d'Ildirim. Comment était-elle au courant de cette affaire? L'explication était on ne peut plus simple : des connaissances l'avaient mise en relation avec des enquêteurs de l'île pour les aider à capturer le criminel.

Bien qu'elle fît partie des Enfants de Yanna depuis plusieurs années, elle avait néanmoins gardé des liens solides avec son peuple d'origine. Officiellement, elle était toujours considérée comme une citoyenne de l'archipel, notamment en raison des services qu'elle continuait d'offrir sur le territoire. Avant l'affaire Clarence Valmont, la Lyrienne n'avait jamais eu à craindre un conflit d'intérêt entre ses deux allégeances. Heureusement, la structure décentralisée de l'Empire lui avait permis de prendre part à l'enquête, sous prétexte que le suspect n'appartenait pas à la même Maison qu'elle – parce que oui, elle savait exactement à qui elle avait affaire, après des mois à investiguer sur le crime et son auteur. C'était la raison pour laquelle elle pouvait également affirmer que le nom « Clarence Valmont » était un faux, comme l'avait soupçonné Zénias Sieg. Ces informations, elle nous les partagea à tous les deux avant de nous révéler la véritable identité du conspirateur de l'ombre : « Son vrai nom est Aefaren Sieg. C'est un cousin lointain d'Abel Sieg, l'actuel Seigneur de Merynla. » Gleinn faillit s'étouffer. « Tu plaisantes, j'espère? « Clarence » serait, en réalité, Aefaren Sieg? LE Aefaren Sieg? » - « Tout à fait. » Avisant la confusion sur mon visage, la détective se permit de clarifier certains détails à propos de l'individu. « Aefaren Sieg est un membre éminent de la Dynastie des Sieg. Il est à la tête d'un navire prestigieux de Merynla et contrôle une véritable flotte au sein de la Maison. » Il était aussi connu pour être un pilleur et un tueur redoutable, comme la plupart de ses semblables, à la seule différence qu'il détenait une véritable influence au sein de sa famille. Sans en être le chef ou un membre particulièrement important, il était déjà parvenu à se faire un nom grâce aux richesses qu'il avait accumulé au cours de ses voyages. Il n'était pas un homme à sous-estimer. Se pinçant l'arête du nez entre son pouce et son index, la Fille de Vëtëtimë soupira. « Si un Sieg est vraiment impliqué là-dedans, il faudra en aviser la Reine. » La nouvelle ne lui plairait pas, mais Kana doutait qu'elle en soit véritablement surprise. Cette information ne ferait que corroborer les soupçons qu'elle envisageait depuis le départ. Si aucune preuve ne semblait a priori incriminer la Maison Merynla, c'était probablement parce que le ou les véritables auteurs du complot agissait en dehors de la sphère du clan. Force était de constater qu'elle avait eu raison. En liant un membre influent de la Dynastie des Sieg aux attaques perpétrées contre les Ygdraë, l'innocence des corsaires n'était plus si évidente à défendre. C'était connu que la famille fondatrice de la Maison détenait une emprise solide sur l'ensemble du clan. De ce fait, les manigances des un se traduisaient souvent par la manipulation des autres pour exécuter le sale boulot, tel un loup obéissant aux instructions de son chef de meute. Il était clair que les douze Matelots que nous avions interrogés n'avaient été que les pions d'un jeu qui les dépassait. Lequel? À ce stade, nous ne pouvions que théoriser sur les objectifs d'Aefaren Sieg. Si la perfidie des Sieg était bien établie à travers l'Empire, jamais l'un de ses membres ne s'était montré aussi téméraire dans l'exécution de ses plans, encore moins vis-à-vis d'une Nation étrangère. Les complots qu'ils orchestraient visaient généralement à détrôner le Roi ou la Reine d'Opaleha afin d'asseoir l'un des leurs à la tête du Vaisseau-Roi. Tout n'était qu'une question de pouvoir et de domination avec eux : malgré les années qui s'étaient succédées depuis la création de la Caste, cette ambition n'avait pas changé – et elle ne changerait sans doute jamais.

Il était probable que l'alliance que la Reine D'Avada avait tissée avec les Ygdraë s'était heurtée, d'une manière ou d'une autre, aux plans du Capitaine. Que ce soit en raison de ses valeurs ou de ses aspirations, Aefaren percevait manifestement cette entente d'un mauvais œil. Après tout, les Sieg avaient été les premiers à s'opposer à la signature du traité, sans doute parce qu'ils y avaient vu un moyen efficace de fragiliser le pouvoir royal. C'était eux qui avaient donné naissance au mouvement contestataire ou, à défaut de le faire, de le populariser parmi leurs équipages. C'était eux qui avaient propagé les rumeurs sur la folie de leur Souveraine et la corruption des Seigneurs des Opaburaha. C'était également eux qui, par l'intermédiaire d'Abel Sieg, avaient délibérément retiré la Maison Merynla de la table des négociations, croyant à tort que leur absence serait suffisante pour convaincre les autres clans de reconsidérer leur décision et forcer le projet à avorter. Seulement, c'était tout l'inverse qui s'était produit : les Seigneurs de Tinloeha, de Sahwelia et de Smara avaient tous les trois cédé à la proposition du Conseil des Sages. Cette décision avait marqué le début de la fin pour le clan Merynla. L'alliance s'était non seulement soldée par un succès retentissant, mais en plus, le recrutement massif qui avait eu lieu à Melohorë avait permis de considérablement gonfler les effectifs des trois autres Maisons. Lorsqu'on recensait la population respective de chaque clan, celle des inventeurs, des Conteurs et des philosophes surpassait à présent celle des pirates qui, jusqu'à tout récemment, avaient formé la seule hégémonie de l'Empire par la force du nombre et de la richesse. L'entente avec les Ygdraë leur avait déjà fait perdre un avantage considérable dans la distribution de la puissance au sein de leur organisation. Il y avait de fortes chances qu'Aefaren Sieg ait voulu prendre des mesures préventives pour éviter que son clan ne perde le second. En s'attaquant aux groupes d'Elfes, il aurait tenté de les effrayer, voire de les tuer, dans le but de forcer les autorités sylvestres à mettre fin à l'alliance. Ce n'était que des suppositions, mais l'hypothèse nous paraissait suffisamment crédible pour creuser dessus, d'autant plus qu'il nous restait encore cinq autres suspects à interroger. Le rideau se levait sur ceux qui conspiraient dans l'ombre.

✠ 3 288 mots | Fin

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[Q] - Ceux qui conspirent dans l'ombre

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