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 [II] Sauver un Ange [Nikolaz] [Solo]

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Jeu 07 Juin 2018, 16:30

Catégorie de quête : II. Sauvetage
Partenaire(s) : Solo
Intrigue/Objectif : Nikolaz découvre les Jardins de Jhën et participe à une mission de sauvetage d'Anges qui ont réussi à revenir des Terres Arides après la chasse aux Anges.

Nikolaz arriva aux Jardins de Jhën dans la matinée. Après avoir croisé la route du musicien près du Lac de Transparence, il avait tout à coup été pris d’une peur inexplicable qui l’avait cloué sur place. Il n’avait pas osé rejoindre les Jardins de Jhën le soir même. Il avait donc décidé de bivouaquer non loin de là, le temps de retrouver ses esprits et d’apaiser ses pensées. Une fois réveillé, il s’était senti plus serein, et il avait entamé les derniers mètres avec détermination.
Il devina les Jardins avant même d’y arriver. Jaillissant des vallées verdoyantes, des constructions colorées se dessinaient dans le paysage, coiffées de silhouettes blanches qui voletaient autour des toits.
Des Anges.
Nikolaz sentit son cœur se contracter violemment à cette vue. Le souffle coupé, il dut ralentir le pas un instant, avant de se mettre à trottiner tant son impatience était grande.
Il était encore à quelque distance des Jardins lorsqu’il vit plusieurs gardes se dresser de part et d’autre de sa route. Il retrouva un pas plus mesuré et tenta de calmer ses halètements.
-Bonjour, lança-t-il en décidant de prendre l’initiative, mais sa voix tremblait et il était incertain des mots qu’il employait. Je m’appelle Nikolaz Bormbaat, j’ai fait le chemin de Bouton-d’Or aux Jardins pour rejoindre mon peuple.
-C’est une fabuleuse nouvelle, répondit avec sincérité l’un des gardes en inclinant brièvement la tête. Chaque nouveau venu est un cadeau des Aetheri. On va vous escorter jusqu’à l’intérieur des Jardins.
Il marqua une pause et Nikolaz vit son regard se troubler derrière son casque.
-En temps normal, nous aurions pris le temps de vous montrer les lieux, mais malheureusement, nous sommes dans une situation compliquée, ces derniers jours. Vous serez livré à vous-même pendant quelque temps.
-Que se passe-t-il ? demanda Nikolaz en sentant son estomac se nouer d’appréhension.
Le garde secoua la tête.
-Vous l’apprendrez bien assez tôt. Jarod, poursuivit-il en coupant court aux questionnements de son interlocuteur, conduis notre frère dans l’enceinte des Jardins.
Son subordonné se raidit puis fit signe à Nikolaz de le suivre. Ce dernier lui emboîta le pas, frémissant d’excitation malgré le mauvais pressentiment que lui avaient donné les mots du garde.
-Le voyage de Bouton-d’Or à ici a dû être long, lança son guide en chemin.
-Oui, je suis parti au début de Koor, répondit Nikolaz.
-Koor ? releva le garde.
C’était un jeune homme, qui était manifestement très curieux d’en découvrir plus sur la vie chez les Réprouvés. Nikolaz haussa les épaules, gêné. Il ne savait pas comment s’appelaient les saisons en naciaze, ni même si elles existaient ici.
-Quand il fait chaud, se contenta-t-il alors de répondre.
Son interlocuteur acquiesça, intéressé.
-Il y a de la place pour tout le monde, ici, expliqua-t-il avec un sourire. Vous trouverez sans mal un toit. La communauté est basée sur l’entraide mutuelle. Il y a toujours des choses à faire.
Nikolaz hocha la tête en tentant d’emmagasiner toutes les informations qu’il comprenait. La barrière de la langue lui avait beaucoup posé problème pendant son voyage. S’il n’avait pas pris de lui-même l’initiative d’apprendre la langue commune et le naciaze, il n’aurait probablement jamais parlé autre chose que le Zul’Dov, car les Réprouvés à Bouton-d’Or mettaient un point d’honneur à n’employer que leur langue entre eux. Apprendre la langue commune avait été relativement aisé, car ses parents la parlaient et ils l’avaient, non sans réticence, aidé dans sa pratique. Mais le naciaze était une autre paire de manches. Nikolaz avait dû faire des mains et des pieds pour acheter un vieux livre d’enseignement à l’un des rares marchands qui passaient par Bouton-d’Or. Grâce à ça, il connaissait les rudiments de la langue. Mais il aurait de quoi faire aux Jardins.
-Vous venez d’où ? voulut-il savoir à propos du jeune garde, qu’il avait retenu comme s’appelant Jarod.
Aucun Ange n’était né aux Jardins, ils étaient tous exilés de quelque part. Sans surprise, l’expression de Jarod se troubla.
-Je fais partie des rares survivants à l’attaque des Démons, répondit-il d’un ton douloureux. Je suis né à la Citadelle Blanche.
Nikolaz garda le silence. La Citadelle Blanche était pour lui un songe merveilleux d’un glorieux passé désormais effacé. Lorsque les Terres étaient peuplées de quinze millions d’Anges, qu’ils étaient un peuple respecté et réputé…
Nikolaz en était à ce point dans ses réflexions lorsqu’au détour d’un virage, les Jardins de Jhën apparurent sous ses yeux. Il ne put retenir une exclamation.
Sous le regard attendri de son guide, le jeune homme découvrit les maisons élancées qui, malgré leur aspect rustique, s’élevaient vers le ciel avec entrain. La pierre brute rappela à Nikolaz Bouton-d’Or, mais la ressemblance s’arrêtait là. Des ruelles étroites sinuaient entre les bâtisses, comme des rigoles qui allaient se jeter dans le Lac Bleu, que l’on apercevait au loin.
Un trio d’Anges passa devant eux et Nikolaz les suivit des yeux avec avidité. Il avait la sensation d’en voir pour la première fois, même s’il en avait côtoyé une quinzaine pendant toute son enfance. Ces Anges-là lui semblaient mille fois plus authentiques. Ils étaient vêtus d’une autre manière, ils parlaient le naciaze entre eux avec une telle aisance que Nikolaz avait du mal à suivre.
Les trois Anges disparurent au bout de la rue. Submergé par l’émotion, Nikolaz sentit ses jambes trembler et sa gorge se nouer.
-Bienvenue chez toi, dit doucement Jarod en comprenant son bouleversement.
Nikolaz ne put faire autre chose qu’acquiescer.
-Je vais te mener à la place centrale, reprit son guide après avoir gardé le silence pendant un temps par respect. Puis je devrai retourner à mon poste.
Il entraîna Nikolaz dans une ruelle en pente. Le nouveau venu buvait les lieux des yeux. Ici, un homme secouait le linge par sa fenêtre et l’étendait au-dessus de sa rambarde en fer forgé. Là, une femme ouvrait ses volets après une grasse matinée. Haut dans le ciel, des Anges ne cessaient de se croiser en une autoroute céleste et faisaient résonner dans les ruelles le froissement de leurs ailes.
-C’est ici que je te laisse, déclara Jarod lorsqu’ils débouchèrent sur une place pavée, au centre de laquelle se dressait une immense statue de femme décapitée. Nous nous croiserons sûrement une nouvelle fois.
-Merci, répondit Nikolaz avec sincérité.
Le garde lui fit un signe et s’éloigna. Nikolaz se tourna vers la statue. Il se demandait qui elle pouvait bien représenter et pourquoi sa tête avait disparu.
-C’est une statue de l’Ultimage.
Il se retourna. Une femme se tenait un peu en retrait vis-à-vis de lui et le regardait avec un sourire aux lèvres. Elle avait parlé en Zul’Dov.
-Elle a fait enlever sa tête il y a quelque temps, car elle veut masquer son identité, poursuivit-elle.
-Pourquoi ne veut-elle pas être reconnue ? voulut savoir Nikolaz.
La femme haussa les épaules en signe d'ignorance.
-Tu es nouveau par ici, n’est-ce pas ? devina-t-elle.
Il hocha la tête.
-Je suis arrivé à l’instant.
-Les Aetheri soient loués, il y a encore quelques Anges qui ne naissent pas entre les griffes des Démons… soupira la femme avec une expression plus sombre.
Nikolaz sentit ses propres entrailles se contracter. Un sentiment d’injustice, mêlé à une colère sourde qu’il n’avait encore jamais ressentie comme telle, lui grimpèrent le long de la gorge.
Au moment où il s’apprêtait à répondre à la femme, des cris agités lui firent se retourner. De l’autre côté de la place, un attroupement se formait à toute vitesse.
-Des Anges ont été vus à la frontière !
-Ils ont échappé à la chasse ?
-Ils sont dans un sale état…
Les vagues d’exclamations furent dominées par une voix, plus puissante que les autres :
-Il faut des volontaires pour aller aider les Anges qui ont réussi à s’échapper des Terres Arides !
Nikolaz sentit son cœur s’emballer dans sa poitrine, tandis que des cris approbateurs et des mains s’élevaient parmi l’attroupement.
-Comment ont-ils fait pour s’échapper ? demanda-t-il à la femme qui se tenait à côté de lui.
Il tourna le regard vers elle. Elle s’était raidie et son regard était orageux.
-Tu n’es pas au courant ? répondit-elle d’un ton dont la dureté ne lui était pas destinée. Les Démons ont organisé une chasse à l’Ange sur leur territoire.
La tête de Nikolaz se mit à tourner.
-Quoi ?
L’expression de la femme s’assombrit encore.
-Ils ne s’en sont même pas cachés. Ils ont annoncé « l’événement » publiquement. Ils voulaient que nous soyons au courant.
Un haut-le-cœur parcourut Nikolaz. Coupé en grande partie de toute communication avec le monde extérieur pendant les longues semaines de son périple, il n’avait pas entendu parler de cette abomination.
-C’est horrible, murmura-t-il, révulsé.
La femme hocha la tête.
-Oui. Je me porte volontaire ! s’exclama-t-elle ensuite d’une voix forte en s’approchant du groupe sur la place.
Des regards se tournèrent vers elle et on l’accueillit avec des cris d’approbation et des applaudissements. Avant de se faire avaler par la masse, elle se retourna vers Nikolaz et lui adressa :
-Tu veux venir avec nous ?
Le jeune homme sentit son sang ne faire qu’un tour.
-Oui !
Il s’élança vers les Anges, qui applaudirent une nouvelle fois. La femme le regarda avec un maigre sourire.
-Je suis Anita, se présenta-t-elle. Je suis née à Stenfek.
-Nikolaz.
Anita lui tendit une main, qu’il serra sans hésiter.
-Votre attention s’il-vous-plaît ! résonna la voix de celui qui avait initié le mouvement.
C’était un Ange roux au visage couvert de taches de rousseur.
-Les Anges ont été repérés par nos frères à un peu moins de dix kilomètres d’ici, au nord des Jardins. Ils sont tous plus ou moins blessés. Tout danger de poursuite par ces monstres de Démons est écarté étant donné qu’ils ont franchi la limite du territoire magicien. Nous allons emporter avec nous des brancards et de quoi leur prodiguer les premiers soins. Emmenons aussi des vivres, ils doivent mourir de faim.
-Comment sont-ils arrivés jusqu’ici ? s’étonna Nikolaz à l’intention d’Anita, après que celle-ci lui eut traduit toutes les instructions en Zul’Dov.
-Je ne sais pas, répondit-elle à voix basse. Les Terres Arides sont très loin d’ici. Quelques camarades courageux sont partis des Jardins il y a plusieurs jours pour leur venir en aide et combattre les Démons.
Sa mâchoire se contracta violemment.
-Prions pour qu’il n’y ait pas trop de pertes à déplorer.
Un frisson parcourut Nikolaz. Il appréhendait ce qu’ils trouveraient sur place.
Il fallut rassembler rapidement le matériel nécessaire. À la recherche de brancards et de matériel de premiers soins, Anita mena Nikolaz jusqu’à l’infirmerie, vaste bâtiment dans lequel Nikolaz croisa un nombre hallucinant d’individus handicapés. Son désarroi allait croissant face au peuple exsangue qu’il découvrait au terme de son périple. Il ne commençait que maintenant à mesurer l’ampleur de l’état critique dans lequel se trouvaient les Anges.
Supporterait-il la vision de ceux qui revenaient des Terres Arides ?
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Jeu 07 Juin 2018, 19:07

De retour du bâtiment d’infirmerie, Anita et Nikolaz retrouvèrent le reste des volontaires à l’entrée du village. Malgré l’inquiétude dans laquelle il était plongé, Nikolaz ne put se retenir de fouiller des yeux les rues qu’ils traversaient. Se savoir arrivé aux Jardins de Jhën lui procurait une multitude d’émotions, exacerbées par le fait qu’il n’avait jamais mis les pieds dans une cité auparavant dans sa vie. Bouton-d’Or était certes animée, mais elle ressemblait bien plus à un village rural qu’à une véritable agglomération. Quant aux villes qui avaient pu se dresser sur la route de Nikolaz entre Lummaar’Yuvon et les Terres du Lac Bleu, il les avait copieusement évitées pour prendre le moins de risques possibles.
Mais le voilà à peine arrivé qu’il repartait déjà. La sensation que tout s’enchaînait trop vite bousculait les émotions du jeune homme. C’est pourquoi il n’ouvrit presque pas la bouche sur le chemin jusqu’au point de rassemblement, trop occupé à ruminer ses pensées agitées.
Néanmoins, il fut impressionné devant les regards résolus des Anges sur le départ. On aurait presque dit qu’ils étaient sur le pied de guerre, tant leur posture était déterminée. Nikolaz comprit qu’ils ressentaient tous un mélange de rage et d’impuissance vis-à-vis des atrocités que commettaient les Démons ; et il réalisa qu’il éprouvait la même chose au fond de lui.
-Tout le monde est là ? lança d’une voix forte l’homme qui menait les opérations. Je m’appelle Oryl. Si vous avez besoin d’aide sur la route, référez-vous à moi.
Sans plus de cérémonie, le cortège prit son envol dans un tourbillon de plumes blanches, sous le regard de spectateurs venus leur souhaiter bonne chance. Nikolaz, avant que les Jardins ne deviennent trop petits sous ses pieds, croisa le regard d’un couple parmi la foule, qui joignit les mains dans une prière emplie de foi. Ce geste lui donna la mesure de la responsabilité qui venait de s’abattre sur ses épaules, et il quitta les Jardins de Jhën avec le cœur gonflé d’appréhension et de détermination mêlées.
Les nuages étaient bas ce jour-là, et il faisait lourd. Nikolaz eut rapidement chaud.
-C’est la saison des orages, expliqua Anita en voyant sa peine. Ce sont quelques semaines pénibles à passer.
Elle volait à côté de lui, bien droite malgré le lourd sac qu’elle portait sur ses épaules. Nikolaz la détailla du coin de l’œil. Il trouvait que cela se voyait qu’elle avait vécu chez les Réprouvés. Elle était relativement musclée, sa queue de cheval blonde battant à intervalle régulier ses larges épaules. Sa posture aussi avait quelque chose de guerrier. Nikolaz fut traversé par une pensée pour Anîhl. Elle se tenait de la même manière, avec quelque chose de plus rustre et sauvage, qui trahissait sa vie à la campagne, et surtout, sa nature de véritable Réprouvée. La nostalgie étreignit Nikolaz l’espace d’un instant.
-À quoi penses-tu ? demanda Anita, perspicace.
-À beaucoup de choses, répondit-il en détournant poliment les yeux. Mais là tout de suite, je me disais que tu ressembles à une amie.
-Une Réprouvée ? voulut-elle savoir, curieuse.
Il acquiesça.
-Je n’ai pas réussi à me faire d’amis parmi les Réprouvés, commenta Anita avec une pointe de regret dans la voix. Du moins, pas de vrais. J’avais la sensation que nos natures opposées rendaient une entente entre nous impossible.
-Je pense que c’est en grande partie vrai, approuva Nikolaz. C’est d’ailleurs en partie ce qui m’a poussée à partir. Les Réprouvés à Bouton-d’Or ont certes accepté leurs enfants nés après la guerre, mais ils ne peuvent pas effacer en vingt ans des siècles de racisme et de haine contre les Anges.
Il se tut, amer.
-Comment as-tu fait pour te lier d’amitié avec l’une d’entre elles, alors ? demanda Anita, étonnée.
Nikolaz haussa les épaules.
-Un coup de chance, je suppose. Elle a un caractère tout aussi exécrable que les autres habitants de Lummaar’Yuvon, mais ça ne m’a pas empêché de passer le plus clair de mon… temps à Bouton-d’Or avec elle.
Il marqua une pause.
-Elle n’a pas imposé de barrière entre elle et moi.
Nikolaz n’ajouta rien et Anita respecta son silence. Parler d’Anîhl avait ouvert les barrières à des souvenirs qu’il n’avait pas effleurés depuis son départ. Face à ces couleurs et ces sensations qui lui revenaient, il comprit lui-même pourquoi il aimait tant Anîhl. Sa présence avait toujours fait taire le grand point d’interrogation de sa vie.
Mais tout cela, c’était fini. À présent, il n’avait plus besoin de se demander qui il était, ni où est-ce qu’il appartenait. Car il touchait ces réponses du doigt. Nikolaz sentit une bouffée de bonheur l'envahir en contemplant l’ensemble des ailes blanches qui évoluaient autour de lui, plus nombreuses que toutes celles qu’il avait eu l’occasion de croiser en une vie entière. Il était à peine arrivé depuis quelques heures qu’il était déjà pleinement intégré. Cette certitude de se sentir au bon endroit et avec les bonnes personnes, était-ce cela, d’avoir un peuple ?

La journée avança au fil des kilomètres. À tour de rôle, les membres de l’équipe vinrent adresser la parole à Nikolaz, en faisant l’effort de s’adresser à lui dans la langue commune. La nouvelle de sa venue s’était rapidement propagée et tous tenaient à lui souhaiter la bienvenue. Malgré les regards inquiets et les traits tirés de ses compagnons, Nikolaz comprit avec un sentiment proche de l’extase qu’ils étaient tous heureux de sa venue.
-Chaque nouvel Ange rejoignant nos rangs est indispensable, déclara Oryl lorsqu’à son tour, il vint saluer Nikolaz. Prions les Aetheri pour que ceux que nous retrouverons à la frontière guérissent vite de leurs blessures.
Le jeune homme garda le silence. Il appréhendait ce qu’ils allaient découvrir à leur arrivée. Il n’osait pas imaginer les atrocités que ces Anges avaient pu vivre sous le joug des Démons.
-Ils sont là ! s’écria soudain quelqu’un, alors qu’ils survolaient des plaines verdoyantes.
-On descend ! ordonna Oryl d’une voix puissante.
D’un commun mouvement, les Anges chutèrent vers le sol dans un virage serré. Nikolaz, qui n’était pas encore très à l’aise avec ses ailes, se fit une frayeur lorsqu’il faillit perdre le contrôle de sa trajectoire et s’écraser par terre, mais il parvint finalement à se rattraper et à atterrir presque droit aux côtés de ses camarades.
Il ne tarda pas à apercevoir à quelques dizaines de mètres les Anges en question, vers lesquels couraient déjà les autres membres de l’expédition. Sa gorge se serra. D’ici, il voyait que deux d’entre eux n’avaient plus d’ailes.
Il s’approcha en trottinant, faisant tout pour masquer sa fatigue après le voyage qu’ils venaient d’effectuer.
Les Anges étaient au nombre de quatre. On s’affairait déjà autour d’eux, mais Nikolaz se figea d’horreur face au spectacle qu’il découvrit. Ses muscles endoloris à cause du manque d’entraînement au vol n’étaient rien face à l’état dans lequel il trouva les rescapés.
Rescapés était un bien grand mot.
Nikolaz dut retenir un haut-le-cœur face à la vue de près des ailes mutilées de deux d’entre eux. Elles avaient manifestement été arrachées avec sauvagerie de leur dos, sur lequel il ne restait plus que deux immenses plaies purulentes.
Il semblait que l’ensemble de leur corps était couvert d’ecchymoses et de coupures. L’extrême maigreur de trois d’entre eux sauta aux yeux de Nikolaz. Le quatrième était lui aussi gravement blessé, mais Nikolaz devina qu’il devait faire partie de ceux qui étaient partis à la rescousse des Anges pendant cette odieuse chasse. Il s’était assis dans l’herbe, un bras déjà tenu en écharpe, et s’était effondré contre l’un des aides-soignants, son large corps parcouru de spasmes de chagrin.
-Nikolaz.
La voix douce d’Anita le fit revenir à lui. Elle était accroupie à côté de l’un des blessés, les mains déjà pleines de sang. Elle avait posé son regard agrandi par l’horreur sur Nikolaz.
-Ils ont besoin de notre aide, dit-elle sur le même ton.
Le jeune homme avala sa salive.
-J’arrive, répondit-il d’une voix rauque.
Il s’accroupit lourdement à côté d’Anita, avec la sensation que l’ensemble de ses muscles s’était transformé en coton, ou en plomb.
-Tiens, dit Anita en lui mettant des bandages et de l’alcool désinfectant dans les mains. Occupe-toi de son flanc, je me charge du… du dos.
Nikolaz lui fut reconnaissante de ne pas lui demander de se confronter au dos amputé de l’Ange, mais il dut malgré tout réprimer un nouveau haut-le-cœur en découvrant la profonde lacération qu’il avait au niveau de l’abdomen. On aurait dit qu’une griffe d’animal lui avait déchiré la chair.
Les mains tremblantes, il inspecta la plaie, puis entreprit de la désinfecter. Le blessé, depuis sa semi-inconscience, fut parcourut d’un soubresaut de douleur. Il gémit entre ses lèvres gercées.
-C’est… c’est bientôt fini, promit Nikolaz d’une voix tremblante et avec la sensation de se parler autant à lui-même qu’à son patient.
Il banda grossièrement la plaie, incapable de faire mieux à cause de sa fébrilité. Il espérait que cela serait suffisant.
Il entreprit ensuite de fixer une attelle à sa jambe fracturée, puis Anita déclara qu’elle avait fini de bander les moignons dans son dos.
-Mettez-le sur un brancard, adressa-t-elle à leurs partenaires d’une voix sourde.
Nikolaz vit que des larmes roulaient le long de ses joues. Elle se releva avec lenteur et le rejoignit.
-C’est… commença-t-elle, mais elle s’étouffa dans un sanglot.
-Comment ont-ils pu faire ça ? souffla Nikolaz.
Il avait la sensation que le désarroi qu’il ressentait allait l’engloutir comme une immense vague. Pour éviter de se faire submerger, il exerça une brève pression sur le bras d’Anita en signe de soutien, puis il se dirigea vers Oryl, qui discutait gravement avec l’un des volontaires un peu plus loin.
-Nous n’allons pas tarder à rentrer, déclara-t-il en se retournant sur l’arrivée de Nikolaz à ses côtés. Ils ont de toute urgence besoin de soins intensifs.
Face au silence de Nikolaz, il lui demanda d’un ton compatissant :
-Tu tiens le coup ?
Le jeune homme hésita, puis il fit un signe entre l’acquiescement et le haussement d’épaules.
-Je suis navré que ton premier jour aux Jardins se déroule ainsi, poursuivit Oryl d’un ton sincère. Je déteste l’admettre, mais nous sommes totalement impuissants face aux Démons. Nous n’avons pas pu les empêcher d’organiser leur ignoble chasse, et nous voilà à ramasser les survivants… ou ce qu’il en reste.
Son regard ambré s’assombrit.
-Ce sont les premiers à être revenus des Terres Arides, reprit-il en se tournant vers les blessés, qui étaient désormais tous allongés sur des brancards. Ils ont été sauvés par le courage exceptionnel de Lenn ici présent. Tu te rends compte, il les a portés sur toute la route jusqu’ici…
Nikolaz posa son regard sur Lenn. Il se demanda où celui-ci avait trouvé la force de transporter non pas un, mais trois de ses compagnons au-dessus de l’Océan, sur une aussi longue distance, lui-même blessé de surcroît.
-Nous allons prier les Aetheri pour que d’autres frères nous reviennent vite, dit encore Oryl, le regard désormais terriblement triste. Mais les pertes seront lourdes, ça ne fait aucun doute. Lenn m’a décrit ce qu’il a vu sur place… Un carnage…
Cette fois, la voix d’Oryl s’étouffa définitivement.
-Rentrons ! lança un volontaire, chargé d’un brancard avec un deuxième Ange. Ceux qui sont doués au vol, chargez-vous des autres brancards. Les autres, formez une escorte !
Le triste cortège prit son envol, bien plus lent qu’à l’aller. Nikolaz, rangé parmi l’escorte, jetait par moments des regards vers les blessés, qui avaient été noués aux brancards par sécurité le temps du trajet. Si ceux qui étaient revenus des Terres Arides étaient dans cet état, il n’osait pas s’imaginer ce que vivaient les Anges qui n’avaient pas réussi à fuir – s’ils étaient encore en vie…
Le retour aux Jardins de Jhën se fit dans un silence funeste. Ils prirent à peine le temps d’atterrir et se précipitèrent à l’infirmerie, escortés de médecins qui les avaient attendus au point d’arrivée. Nikolaz préféra ne pas entrer dans le bâtiment. Il se sépara du groupe de volontaires et alla se perdre dans les ruelles des Jardins. Les images de ce qu’il avait vécu dans les plaines flottaient comme des fantômes devant ses yeux, chassant sa fatigue malgré ses muscles en feu après le voyage.
Entre l’horreur, le désarroi et la peine, une émotion dominante s’imposait petit à petit en lui.
La haine des Démons.
Et de cette haine naquit une volonté inébranlable.
Celle de reconstruire le peuple des Anges. Son peuple.
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[II] Sauver un Ange [Nikolaz] [Solo]

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