Intrigue :Le couple Ward se rend à une soirée organisée par leurs amis. Bellada en profite pour inviter une jeune ange dont elle a fait la connaissance, afin que celle-ci passe une agréable soirée.

Bellada retira l'épingle à cheveux, bientôt suivie du bigoudi qu'elle maintenait en place. Avec des gestes précautionneux, la vieille femme déroula la mèche sans casser la boucle ainsi formée. De ses petits doigts fripés mais agiles, elle répéta l'opération pour tous les accessoires qui trônaient sur la tête de la jeune femme dont elle s'occupait. Usant de rubans et de barrettes, la magicienne élabora une coiffure raffinée mais suffisamment robuste pour pouvoir se maintenir en place durant toute la durée de la soirée. Lorsqu'elle eut terminé son œuvre, elle attrapa la jeune femme par les épaules, l'observant par l'intermittence du miroir de sa coiffeuse. « Alors, qu'en penses-tu ?» questionna la vieille dame en replaçant une mèche rebelle derrière l'oreille de la demoiselle. Cette dernière admira son reflet. Elle semblait émue en se voyant ainsi parée. Lorsqu'elle s'exprima, sa voix était chargée d'émotions difficilement contenues, les larmes lui montant presque aux yeux. « C'est... C'est parfait. » La réponse arracha un sourire satisfait à la coiffeuse. « Bien, je suis contente, si tu aimes. » Bellada observa son modèle et laissa un petit soupir rêveur lui échapper. « Aucun doute, tu vas attirer tous les regards ! Ravissante comme tu l'es, je suis certaine que tu trouveras ton prince charmant. » « Merci... Vraiment, merci de vous être donné autant de mal pour moi. Même si je ne rencontre personne ce soir... Vous m'avez offert un cadeau magnifique. » Bellada, qui avait commencé à courir à droite à gauche pour rassembler ses propres affaires afin de se préparer s'arrêtera un instant en entendant les paroles de son invitée. Elle ne comprenait pas bien où voulait en venir la jeunette. « Cela faisait bien longtemps qu'on ne s'était pas occupé de moi comme vous l'avez fait et... Et depuis plus longtemps encore la dernière fois que je ne me suis pas répugnée en croisant mon reflet... Je pense que vous y êtes pour beaucoup. » confia timidement l'Ange. « Oh mais il n'y a aucune raison de me remercier voyons ! C'est plutôt moi, qui vous serai éternellement reconnaissante. Votre rencontre et l'espoir que vous m'avez apporté... Croyez-moi, vous prêter quelques heures de mon temps, c'est loin d'être un effort et c'est surtout loin d'être suffisant pour vous remercier. » C'était cette jeune Ange qui, quelques mois plus tôt, lui avait annoncé que Hortanse, sa sœur aînée, était toujours en vie : esclave mais saine et sauve, sur la Terre Blanche. Les deux femmes s'observèrent quelques secondes sans rien ajouter de plus, avec une complicité qui témoignait du rapprochement qui s'était fait depuis leur rencontre.

« Bon, il faut que je m'active ! Je bavasse, je bavasse, mais je vais nous mettre en retard ! Il est hors de question que je parte habillée comme ça ! » Se disant, madame Ward s'empara de la tenue qu'elle avait acheté au marché aux puces quelques jours plus tôt. Il s'agissait d'une imposante robe à crinoline, dans des tons vert pomme, lui donnant un air doux et rassurant. Une fois qu'elle se fut glissée dedans, elle rassembla d'une main experte ses longs cheveux argentés et le noua en un chignon sur le sommet de son crâne. Elle se para d'un éventail accordé à sa tenue ainsi que d'un imposant chapeau. Il était décoré d'une composition florale qui s'épanouissait à tout au long de la soirée. Les plantes n'étaient donc, pour l'instant, composées que de bourgeons et de petites feuilles vertes. « Bien, nous ferions mieux de rejoindre Gilbel, n'est-ce pas mon enfant ? » L'ailée acquiesça en souriant.

« Vous êtes tout en beauté, mesdames. » complimenta le mage bleu dès qu'elles eurent descendu l'escalier. Il les avait patiemment attendu, se tenant prêt depuis plusieurs minutes. Le gentleman s'approcha de sa femme et s'empara de l'une de ses mains où il déposa un baiser. Bellada partit dans un petit rire. « Tu n'es pas mal non plus, dans ton joli costume. » Si la robe de la magicienne se composait de vert clair, l'ensemble de Monsieur Ward était d'un vert foncé qui rappelait les aiguilles d’un sapin. « Bien, nous sommes tous parés... Alors allons passer une agréable soirée ! » dit le vieillard tout en rendant ses bras aux deux femmes qui l'accompagnaient. « Oh attend, avant que j'oublie ! » Bellada commença à farfouiller dans son petit sac de toile et en ressortit une paire de lunettes brunes, presque noires. Avec des gestes tendres, elle échangea la monture de son époux. « Voilà, avec ça, le tout est parfait ! » se disant, elle se pencha sur la pointe de ses petits souliers vernis et déposa un bisou sur la joue de son âme sœur.

Les lunettes de Yanna:

« Il risque d'y avoir beaucoup de gens, à l'intérieur. » prévint Bellada en se penchant vers l'Ange. « Madame DeTronceuil connait tout le monde et tout le monde connait madame DeTronceuil ! » confia la vieille dame avec un petit sourire en coin. Les soirées de cette très noble Dame étaient souvent le théâtre de nombreux scandales, où naissaient bon nombre de rumeurs sur les invités qui s'y rassemblaient pour y passer, en théorie, une bonne soirée. Les cibles de ces histoires se voyaient néanmoins rarement satisfaite de la réputation qu'ils s'y faisaient. Bellada adorait s'y rendre, pouvant assister à quelques scènes croustillantes, lançant par mégardes quelques rumeurs qui colleraient à la peau de ses fortuites victimes. « En plus du brouhaha des conversations, il y aura de la musique, jouée par un orchestre. Je connais personnellement certains des musiciens : ce sont des amis de mon petit-fils, le Compte Ignatius Worth. Peut-être en avez-vous entendu parler ? » Manako secoua doucement la tête. Ce nom ne lui évoquait rien du tout. « Mmh, ça ne m'étonne pas. Ça ne fait pas très longtemps que vous êtes revenue parmi nous. » se souvint la magicienne. « Dans ce cas-là, je vous conseille vivement de visiter son domaine, lorsque la saison des Hortensias sera arrivée. La vue est absolument resplendissante. Les portes de son compté sont ouvertes aux invités, lors de cette saison. Mais si vous en avez envie, je pourrai vous y conduire à une période un peu moins fréquentée. La mère de ce garçon est une vraie pince sans-rire mais malgré tout, j'ai mes entrées là-bas ! » Madame Ward, à force d'aller visiter le jeune gardien de ponton, avait appris à connaitre certains employés de la maison, qui l'appréciaient pour sa gentillesse manifeste à leur encontre. Un changement radical, en comparaison du traitement que leur faisait subir la maîtresse de maison. « Oui, il serait d'ailleurs plus responsable de vous y emmener à un moment où les chances de croiser mon descendant seront moins élevées... C'est vraiment un garçon charmant mais avec les jolies demoiselles, c'est un véritable chenapan. » Bellada poussa un léger soupire. C'était une jolie façon de minimiser l'amour que le mage bleu avait pour les jolies et jeunes femmes qu'il n'hésitait pas à emmener dans son lit. « Croyez-moi, mieux vaut rester loin de lui pour l'instant, si vous ne voulez pas faire passer cette grossesse pour une indiscrétion de sa part... » Un scénario qui tracassait déjà un autre couple, rendu célèbre par ces mêmes bruits de couloir dont raffolait tant la magicienne. « Quoi qu'il en soit, si le bruit ou la foule vous indispose, n'hésitez pas à venir nous trouver : Gilbel et moi vous accompagnerons, d'accord ? »

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« Oh Cunégonde ! » héla la magicienne en apercevant au loin sa partenaire de commérage. L'intéressée tenta difficilement de se retourner pour voir qui l'avait appelé : sa tenue la rendait presque aussi haute que large et entravait tous ses mouvements. « Venez ma chère, je vais vous présenter à mes amies ! » affirma Bellada en s'emparant du poignet fin de l'Ange qu'elle traîna derrière elle. Lorsqu'elle retrouva son cercle, la vieille dame fut accueillie avec des sourires chaleureux. « Bonjour Bella ! Alors, as-tu fais bon voyage ? » Le Couple Ward habitait loin du centre des activités magicienne, et le coup des trajets la forçait parfois à renoncer à se rendre à ces soirées qu'elle chérissait tant. Louer une calèche chaque fin de semaine se révélait beaucoup plus onéreux qu'on pourrait le penser. « Très bon, merci Cunégonde ! » Même si c'était elle qui s'était exprimée, tous les regards étaient rivés sur la jeune femme qui l'accompagnait. C'était un visage inconnu. Et ces visages là attiraient l'attention encore plus intensément que le nez au milieu de la figure : ils étaient comme des étendards que l'on agitait sous le nez des convives avides de potins à se raconter et déformer au détour de couloirs. La troupe de vieilles dames observait l'Ange avec avidité, comme si elle était un morceau de viande qu'elles désiraient tâter de leurs griffes ou déchirer avec leurs crocs acérés. Bien sûr, leurs sourires et leurs voix douces atténuaient leur air vorace mais l'ancienne captive savait repérer le danger là où elle le voyait - elle avait passé suffisamment de temps sous le joug des démons pour flairer les ennuis. S'il ne lui serait fait aucun dommage volontaire, certains exemples récents prouvaient que de mauvaises rumeurs pouvaient faire bien plus de mal qu'un coup porté directement sur le corps. La jeune femme ressentit un profond mal-être et baissa la tête pour observer le sol. « Bellada, tu ne nous présente pas ton amie ? » La magicienne, ne se rendant compte de rien - elle mettait cela sur une timidité attachante propre aux Anges et aux Vertus qu'ils incarnaient - passa une main encourageante dans le dos de son invité et la poussa doucement à s'avancer au centre du cercle, ne se rendant pas compte qu'elle exhibait la cible à des vautours affamés. « Mais si, bien sûr ! Je vous présente Manako ! » « Oh c'est donc elle ! » « Bellada nous a beaucoup parlé de vous ! » « Quel soulagement c'était d'enfin avoir des nouvelles de cette bonne vieille Hortanse ! » « C'est un plaisir de vous accueillir parmi nous ! » Étonnement, en apprenant son identité, les regards s'étaient fait moins charognards, teintés d'un mélange d’admiration et de gratitude. Les Vertueuses, surtout celles qui avaient échappés à un tel cauchemar, avaient le droit à un peu de répit - mais juste un tout petit peu.

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« Vous avez entendu ce qu'il s'est passé, sur les Côtes de Maubëe ? » « Non, quoi ? » « Il paraîtrait qu'une énorme tempête ait fait rage là-bas ! » « Une tempête ? » « Oui, énorme ! Mais c'est pas tout ! » La bavarde marqua une pause dramatique, créant le suspense sur son auditoire qui s’accrochait à ses lèvres. « Il parait qu'il y a eu d'énorme monstres ! Des créatures gigantesques qui auraient ravagé la région ! » « Quoi ? Mais, et ça va mieux ? Ils s'en sont sortis ? » « Oui, je crois... Il y a eu quelques dégâts - beaucoup matériels - mais pas trop de pertes humaines... Je n'ai pas vraiment les chiffres mais, dans tous les cas, ça leur a fait un sacré coup de frayeur ! » « Tu m'étonnes ! Mais bon, si les pertes humaines sont nulles, tout va pour le mieux ! » « Je n'ai pas dit nulles ! » « Mais attends Bella, tu n'avais pas une cousine à Avalon ? » « Si, Ilda ! Enfin, c'est la cousine de Gilbel, nous ne nous parlions pas vraiment. » « Oh par les AEtheri, j'espère qu'elle est saine et sauve ! » « Oui, j'ai reçu une lettre d'elle il n'y a pas longtemps ! » Bellada avait croisé les bras et se tenait désormais le menton avec sa mains droite, l'air de réfléchir. Elle comprenait mieux désormais, ce qu'avait voulut dire Ilda par "nous avons dû affronter quelques soucis"... Faisait-elle allusion à ces bêtes féroces lâchées dans la nature dont parlait son amie ? « Et je crois qu'elle va bien. Elle n'a fait allusion à rien de grave ! » rassura la Ward. « D'ailleurs, en parlant d'elle, j'ai un secret à vous dire ! » L'air troublé de la magicienne s'effaça aussitôt, remplacé par une mine coquine et mystérieuse. « Je vous ai déjà dit que l'épouse d'Ilda, Graetz, était une luxurieuse, n'est ce pas ? » Tout le monde était au courant. Graetz leur avait fait parvenir toute une cargaison de romans luxurieux, décrivant des pratiques très en vogues à la Capitale des Péchés, ainsi que quelques accessoires pour pimenter leurs jeux de chambre. « Eh bien, elles ont eu une idée de génie ! Elles sont en train de monter une entreprise pour vendre des baisers. Et devinez quoi ?! Elles m'ont proposé d'essayer leurs produits en avant-première... » Quelques cris surexcités traversèrent l'audience. « Une entreprise de baisers ? Je ne sais pas vraiment ce que c'est mais en tout cas, ça sonne bien ! Tu partageras, hein Bella ? » « Mais bien sûr ! D'ailleurs, elles m'ont demandé de savoir qui est ce que je voudrais voir apparaître dans leur collection... Une sorte d'étude pour pouvoir étudier le marché Magicien... Alors ? Qui voudriez-vous pouvoir embrasser fougueusement ? »

452 mots

« Vous avez vu ? C'est Auréline qui danse avec Cléonidas ! » « Oh oui, quel bel étalon ! J'ai entendu dire qu'il faisait des merveilles, entre les draps ! Que celles qui en ressortaient étaient toujours ravies ! » « Oui... Un grand sourire rêveur aux lèvres. » confirma Bellada. Elle avait déjà vu quelques jeunes demoiselles dont la vertu avait été ôté par ce coureur de jupon. Il appréciait autant les femmes mariées que les jeunes vierges. C'était surtout ce point qui faisait froncer les sourcils à la Ward. « Auréline ? C'est étonnant, qu'elle se montre déjà aux côtés d'un autre homme... » « Presque aussi étonnant que de voir l'Ultimage au bras du Prince Noir. » se moqua l'une des vieilles dames. Oui, ce choix avait beaucoup fait parler. Certaines approuvaient l'envers politique, le sens du devoir dont avait fait preuve la souveraine. D'autres au contraire ne parvenaient pas à encourager cette approche. Il y avait déjà beaucoup de ponts établis entre les deux races afin de consolider l'entente entre les deux peuples antagonistes. A commencer par les mariages forcés établis entre les souverains et un membre du peuple opposé. L'exemple d'Aliénor Vaughan faisait beaucoup parler d'elle. Sans doute était-ce principalement dû au comportement choquant et effrayant de l'homme qui l'accompagnait comme son ombre... Parfois de façon un peu trop insistante, selon certains. La rumeur selon laquelle ils étaient particulièrement proches et intimes flânait à certaines oreilles. Des histoires d'amour interdit entre ce garde et la Promise de l'Ultimage des ténèbres. Parfois, ce n'était plus un amour mais des histoires plus violentes, contre la volonté de la petite magicienne... Bellada préférait ignorer toutes ces messes-basses : elle croyait en l'innocence de leur représentante et puis, elle était persuadée qu'un homme aux services du Roi des Sorciers ne se risquerait pas à de telles pratiques... Elle l'espérait de tout son cœur, en tout cas ! L'idée que cette petite puisse subir un tel traitement la tétanisait. « Oui, et puis, regardez ! Son mari est absent, lui aussi ! » « Comme Caliel... » Quelques rires moqueurs se firent entendre dans l'assemblée. « C'est d'un triste... Vous pensez qu'ils essaient de nous rejouer la scène du bal des cycles lunaires ? C'est d'un très mauvais goût. » « Vous pensez que son mari est impuissant ? » « Je ne sais pas, mais en tout cas, elle ne doit pas vraiment l'aimer ! S'afficher en public avec un tel personnage, c'est comme crier au monde entier que l'on court à l'adultère ! »

427 mots

« Oh, et vous avez entendu la dernière nouvelle ? » La voix contenait mal l'excitation de celle qui parlait. Elle possédait un secret dont ses copines n'avaient pas la moindre idée et cela la rendait excitée : elle se sentait l'âme des tous puissants, privilégiée parmi les privilégiés de détenir une telle information en exclusivité. « Vous savez toutes que le Baron Paiberym s'est engagé dans l'armée, n'est ce pas ? » La troupe de vieille femmes, qui s'étaient toutes penchées en avant pour mieux écouter les confidences, hochèrent toutes la tête comme un seul homme. Tous les magiciens avaient entendu parler de cette nouvelle troublante. Ou plutôt, du coup d'éclat qu'avait fait l'Ange de Volatys. Protéger leurs terres des barbares qui menaçaient les populations locales... Pendant longtemps, tout le monde n'avait plus eu que cela à la bouche. « Oui, j'ai entendu dire qu'il arrêtait d'enseigner la magie à Basphel. » rappela à regret l'une des commères. L'un de ses petits-enfants avait été envoyé à la cité-école et la nouvelle l'avait un peu agacé : la petite arrivait tout juste l'année de son départ, c'était un manque de chance. « Oui, eh bien, vous ne devinerez jamais pourquoi il a rejoint les rangs de la Section Aragon en particulier ! C'est pour... sa petite amoureuse ! » « Sa petite amoureuse ? » « Mais oui, tu sais bien ! Cette petite Ange là, Maëlle ! » « Laëth. » corrigea une voix timide. « Oui voilà, c'est ça ! » « Mais pourquoi il aurait fait ça ? » « Bah, tu sais bien qu'ensemble... » l'oratrice fit un signe équivoque pour signifier l'accouplement. « Et du coup maintenant bah, y'a un polichinelle dans le tiroir ! » « Mais vous êtes sûres de ça ? Les Anges, c'est pas censé être capable d'enfanter, je vous rappelle ! » « Mais je vous dit que je l'ai vu de mes propres yeux vue, et elle avait le ventre aussi gonflée qu'un ballon de baudruche ! » « Oh c'est vrai alors ? » « Mais non c'est pas possible, tu sais même pas à quoi elle ressemble, Germaine ! » « Mais si je le sais ! » « Enfin bon, et alors ? » « Eh bien grâce à sa nouvelle position, il serait capable de renforcer les liens entre nos deux races ! Et puis surtout, j'ai entendu dire qu'il prévoyait de la rejoindre aux explorations, afin d'être capable de les protéger lui-même, elle et le bébé ! Il y serait déjà aller une première fois pour faire valider ce transfert ! » « Mais voyons, ça n'a pas beaucoup de sens ! Si elle est enceinte, ce serait plutôt à elle de revenir ici, vous ne pensez pas ? Ce serait beaucoup plus prudent, pour le bébé ! Quelle imprudente, tout de même ! » « Mais c'est une Ange, si elle prend le risque, c'est qu'elle a une bonne raison. » « Haa... Je suis triste, tout de même. Le Pianiste, qui n'est plus épris de notre belle Reine... Moi qui rêvait encore de les voir se marier et nous faire plein de petits héritiers... » « Gustine, on t'a toujours dit que tu avais lu trop de romans ! »

520 mots

« D'ailleurs... Vous avez entendu parler de cette terrible histoire ? » Le groupe de vieilles dames avait commencé à parler des expéditions Angéliques - forcément, après avoir autant bavasser sur le dos de Laëth Belegad. « Quoi, qu'y a-t-il ? » « Il y a eu une terrible maladie, qui a fait plusieurs victimes... Enfin, pas tout à fait. » Micheline prenait un air pincé et outré. Ce qui allait se dire maintenant ne serait pas agréable à écouter. Pourtant, aucune des femmes présentes ne perdait la moindre miette de la conversation. « La maladie a infecté beaucoup de gens mais en réalité, elle ne les tuait pas. Pas directement. » « Quoi ? Quelle maladie ? » « Je ne sais pas. Il parait que c'était une grosse toux, qui prenait aux poumons... » « Quoi, c'est tout ? » « Oui bon, je n'ai pas les détails. Il parait que c'était un peu dangereux. » « Et donc ? Que s'est-il passé ? Tu as parlé de morts ? » « Oui ! Pour éviter que la maladie ne se propage et ne fasse plus de morts, ils auraient exécuté les malades ! » « Quoi ? Mais c'est affreux ! » « Sans essayer de les soigner ? » « Si mais... Ca n'aurait pas suffit. Et j'ai cru comprendre qu'on les poussait à prendre cette décision. » Les commères semblèrent choquées par cette révélation. « Et le pire, c'est que cet homme... Cet Isiode Yüerell... » « Quoi, le Prince de Caelum ? » « Oui, lui-même ! » « Quoi, qu'est ce qu'il a fait ? » « Il se serait montré violent avec certains de ces camarades... Des camarades malades ! » « Violent ? Comment ça ? » « J'ai entendu dire qu'il aurait tué un garçon atteint d'une grosse fièvre. » « Quoi ? Tué ? Comme ça ? » « Un assassinat ? Par un Ange ? Impossible ! » « Mais si ! Et puis, après ça, c'est lui qui aurait exécuté les uns après les autres les pauvres âmes qu'il était impossible de soigner ! » « Mais c'est affreux ! » « Je n'y crois pas trop. » « Bah tiens, écoutes ça : on l'appelle même "le Boucher", là-bas ! Si c'est pas un signe, ça ! Il parait qu'il les a tous tué sans broncher, sans un clignement de cils ! »  « Oui et puis, c'est tout à fait possible ! Vous savez, avec ces histoires de ne pas vouloir déchoir les Anges qui devraient l'être, et tout ça... »

Bellada fronça les sourcils. Discrètement - ou plutôt, de façon la moins flagrante possible - la magicienne se retourna vers son invitée. Un seul coup d’œil dans sa direction lui appris qu'entendre de telles choses la mettait mal à l'aise. Avec un air contrarié, elle tendit sa coupe de champagne à sa voisine et tourna les talons, traînant la Vertueuse dans son sillage. « Allons prendre l'air, il fait affreusement chaud ! » prétexta-t-elle pour sauver les apparences.

457 mots

La vieille dame conduisit sa protégée jusqu'au balcon. Plusieurs personnes s'y agglutinaient déjà mais, en raison de la fraîche température de la nuit, ils étaient nombreux à préférer rester à l'intérieur. « Est ce qu'il fait trop froid pour vous, mon enfant ? Préférez-vous trouver un endroit calme à l'intérieur ? » s'enquit la vieille dame. La mère en devenir esquissa un sourire. Son ventre arrondit ne se voyait pas à travers les épaisseurs mais lorsqu'on la voyait le caresser de cette façon, avec tant de tendresse, sa grossesse sautait aux yeux. « Non... L'air du dehors me fait du bien. » « Bien... Je... Je suis vraiment désolée que vous ayez eu à écouter toutes ces bêtises ! Micheline ne sait plus ce qu'elle raconte après quelques verres et, très clairement, elle a abusé du rosé, cette fois encore ! » La magicienne avait désormais un air courroucé. L'entendre parler de l'Ange, devant Manako l'avait fait sortir de ses gonds. Les rumeurs sur Laëth l'avaient tout autant affecté - elle était, après tout, elle aussi dans une position délicate avec son enfin à naître, sans père et surtout, sans la moindre idée de la race de ce futur enfant - mais Bellada ne s'en était douté que lorsque le sujet des explorations avaient été abordé. « Ne vous faites pas de souci... Ce n'est pas de sa faute. » « Oh que si ! Elle exagère tout le temps ! Je suis certaine que le Prince de Caelum n'a pas eut un tel comportement et puis, si ça se trouve, personne n'est mort ! » Le sourire nostalgique de l'Ange se fit un peu amer. « Il y a eu des morts. Ça ne fait aucun doute. Qu'ils soient la conséquence de ces explorations ou à cause de difficiles décisions... Il y a eu des morts. C'est tout ce qui compte. » La Ward garda le silence un instant, s'emparant de la main de la demoiselle et la serrant fort dans la sienne. « Je me souviens d'une époque où les Anges étaient des êtres fiers et puissants. Où ils n'étaient pas réduits à devoir aller risquer leurs vies à l'autre bout du monde pour espérer trouver un Sanctuaire, un lieu de refuge... Et pourtant... Voilà à quoi nous en sommes réduit. » Bellada fronça les sourcils. « Ces explorations... Elles représentent le futur ! C'est une façon de se tourner vers l'avenir et d'offrir à votre peuple une voie pour se reconstruire... Vous étiez puissants et forts, et grâce à ces nouvelles terres, vous le redeviendrez. » affirma la plus mûre des deux. « Vous m'avez prouvé qu'il ne fallait jamais baisser les bras. Qu'il fallait s'accrocher à l'Espoir jusqu'au bout... C'est à votre tour de garder la Foi. » Les deux femmes se sourirent. Manako acquiesça lentement, gardant le silence. « Bien, je vais chercher Gilbel et ce sera l'heure de rentrer. Je vais prévenir le Cocher qu'il est l'heure de nous ramener. »

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