Dernier voyage et adieux.

Le jeune Eblaë sorti difficilement de son sommeil, ses yeux collants s’ouvrir lentement sur le plafond de sa chambre. Le soleil n’était pas encore levé qu’il entendait déjà son oncle s’affairait au rez-de-chaussée. Ce dernier avait temporairement obtenu une permission pour partager le deuil de son neveu et aussi par la même occasion faire le sien. Cela faisait donc deux jours qu’Orion avait emménagé dans la maison. Gabriel avait insisté pour qu’il prenne son lit, mais son parent avait refusé catégoriquement, prétextant trouver davantage de confort dans son sac de couchage. Ces deux jours leur avaient permis de se rapprocher un peu. Pendant des années, il n’avait plus vu son oncle. Orion lui raconta qu’à la suite du décès de la mère de Gabriel, sa sœur, une violente dispute avait éclaté entre lui et son père. Il avait donc arrêter de se parler, limitant leur interaction au travail, les deux servant dans le même régiment, il était d’une importance capitale qu’une communication existe toujours entre les deux. Au fur et à mesure des années, leur relation s’était améliorée, mais un ressentiment mutuel avait perduré. Sur le moment, Gabriel lui avoua qu’il se sentait déçu. Il aurait bien aimé connaître un peu plus son oncle autrement que dans un contexte aussi triste que celui-là et que même s’il s’était embrouillé avec son père, lui n’avait pas mérité de subir cela. Orion s’excusa, avouant que cela avait été effectivement injuste.



Il avait redouté ce jour-là, car c’était le jour de leur départ pour le Yolvaëch, la nécropole sacrée des Ygdraë. Gabriel ferait le trajet avec son oncle et de certains membres de la section de son père présent au moment de sa mort. Le corps froid et sans vie de son paternel quant à lui était déjà parti afin d’être préparé pour la cérémonie.

- Gabriel ?! T’es levé ?

Comment avait-il su qu’il était réveillé ?

- Oui Oncle Orion !

- J’ai préparé le petit-déjeuner viens manger un morceau !

- Je m’habille et j’arrive !

Gabriel sortis de son lit, récupéra la bassine d’eau se trouvant sur le rebord de sa fenêtre et entrepris de se nettoyer le visage. Il s’habilla ensuite pour le voyage : une chemise en coton, blanche, rentrée dans des braies vertes. Des bandelettes marron serrées autour de ses genoux qui descendaient jusqu’à ses chevilles et ses pieds quant à eux étaient chaussés de sandales de cuir. Il prit son sac de voyage comprenant des affaires de rechange et un recueil de prières. Gabriel avait demandé à son oncle d’être désigné comme celui devant être celui qui prononcera l’incantation en Hyriël ancien. Il devait donc apprendre par cœur les mots afin que son père puisse se voir accorder le repos qu’il méritait. C’était pour lui une grosse responsabilité, mais il devait le faire, ça devait être lui. Il ferma la porte de sa chambre après l’avoir quitté, il tomba sur celle de son père encore ouverte, son oncle avait dû y entrer pour les besoins de la future cérémonie. Gabriel s’avança et scruta la pièce. Elle était exactement dans le même que l’avait laissé son père avant de partir en mission : bien rangé, le lit se situant sur la gauche avait été fait, les rideaux de la fenêtre de trouvant en face de la porte avait été écartés pour laisser la lumière du soleil et de la lune pénétrer dans la chambre et le présentoir de son armure, vide de celle-ci, était sur la gauche entre deux armoires. Une chose contrastée avec cette apparence soignée, c’était la présence non-négligeable de poussière. Son père lui avait interdit formellement de s’introduire dans sa chambre. Ce qui, après de longues semaines, devait donner une odeur de renfermé. L’Eblaë remarqua que la chambre était dépourvue de décoration. Néanmoins, une chose attira son regard, un mouvement. Sur une des deux tables de chevet du lit, un cadre était déposé. Gabriel marcha presque sur la pointe des pieds, comme si son père était endormi dans le lit. Il prit le cadre dans la main et vit une peinture vivante. Il avait entendu parler de peintres qui utilisaient de l’encre enchantée leur permettant d’animer leur création. L’adolescent n’eut pas de mal à reconnaître la jeune femme qui dansait sur la peinture, il s’agissait de sa mère.  Une élégante Ygdraë à la chevelure blonde et à la peau aussi blanche que les premières neiges de la saison d’Eliël. Son père lui avait déjà parlé de sa mère, de qui elle était, à quoi elle ressemblait, il n’était pas avare d’informations sur elle, mais c’était la première fois qu’il la voyait en vrai, du moins, la première qu’il en avait une image.

- Gab ? Tu descends… Ah… Tu es là.

Gabriel sursauta et fit tomber le cadre par terre.

- Tu m’as fait peur Oncle Orion. Il ramassa le cadre et le replaça. Je ne t’ai pas entendu arriver.

- C’est Tasha ? Ta mère ?


- Oui… Je ne savais pas qu’il avait cet objet.

- Ton père était bien des choses, mais il aimait follement ta  mère. Sache-le. Aller. Mange un morceau, nous n’allons pas tarder à partir.

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