Le soleil était juste assez bas pour caresser chaleureusement le visage de la jeune femme de ses rayons. La journée touchait à sa fin et cela faisait un moment que Shanxi avait quitté le bureau. Plutôt que de retourner directement dans son petit logement de l’infirmerie, l’ailée avait préféré fureter dans les jardins et profiter de l’agréable brise qui balançait chaque brin d’herbe. Elle s’éloignait progressivement de la vivacité des rues de la cité en quête d’un peu de calme, et finit par le trouver sur un banc au pied d’un arbre. L’Okan poussa un long soupir tandis qu’elle s’installait confortablement au fond de son siège. Son quotidien était peut-être moins éreintant que ce qu’elle avait pu connaître en Terre Blanche, mais il n’était quand même pas de tout repos. Son changement de régime alimentaire, bien qu’il s’opérait en douceur, était probablement la cause de sa fatigue permanente. Son regard commençait à se balader là où son corps refusait de l’emmener tandis qu’elle relatait dans son esprit le cours de sa journée ; puis finit par se fixer, plus attiré par leurs voix qu’autre chose, sur ce que l’ange supposa être une mère et son fils. Leur comportement semblait indiquer un désaccord, et la jeune femme n’en fut qu’assurée lorsque l’adolescent s’éloigna soudainement de sa mère, visiblement contrarié.


Shanxi avait beau elle aussi avoir été bénie avec la naissance d’un enfant, elle n’avait connu ce type d’échanges que de son jeune point de vue avec ses propres parents. Et au fond, l’ancienne captive ne savait pas si elle devait se réjouir que ce ne fut pas le cas avec sa fille. Les douloureuses remembrances de l’Okan furent perturbées par la silhouette d’une femme venue s’asseoir à côté d’elle, qu’elle reconnut comme la mère du garçon. Celle-ci évacua alors toute sa frustration dans un profond soupir. « Ah, les enfants. » fit-elle en regardant son fils s’éloigner. La vertueuse ne sachant que lui répondre lui décocha un faible sourire. « Ils n’ont pas idée à quel point c’est difficile pour nous aussi. » Si elle semblait en rire de prime abord, la mère avait aussitôt repris son sérieux. « C’est une période difficile pour tout le monde. » Shanxi ne pouvait qu’être d’accord avec son interlocutrice et était ironiquement bien placée pour le savoir. C’était pour cette même raison qu’elle souhaitait s’attarder sur ce sujet le moins possible. « Était-ce le sujet de votre dispute ? » La jeune femme ne savait pas ce qu’elle craignait le plus en lui demandant cela : avoir été indiscrète ou que sa réponse puisse effectivement se rapporter à la condition actuelle de leur race ? Peut-être même les deux.


« Il est à un âge difficile et c’est vrai que le contexte n’aide pas. Je n’imagine pas ce que ça doit faire de grandir au milieu de tout ça. J’essaie de l’aider du mieux que je peux mais ça ne suffit pas toujours. Il y a certaines choses que seuls ses amis ou son père peuvent faire. Et comme son père est souvent absent ces temps-ci… C’est compliqué. Il lui manque, je le vois. » L’Okan écoutait son homologue avec une attention particulière. Lorsque la mère avait mentionné le manque que l’adolescent pouvait ressentir face à l’absence de son père, Shanxi se demanda alors si sa fille avait pu ressentir la même chose. Asra avait bien souvent occupé ses pensées, et ce encore plus depuis sa libération. La vertueuse s’était maintes fois interrogée sur le temps qui avait pu s’écouler depuis son réveil dans le fleuve sans pouvoir trouver de réponse qui puisse la satisfaire. L’ange savait son enfant à portée de main mais n’avait encore jamais entreprit de la retrouver. « J’espère que vous pourrez vite vous réconcilier en tout cas. » exprima la jeune femme après s’être empressée d’avaler le nœud qui s’était formé dans sa gorge. « Oh, ne vous en faites pas. Nous ne restons jamais fâchés très longtemps lui et moi. » La mère lui souriait tendrement. « Enfin… Je me rends compte que je vous ai embêtée avec mes problèmes et je ne connais même pas votre nom ! Je m’appelle Aleissa. » - « Moi c’est Shanxi. Et vous ne m’avez pas dérangée, ne vous en faites pas. Si ça vous a fait du bien de parler, c’est l’essentiel. »

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