Ceux qui frappent férocement [Mission de niveau III]
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Latone ~ Orisha ~ Niveau I ~ ◈ Parchemins usagés : 2309 ◈ YinYanisé(e) le : 24/05/2014◈ Activité : Horticultrice
Jeu 26 Juin 2014, 23:01
C'était un matin comme les autres, depuis les nombreuses semaines passées ici. Tout n'était pratiquement que routine, mais chaque aventure était aussi passionnante que fructueux. Léto n'aurait jamais pensé acquérir autant de richesses en si peu de temps, autant de notoriété alors qu'elle n'était qu'une fille de bûcheron. Comment avait-elle fini par brandir les armes, comment avait-elle fini par devenir aussi forte, pourquoi elle,… tant de questions qui ne trouvaient qu'une unique réponse dans son esprit : c'est le destin. Ainsi diront chaque Orisha qui l'entoure. Ainsi avait-elle fini par se dire.
Mais là n'était pas la finalité de sa métamorphose en Orisha, loin de là. Il lui restait encore un long parcours à franchir avant de se considérer tel quel ; bien qu'elle soit juste ravi d'être devenu indépendante pour sa propre famille puisse vivre sans se soucier d'elle. En tout cas, ses actes ont dû attirer grandement l'attention, car elle reçut ce jour-là une missive tout droit sortie de l'Eorishaze. Pensant avoir encore fait une bêtise qui lu avait attiré des ennuis, Léto racla sa gorge en ouvrant la lettre et fut surprise de son contenu : le Solstitium – l'armée de terre des Orishas – l'invitait à rejoindre ses rangs, ayant remarqué ses aptitudes au combat. La blonde n'avait jamais vraiment exhibé ses talents, étant encore un peu en apprentissage pour user à bon escient de sa force, mais c'est vrai qu'il lui était arrivée d'être entraînée dans des matchs amicaux. Elle n'était pas non plus puissante au point de s'en faire une réputation convenable, mais on lui avait souvent dit qu'elle ferait une excellente soldate.
A cette annonce, Thémis fut perplexe et sentit le trouble grandissant en Léto. Elle pourrait trouver la mort sur le champ-de-bataille, surtout qu'on lui proposait de préférence un poste de Légionnaire, soit sur la ligne de front. La Mord'th ne vit pas trop l'utilité de ce travail, l'Orisha avait déjà le sien après tout, mais elle comprenait que c'était une opportunité pour la blonde de se rapprocher davantage de son peuple, de lui prouver son allégeance et son amour patriotique. Bien évidemment, elle s'en montra néanmoins assez confuse.
" Tu penses que je devrais accepter ?elle avait confiance en la blanche, qui lui faisait presque office de conseillère. - Tu aimes ta patrie ? Tu veux servir les Orishas jusqu'à la fin de tes jours ?elle acquiesça sans hésitation.Alors vas-y, je suis sûre que tu accompliras de grands exploits.le regard de la Mord'th parut un peu fuyant.Et… fais attention.la blonde sourit. - Je ne pars pas guerroyer tout de suite. - Non. Retiens ceci : tant que tu t'allieras loyalement aux uns, les autres seront tes ennemis. "
Cet avertissement tomba sous le sens selon l'Orisha. Il était vrai qu'en entrant dans l'armée, il n'y avait pas de meilleurs moyens de se faire des ennemis. Mais si c'étaient les rivaux des Orishas, c'est qu'ils étaient également les ennemis de la Liberté, non ? Alors leurs valeurs n'avaient aucune consistance pour la blonde et ils ne méritaient pas qu'elle comprenne ce pour quoi ils se battaient. Si Léto pouvait protéger l'héritage d'Antarès, alors elle se fera une joie de se plier aux exigences des Eshus et de l'Orishala.
Après avoir dit au revoir à la Mord'th et à ses dragons – car elles ne partaient que pour quelques jours pour l'instant – Brise-Tympans se rendit au lieu de rendez-vous. Plusieurs Orishas furent convoqués à joindre la côte : un navire devait les emmener sur une île, plus loin, certainement pour les tester ou quelque chose dans ce goût-là. Le bateau risquait néanmoins de passer par le Port pour recruter les Orishas de là-bas, ayant un petit détachement de l'armée de terre à ce QG, le voyage risquait donc d'être assez long avant qu'ils ne posent pieds à terre. En montant sur le navire, Léto repéra le commandant de cette opération, sûrement un gradé du Solstitium, et plusieurs volontaires qui avaient accepté l'invitation : des hommes, des femmes, des couples-guerriers, même des enfants qui serviraient d'écuyers. Elle vit même une famille au complet : les mariés avec leur gosse, une vraie lignée de combattants sans doute. Ils allaient pour la plupart devenir ses frères d'arme, c'était assez… nouveau, comme une grande famille.
Encore fallait-il passer avec succès les tests. Connaissant les Orishas, cela n'allait pas être de la tarte. Puis la voie des mers a toujours été la préférée de Léto. Heureusement qu'elle n'avait pas fini par attraper le mal de mer, avec tous ces allers-retours… Même si elle commença à avoir la nausée quand on lui apprit qu'il y avait du vin à bord. Pas question que je descende dans la cale. Jamais. Et le premier qui m'en propose, je crois que je vais le jeter par-dessus bord… et aller le repêcher avec de plates excuses.
La petite croisière se montra quand même agréable, le calme avant la tempête comme on dit. Lorsqu'ils jetèrent l'ancre au Port, elle ne fut pas autorisée à aller voir sa famille, ils voulaient repartir le plus rapidement possible, bien qu'ils acceptèrent qu'ils écument les quelques tavernes bordant le littoral. Après quoi, on mit le cap sur l'île. Tandis que le chef faisait une annonce officielle et qu'ils étaient au beau milieu de l'océan, le ciel s'assombrit.
" Anges déchus ! "hurla la vigie avant que son cadavre s'écrase en une jolie bouillie sur le pont.
Ils levèrent tous les yeux au ciel : ce n'était pas un orage qui s'était profilé mais une multitude d'ailes aussi sombres que la nuit. Léto n'en crut pas une seule seconde : une embuscade en pleine mer ? Par des anges déchus ? Les paroles de Thémis résonnèrent alors dans sa tête : les Orishas et les Anges Déchus ayant des relations belliqueuses, elle s'était elle-même fourré dans le tas, devenue une cible à abattre pour ces emplumés de jais. Elle n'eut même pas le temps de le regretter qu'une pluie de flèches et de magie s'abattit sur le pont. Ce n'était qu'une question de secondes avant que le navire coule. Léto prit son arme, se mettant hors de portée des attaques aériennes. Elle dut se défendre quand des anges tentèrent de finir le nettoyage. Elle ne savait pas si elle était devenue forte depuis le temps ou si son adversaire n'était qu'un novice, mais l'Orisha parvenait facilement à le surpasser. Il se mit même à tenter une fuite, décollant grâce à sa paire d'ailes. Léto ne lui laissa néanmoins pas de répit, invoquant des chaînes pour lui entraver la cheville ; l'ange mit du temps à reprendre de l'altitude mais il y parvint quand même, emportant avec lui l'Orisha qui s'accrochait tant bien que mal pour ne pas chuter. Elle se convainquit plusieurs fois de lâcher prise vu la hauteur mais quand elle entendait les cris des enfants et des femmes, l'agonie des hommes et le craquèlement du navire, elle n'avait qu'une seule envie : les venger. Puis c'était elle ou eux, donc autant se défendre. Elle ne comprit toutefois pas trop ce qu'il se passait, roulant plusieurs fois dans les airs, sa lame avait fini par trancher la chair, les faisant chuter tous les deux. Pas de bol, elle atterrit pile sur un des mâts, s'y cassant une ou deux côtes, avant que sa chute ne se termine sur le pont, où elle dut se fracturer le bras. La douleur la lancinait tellement qu'elle ne put reprendre son équilibre lorsque le navire, fendu magiquement en deux, commença à se noyer.
Et si ce n'était pas suffisant, un orage fit son apparition, les éclairs carbonisant la plupart des troupes angéliques et remuant les eaux pour qu'aucun ne puisse prendre sa respiration à la surface. Quelques uns se percutèrent même aux planches, la mer les emportant avec force. Dans tout ce bordel, Léto coulait lentement, pas assez forte pour pouvoir espérer atteindre la surface. Elle était quand même consciente de son entourage : le sang, les cadavres, les armes, les morceaux de la coque… Un ange déchu coulait également à ses côtés, il tentait de remonter. Dans un élan de vigueur, elle l'étrangla avec sa chaîne, s'imaginant que c'était l'homme qui l'avait tripoté auparavant, que c'était Kole, que c'était le peuple des anges déchus en entier, qu'il représentait en bref tous ses ennemis. Cette besogne faite, elle perdit toute son énergie et sa descente continua. Je vais mourir ici… Seule la mort régnait et emportait tous les cadavres vers les abysses.
Alors que le manque d'oxygène se fit pressant, la faisant délirer – sa vue s'étant perdue depuis longtemps dans un flou incompréhensible – Léto sentit sa bouche s'ouvrir par la force, comme si on lui faisait avaler quelque chose par la force. Et puis tout lui redevint clair, limpide. Les eaux autour d'elle n'assaillirent plus ses yeux et, bizarrement, elle parvenait à respirer. Son regard s'arrêta sur un homme, un Ondin à la nageoire émeraude, lui faisant face. Ce devait être lui qui l'avait sauvé car il lui souriait. Pourquoi me souris-tu au milieu de tout ça ? Elle ne comprenait pas comment on pouvait être aussi serein au beau milieu d'un tel massacre. Les morts pleuvaient autour d'eux et c'était pour elle qu'il avait décidé de protéger. Pourquoi pas les autres ? Les enfants notamment ? Tout cela, elle ne pouvait aucunement lui questionner, incapable de parler sous l'eau et de toute manière trop faible pour lui demander. L'Ondin se mit alors à chanter, la douce mélodie atteignant ses oreilles malgré le vacarme environnant et apaisant son esprit. Léto se sentit plus légère, la douleur s'estompant lentement. Son sauveur lui prit alors la main, de son bras non-fracturé bien sûr, et l'entraîna loin de ce carnage.
A son réveil, suite à un sommeil d'une durée indéterminée, Léto se trouvait sur une plage. Le soleil éblouissait ses yeux avant que ces derniers ne s'habituent aux rayons. Elle tenta de se lever et dut supporter la douleur de son bras, il va avoir besoin de temps celui-là pour se guérir comme il faut… Et ses côtes aussi. C'était vraiment un miracle qu'elle soit vivante, enfin qu'elle ait survécu jusqu'à ce que l'Ondin la sauve. L'Orisha fut coupée dans ses pensées lorsqu'elle sentit un truc lui remonter la gorge, la faisant tousser quelque peu avant de la faire cracher cette chose qui n'était nul autre qu'une écaille d'émeraude, qui partit en poussière aussitôt. Ce devait être ça que l'homme lui avait injecté lors de son bouche-à-bouche et qui lui permettait de respirer sous l'eau. Au fait, où il… Léto l'aperçut justement au loin, la saluant avant de replonger dans l'eau. Drôle de type, mais elle lui était reconnaissant… bien que la vision des autres passagers la tourmentaient aussi. Ils devaient être tous morts à l'heure qu'il est. Par sens du devoir et de la survie, il lui fallait rentrer à Mégido et sur-le-champ. Elle obligea son corps à faire un effort et tituba avec beaucoup de mal jusqu'au repère des Orishas.
Quand elle se présenta aux abords de la ville, elle ignora les commentaires des passants. Son "mascara" avait tellement coulé qu'elle ressemblait à une Ombre revenue les hanter. Elle se traîna pitoyablement jusqu'à l'Eorishaze où on ordonna son examen médical. Léto était tellement ailleurs qu'elle ne sut combien de temps elle passa avec les guérisseurs, tout ce qu'elle voulait c'est faire son rapport et rentrer. Oh, elle le fit avec joie d'ailleurs, ce rapport. Auprès de l'Eshu de Guerre, elle n'épargna pas un seul détail et on lui fit savoir qu'elle était la seule survivante, ce qui devait renforcer leur impression sur elle mais elle s'en contrefichait royalement. L'Orisha avait pris conscience de n'être rien d'autre qu'une femme comme tant d'autres, aucunement libre de son destin ; et si elle l'était, alors sa liberté commençait là où s'arrêtait celle des autres. Sa langue avait dû d'ailleurs fourcher là-dessus quand on remit en question sa candidature pour l'armée.
" Non.lâcha-t-elle catégoriquement.Je ne veux plus. Tous ces morts, alors que moi pas… Au revoir. "et elle quitta la salle, sur cette démission si on pouvait la considérer telle quelle.
Il n'était plus question que les gens qui l'entouraient souffrent et pas elle, elle voulait éviter d'attirer davantage d'ennuis dans son périmètre. Ce n'était certainement pas de sa faute, elle en était consciente. Mais le prix à payer pour cette liberté qu'elle avait tant désiré, il était lourd, très. Donc, quitte à être libre, autant s'en approprier pleinement et faire ce qui était juste selon elle. C'est ce qu'aurait voulu sa famille, c'est ce qu'aurait voulu Thémis, et c'est ce qu'aurait certainement voulu entendre les Orishas plus expérimentés qu'elle. "Libérée" devait être le mot qui qualifiait le mieux son état d'esprit à présent.
La vue de sa demeure la réconforta, lui faisant oublier ses blessures presque guéries. La Mord'th avait dû se faire un sang d'encre pour elle, ainsi que ses dragons, les gardes à la porte furent aussi bien contents de la revoir. L'Eshu lui avait dit qu'ils étaient au courant pour l'attaque avant son arrivée, Thémis avait dû savoir aussi. Inutile d'aggraver sa souffrance, Léto franchit donc le pas de la porte.
" Je suis rentrée. "souffla-t-elle, assez fort tout de même.
La Mord'th était toujours là, se retournant vivement vers l'Orisha. L'expression sur son visage… cela fendit le cœur de la blonde, elle sentit toute la peine qu'elle avait vécue. Sans un mot, incapable de s'exprimer, Thémis l'enlaça avec toute sa petite force. Léto ne l'entendit point gémir, mais elle sentit tout de même les larmes de la blanche couler sur son épaule. Oui, elle était bien rentrée à la maison… Mais pour combien de temps ?
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By Jil ♪
Ceux qui frappent férocement [Mission de niveau III]