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 [A] - L’engrenage | Réprouvés

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Priam & Freyja
~ Ange ~ Niveau III ~

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◈ Parchemins usagés : 3914
◈ YinYanisé(e) le : 02/02/2018
◈ Âme(s) Soeur(s) : La bière et le saucisson | L'adrénaline et les problèmes
◈ Activité : Berger [III], traducteur [II], diplomate [I] | Soldat [III], violoncelliste [I]
Priam & Freyja
Mer 12 Jan 2022, 08:44




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


RP précédent : Le siège d’Arcadia.
RP lié : Lorsque le blanc et le noir ne se confondent pas.
Lieu : Sceptelinôst/Gein’Drakul.


Hazaan laissa ses doigts courir sur le tranchant de l’épée. C’était tout ce qu’il restait de Shezira. Il ferma les yeux. Le navire était agité. Les appels à la guerre frappaient comme le tonnerre. La mort de la Thur levait sur les cœurs la poussière qui masquait les vieilles rancœurs. Un Réprouvé n’oublie jamais. Ailleurs, on les traitait de barbares, d’incultes et d’idiots : c’était mettre de côté cette mémoire collective, increvable et parfois si pénible. Personne n’avait oublié les exactions des Anges et des Démons à l’encontre des Manichéens – bien que désormais, on doutât de la version des faits –, tout comme nul n’avait effacé de son esprit l’image des flammes qui ravageaient Lumnaar’Yuvon. Même les enfants sauraient reconnaître Jun Taiji, tant les parents, depuis des générations, avaient pris soin d’entretenir cette haine contre l’homme et tous ses pairs. Les Sorciers étaient des monstres, et aujourd’hui, Val’Aimé Taiji le leur avait encore prouvé. Le Tyd’Saan soupira. Lui aussi était en colère. Contre ce Mage Noir qui aimait trop la discorde pour respecter les règles. Contre cet adolescent qu’il avait aidé à se relever, sur le champ de bataille, et qu’il aurait dû laisser mourir pour sauver Shezira. Contre Zel’Eph, pour ne pas avoir participé directement à l’affrontement. Contre Erza qui ne jurait plus que par le Léviathan – il lui en voulait, lui qui pourtant la soutenait depuis toujours. Contre lui-même, pour ne pas être intervenu à temps. Contre la solitude, surtout. Parce que c’était cela : désormais, il était seul. Seul avec un peuple qui réclamait vengeance.

Ils rejoignaient la Ville des Cadavres. Sceptelinôst avait acquis ce nom suite à deux phénomènes étranges, qui avaient précédé l’arrivée des pirates : d’abord, des centaines de corps de cochons avaient bouché les artères de la ville, puis des restes de poissons et de Sirènes s’étaient agglutinés dans les eaux pourries du port. Parfois, selon les marées, l’odeur de la mort sévissait à nouveau ; et quand l’air se purifiait, il semblait tout de même conserver une touche de pestilence. Depuis l’installation du Léviathan, la cité avait radicalement changé. Il ne la détestait pas, mais il n’y était pas à l’aise. Shezira se moquait souvent de lui, arguant qu’il ne se sentait à sa place que lorsqu’il pelletait du fumier. Elle n’avait pas totalement tort ; ou en tout cas, sur l’instant, il ne pouvait pas lui donner tort. Il aurait mille fois préférer devoir manier une pelle et de la bouse plutôt que d’être obligé de gérer les conséquences de sa mort. Il inspira, puis appuya son front contre sa paume de main, le coude posé sur la table. Jambes croisées au niveau des chevilles et épaules affaissées, il avait l’allure d’un homme fatigué.

Lorsque les navires fendirent les eaux du port, la liesse qui les attendait monta jusqu’aux oreilles des combattants. Debout près de la proue, Hazaan observait la foule. Ils avaient de quoi se réjouir : les bateaux qui revenaient étaient chargés de guerriers victorieux et de Kiir’Sahqon. Pourtant, les combattants n’exprimaient pas autant d’allégresse. Ils avaient battu l’Ordre d’Hébé et ils apportaient à leur peuple de nouvelles vies vigoureuses, certes. Mais ils avaient aussi perdu. Quand ils accostèrent, les hommes et les femmes bondirent à terre et se mêlèrent à ceux qui n’avaient pas pris la mer. Des murmures se répandirent. Le Thur n’avait pas bougé. Il jeta un coup d’œil à une forme mouvante, dans l’eau. Ses écailles vertes affleuraient parfois à la surface, avant de replonger dans les ténèbres. C’était l’apanage du Léviathan : des créatures féroces pour garder les eaux de la cité. Elles ne feraient rien aux Réprouvés : ils étaient des leurs, désormais. « Hazaan ! Où est Shezira ? » l’interpela une voix, au-dessus du brouhaha, qui s’intensifia immédiatement. Le Manichéen planta son regard sur la femme qui l’avait apostrophé, puis parcourut l’assemblée du regard. « Silence. » clama-t-il, et le silence se fit. « Nous nous sommes bien battus et nous avons triomphé de l’Ordre d’Hébé. » Il avait une bonne élocution, presque étrange pour un natif de Lumnaar’Yuvon. « Nous avons si bien massacré leurs chevaliers que nous revenons avec de nombreux Kiir’Sahqon. » Une acclamation suivit ses propos. Elle n’était pas aussi rugissante qu’elle aurait dû l’être : la plupart d’entre eux avaient deviné que son discours ne serait pas que positif. « Malheureusement, nous avons aussi perdu certains des nôtres. » Il laissa planer un bref silence. « Shezira est tombée au combat. » - « Mais ce n’est pas un chevalier qui l’a tuée ! » s’écria une voix. « Non, en effet. C’est le Chancelier Elzagan, Val’Aimé Taiji. » Un murmure se répandit dans la foule. Il enfla, gronda, vrombit, jusqu’à muter en écumes de rage, hurlantes et criardes.



Message I – 793 mots




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Priam & Freyja
Ven 14 Jan 2022, 20:06




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


Lieu : Sceptelinôst/Gein’Drakul.


Durant de longues secondes, il ne dit rien. Il observa le déchaînement de la foule, pareille à un océan tourmenté par la tempête. Dans leur colère se reflétait la sienne. La voir se déployer avait quelque chose de jouissif. Pourtant, il finit par fermer les yeux. Il devinait où leur ire les mènerait, parce que c’était là-bas que la sienne voulait le traîner. Les tambours de la guerre résonnaient au fond de son cœur, pareils à un second battement, un nouveau souffle de vie, une autre impulsion. Un murmure de la mort. Réjouis-toi tant que tu le peux, avait-il dit à Val’Aimé ; et il le pensait. Ce crime-là ne pouvait pas rester impuni. Il ne devait pas tomber dans l’indifférence générale. « Justice ! » s’exclama une voix au-dessus des autres. Puis le mot fut repris, scandé, chanté. Le poids d’un peuple tomba sur les épaules d’Hazaan. Il se sentit vaciller, puis rouvrit les paupières. Il leva la main et le silence souffla sur l’assemblée. « Ce crime ne restera pas impuni. Shezira mérite qu’on lui rende justice, et je m’y emploierai. » C’était une promesse. « Pendant ce temps, Raguel s’occupera de Gein’Drakul. » Demeurée en retrait sur le pont, la femme gravit les marches et se planta aux côtés du Thur. « Je vais rentrer à Lumnaar’Yuvon avec ceux qui le souhaitent. Nous devons soigner nos blessés avant de penser à la justice. » Un murmure de protestation glissa sur les lèvres. Il reprit, plus fort : « Nous ne pourrons rien envisager contre les Mages Noirs si nous sommes affaiblis. Pendant que nos guerriers se reposeront, je convoquerai Raguel. Et Atthirari. » D’autres chuchotements, plus incertains, ondulèrent dans le rassemblement. « Et Erza ? Et Zel’Eph ? » Il s’humecta les lèvres. La question était délicate. « Zel’Eph est avec nous en tant que Zaahin. » Jusque-là, il avait été l’intermédiaire des Thur avec Erza. Depuis sa prise de pouvoir au sein de l’Empire du Léviathan, il était le seul capable de la regarder en face. Son retrait de la vie des mortels entraînait la rupture du discours avec la Dovahkiin. Un sentiment étrange habitait le cœur du Manichéen : la mort de Shezira sonnait comme le dernier acte de la fin de leur système politique. Il n’y avait plus personne, hormis lui. « Erza, je ne sais pas où elle est. » répondit-il franchement. « Si vous la trouvez, prévenez-la et dites-lui que je l’attendrai à Lumnaar’Yuvon. » Il savait que personne n’oserait jamais l’approcher. Personne ne le pouvait. Ce n’était pas prendre un grand danger de dire qu’il ignorait où se trouvait la Dovahkiin : même absente et inapprochable, sa menace planait sur la ville. Nul n’aurait osé la défier.

Il pivota à demi vers Raguel. Quand elle souriait, son visage adoptait une douceur presque enfantine ; elle souriait peu souvent. Elle passait plus de temps à grogner, ou à éclater de rire franchement. Néanmoins, elle ne manquait pas d’humour et, malgré son apparence froide, forgée par des années dans les bas-quartiers de la Ville des Cadavres, elle était appréciée des autres. Chacun savait qu’elle était dotée d’une âme solide et d’un esprit juste et droit ; on pouvait compter sur elle pour distribuer les torts et reconnaître les mérites. Loin d’être opposée à la culture propre du port et de la cité, Hazaan savait qu’elle saurait l’entretenir pour mieux la tenir et l’enrichir, notamment lors des semaines et des mois à venir. Le trépas de Shezira laissait un vide dans certaines des affaires les plus réputées de la ville : il ouvrait un boulevard aux différents gangs. Ils se battraient. Ce qu’il avait proposé à Raguel était loin d’être un cadeau. Peut-être mourrait-elle le soir même : il comptait sur sa volonté et sa force pour la porter jusqu’au jour prochain, et ainsi de suite jusqu’à ce que les Zaahin ne la rappelassent pour l’honorer autant que faire se peut. Elle s’avança. Sa haute stature jeta une ombre sur la proue et le silence sur l’assemblée. « Les restes de Shezira sont avec nous. Ce soir, on s’en occupera pour lui faire honneur et l’aider à parvenir jusqu’à la Dilon. » Des réponses approbatrices et quelques hochements de tête se dégagèrent de la foule. « Ce soir, on honorera tous nos morts. Tous ceux qui sont partis combattre aux côtés des Zaahin. » Elle marqua une pause. « Demain, on discutera. » Et elle sauta en bas du navire. Ses bottes claquèrent contre le sol. Le brouhaha reprit. Hazaan imita la Thur remplaçante. Ils se fondirent dans la masse.



Message II – 765 mots




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Sam 15 Jan 2022, 22:13




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


Lieu : Sceptelinôst/Gein’Drakul.


La mort est une fête. Ce soir-là, pourtant, l’allégresse se teintait d’amertume. On ne célébrait pas seulement le passage d’un état à un autre, la route continue de la vie vers la mort et la course pour rejoindre les Zaahin ; on constatait aussi l’indélébile marque que l’acte de Val’Aimé Taiji avait imprimée sur la cérémonie. Une cérémonie aux précédents houleux, elle aussi ; si les Réprouvés enterraient toujours leurs morts, les coutumes du Léviathan différaient. Certains avaient réclamé que Shezira fût déposée dans un cercueil que l’on aurait laissé voguer sur les flots. Hazaan et Raguel avaient refusé de céder. En guise de compromis, ils avaient proposé de la mettre en terre en haut d’une falaise qui surplombait l’océan. Ils étaient désormais tous autour de la corniche, leurs cheveux brassés par les vents marins et leurs âmes bercées par les murmures de la marée. On avait dressé les sépultures des autres guerriers avant, et déchargé une partie des Kiir’Sahqon. La mort et la vie s’étaient côtoyées dans un étrange ballet d’allées et venues, entre terre et mer.

Le Thur Merrill s’avança jusqu’au cercueil et posa ses yeux verts sur les restes de son amie, que l’on avait placés dans un coffret de bois, sculpté de symboles et de scènes évocatrices de la Dilon et de l’existence des Zaahin. On y avait tracé les traits blanc, rouge et noir propres à la cérémonie. Hazaan n’aimait pas l’idée que son corps fût dissout. Sa foi l’encourageait à croire qu’il se reconstituerait parmi les Héros, mais son esprit pragmatique le conduisait à douter. Il inspira, et glissa sur les couvertures l’épée qu’elle tenait durant la bataille. Le cercueil contenait déjà des objets qui lui étaient précieux – comme ce collier de perles qu’elle arborait si souvent – ou des statuettes à l’effigie des Dieux, pour la protéger ou faire écho à ses accomplissements – que, là-bas, tous sachent qui elle était et ce qu’elle avait réussi. Il leva le regard vers l’océan, observa l’horizon quelques instants, puis recula, avant de pivoter tout à fait pour rejoindre le groupe. D’autres Bipolaires déposèrent des souvenirs, puis on plongea la défunte en terre. Le hash’gein touchait à sa fin, pourtant, Hazaan entendait encore les chants du sonaan’dahmaar vibrer dans sa poitrine. « C’est l’heure de la dilon’lus. » dit Raguel d’un ton égal lorsque la dernière motte de terre recouvrit le cercueil. Il acquiesça. Peu à peu, la falaise recouvrit ses accents d’indomptable, avec ses herbes qui se déhanchaient sous les derniers rayons du soleil comme des danseuses folles autour d’un feu. Seule la plaque en fer gravée et la torche marquaient la présence de Shezira.



Il y avait tout de même des rires, des cris, des blagues, de la bière à flot et des repas chauds et copieux. Un Réprouvé ne reste jamais abattu, et chacun sait qu’il existe un temps pour tout. À Sceptelinôst, rien ne sert de prendre la mer quand les flots se cabrent ; à Lumnaar’Yuvon, on n’aurait pas idée de récolter de trop jeunes pousses ; à Gona’Halv, on apprend à ne pas se tuer en attaquant trop bêtement. L’impatience et l’empressement habiteraient toujours le cœur d’un Manichéen, manifestations brûlantes de son ardeur à vivre, mais il savait parfois les mettre de côté. Ils n’étaient pas que des Bipolaires ou des Démons ; ils étaient aussi des Anges. Les soirs de liesse, ils étaient avant tout des hommes et des femmes. C’étaient eux qu’Hazaan observait, le sourire aux lèvres malgré les responsabilités qui cherchaient à peser sur les coins de sa bouche. C’était peut-être l’alcool.

Raguel vint s’accouder au bar près de lui : son bras frôla le sien. Il tourna la tête vers elle. Son visage exprimait son sérieux habituel. « Quand est-ce qu’on attaque ? » Il la scruta, mais ne dit rien. Un sourire énigmatique peignit ses lèvres. C’était sans doute l’alcool. Elle s’assit. « Leur roi va se faire crucifier bientôt. On devrait attaquer à ce moment-là. » continua-t-elle. Il but une gorgée de bière et se pencha vers elle, une lueur de confidence dans le regard. « Je crois qu’on ne devrait pas attaquer. » Les yeux de la femme s’écarquillèrent et elle fronça les sourcils. « Quoi ? » - « On ne devrait pas attaquer. » - « Shezira est morte. » Les iris d’Hazaan s’assombrirent. « Je sais. J’étais là. » Elle plissa les paupières et inclina légèrement la tête sur le côté. « À quoi tu penses, alors ? » - « Je compte négocier une compensation. Des richesses, et Val’Aimé, qu’on rende notre propre justice. » La brune se recula un peu, comme si elle cherchait à mieux jauger la situation. « Je vois. Et pourquoi pas l’attaque ? » - « On perdrait. » Elle secoua la tête. « On perdrait. » répéta-t-il avec insistance, quoique toujours aussi bas. « Je ne dirai pas ça à nos guerriers, mais si on marche sur Amestris, je suis sûr que les pertes seront trop importantes. Regarde Shezira. » Elle sonda son regard et, dans le sien, il vit se dessiner la même détestable conclusion. Pourtant, elle lança, défiante : « Alors, ils ont réussi à faire peur au valeureux Hazaan ? » - « Ils l’ont rendu plus sage, plus réaliste et moins prompt à sacrifier ses combattants. » Elle le fixa, silencieuse. « On sort tout juste la tête du tas de fumier, ce n’est pas pour y replonger immédiatement, malgré la mort de Shezira. » Elle repensa à l’Odon do Dur, à l’indépendance de Stenfek puis aux nouveaux signes envoyés par les Zaahin. « Le futur est glorieux, mais pas à Amestris. » Elle ne pouvait pas lui donner tort. Leur bravoure et leur férocité ne les protégeraient pas tous de la noirceur du chaos. « On devrait s’allier à ces putains d’Humains. » cracha-t-elle, et Hazaan ricana de bon cœur.



Message III – 980 mots




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Dim 16 Jan 2022, 13:57




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


Lieu : Lumnaar’Yuvon.


Dès le lendemain, quelques navires étaient repartis pour Lumnaar’Yuvon. Le soir-même, on avait recommencé les festivités. Les défunts avaient été enterrés, et une majorité des Kiir’Sahqon, adoptés. Ceux qui n’avaient pas encore trouvé de famille avaient été placés dans une garderie improvisée. Dans les prochains jours, Hazaan se chargerait d’entrer en contact avec des adoptants potentiels. Les premières vagues d’enfants de la Paal’Maar avaient rempli nombre de foyers. Certains étaient déjà adultes, d’autres non : leur croissance, certes rapide, traçait des courbes chaotiques et irrégulières. Il était difficile de prévoir leur évolution. Le retour de la naissance des Bipolaires par voie naturelle avait aussi ralenti le processus d’adoption. Il était évident que, plus les attaques seraient nombreuses et rapprochées, plus il serait difficile de trouver des parents à chaque nourrisson. Plus tard, lorsqu’ils en auraient le temps et l’occasion, ils devraient réfléchir à des solutions. Pour le moment, la priorité concernait les relations entre les Mages Noirs et les Manichéens. Des messagers étaient partis prévenir Atthirari, et Raguel devait arriver d’ici quelques jours.



Raguel entra dans la cuisine, semblable à un bicorne fou de rage, et plaqua une lettre sur la table. « Il faut qu’on attaque. » Hazaan fronça les sourcils. « Quoi ? » - « Lis. » Le Réprouvé la fixa une seconde, puis se pencha et attrapa la lettre. Debout, il laissa ses yeux courir dessus. Mauvais lecteur, il déchiffrait assez lentement le langage alambiqué de l’expéditeur. « On devrait attendre Atthirari. » s’interrompit-il. « Non. » Il lui décocha une œillade, puis reprit sa lecture. Ses sourcils se froncèrent. « Un accident ? » Elle ne répondit pas. Il leva la tête et planta son regard sur elle. « Ils essaient de faire passer ça pour un accident ? » - « C’est déjà ce que croient beaucoup de gens. » - « Quoi ? » - « Ils se sont débrouillés pour répandre ce mensonge. » grogna-t-elle en balayant l’air de la main, comme si elle cherchait à effacer la tromperie des Mages Noirs. Dans la tête d’Hazaan, les informations s’enchaînaient. Elles s’imbriquaient en une cascade inarrêtable. Les Sorciers avaient été les premiers à s’exprimer. Peu importait que leur version des faits fût erronée : à mesure qu’elle traçait son chemin dans les esprits, elle devenait vérité. Elle avait la force d’un discours officiel. La lettre d’excuses qu’ils leur adressaient plaçait les Réprouvés dans une situation intenable. Le peuple serait en colère, à juste titre. Les Thur ne pourraient rien faire pour démentir les propos de la couronne noire : qui les croirait, quand tous les antécédents entre Sorciers et Bipolaires se faisaient le spectacle d’une haine viscérale ? Qui les croirait, eux, les vassaux d’une reine absente ? Qui le croirait, lui, le Thur de Lumnaar’Yuvon, le fief le plus raciste et le plus rancunier qui existât ? « Alors nous ne pouvons plus exiger Val’Aimé. » lâcha-t-il calmement, le regard dans le vague. « Non. » Il inspira ; elle soupira. « On doit se battre. » Les iris du châtain retrouvèrent leur acuité et plongèrent dans les siens. « Ce serait se condamner, par orgueil. » - « Par fierté et par justice. On doit se battre. » répéta-t-elle.

« Non. » Atthirari venait d’apparaître dans l’embrasure de la porte. Raguel fit volte-face et planta sur lui des prunelles assassines. « Tu dis ça parce que vous avez le même sang. » gronda-t-elle, un doigt accusateur pointé vers lui. Sans se démonter, le seigneur de Keizaal s’approcha et railla : « C’est un peu ironique de s’entendre dire ça d’une cité qui reste sous la juridiction d’Erza Taiji Stark. » - « Elle a fait preuve de bien plus d’allégeance envers la famille Stark qu’envers la dynastie Taiji. » - « Hum. C’est probablement pour ça que père et fille vous ont abandonné en même temps. » - « Je crois que tu confonds avec ta maudite Keizaal, traître. Vous êtes comme toutes ces saloperies de Sorciers, on ne peut pas vous faire confiance une seconde ! » - « Stop. Ça suffit. » Hazaan s’avança entre la Thur et le Roi. « Je ne vous ai pas convoqués pour le plaisir de vous voir vous taper dessus. » Il se tourna vers Atthirari. « Tu as entendu les rumeurs, toi aussi ? » - « À ce stade, on ne peut plus parler de rumeurs, malheureusement. » - « Hum. » - « Je suis désolé, pour Shezira. » Le chef de Bouton d’Or acquiesça. « Mais si vous partez en guerre, mes guerriers ne vous rejoindront pas. » Malgré la scission, les Réprouvés effectuaient toujours leur service militaire ensemble, à Gona’Halv. Ils auraient pu lever une armée commune. Dans la pire des éventualités, c’était ce qu’Hazaan espérait. Il opina de nouveau.



Message IV – 800 mots




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Dim 16 Jan 2022, 22:02




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


Lieu : Lumnaar’Yuvon.


« Lâche ! » Atthirari se tourna vers la brune. « Raguel… » commença Hazaan, coupé par le roi. « Keizaal n’est pas encore en mesure de partir en guerre. Nous n’avons pas participé au siège d’Arcadia et ce sera pareil pour celui d’Amestris, si vous décidez de vous lancer là-dedans. » - « Et l’honneur des Réprouvés ? » - « L’honneur de Keizaal n’a rien à voir avec celui de Gein’Drakul et de Lumnaar’Yuvon. » Elle releva le menton, défiante. « Pourquoi tu es venu, alors ? Pour nous narguer ? » - « Non. Avant d’apprendre la version des Sorciers, je comptais appuyer la démarche d’Hazaan. Maintenant qu’elle n’est plus réalisable, j’aimerais savoir ce que vous comptez faire. » Les deux Thur se regardèrent, et le plus ancien prit la parole avant qu’un nouveau débordement n’éclatât : « Une guerre serait une catastrophe. » Atthirari acquiesça. Le Tyd’Saan inspira, les yeux fermés, désabusé. Puis, il lâcha : « Mais ça fait trop longtemps que les désirs de vengeance à l’encontre des Sorciers sont étouffés. Le meurtre de Shezira, c’est l’étincelle qu’il manquait au brasier. » Il marqua une pause. « On ne pourra pas ne pas se battre. » Le silence les enroba de sa sévérité teintée d’angoisse. « Alors vous allez courir vers la mort ? » Raguel, calmée par les déclarations de son collègue, répondit doucement, de sa voix chaude et basse : « C’est le prix que demandent les Zaahin. »

Le Taiji tira une chaise et se laissa tomber dedans. « Je parlerai au peuple de Lumnaar’Yuvon, demain, pour l’avertir des agissements des Sorciers. Si je ne leur annonce pas que nous partons livrer bataille, alors ils se révolteront. Ils s’entretueront, peut-être, même. » - « C’est peut-être toi qui as peur de mourir, Hazaan. » Les deux hommes échangèrent un regard. « Je suis suffisamment vieux pour n’avoir plus peur d’Öodun. » Il sourit faiblement, puis prit à son tour place sur un siège. Raguel les imita. « Tous les Sorciers ne sont pas aussi puissants que Val’Aimé Taiji. » - « Non. Mais il paraît qu’Elias Salvatore recèle un pouvoir phénoménal. Au bal de Lagertha, la magie noire suintait autour de lui. » - « Peu importe. Il va sans doute mourir durant sa crucifixion. » - « Je l’espère. » Silence, de ces silences fatalistes qui martèlent les cœurs de lourds battements fatigués. Pourtant, la colère pulsait encore dans leurs poitrines. L’affront des Sorciers les avait poussés dans un précipice d’incertitude et de désastre. « Je ne vais pas me battre, mais je suis prêt à vous aider, pour le matériel et l’organisation. » Raguel lui adressa une œillade en coin, mais ne dit rien. « Merci. » souffla Hazaan. Il attrapa le saucisson et le fromage qu’il avait laissés sur la table. « Servez-vous en bière. » Il avait prévu d’accueillir ses invités dignement, avant que ceux-ci ne se sautassent à la gorge. Muni d’un long couteau, il découpa des tranches de saucisson et de fromage, tandis que ses acolytes se servaient en bière. « Le monde entier va penser que vous exagérez et que vous outrepassez vos droits. » déclara Atthirari, un morceau de viande dans la bouche. « Oui. On ne sera plus les victimes, mais les bourreaux. » Sa chope à la main, il haussa les épaules. La femme de Sceptelinôst répondit : « Si le monde entier préfère croire un mensonge, libre à lui. »

Tard dans la nuit, ils discutèrent. Nombre de soldats, entraînements, équipements, denrées, boissons, alliés, stratégies, tactiques, modes opératoires, attaques, défenses, replis. Lorsque l’alcool enfuma trop leurs esprits, plus aucun propos sensé ne fit vibrer leurs lèvres ; mais des rires résonnèrent dans leurs gorges, des exclamations gonflèrent leurs poumons et la joie chassa l’appréhension, la colère et le sérieux. Ils sortirent festoyer avec leurs semblables ; là où la bière coulait à flot, la présence du souverain de Keizaal n’importunait personne. Là où l’odeur avinée régnait en maîtresse, le spectre de la guerre ne faisait trembler personne : on y parlait le langage de l’amour. Telle la lumière des flammes, les mains dansaient d’une courbe à l’autre. Les bouches se fermaient et s’ouvraient sur des mondes de fantasmes. Les râles et les gémissements montaient dans l’air nocturne comme des centaines de prières adressées aux divinités du plaisir. Là où on célébrait la vie, il n’y avait pas de place pour la poigne sèche de la mort.



Message V – 745 mots




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Lun 17 Jan 2022, 08:13




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


Lieu : Lumnaar’Yuvon.


Les jours s’étaient étirés à la manière d’un long nuage cotonneux dans le ciel d’azur. Finalement, Raguel et Atthirari étaient partis, et Hazaan goûtait de nouveau à la solitude. Ils avaient décidé de ne rien dire avant que les deux autres chefs fussent partis, afin de garder la situation sous contrôle – et notamment d’éviter tout débordement à l’égard du représentant de Keizaal. Désormais, il se tenait sur le sommet d’une pile de caisses, debout devant une bonne partie de son peuple, visible et audible de tous. Les regards étaient rivés sur lui. Depuis des jours, tous attendaient qu’il prît la parole, pour savoir de quelle façon ils allaient faire payer les Mages Noirs. La rumeur voulait qu’une guerre se préparât. Si tout le monde parlait de venger la Thur de Gein’Drakul, il eût fallu être stupide ou borné pour ne pas voir plus loin : s’il advenait, ce conflit serait avant tout la traduction de siècles de haine et d’espoirs de revanche. Une large poche de pus prête à éclater et à répandre sur Amestris ses coulées jaunâtres, visqueuses et puantes.

Le Thur inspira, puis commença : « Je ne vous apprends rien en disant que les Sorciers sont les lâches et les traîtres les plus fourbes qu’on puisse trouver. Quiconque manque de s’en méfier s’expose à un danger. Et nous avons commis cette erreur. » Des murmures d’incompréhension parcoururent l’assemblée. Parlait-il de Shezira ou d’autre chose ? Tandis que le doute virevoltait, l’attention était focalisée sur l’orateur. « Je comptais vous proposer de leur demander un paiement en pièces d’or et de nous livrer Val’Aimé Taiji afin qu’il réponde de son crime devant notre justice. Mais les Sorciers nous ont écrit une lettre d’excuses. » Il la brandit, sous les regards médusés, outrés ou énervés des Réprouvés. Les pans de la feuille claquaient sans bruit dans le vent. « Dans cette lettre, ils décrètent que la mort de Shezira n’est qu’un « regrettable accident ». J’étais là, je l’ai vue, et ça n’avait rien d’un accident. La magie de Val’Aimé ne lui a pas échappé. Il ne visait pas quelqu’un d’autre. Il ne pensait pas à autre chose qu’à la tuer. » La colère faisait vibrer sa voix : elle trouva un écho dans les cris de la foule. Certains se trouvaient près du lieu du massacre et avaient pu voir les restes de Shezira ; d’autres avaient été des spectateurs impuissants de la scène qui s’était jouée sous leurs yeux. « Ils ont raconté cette version à qui voulait l’entendre et, désormais, c’est le monde entier qui croit que Shezira n’est que la victime d’un hasard bête et méchant. » - « C’est des imbéciles, pour croire la parole de Sorciers ! » - « Tout le monde sait que les Sorciers sont des menteurs ! » - « Des assassins ! » L’ire enflait. Il la sentait venir saturer l’air, électrique et piquante, semblable à des centaines de têtes de serpents prêtes à mordre.

Hazaan acquiesça, avant de reprendre : « Nous ne pouvons pas forcer les autres à croire la vérité. Ça ne sert à rien. C’est notre erreur, à Raguel et à moi, de ne pas avoir parlé en premier. » - « On avait des morts à enterrer et des Zaahin à honorer ! » - « Oui, et comme vous, je crois que nous avons bien fait. » C’était à son tour de mentir. Ils avaient commis une erreur stratégique déplorable, qui allait leur coûter des centaines de vies. Peut-être même plus. Il frissonna. « Maintenant, nous avons deux options : soit nous ne faisons rien, et nous épargnerons bien des vies, soit nous partons attaquer Amestris, et nous laverons l’honneur sali. » Il y eut un bref silence, comme un souffle haché. Une suspension d’éternité, sur laquelle coulèrent les regards attentifs des Zaahin. Paaz Kiin’Din brandissait sa justice ; Kiir’Wahlwan levait son poing guerrier. Si quelques-uns protestaient, leurs murmures se perdaient dans le vent. Seul l’appel du sang tonnait, justice parmi les justices. Puis, un cri résonna : « LA GUERRE ! » Un rugissement suivit, et des poings montèrent vers le ciel. Le cri fut repris, une fois, deux fois, trois fois, puis scandé des dizaines, des centaines, peut-être des milliers de fois. Dans son écho, on entendait déjà les noms des morts. Trop tard pour les sauver : l’engrenage était lancé.



Message VI – 731 mots

*se prépare à faire du hachis parmentier de Réprouvés*




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Lun 17 Jan 2022, 22:26




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


Lieu : Lumnaar’Yuvon.


« Ils ne peuvent pas faire ça. » - « Je t’avais dit qu’ils allaient le faire. » - « Ils sont stupides, ou quoi ?! » Priam haussa les épaules. Ils étaient plus orgueilleux que stupides. Plus ancrés dans une réalité qui n’existait plus qu’imbéciles. Plus certains de leurs croyances que de leur idiotie. Les masses semblent avoir cette crétinerie inhérente aux troupeaux agglutinés, comme si, paradoxalement, la réunion de tous ces cerveaux court-circuitait chaque réseau de neurones. « S’ils y vont, ils vont mourir ! » - « Je ne sais pas s’ils réalisent tous. Et ceux qui s’en rendent compte s’en fichent. Ce qui importe, c’est de faire suffisamment mal aux Sorciers pour qu’ils s’en souviennent toujours. » Freyja serra les dents. « Ils se souviendront juste de leur bêtise et de l’humiliation qu’ils leur ont infligée. » Tandis que le Thur de Lumnaar’Yuvon quittait son podium de caisses en bois, elle gardait les yeux rivés sur lui. Vivement, elle attrapa le poignet de son frère. « Viens. » Elle l’entraîna à sa suite.

« Qu’est-ce que tu comptes lui dire ? Qu’il est stupide ? » Sa cadette jouait des coudes dans la foule. « Peut-être bien. » - « Laëth, ce n’est pas ta plac- » Parvenue à quelques mètres du châtain, elle appela : « Hazaan ! » Il se retourna pour découvrir les silhouettes de la fratrie. « Vous ne pouvez pas attaquer Amestris ! » - « Qu’est-ce que vous faites ici ? » Les sourcils froncés, il les dévisagea. « Nous avons appris pour Shezira et nous sommes venus aussi vite que possible. » - « Si vous attaquez, vous mourrez. » Son regard vert passa de l’un à l’autre des Belegad, puis glissa sur la foule qui se dispersait, à quelques mètres d’eux. Certains le regardaient encore, les bras croisés, probablement insatisfaits de sa décision. Personne ne les entendait. « Je sais. » lâcha-t-il. La brune secoua la tête, le visage marqué par l’incompréhension. « C’est du suicide ! » Il acquiesça. « Tu les livrerais tous à la mort ? C’est ce qu’un chef est censé faire, c’est ça ? » Hazaan serra les dents et fit un pas vers elle. « Et qui es-tu, pour remettre en cause mes choix ? Juste une traîtresse de plus, non ? » Piquée au vif, Freyja se campa sur ses jambes et leva un index plein de sentiments contraires. Le feu brillait dans ses prunelles. « Je me suis battue pour vous. À l’Odon do Dur et à Arcadia. » - « Donc ça te donne le droit de prétendre diriger à ma place ? » gronda-t-il. Toute bienveillance avait quitté ses prunelles. Tel un lion, il dévisageait l’Aile d’Acier depuis les hauteurs de son allure princière. Elle se sentit vaciller un peu, mais lutta, les muscles tendus et le regard embrasé. « Hum. » Un rictus moqueur tira les lèvres du Réprouvé. « Je croyais que les Anges vous enseignaient le respect et l’humilité, Intrépide. » La fille de Manichéens rougit, prête à répliquer, mais son frère s’avança. « Elle ne pensait pas à mal. Elle est juste inquiète. Pas vrai ? » Le regard dur d’Hazaan se planta sur lui. « Je crois que ta sœur est largement capable de se défendre seule. »

Ses yeux allèrent de l’un à l’autre. « C’était tout ce que vous aviez à me dire ? » - « Non. On voulait proposer notre aide. » - « Et je devrais l’accepter ? » - « Tu as reconnu toi-même que cette bataille était perdue d’avance. Je crois que vous aurez besoin de toute l’aide que l’on vous proposera pour vous en sortir avec le moins de dommages possibles. » Le Thur le jaugea. Il savait que Priam était parti pour suivre sa sœur. Pour l’accompagner, pour la protéger. Sa décision de rester parmi les Immaculés constituait une trahison, mais elle était toujours moins grave et moins pénible que celle de sa cadette, poussée à déserter pour des raisons idéologiques. Pourtant, comme elle, il s’était investi pour son peuple d’origine. Au sein de leurs nations d’accueil, ils jouissaient d’une certaine reconnaissance. « Qu’est-ce que tu proposes ? » - « Je suis diplomate. Nous avons été invités à Amestris, pour la Crucifixion. Nous pourrions vous faire un retour rapide de ce qu’il s’y est passé. » - « Elias Salvatore va sans doute mourir. » - « Je n’en suis pas certaine. » intervint Freyja, le cœur battant. Il ne devait pas. Il ne pouvait pas. Il n’avait pas le droit. Elle ne pouvait rien dire de tout cela. Hazaan lui adressa une œillade à mi-chemin entre l’hostilité et l’intérêt. « Et après ? » - « On peut vous aider à préparer la guerre. Si je peux me permettre, vous devriez chercher l’aide d’autres personnes : les Déchus, les autres participants à l’Odon do Dur… N’importe quel allié potentiel. » Le Tyd’Saan plissa les yeux, apparemment songeur. Finalement, il dit : « Nous verrons. Allez à Amestris. Nous discuterons du reste à votre retour. » Il retint un mouvement de départ et hésita, avant de demander : « Et les Anges ? » Freyja haussa les épaules. Priam répondit, prudemment : « Nous agissons pour ce qui est Juste. »



Message VII – 888 mots

En fait, les Réprouvés, c'est les sangliers de Princesse Mononoke. Ils se disent comme Okkoto : « Même si nous devons périr jusqu’au dernier, ce sera une bataille que les humains n’oublieront jamais ! » C'est beau <3 (stupide mais beau /sbaf)
*elle parlait toute seule dans ses solos*




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Mar 18 Jan 2022, 09:34




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


RP lié : La Crucifixion.
Lieu : Amestris.


Elle voulait être présente. Elle le voulait, et pourtant, la peur lui tordait le ventre. Elle se souvenait de l’interdiction de Jun. Elle se rappelait son ton sec et ses yeux plissés, comme si elle venait d’essayer de le blesser. C’était de l’inquiétude. Cette angoisse nourrissait la sienne. Outre le caractère particulier de cette journée, retrouver Amestris n’avait rien de plaisant. La Vorace avait dévoré une part de l’Ange. Une lumière fracturée par la douleur de la trahison et du mensonge et par la peine de la réalité et de la vérité ; un fragment d’innocence qu’elle ne récupérerait jamais. Une désillusion vive et brutale. Une horreur que le reste avait réussi à surmonter. Le reste n’était peut-être que folie. Parfois, elle avait peur – d’elle-même. Elle inspira et regarda à sa droite. Nalim et Priam se tenaient près des autres diplomates, droits et sérieux dans leurs vêtements soignés. Voir son frère si bien habillé lui procurait toujours un drôle d’effet, comme si les nobles tissus dénaturaient l’authenticité de son cœur et le faisaient paraître pour ce qu’il n’était pas. C’était étrange. Nerveusement, elle appuya sa paume sur le pommeau de son épée, la fit rouler sur l’orbe lisse, glissa ses doigts sur la garde, s’y cramponna, lâcha tout. Elle coula un regard vers les Humains maintenus autour de la croix et frissonna. Leur présence la terrifiait. Comment pourrait-il survivre, sans sa magie ? Il mourrait. L’épuisement finirait par le gagner, et il mourrait étouffé par son propre poids. Pourtant, l’Ange ne pouvait s’empêcher d’espérer un miracle. Si elle essayait de le sauver, il serait en colère. Mais supporterait-elle de le regarder souffrir et mourir ?

Le silence s’érigea. Elias Salvatore arrivait. Lorsque ses yeux le touchèrent, elle sentit son cœur défaillir. Les images de son couronnement lui revinrent : il s’était déroulé ici, avec ce même cérémoniel dégoûtant. L’atmosphère, néanmoins, était bien différente. Elle avait envie de crier. De se jeter au milieu du chemin et de hurler, de prier, de supplier. Ne fais pas ça, ne faites pas ça. Il passa devant elle, et elle ne fit rien. Son palpitant se serra et son estomac se retourna. Les prunelles toujours fixées sur l’Empereur Noir, elle scruta sa peau sur laquelle se dessinèrent les marques du mal ; dans son dos, cette Lune Noire qu’il lui avait montrée, longtemps auparavant, et partout ces stries qui menaçaient de l’engloutir depuis son couronnement. Une autre sphère d’ébène, sur son front, comme si Ethelba ne le suivait plus seulement à la trace, mais exerçait sur lui toute l’emprise dont peut jouir une Déesse. Son cœur s’effritait. Pas à la manière d’un bâtiment usé par le temps, mais plutôt comme du calcaire frappé à la masse. Chaque coup lui meurtrissait l’âme. Lorsque le premier clou s’enfonça dans la chair du Sorcier, elle détourna le regard. Malgré elle, sa douleur devenait la sienne : ses mains et ses pieds la démangèrent aussitôt. Elle ne pouvait pas le supporter ; et les autres ne devaient pas voir les larmes qui menaçaient de couler. Si elle l’avait pu, elle aurait pris sa place. Tout n’était qu’une question de place ; mais ces derniers temps, sa place ne semblait jamais se trouver où elle le souhaitait.

Finalement, pour n’éveiller aucun soupçon, elle se força à le regarder. À observer cette vie qui commençait déjà à s’écouler. Ce sang qui rampait sur le corps blême du vieillard, ce corps qu’elle imaginait sans mal être celui qu’elle avait embrassé, caressé, serré contre elle, aimé – celui de Kaahl. Par moment, il lui semblait qu’elle le voyait véritablement, et tout devenait encore plus insupportable. La folie serpentait entre son esprit et son cœur, avide d’adoucir les maux qui la tourmentaient. Elle aurait pu tuer ces Humains. Elle aurait pu essayer de le faire d’ici, ou s’envoler et bondir dans leur cercle. Les éliminer un à un, dans des giclées vermeilles regorgeantes de vie et d’espoir. Elle aurait pu laisser sa magie se déployer, disperser la foule, apaiser les mœurs, frapper les mauvais. Elle aurait pu essayer n’importe quoi. Elle se sentait comme une bête affolée dont on aurait entravé chaque membre, que l’on aurait muselée jusqu’au sang et que l’on aurait continué à battre pour que ses plaintes cessassent. Comme Kaahl, Freyja voulait que son palpitant arrêtât de chanter, pour ne plus jamais marquer le rythme de la souffrance de l’amour.



Message VIII – 729 mots




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Mer 19 Jan 2022, 08:41




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


RP lié : La Crucifixion.
Lieu : Amestris.


Priam jeta un coup d’œil à Laëth. Elle était pâle et son regard brillait d’une émotion mal contenue. Il fronça les sourcils. « Ça va ? » Elle acquiesça. « C’est juste répugnant. » Il opina. Ce n’était pas le spectacle le plus agréable qu’il lui eût été donné de voir. Malgré lui, parallèlement à sa satisfaction, il ressentait une certaine peine à observer l’Empereur Noir souffrir de la sorte, et ses comparses se réjouir de son sort. À côté de lui, Nalim demeurait impassible. Il fixait la scène avec des prunelles glacées : quand la surprise effleurait le Belegad, il se rappelait ce qu’elles avaient dû endurer, des années auparavant. La perte de ses proches, le massacre des siens, des mois d’errance et d’incertitude. La violence. Et on s’y habitue, à la violence. C’est peut-être terrible, mais c’est au moins aussi vital. Qui pourrait survivre à l’insoutenable sans jamais s’y accoutumer ? Sans jamais le rechercher, parfois ? Il songea à Aliénor. De leur impossible relation, il tirait de la souffrance : pourtant, il n’interrompait rien. Il pensa à sa sœur et à son fiancé. Il l’avait rendue terriblement malheureuse à plusieurs reprises : pourtant, elle n’interrompait rien. La marque des Réprouvés les poursuivait ; leurs relations violentes et malsaines marchaient dans leurs pas comme des ombres menaçantes. Cela cesserait-il, un jour ? Auraient-ils la volonté de briser ce cercle ? Au creux de son esprit, une phrase extirpée des limbes de sa mémoire résonna : lorsque son cœur sera en cendres de s’être trop brûlé, elle ne cherchera plus à toucher les flammes. Il ferma fort les yeux, plissa le nez et la bouche et tourna à moitié la tête, comme s’il venait de prendre un coup. Un pic semblait s’être introduit près de l’une de ses tempes pour aller perforer la deuxième. En quelques secondes, la sensation disparue, et le souvenir avec. Il n’y avait plus de place pour le passé quand le présent basculait.

Cyrius Windsor couronné. Sa main dans celle d’une fillette – de laquelle Priam, sans le savoir et malgré lui, était partiellement le géniteur. Elle avait été conçue dans un autre monde, un monde où il ne s’appartenait plus vraiment et où Scar manigançait contre tous. Les interrogations du diplomate faisaient écho à celles de toute l’assemblée : que faisait le Chancelier Merlfide, l’insigne des Empereurs Noirs posé sur sa tête ? Cette lettre disait-elle la vérité ? Pourquoi Elias aurait-il abdiqué ? Pensait-il vraiment mourir ? N’avait-il rien prévu pour sauver sa peau ? Un sentiment de colère gagna le cœur de l’Immaculé. Il n’imaginait pas une seule seconde que le Grand Chaos eût accédé à la requête de son clergé s’il était certain d’en périr. Quel fou se serait jeté aussi bêtement dans la gueule de la mort ? Elias Salvatore avait de nombreux défauts, mais la stupidité ne semblait pas en faire partie. C’était un homme intelligent. À quel moment un Sorcier de son rang abdiquait-il au profit d’un autre ? Que manigançaient-ils, ces deux hommes que l’on disait si proches ? Il plissa les paupières, tandis qu’un semblant de réponse s’immisçait en lui dès que fut formulée l’exigence concernant les Humains.

« Quelque chose est en train de changer. » intervint Laëth. « Déployez le Sanctuaire d’Ahena. » Il sentit celui de sa cadette l’effleurer, puis l’englober. Il relâcha le sien, et rapidement, Nalim fit de même. « Ne bougez pas d’ici, et si quelqu’un vous parle, ne répondez pas. » La zone de non-violence qu’ils venaient de créer devrait suffire à les protéger de toute interaction venimeuse, mais combien de temps ? Il observa sa sœur. À l’affût, elle guettait la foule. Il suivit son regard, et constata la même chose qu’elle : le chaos se répandait dans l’assemblée. On aurait dit qu’un orage planait au-dessus de cet océan et qu’il grondait sourdement, prêt à faire claquer des coups de tonnerre. « Qu’est-ce qu’il se passe ? » - « Je ne sais pas exactement. » Elle s’avança pour se poster devant eux, prête à assumer la mission qu’on lui avait assignée : leur protection. Le Prince Noir, qui jouait des coudes dans la foule, passa devant la tribune des diplomates et avança jusqu’à la croix. Ils le suivirent des yeux. Ils étaient suffisamment près pour profiter de tout le spectacle, mais trop loin pour entendre ce qu’il se disait. Priam étendit son ouïe au-delà de sa sphère usuelle. Il haussa les sourcils, surpris. « Délilah Salvatore est morte. Elle a été assassinée. » lâcha-t-il. Les deux autres Anges pivotèrent vers lui. Le choc se lisait aisément sur le visage de Laëth. Nalim arborait une expression suspicieuse. Pourtant, il ne considérait déjà plus Priam. « Regardez le ciel. »



Message IX – 772 mots




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Jeu 20 Jan 2022, 10:05




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


RP lié : La Crucifixion.
Lieu : Amestris.


« Elle tombe ? » Freyja secoua la tête, incapable de répondre. La noirceur du ciel rendait indiscernable le manège de la Lune Noire. « On devrait partir. » - « Non. » Elle pivota vers Nalim. Il y avait, dans leurs voix et leurs gestes, une pointe de ce chaos contre lequel leur magie luttait. « Ce n’est pas parc- » Le hurlement l’interrompit. La fille de Réprouvés suivit le regard de la foule : d’épaisses pattes noires venaient de broyer le haut d’un bâtiment. « Et là, vous ne pensez toujours pas qu’on devrait partir ? » - « Non ! » s’écria-t-elle en jetant un regard noir au diplomate. Vif, il lui attrapa le poignet. « Je ne vais pas mourir simplement parce que vous avez envie de jouer les preux chevaliers. » Les deux Anges s’affrontèrent du regard. « Ce n’est pas ce que je fais. Lâchez-moi. » Priam intervint : « On ne peut pas se permettre de ne pas savoir tout de suite si Elias Salvatore meurt ou survit. » Son mentor le regarda. Dans ses prunelles, la peur luisait, une peur viscérale et insoutenable. Le brun se demanda s’il avait l’impression de revivre la défaite des Anges en Terre Blanche. Depuis la fin de la guerre, Nalim n’avait assisté à aucune scène de combat, à aucune violence ; il vivait sur les terres magiciennes, dans un cocon de verdure et de paix. Les conflits, il les orchestrait, mais il ne les vivait pas. Lui aussi, il avait peur. Laëth aussi. Mais il savait tous les deux qu’ils ne pouvaient pas partir avant la fin de la cérémonie ; sinon pour les Anges, au moins pour les Réprouvés. « On ne- » Freyja leur envoya une onde de choc qui les fit tomber, puis se jeta au sol. Les serres de la créature – qui n’était autre qu’un énorme dragon noir – frôlèrent leurs corps. Ou n’était-ce que le vent de sa course ?

Le danger passé, la brune releva la tête vers la croix : dans le sac et le ressac de la foule paniquée, dans l’alignement du gros reptile, elle aperçut le visage d’Elias. La peur lui crispa le ventre. Elle songea à l’ironie que représenterait sa mort si le dragon le dévorait, lui qui avait un fils dont ces bêtes étaient la passion. Ses membres la brûlaient. Elle avait envie de bondir vers eux et de faire inutilement rempart de son corps. Un mouvement, non loin d’eux, attira pourtant son regard : elle reconnut Adam, et resta muette. Une main solide se fixa sur son épaule. « Merci. » Elle regarda son frère, interdite. « Debout. » finit-elle par articuler, la bouche sèche. Elle se releva, et les deux hommes firent de même. Elle devait se concentrer sur eux. Kaahl s’était délibérément laissé crucifié : elle espérait de tout cœur qu’il avait un plan savamment préparé et minutieusement mené – que le Merlfide avec la couronne et le dragon en faisaient partie. Pour le reste, elle n’avait pas le temps d’y songer, pas le temps de réfléchir, pas le temps d’assembler le puzzle ; et elle lui en voulut, soudain, de ne rien lui avoir dit, de la laisser souffrir de son ignorance et d’y demeurer indifférent. Elle aurait aimé que le cœur prévalût plus souvent sur les raisons d’État. Elle voulut se tourner vers Nalim pour lui parler, quand son regard buta sur une silhouette qu’elle connaissait par cœur. Ezechyel. Son ire eut à peine le temps d’éclore ; un bruit sec et puissant fit vibrer l’air. À nouveau, elle leva la tête : la Lune Noire s’était disloquée. « Éloignez-vous des bâtiments. » Elle s’envola ; mais eux, figés d’ébahissement, ne bougèrent pas. « Éloignez-vous des bâtiments ! » cria-t-elle, à quelques mètres au-dessus du sol. Priam asséna un coup de coude à Nalim, juste assez insistant pour le faire réagir, et ils prirent leur envol.

Depuis les hauteurs, le spectacle révélait son ampleur. Des rochers lunaires s’étaient déjà écrasés sur plusieurs édifices. Des corps jonchaient le sol, éclatés par des morceaux de lune ou heurtés par des projectiles plus petits. La Vorace éventrée semblait dégueuler tout le sang qui faisait sa vie. Par télékinésie, Priam et Nalim parvenaient à détourner certains lambeaux du ciel ; Freyja en repoussait d’autres grâce à la propulsion d’ondes de choc. Ils évitaient les plus gros en slalomant entre eux. De temps à autre, l’Aile d’Acier jetait un coup d’œil en contrebas. Dans le flot de la bataille, elle avait perdu de vue Adam – et se souciait-elle seulement de ce qu’il pouvait lui arriver ? –, mais distinguait parfaitement Elias. Il n’était plus attaché. Debout à côté de lui se tenait Jun – mais ce n’était pas celui qu’elle avait vu, plus tôt, avec cette femme. Elle fronça les sourcils, sans pouvoir plus y penser : chaque distraction mettait sa vie et celle de ses partenaires en danger. Celle de Kaahl, aussi, qu’elle s’évertuait à protéger le plus discrètement possible. Elle aurait pu le justifier : si cet Empereur Noir avait cherché à préserver une forme de paix et à coopérer avec plusieurs peuples, il aurait pu être remplacé par un individu plus virulent. Elle plongea sous un morceau de Lune Noire pour l’éviter, et lorsqu’elle remonta, ses yeux se posèrent sur l’impensable, sur l’inimaginable, sur l’insoutenable. Elle ne sut pas si elle parvint à crier ou à n’expulser que du silence. Un fragment noir frappa son omoplate et une partie de son aile droite. Elle chuta.



Message X – 920 mots




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Ven 21 Jan 2022, 22:05



[A] - L’engrenage | Réprouvés 8au1

L'engrenage


Je la balançai sur le lit, comme un sac de patates ailé. Mes yeux la fixèrent, entre colère et urgence.

« Espèce de grosse débile ! »

Les mots étaient sortis avec rancœur. Je savais pourtant que je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même. Elle ne m’avait pas demandé de l’aider. J’aurais pu la laisser crever. J’aurais dû. Je n’avais pas pu.

« Merde ! Je te… »

Je n’avais pas les mots et, de toute façon, elle ne m’entendait pas.

« Aile d’Acier, tu parles ! Plomb dans l’aile oui ! »  

Mon genou s’enfonça dans le matelas. L’autre le rejoignit. Mes mains cherchèrent ses blessures.

« J’en ai marre de te sauver le cul sans que tu ne me l’offres en retour, tu sais ça ? »

Je disais tout ce qui me passait par la tête. Il n’y avait plus rien de stable dans mon esprit. Les derniers instants avaient été confus. J’avais vu la même chose qu’elle mais, à sa différence, je ne m’étais pas pris un morceau d’astre.

« L’amour plus fort que la mort, c’est des conneries, au cas où tu ne le saurais pas. »

Parler m’aidait à me calmer mais j’étais trop mal pour qu’une ou deux phrases suffisent.

« Comment est-ce que tu peux être aussi sotte ? Le regarder, lui, et oublier de regarder autour de toi ? Il fera quoi si tu crèves comme une merde ? »

Je la déshabillai, en pensant que c’était bien fait. J’espérais qu’elle me fuirait à l’avenir. Je pourrais même prétendre l’avoir tripotée pour attiser son ire. J’avais quitté Amestris en grande partie à cause d’elle après tout.

Je l’accusais mais j’avais conscience qu’elle m’avait fait prendre la bonne décision. Nous n’aurions pas pu, ni l’un ni l’autre, aider Kaahl, pas sans le mettre encore plus en danger. Nous étions deux poids morts, deux incapables. Il nous fallait subir ses putains de plans tordus.

« Mais quelle idée ! »

Quelle idée de s’enfoncer une lame dans la gorge ! Qui fait ça ? Qui ?

Je me sentais doucement couler vers l’état le plus problématique de ma vie. Je ne me laissais pas souvent dépasser par les événements mais je sentais cette tension en moi, une souffrance particulière. Je ne savais pas ce qu’il s’était passé ensuite puisque j’avais vu Laëth dégringoler. J’étais allé la chercher, poussé par une pulsion soudaine. J’avais ressenti une nécessité.

J’aurais dû la laisser par terre, c’est ce que je ne cessais de me répéter. J’aurais dû la laisser là. Elle aurait été sauvée par quelqu’un d’autre. Pourtant, j’avais eu peur qu’elle tombe sur un Sorcier à moitié fou qui en aurait fait je ne sais quoi. Il valait mieux que ce soit moi.

En mettant sa peau à nu, mes mains tremblaient. Dans ma tête, des scénarios improbables se bousculaient. Il n’allait pas bien ces derniers temps. Et s’il avait décidé de se suicider, en constatant que la croix n’arrivait pas à l’achever ?

« Non. »

Je ne devais pas devenir comme elle, là, étalée sur le lit. C’était sa fonction de s’inquiéter et de s’emporter, de devenir confuse et de bouger dans tous les sens comme une poule à qui l’on a volé son œuf. Ce n’était pas mon mode de fonctionnement.

J’enlevai mes chaussures en m’aidant de mes pieds et m’assis sur le lit. Je regardai son corps. Des bleus s’y étaient formés durant le trajet. Je ne savais pas exactement où est-ce qu’elle s’était cognée. Tout demeurait confus. Je l’avais vue, je m’étais précipité vers elle. C’était tout ce dont je me rappelais.

« Bon. De toute façon, je ne peux rien faire maintenant. S’il s’est égorgé, il est déjà mort. »

Parler à voix haute m’aidait à me canaliser et à prendre conscience de mes priorités. Je ne pouvais pas agir de façon irrationnelle.

« Je la soigne et ensuite j’aviserai. Il savait ce qu’il faisait. On va dire ça. »

Je lâchai une injure après quelques secondes de soin.

« Putain ! J’espère vraiment qu’il savait ce qu’il faisait ! »  

Mes mains tremblaient toujours. Le sentiment d’urgence continuait d’exister et je me demandais ce que j’allais faire une fois qu’elle serait réveillée. Elle voudrait sans doute y retourner.

Je fis une pause lorsque les plaies ne furent plus que superficielles, entassai ses vêtements au sol et y mis le feu. Je n’étais pas certain que ça la freinerait longtemps mais tant pis. L’odeur la réveillerait.

Je me rassis sur le lit et tentai de passer mon angoisse en résorbant ses blessures, avant de joindre ses mains et d’user des menottes des Léralondé. Elle n’irait nulle part, pas avant que je réussisse à avoir des nouvelles d’Amestris et de lui.

« Tu te réveilles ou t'as besoin que je t’aide ? »

Elle devait se réveiller maintenant.

« Oh ! Plomb dans l’aile ! Tu te lèves ? J'ai autre chose à faire que de m'occuper de toi ! »

815 mots



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Sam 22 Jan 2022, 12:21




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


RP lié : La Crucifixion.
Lieu : Vervallée.


Dans un tourbillon de plumes blanches, elle se débattit contre l’inéluctable. Elle voulait se raccrocher au ciel, agripper les étoiles, ne pas chuter. Pourtant, quand son corps heurta le sol, elle n’eut pas peur. C’était autre chose : une sensation plus douce, presque rassurante, une certitude, comme un point à la fin d’une phrase. Une pensée qui contre la mort au point de lui rire au nez. Seule l’inconscience l’avala. Elle ne sentait pas son corps et il n’existait aucune douleur. Dans ces limbes, le silence invitait des échos lointains. Des sons, des mots, des bribes incompréhensibles qui se mêlaient à des fantaisies de l’esprit. Elle se rêvait dans une école, loin de ses terreurs d’adulte, plus proche des monstres de l’enfance, à mi-chemin de l’adolescence. Elle vagabondait dans un parc, s’élevait vers les hautes tours, redescendait en piqué vers la cour. La voix qu’elle entendait résonnait parfois et se prêtait à l’incarnation de divers personnages. Son esprit bondissait d’une scène à l’autre, indifférent à l’incohérence qu’il générait. Il n’affectionnait pas toujours les rêveries et plongeait parfois au cœur d’épisodes cauchemardesques. La suie noircissait les bâtiments de Basphel au rythme de la montée affolée des flammes. Dans l’incendie, des hurlements perçaient. La morsure du feu déchirait les peaux et volait les vies, quand sa fumée n’étouffait pas les poumons. Son odeur piquante embrasait le nez et la gorge. Freyja toussa et roula sur le côté. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, le soleil qui se dévidait par la fenêtre perça ses rétines. Elle plissa les paupières. Elle connaissait cet endroit. La silhouette noire du piano se découpait sur le mur bleu pâle. Sur les étagères de couleur claire, les livres et les dossiers s’alignaient dans un ordre savamment réfléchi. Au bout de l’une d’elles, un hortensia bleu s’épanouissait. Elle savait que d’autres plantes décoraient la chambre : une orchidée, une amaryllis et un philodendron. Il y avait aussi un miroir, un bureau toujours impeccablement tenu, une armoire où chaque chose était soigneusement pliée et rangée par couleur, quelques menus objets de décoration, un tapis gris et dessous, un parquet lustré. Elle se retourna. Sa peau nue, chauffée par le contact des couvertures, frissonna. Une vague douleur lui pinça l’omoplate : elle voulut bouger mais sentit une résistance autour de ses poignets, au moment même où ses yeux verts se fixaient sur le visage d’Adam.

Elle demeura interdite. Dans sa tête, les informations s’entrechoquaient. Cela produisait un brouhaha duquel elle était incapable d’extirper quoi que ce fût. Les faits. Les faits. Les faits. Ils étaient chez Kaahl, dans sa chambre. Elle était nue et menottée. Adam était habillé et assis près d’elle. Du sang tachait ses vêtements, ainsi que l’épiderme et les plumes de l’Ange et les couvertures du lit. D’où venaient-ils ? Son regard égaré scrutait la figure du Déchu comme si la réponse pouvait y être ancrée. Sa respiration s’accéléra et soudain, elle se rappela. Le vermeil sur la gorge blanche, la noirceur éclatée, la chute. La peur et la douleur broyèrent son palpitant. « Je dois y retourner. » fit-elle d’une voix blanche. « Détache-moi. » Elle se redressa et tendit ses bras vers lui, en même temps que ses iris se lançaient à la recherche de ses habits. Bien que l’idée que l’homme eût pu la toucher durant son temps d’inconscience la révulsait, elle n’avait mal nulle part, malgré la présence du sang : il avait dû la soigner. « Où sont mes vêt- » L’odeur de brûlé, qui n’était jamais partie, lui revint. Elle regarda vers sa provenance et pâlit. Ses muscles se tendirent et sa mâchoire se crispa. « Pourquoi t’as fait ça ? » L’énervement vint chatouiller son angoisse. Mais il ne pouvait pas être mort. Il n’avait pas le droit de mourir. Il ne voulait pas mourir. Il avait dû prévoir quelque chose. Ce n’était peut-être pas une vraie arme, pas du vrai sang, ou juste une illusion. Il n’était pas mort, mais elle avait besoin de s’en assurer.

D’une impulsion d’ailes, elle se mit debout. Son pas, d’abord bancal, se raffermit. Elle se dirigea vers l’armoire et l’ouvrit tant bien que mal. « Retire-moi ces putains de menottes. » répéta-t-elle, plus agacée. Il y avait urgence. Ne comprenait-il pas ? Non. Il ne le pouvait pas. Tandis qu’elle parcourait du regard les vêtements disponibles, elle tenta de faire glisser ses mains au travers des entraves. Impossible. Elle convoqua sa magie pour altérer le métal qui les constituait. Impossible. Elle ne le sentit pas immédiatement, mais chaque résistance drainait son énergie : grâce à cette baisse, ses émotions redevenaient maîtresses. Avec difficulté, elle attrapa un pantalon et commença à l’enfiler. Combien de temps était-elle restée inconsciente ? Que se passait-il, là-bas ? Elle insista : « Je dois retourner à Amestris. Je dois protéger mon frère et Nalim. » C’était une question de vie ou de mort ; autant pour eux que pour Kaahl – mais lui, elle ne pouvait pas en parler. Comment ferait-elle, s’ils mouraient tous ? Et s’il était déjà trop tard ? À cette pensée, la panique la gagna. Son cœur tressauta, sanglotant, puis des larmes coulèrent sur ses joues. « Tu n’aurais pas dû m’amener ici. » Le parfum de son fiancé flottait partout, cette odeur de propreté que n’importe quel Réprouvé aurait haïe mais qu’elle avait appris à aimer ; sa marque méticuleuse imprégnait l’agencement, le rangement, l’ameublement ; ses goûts laissaient dans cette pièce une trace de son âme. La chambre était comme un sanctuaire. Le cœur coincé entre l’espoir et la terreur, Freyja vivait son deuil avant l’heure. Pourtant, aucune anticipation paniquée ne pourrait rendre plus supportable la pire des éventualités.



Message XI – 945 mots




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Sam 22 Jan 2022, 13:53



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L'engrenage


« C’est pas trop tôt. »

Il y avait de la plainte dans ma voix mais elle était fausse. Je me sentais aussi soulagé qu’inquiet. Soulagé qu’elle aille bien. Inquiet pour la suite. C’était bien plus facile de discuter avec une demi-morte qu’avec une casse-couille. Durant son inconscience, elle n’avait pas eu la possibilité de me répondre là où j’avais eu celle d’essayer de noyer mes angoisses en l’invectivant à voix haute ou en détaillant ce que j’allais faire. Maintenant, c’était différent. Tout ce que je dirais pourrait être retenu contre moi.

« Ha ha, très drôle. »

Un peu plus, et j’aurais pu rire. Tout aurait été joué dans ce rire et je n’étais pas un comédien d’exception. Je remarquai simplement que j’avais eu raison de penser qu’elle voudrait repartir. Elle ne s’arrêtait jamais. Plomb dans l’aile devrait être décapitée pour s’arrêter.

Ma mine s’assombrit pour rendre mon verdict.

« Non. Hors de question. »  

Mes yeux glissèrent sur sa poitrine lorsqu’elle me demanda pourquoi j’avais fait ça. J’avais une explication facile. Ce n’était pas la bonne et j’étais certain qu’elle le saurait mais ce n'était pas important.

« Je préfère te voir nue, c'est tout. »

Mon ton était sarcastique, parce que j’étais anxieux. Il fallait que l’angoisse passe quelque part : dans ma voix, dans la contraction que je sentais dans mon dos, par un mal de ventre latent. Elle se mettait là où elle pouvait, là où elle ne se voyait pas trop. Je n’aimais pas ça. C’était trop compliqué pour moi. Je préférais vivre simplement mais rien n’était simple avec ces deux idiots que je me trimballais dans mon existence, comme deux valises bien trop lourdes à porter.

« T’es ridicule. »

Lors de ses premiers pas, elle ressemblait vraiment à un oiseau à qui l’on aurait cassé une aile. Je restai sur le lit, à regarder ses fesses bouger, sans en éprouver le moindre plaisir. Elle me faisait de la peine et la peine grandit petit à petit, au fur et à mesure qu’elle essaya de s’habiller alors même que ses poignets étaient entravés. Je n’aimais pas ce rôle que j’avais endossé. J’aurais dû la détacher et lui rendre sa liberté. Un oiseau en cage c’est un oiseau mort.

« Non. »

Je ne disais pas souvent non. J’étais partant pour toutes les folies. Chaque individu devait vivre sa vie comme il l’entendait d’après moi, peu importe la morale. J’aurais dû la laisser repartir. Elle voulait faire le choix de risquer sa vie pour celles de ceux qu’elle aimait ? Tant mieux. C'est ce que j'aurais dû penser. Mais c’était hors de question.

« C’est ça. »

Les larmes coulèrent sur ses joues. Ça coulait toujours. Je sentis mes poumons se soulever et mon souffle se relâcher. Elle en devenait presque pathétique, à essayer de se vêtir sans y parvenir, à sautiller comme une colombe boiteuse.

Je me levai à mon tour et me dirigeai vers elle. Ma main attrapa son avant-bras et je la poussai contre le meuble.

« Arrête ! »

Mon poing frappa juste à côté de son visage, sur le miroir qui habillait la penderie. Il ne se brisa pas mais il trembla. Si j’avais regardé mon reflet, j’aurais pu y voir que mes sourcils s’étaient soudainement froncés. Mais je la regardais elle, avec ses mains attachées et ses envies délirantes de sauver tout le monde.

« Ce n’est pas en retournant te mettre en danger que tu sauveras qui que ce soit, tu entends ? C’est trop tard maintenant ! Ton frère doit déjà être parti d’Amestris. Qu’est-ce qu’il fera si t’y retournes et que tu t’y fais tuer ? »

Elle me tapait sur les nerfs, parce qu’il y avait cette bulle entre nous que personne ne devait faire éclater. Mais je n’en pouvais plus. C’était trop cruel. J’étais franc, je n’étais pas comme lui, à pouvoir mentir et zigzaguer quelle que soit la situation.

« Tu ne le sauveras pas lui non plus. S’il veut mourir, il mourra. Et même s’il ne le veut pas : il finira par mourir, un jour ou l’autre, de sa folie ou de celle des autres. Arrête de vouloir le sauver. Il n’y a rien à sauver chez lui ! Il n’y a qu’à accepter, tu comprends ? »

Je me sentais triste à présent, si bien que je l’attirai à moi. Je refermai mes bras sur elle. J’aurais aimé pouvoir poser mon menton sur le sommet de sa tête, pour me libérer de son regard mais elle était trop grande pour ça. J’enfonçai donc mon visage quelque part, dans ses cheveux ou contre sa peau. Ça n’avait aucune importance.

« Je ne te laisserai pas repartir parce que, sans toi, il ne serait plus le même. »

781 mots



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Sam 22 Jan 2022, 18:11




L’engrenage

En solo | Les Réprouvés


RP lié : La Crucifixion et Je souhaite.
Lieu : Vervallée.


Freyja regarda le poing d’Adam, appuyé contre la surface lisse du miroir, à quelques centimètres de sa tête. « Sinon quoi ? » lança-t-elle en plantant ses prunelles dans les siennes, défiante. Il n’avait pas le droit de lui interdire de protéger les siens. Il n’avait pas le droit de la retenir ici, prisonnière de quatre murs qui lui rappelaient tant celui qu’elle aimait. Il n’avait pas le droit de la condamner à l’ignorance, au doute et au désespoir. Il n’avait aucun droit sur elle. « Je ne m’y ferai pas tuer ! » Et si je meurs, qu’est-ce que ça fait ? S’il est mort, pourquoi est-ce que je continuerais à vivre ? Est-ce que j’y arriverais ? Est-ce que, malgré moi, je ne mourrais pas en même temps que lui ? Elle avait besoin de le prendre dans ses bras, de le serrer contre elle, de l’embrasser, d’éprouver sa vivacité autant qu’elle le pourrait. Elle ne s’imaginait plus sans lui depuis longtemps. Elle avait bâti sa propre vie, construit ses réussites et surmonté ses échecs, mais il occupait tant de place dans son cœur qu’elle ne parvenait pas à envisager la suite sans sa présence. Sa mort viendrait mettre un coup d’arrêt aux vibrations qui faisaient chanter son âme. Déjà, une dissonance s’y immisçait ; le regard de l’Aile d’Acier se troubla.

Elle observa fixement le Déchu. Que venait-il de dire ? De quoi parlait-il ? « Non. » souffla-t-elle. Non, elle ne comprenait pas. À quoi faisait-il allusion ? Pouvait-elle ne pas en être certaine ? Comment pouvait-il savoir ? Elle ne comprenait pas. Pourquoi Kaahl ne lui aurait-il pas dit qu’il savait, lui qui avait envisagé d’inclure Priam dans la confidence pour qu’elle pût en parler avec quelqu’un ? Pourquoi le Déchu était-il soudainement devenu si proche de lui, au point de l’assister dans son handicap, tous les jours ? Pourquoi son fiancé lui aurait-il menti à son sujet, lui qui lui avait affirmé qu’ils n’étaient que d’anciens collègues ? Pourquoi Adam avait-il toujours été insupportable avec elle, une Ange parmi tant d’autres ? Pourquoi les gens du quartier s’amusaient-ils de la relation entre les deux hommes, au point d’imaginer des choses qui n’existaient pas ? Pourquoi avait-elle fait ce rêve où ils s’embrassaient, tous les deux, devant elle ? Pourquoi Kaahl s’était-il mieux accommodé de son Lien avec Adam qu’elle-même, alors qu’il avait été peiné de son intention d’en créer un ? Pourquoi lui avait-il dit qu’il était heureux qu’elle eût quelqu’un sur qui compter, s’il venait à mourir ? Elle ne comprenait pas. Pourquoi n’avait-elle jamais écouté son instinct ? Les doutes et les questions se succédaient dans une folie tourbillonnante. Ils traînaient derrière eux des réponses qu’elle ne comprenait pas. Elle ne voulait pas comprendre. Elle ne voulait pas entendre cette vérité hurlante. Elle préférait s’arracher les tympans, les yeux, le cœur et tout le reste. Elle voulait les jeter dans les cendres de ses vêtements et raviver le brasier. Elle voulait mourir comme elle n’avait jamais eu envie de mourir, et tout emporter avec elle. Ne rien laisser d’autre que le goût infâme de la souffrance qu’elle sentait poindre dans sa poitrine. Peut-être n’était-ce dû qu’au fond des paroles du brun, et pas à la réalité qui sous-tendait ses propos ? « Il n’a pas le droit de mourir ! » s’obstina-t-elle. « Je refuse d’accepter ça ! Je ne veux pas… je ne veux pas… » De longs sanglots tuèrent sa phrase, et dans les bras d’Adam, ils ne cessèrent pas. Ce n’étaient pas ceux-là, qu’elle voulait – pourtant, elle s’y blottit. Ce n’était pas ce torse qu’elle voulait frapper – pourtant, elle le fit. Ce n’était pas lui qu’elle aimait et qui lui faisait si mal, avec ses envies de mourir, ses prises de risque absurdes et ses mensonges. Il y avait tout à sauver. Il y a toujours des choses à sauver chez tout le monde, et Kaahl ne faisait pas exception. Elle devait combattre le mal qui le rongeait, l’épauler, le soutenir, l’aimer, le haïr s’il le fallait. Elle devait rester cette lumière à l’horizon, qui faiblit parfois mais jamais ne s’éteint. Oui, il y avait tout à sauver. Il n’était pas que ce monstre que la plupart voyait en Elias. Il s’extasiait devant la beauté, il avait des rêves d’harmonie et de paix, il aimait les siens aussi sincèrement que possible, et il n’avait pas le droit de mourir. Il n’avait pas le droit de la laisser seule, avec son amour meurtri, ses milliers de questions, ses insultes et ses mots tendres, sa douceur et sa passion, sa tristesse et sa colère. Il n’avait pas le droit de partir. C’eût été lâche, injuste et cruel.

Mieux valait, sans doute, l’entêtement, l’honnêteté et la bêtise. Freyja se sentait idiote. De croire qu’elle pourrait toujours le porter à bout de bras. De penser qu’elle l’avait déjà fait autrement que quand il la laissait faire. De ne pas savoir s’arrêter et de continuer à lutter quand tout pointait vers sa défaite. D’être trop aveugle pour ouvrir les yeux. De n’avoir rien deviné quand l’évidence se dessinait. De n’avoir pas vu que le cœur du Magicien abritait quelqu’un d’autre. Comment avait-elle pu ne pas se rendre compte qu’ils s’aimaient ? Ce n’était pas de l’amitié, parce que les amitiés ne s’embarrassent pas des secrets de l’amour. Désormais, elle comprenait aussi pleinement que péniblement. Elle était prête à mourir pour un homme qui l’avait méprisée, dupée et moquée. Elle était prête à donner sa vie pour quelqu’un qui la piétinait à coups de mensonges et de tromperies. Il n’existait pas de douleur comparable à celle-ci. Nulle part dans l’univers ou dans le temps, dans nul autre cœur que le sien. Peu importait l’amour qu’il lui vouait : s’il existait, il l’avait massacré. Pourquoi ? Pourquoi se montrait-il si terrible, parfois ? Que lui importait qu’il ne fût plus le même, après elle, quand tout ce qu’elle avait construit autour de lui s’effondrait dans un fracas insoutenable ? « Je m’en fous. » lâcha-t-elle. Et Adam ? Lui en voulait-elle ? Le comprenait-elle ? Pouvait-elle faire preuve d’empathie quand de sa bouche étaient sortis les couteaux qui avaient déchiré ses rêves et son cœur ? Pouvait-elle le haïr quand il était le seul à avoir osé prononcer cette vérité qu’il ne lui devait pas ? Elle l’ignorait. Son cerveau malade rappelait à sa mémoire des phrases, des comportements, des scènes. Des remembrances d’enfance ou des souvenirs plus récents. Tout ce qui pouvait rendre l’expérience plus difficile et tout ce qui expliquait qu’elle représentât une telle fracture. L’Aile d’Acier se sentait brisée. Divisée. Incomplète. Comme si on lui avait volé une part d’elle-même ; et c’était certainement le cas. Elle avait cru en quelque chose qu’elle n’avait jamais eu, pas de cette façon-là. Elle avait cru en un amour sincère et profond. Il le lui avait arraché, pour jeter dans sa poitrine un tas de désillusions abjectes.

Il avait prononcé des mots, un jour, quelque part, des mots qui disaient qu’il l’aimait, qu’il serait toujours là pour elle, qu’elle ne serait jamais complètement seule, qu’il reviendrait lorsqu’elle serait trop triste et qu’il sècherait ses larmes et chasserait ses cauchemars. C’étaient des mensonges. Il était celui qui faisait déborder ses yeux, qui orchestrait ses songes les plus atroces, qui la rendait triste et qui n’était pas là. Et malgré tout ça, elle sentait encore qu’elle l’aimait. Les Anges devraient combattre l’amour tant il est injuste. L’Ailée pressa sa joue contre le torse d’Adam et renifla. Il ne mentait pas. Elle le savait, puisqu’elle portait la bague que Kaahl lui avait offerte et qui avait appartenu à sa mère. En dépit de ses mains liées, elle la retira et la laissa tomber sur le sol. L’anneau de Lagherta ricocha sur le parquet puis roula jusqu’au pied du bureau. S’il fallait encore douter, elle sentait la tristesse du Déchu, et là où les discours se jouaient de la vérité, là où la magie pouvait tromper, les émotions ne mentaient pas. « Depuis quand ? » demanda-t-elle de sa voix brisée. Elle aurait voulu pouvoir enrober son palpitant de métal, pour qu’il se tût à tout jamais.



Message XII – 1367 mots

Plus de deux ans qu'on attend ce moment. On fait péter le champagne ? [A] - L’engrenage | Réprouvés 2289842337




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Sam 22 Jan 2022, 20:38



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L'engrenage


Je fermai les yeux. J’avais conscience de ce que j’avais dit. Ce n’était pas un stupide accident. Les mots ne s’étaient pas échappés d’entre mes lèvres sans que je ne m’en rende compte. Ils avaient existé parce que je les avais voulus ainsi. Ma peine n’en était pas plus supportable mais elle devenait bien plus réelle et tangible. Je devenais légitime à la ressentir. Ma peur et ma colère trouveraient un fondement à l’intérieur du cœur et de l’esprit de l’Ange.

Je savais qu’elle comprendrait. De l’ombre, je passais à la lumière. Mes souffrances ne seraient plus jamais silencieuses. Je n’aurais plus à supporter ses excès sans avoir mon mot à dire. Pourtant, je savais que je venais de lui offrir un cadeau empoisonné. C’était un présent, parce que je la libérais du mensonge. Cependant, certaines personnes préféraient vivre à l’intérieur d’une illusion toute leur vie plutôt que de sentir le venin couler dans leurs veines.

Mes doigts se resserrèrent sur elle. La transition était facile à comprendre. La tonalité des sanglots, le rythme de ses respirations. J’avais passé ma vie à faire l’amour et, aussi saugrenu que cela pouvait paraître, faire attention au désir de l’autre était d’abord faire attention à l’autre tout court.

J’aurais pu manipuler ses sens, les anesthésier pour la calmer. Je ne le fis pas. Je le ferais peut-être, si elle commençait à se mettre en danger. Pour le moment, tout ce que je faisais, c’était la serrer contre moi. Peut-être avions-nous l’air pathétique, vus de l’extérieur. Je ne haïssais pas Kaahl pour ses mensonges et ses comportements cruels mais je savais aussi qu’il aurait pu agir autrement. Il aurait pu commencer par lui faire confiance.

Je me redressai légèrement à sa question. Depuis quand ? Je me détachai d’elle doucement et mes yeux se fixèrent sur l’anneau qu’elle portait précédemment. Il m’en avait parlé. Elle n’aurait pas dû le porter avec moi. Elle aurait dû le porter avec lui. Comme un masochiste, il lui avait donné la clé de la vérité. Pourquoi ? Pour qu’elle se rende compte de la supercherie et le fuit avant qu’il ne soit trop tard ? Il était tellement tordu que c’était probable.

« C’était… »

C’était étrange. Je savais que le sceau ne valait plus depuis longtemps, même si je n’avais jamais rien dit. La marque avait disparu dès que j’avais mué et Kaahl ne l’avait pas reconduite. Il devait le savoir mais il n’en avait plus reparlé non plus.

Je m’appuyai contre le miroir de la penderie, celui-là même qui avait rencontré mon poing plus tôt. Je fermai les yeux après avoir penché ma tête en arrière. Je me sentis déglutir.

« C’était avant. »

Avant elle.

« À Basphel. Je trouvais que c’était un putain de Magicien coincé. J’ai voulu m’amuser à ses dépends et il s’est passé un truc bizarre. Et après, je ne sais pas, je crois que je lui ai prêté un livre ou deux. »

Je soupirai. Je n’avais pas vraiment envie de rentrer dans les détails.

« J’ai vu son père ensuite. Il m’a dit ce qu’il était et, forcément, ce n’était plus vraiment un putain de Magicien coincé dans ma tête. Quand il est venu me rendre mon livre je n’étais pas à l’aise… Enfin, quelle importance ? Juste qu’il lit dans les pensées. Il a su que je savais. Et c’est comme ça que ça a commencé… »

Je passai ma main sur mon front.

« Et ensuite il y a eu toi, l’Ange parfaite. »

Je ne savais pas quoi lui dire. Qu’il faisait semblant, au début ? Qu’il la voulait pour parfaire son jeu ? Est-ce que ça avait la moindre importance ? Je ne pensais pas. Ce qui était important c’est qu’il avait fini par l’aimer.

« Je savais que ce n’était pas vraiment pareil. En fait ça m’était égal la plupart du temps. Ce n’est pas comme si… Enfin, je ne vais pas te faire un dessin. »

Elle et moi étions différents. Elle pouvait lui offrir ce que je ne pouvais et ne voulais pas lui offrir : un mariage bénéfique et des enfants.

« Juste qu’il est comme il est. Il est possessif mais ce n’est pas son pire défaut. »

Je ris face à son déni à lui.

« Il pense qu’il te protège, en ne te parlant pas, mais c’est lui qu’il protège en fait. Il sait bien que s’il te disait tout ce qu’il me dit, tu ne resterais pas avec lui. Alors il te ment et il omet, pour que tu restes. Et ça, ça… ça me rend fou. Parce que tu… »

Mes mains se fourrèrent dans les poches de mon pantalon. Je ne savais pas quoi en faire d'autre. Je me sentais dépité.

« Tu es toi quoi. Tu es trop dans l’absolu. Quand tu aimes, tu aimes aveuglément. Je l’ai vu. Tu aurais pu te jeter devant lui pour le protéger et je suis sûr que tu aurais décapité plus d’un de ses ennemis rien qu’avec la force de ta détermination. Mais… ça te rend vulnérable. Et je n’aime pas te voir t’agiter pour des combats vains. Ça me fait de la peine. »

Je tournai la tête vers elle.

« Comme maintenant. Et après tu te liquéfies au point que tu pourrais créer un lac à toi seule, tout ça pour un tordu qui ne te dit jamais rien. »

866 mots
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