Abel était un petit peu préoccupé par l’état général de la structure du château. Depuis qu’il était rentré, il n’avait pas pu s’empêcher de noter les fissures qui lézardaient les murs et les briques qui s’étaient détachées çà et là. C’était comme si l’édifice tout entier menaçait de s’écrouler, et on aurait cru que c’était ce qui était en train de se produire. Depuis que la magie qui protégeait ces lieux était tombée, les barrières qui séparaient les deux parties de cet endroit s’étaient dissipées et deux mondes s’entrechoquaient alors qu’ils avaient été isolés depuis des siècles. Quelle idée Abel avait-il eu de venir se jeter de la sorte au beau milieu de la tourmente. Myrialuna avait bien fait de récupérer la pierre à ce moment-ci, car quelques jours plus tard il était fort probable que la cachette où elle était entreposée ne soit condamnée à jamais par l’écroulement du passage qu’elle avait découvert quelques instants plus tôt.
Le bélua regarda autour de lui, cherchant Alia des yeux et ne fit pas attention au piège qui s’était déclenché. Seuls les bras de la fée lui permirent d’échapper à une mort certaine mais avant qu’il ait pu dire quoi que ce soir Myrialuna était déjà en train d’approcher d’une des fenêtres. Elle n’y pensait pas…

"Alia !"
Abel eut tout juste le temps d’attraper au vol la jeune panthère qui accourait vers lui, apeurée par le fracas qu’ils entendaient tout autour d’eux lorsque la fée lui demanda de s’agripper à elle, ce qu’il fit sans réfléchir. Ils s’élancèrent alors vers la fenêtre et d’un bond vif passèrent au travers en brisant la vitre. Abel chercha à protéger Alia de ses bras et cru qu’ils vivaient leurs derniers instants en voyant le sol approcher à toute allure, mais des lianes vinrent les attraper pour ralentir quelque peu leur chute. La respiration haletante, Abel atterrit sur le sol sans trop de dommages si ce n’était quelques égratignures dues au verre et une belle frayeur. Il avait du mal à réaliser ce qui venait de se produire et leva les yeux vers la fenêtre située plusieurs mètres au-dessus d’eux. Myrialuna venait de lui sauver la vie une fois de plus… Il espérait sincèrement qu’un jour il serait assez fort pour lui rendre la pareille.

La fée lui raconta alors à quoi servait la pierre qu’elle était venue chercher. Il n’avait pas été très utile à sa découverte, bien que d’une certaine façon c’était sa faiblesse qui avait amené Myrialuna dans cette chambre, mais il était néanmoins heureux qu’elle ait réussi à trouver ce qu’elle était venue chercher. Cette petite chose semblait contenir un pouvoir tellement puissant… En transposant dans le monde réel ce qu’elle créait dans un simple dessin, la fée venait de se rendre maîtresse d’un objet magique très intéressant, et Abel l’imaginait déjà donner vie à un arbre, une maison ou encore une volée de flèches. La seule limite était son imagination, et sans doute la puissance que renfermait la pierre, mais il ne doutait pas que Myrialuna aurait tout le loisir de découvrir la force et les limites de cet objet.

Abel aussi avait trouvé un trésor dans ce château, peut-être plus précieux encore que toutes les pierres magiques de ce monde. Il ne voulait pas voir la fée partir. Il eut envie de la retenir, mais ses mots le figèrent sur place, comme si ce qu’il avait craint depuis qu’il avait posé les yeux sur elle se réalisait sans qu’il puisse y faire quoi que ce soit.
« Je viendrais te voir dès que je le pourrais. Laisse-moi juste le temps de rapporter aux gardiens de Phoebe ce que j’ai vu ici et je me mettrais en route vers le continent du matin calme. Tu me manques déjà… »
Abel l’embrassa avec passion et passa ses bras autour d’elle comme pour la retenir et la garda contre lui plusieurs longues secondes avant de la laisser monter sur le dos de son dragon qui ne tarda pas à s’envoler.
Reste, s’il te plait… Myrialuna, je t’aime…
Mais le dragon n’était maintenant plus qu’une petite forme au loin, rapetissant de plus en plus, et finit par disparaître à l’horizon.

HRP: