Kitoe ~ Démon ~ Niveau II ~ ◈ Parchemins usagés : 2067 ◈ YinYanisé(e) le : 09/11/2016
Ven 28 Avr 2023, 15:41
Objectif : Après avoir gagné la confiance de Zack, Kitoe tente de l'attirer dans son piège et développe son business RP précédent :Les liens de l'éternité
Elle poussa un cri, s'immobilisa un bref instant, puis reprit les mouvements de bassin avec plus de véhémence. Entrainé par ses gémissements, il jouit à son tour. Leurs cris s'atténuèrent jusqu'à ne redevenir plus que le halètement qu'ils avaient été au départ. Elle l'embrassa avant de se défaire de lui, puis s'allongea à ses côtés. Ils restèrent ainsi plusieurs minutes, à fixer le plafond tandis qu'ils reprenaient leur souffle. Zack l'entoura de ses bras et elle se blottit contre lui en serrant les dents. Ellie n'avait pas atteint l'orgasme ; elle avait seulement voulu mettre fin à leurs ébats dégueulasses. Elle détestait l'avoir accueillie entre ses jambes, plus particulièrement l'humidité qu'il y avait laissé. Elle devait encore attendre qu'il s'endormît pour pouvoir se détacher de lui. La Démone regarda sa propre main, posée sur le torse de son amant. Il lui aurait été si facile d'enfoncer ses griffes dans sa chair pour lui arracher les poumons et lacérer son cœur. Une seule pensée, un seul ordre, un seul geste suffisait à le tuer sur le champ. La tentation était très forte. L'homme passa ses deux mains dans ses cheveux.
-Wow. Qu'est-ce qu'on est en train de faire ?
-On couche ensemble. Elucida Ellie.
Elle n'avait aucune envie d'avoir une discussion sérieuse avec lui, précisément parce qu'elle serait incapable d'imiter Kitoe sur la durée.
-C'était une question sérieuse, Kitoe. Il tourna la tête vers elle et elle dut fournir un effort monstre pour parvenir à le regarder dans les yeux sans grimacer. Heureusement, la pénombre de la nuit jouait en sa faveur. Je voudrais savoir où nous en sommes. Est-ce que c'est sérieux ?
Ellie se redressa sur ses coudes. Ses cheveux glissèrent délicatement de ses épaules et chatouillèrent son cou. Elle sourit.
-C'est à toi de me le dire. Dit-elle en déposant son index sur le bout de son nez. Est-ce que tu veux que ça soit sérieux ?
Elle se coucha sur lui, ancrant ses pupilles dans les siennes. Par magie, elle lui insuffla de l'affection pour qu'il y crût davantage. Peu importait ses propres sentiments à son égard, lui devait l'aimer.
-Moi je vais te le dire : je suis heureuse de t'avoir retrouvé et je suis heureuse de coucher avec toi. Conneries. On passe du bon temps, on rigole et j'apprécie ton aide tout autant que ta compagnie. Conneries. Je me rends compte que tu m'avais manqué. Conneries. C'est différent d'avant mais j'aime bien.
Elle lui vola un baiser.
-Toi, tu aimes ?
Il rit. Sa manière de se comporter semblait lui plaire.
-On ne peut pas dire que je déteste.
-C'est tout ?
Sa réaction répondait que non, ce n'était pas tout. Il l'appréciait bien plus qu'il ne voulait l'admettre, mais Ellie voulait l'entendre de sa bouche. Qu'il avouât son faible pour elle de vive voix était tout ce qu'elle attendait pour apprécier ce court instant où elle le dominerait.
-Oui, j'ai beaucoup aimé.
Satisfaite, la femme l'embrassa de nouveau.
-Mais je me demande si c'était une bonne chose de l'avoir fait.
Le visage de la Démone s'effaça. Ellie profita de l'aveu pour s'écarter, feignant la vexation. Elle lui suggéra magiquement la culpabilité lorsqu'elle quitta le lit et enfila sa robe. Elle sentit aussitôt le liquide couler le long de ses jambes et en eut presque un haut-le-cœur.
-Kitoe...
Elle resserra davantage les nœuds du remord dans son estomac pour qui la fermât. Elle devait se retenir de ne pas le tuer à l'aide de ce seul sentiment – elle était sûre qu’elle en était capable. La Démone quitta la pièce. Elle s'installa dans le salon. Ses ongles s'attaquèrent aux accoudoirs du fauteuil où elle trouva refuge. Son regard était porté vers la fenêtre. Elle avait envie d'une clope, mais ce gros con n'avait rien chez lui. Un réflexe primaire la poussait à assouvir sa frustration dans la nourriture, mais elle ne s'y résolut pas. Zack la rejoignit. Il avait juste remis un sous-vêtement et elle remercia les Aetheri pour ce détail.
-Excuse-moi.
Ellie enfonça ses ongles dans le fauteuil. Elle détestait lorsqu'il prenait sa voix douce pour la caresser dans le sens du poil. Elle n'était pas son petit animal stupide ; c’était lui l’animal dans l’histoire. Pauvre type. Il lui tardait d'en finir avec lui.
-C'est rien.
-Je veux juste... que les choses soient claires entre nous.
Silence. Ellie se concentrait sur un point fixe à l'extérieur, une étoile. Elle aurait souhaité que Kitoe prît le relais pour gérer cette discussion. Mais elle n'y arrivait pas. Elle poussa un soupir.
-J'apprécie énormément ce que tu as fait et le chemin que nous avons parcouru ensemble. J'ai retrouvé une vieille amie et je me rends compte d'à quel point tu m'avais manqué. Je rigole plus avec toi qu'avec n'importe qui d'autre, tu sais. Le temps que je passe avec toi est toujours agréable.
Son discours était ridicule, mais elle ne pouvait pas l'arrêter en si bon chemin. Elle aurait simplement aimé qu'il allât droit au but.
-Je veux juste éviter de m'attacher trop comme je l'ai déjà fait. Ça m'a détruit la dernière fois.
Elle se retourna pour planter ses pupilles dans le siennes.
-Que ce soit bien clair, Zack : je ne suis pas amoureuse de toi.
Pour une fois, ça venait du cœur. Et ça faisait du bien. Ellie se demandait de ce que Kitoe ressentait pour le Déchu. Cette dernière avait toujours eu un cœur d'artichaud.
-J'aime juste passer du temps avec toi. Je ne veux pas que ça devienne sérieux non-plus.
Rassuré, il lui tendit sa main. Ellie y glissa la sienne et le suivit dans sa chambre. Elle regrettait déjà le répit qu'avait été de quitter cette pièce, la distance qui les avait séparés. Elle n'en pouvait plus. En se couchant, elle s'allongea suffisamment loin de lui pour éviter tout contact et lui tourna le dos. Zack vînt se coller à elle, passa un bras par-dessus son épaule et plaça son front contre sa nuque. Les yeux grands ouverts, elle ne bougea pas. Sa mâchoire était si serrée que ses dents menaçaient de grincer. Elle n'allait pas pouvoir dormir de la nuit.
Le lendemain matin, Kitoe avait ressenti le besoin de se laver. Elle avait frotté avec énergie et s’était savonnée au moins trois fois. Des plaques rouges avaient commencé à apparaître sur son épiderme. Elle se sentait sale. Kitoe ne comprenait pas très bien pourquoi cette impression l’avait tout à coup prise à la gorge. Elle avait eu envie de pleurer. En se réveillant dans le lit de Zack, c’était l’horreur qui l’avait saisie aussi violemment que si on l’avait plongée dans un bain d’eau glacée. Elle était restée longtemps à observer son amant dormir, incapable de bouger, trop terrifiée à l’idée de le réveiller. Quand il avait ouvert les yeux, Kitoe avait arrêté de respirer. Et lorsqu’il avait voulu l’étreindre, elle avait réagi par un brusque mouvement de recul. Il lui avait demandé ce qui n’allait pas et elle avait quitté son lit en s’excusant. Il l’avait suivi jusqu’à la salle de bain où elle s’était enfermée. Elle n’avait pas écouté les inquiétudes du Déchu à travers le battant et pour ne pas fondre en larmes, elle s’était concentrée sur sa toilette.
Kitoe n’était ressortie qu’une heure plus tard, les yeux gonflés et rouges. Zack avait fini par quitter sa place de l’autre côté de la porte.
-Que se passe-t-il ?
Elle ne réussit pas à répondre. Il la dégoutait profondément. Elle se dirigea vers la sortie, ne prenant même pas le temps de s’habiller correctement.
-Il faut que je prenne l’air.
*
-T’étais chez lui ?
Weena s’était arrêtée au milieu de la rue. Sa mâchoire avait manqué de se décrocher, son regard s’était acéré. Kitoe ne lui prêta pas la moindre attention. L’Avare la trouva ridicule dans son pyjama et détesta d’autant plus son insolence. Elle la rattrapa et s’agrippa à son épaule, la forçant à se retourner.
-Hé ! Je t’ai posé une question !
Kitoe aurait pu la tuer avec ses yeux si elle en avait eu le pouvoir. Son attitude glaciale déstabilisa Weena.
-Laisse-moi tranquille.
-T’étais chez lui ?
-Fous moi la paix, à la fin !
Kitoe vociférait. Elle avait l’air d’une clocharde avec ses cheveux hirsutes et mouillés, sa voix enrouée et sa peau irritée. On aurait dit qu’elle avait été chassée de chez elle. Pour autant, aucun des quelques passants ne s’attardaient sur elle. On croisait les situations sur les atypiques chez les Déchus.
-Il t’a larguée, c’est ça ? Il a enfin compris que tu le menais en bateau.
Kitoe lui tourna le dos. Elle n’était pas en mesure de lui parler ou de la manipuler. Elle n’était en mesure de rien du tout, sinon de trouver un lieu calme et isolé où elle pourrait gérer sa crise de panique qui n’en finissait pas de revenir à la charge dès qu’elle pensait s’en être débarrassée.
-Ouais, barre-toi c'est ça. Dégage d'Avalon et va emmerder d'autres gens, mais pas nous. Sale traînée manipulatrice. Pauvre folle.
Elle s'arrêta immédiatement. Il y avait des mots qu’elle ne supportait pas, et les termes liés à son état mental en faisaient partie.
-Retire ce que tu viens de dire.
-Non.
-Retire ce que t'as dit ! Vociféra Kitoe.
Elle voulut attraper Weena à la gorge mais celle-ci l'esquiva. La brune parvint à saisir une poignée de cheveux et l'Avare poussa un râle rauque.
-Tu ne vas jamais me foutre la paix, pas vrai ? Siffla-t-elle entre ses dents. La Déchue avait réengendré une crise de larmes.
-Jamais.
Kitoe inséra son annulaire dans sa bouche pour retirer sa bague raciale. Weena venait de signer son arrêt de mort.
-Lâche-m…
La Démone l’entraina de force dans une ruelle adjacente. Elle la plaqua contre un mur. Un filet dégoulinant de bave pendait à ses lèvres tandis que ses dents s’allongeaient et que sa bouche, tout à coup, prenait des proportions impossibles. Kitoe se transformait en une entité sombre, monstrueuse. Les yeux écarquillés de sa victime la firent jubiler. Weena s’écrasait contre elle-même, pétrifiée. Elle entendait d’ici son rythme cardiaque affolé. Elle voulait que son cœur lâchât. Quand l’énorme gueule s’ouvrit devant son visage, la Déchue parvînt néanmoins à pousser un cri aigu.
-Hé !
Kraa, ou Kitoe, sursauta, et elles se tournèrent comme une seule entité vers la voix. Au bout de la ruelle, une tête dépassait. Kraa se rétracta comme l’ombre face à la lumière en poussant une sorte de couinement. Kitoe lâcha sa proie. Elle ressemblait à un chat feulant face à un gros chien. Elle s’enfonça davantage dans le passage et se tapit sous un tas d’ordures.
-Ça va ? C’était quoi ce truc ?
L’inconnue accourut vers Weena, qui fixait la zone où elle s’était cachée, terrifiée. Elle pressa son poing contre sa poitrine.
-Je… je sais pas…
-Foutons le camp d’ici. On va prévenir des gardes.
Les deux femmes s’enfuirent. Le poil hérissé, Kitoe attendit quelques minutes avant de quitter sa cachette. Elle reprit forme humaine, complètement paniquée. Elle avait perdu les pédales et si elle restait plantée ici, elle allait finir dans un cachot sous la capitale.
La Démone se mit à courir. A présent, le temps lui était compté. Elle devait retourner auprès de Zack et mettre fin à cette farce une bonne fois pour toutes.
Ce ne fut pas dans un meilleur état que Kitoe retourna devant l’habitation de son amant. Ses pleurs ne s’étaient pas taris, au contraire, et elle tremblait. Quand Zack ouvrit enfin la porte, après qu’elle eut frappé à plusieurs reprises, elle ressemblait à un chiot qui avait été surpris par la pluie. Le Déchu se surprit même à regarder le ciel au-dehors. Il faisait gris.
-J’ai fait une bêtise. Une très grosse bêtise.
Le visage du Déchu s’assombrit plus qu’il ne l’était déjà. Kitoe avait remis sa bague en vitesse. Une migraine commençait à poindre, accentuée par le Contrôle des Émotions, qui agissait en continu sur leurs deux personnes.
-Quel genre de bêtise ? Souffla-t-il, la gorge nouée.
Elle se demandait à quoi il devait penser, à quel point il l’imaginait s’embourber dans des problèmes sans issue. D’une main contre son torse, la jeune femme l’incita à se pousser. Elle alla tout droit vers la chambre, dans le coin où elle avait entassé quelques affaires. Quand elle revînt, elle tenait suspendu au bout de ses doigts un jeu de clefs.
-J’osais pas te dire. Mais j’ai acheté ça. Elle s’approcha en essuyant ses joues. C’est un bâtiment pour commencer une boulangerie.
Il cligna des yeux. Son attention se reposa sur les deux clefs brunies par le temps et la rouille.
-C’est ça que tu appelles une grosse bêtise ?
Il l’attrapa par les épaules. Elle se sentit comme un lapin pris en grippe mais retînt sa respiration. S’il y avait bien un prédateur ici, c’était elle.
-Ce n’est pas une bêtise du tout, Kitoe, c’est génial !
Elle regarda le sol pour s’épargner un jeu d’acteur qu’elle n’aurait pas assumé. C’était déjà trop. Elle en avait assez de tout ça et elle devait faire vite. Zack poursuivait :
-Tu as les compétences pour faire ça. C’est normal d’avoir peur, mais ça ira non ?
Elle hocha la tête. Elle avait suffisamment cuisiné pour lui pour qu’il put attester de ses aptitudes en la matière.
-… Tu veux venir voir ? Je voulais te montrer mais je n’étais plus sûre de m…
-Bien sûr que je veux venir voir !
-D’accord.
Kitoe se lacérait les mains et tripotait la bague à son doigt. Elle était partagée entre diverses personnalités. Elle se mordit l’intérieur des joues, inspira, planta ses ongles dans sa paume pour rester ancrée dans le moment présent. Sa Magie l’avait lâchée depuis une minute ou deux. Elle ne contrôlait plus rien, ou si peu.
-Par contre c’est en-dehors de la ville… c’était moins cher, pour commencer.
Cela le fit rire et elle releva des yeux brillants et surpris en sa direction. Son enthousiasme la touchait. Tout était parfait.
Kitoe inséra la clef dans la serrure. La porte résista un peu, puis s’ouvrit en grand sur un intérieur désert. Le courant d’air engendré par le battant fit s’élever la poussière qui s’était accumulée dans le bâtiment, vide. Après son annonce, ils avaient quasi-immédiatement quitté Avalon en direction de cette fameuse acquisition. Il leur avait fallu une heure de vol et plusieurs kilomètres hors de la cité pour arriver sur les lieux.
-C’est un peu éloigné du moulin et il y aurait besoin de retaper, mais… C’est tout ce que j’ai trouvé. Je ne sais pas ce qui m’a pris…
Zack passa à l’intérieur pour mieux constater l’état de l’acquisition. Il souffla par les narines pour éviter d’étouffer sous l’épaisseur de grasse qui stagnait dans l’air. Une partie des fenêtres étaient condamnées par les volets et on n’y voyait pas grand-chose.
-Hm…
Derrière lui, la porte claqua et l’obscurité reprit ses droits.
-Un courant d’air ? Élucida-t-il, un rictus sur les lèvres.
Il plissa les yeux pour essayer d’apercevoir les poutres du plafond, l’état des murs, puis son attention redescendit à hauteur d’homme. Une silhouette noire, à l’autre bout de la pièce, se détachait de la monotonie grise des briques. Elle le fit sursauter.
-Par tous les Dieux, Kitoe, tu m’as fait peur. Silence. Qu’est-ce que tu fais ? Tu ne voudrais pas rouvrir la porte pour qu’on y voit plus clair ?
Deux mains se posèrent sur ses épaules et il tressaillit encore. Il voulut se retourner sans y parvenir. La poigne était affreusement forte et le clouait sur place.
-Kitoe ?
-A genoux.
La voix rauque de la jeune femme derrière lui vibra dans son oreille comme un marteau frappant l’enclume. Il n’eut le temps de rétorquer que les mains le plaquèrent vers le bas et il céda. Ça n’était pas compliqué : ce qui se trouvait devant lui lui insufflait tellement de peur qu’il était tétanisé. La silhouette dégageait une aura malsaine. En quelques pas, cette dernière avala la distance entre eux. Elle s’accroupit pour être à son niveau. Zack découvrit le visage de Kitoe. Ce qui voulait dire que… qui était derrière elle ?
-Kitoe, qu’est-ce que ça veut dire ? A quoi tu joues ?
Devant lui, la jeune femme se redressa. Elle effectua quelques étirements. Le cou, les épaules, puis les jambes.
-Réponds-moi ou j’appelle à l’aide.
Toki, placée derrière lui, dut se retenir pour ne pas éclater de rire. Kitoe, elle, y allait bon cœur. Elle avait un air particulièrement sinistre : elle rigolait sans rire, grave, mauvaise.
-Puissent les Wëltpuffs te venir en aide.
Sa poitrine se gonfla d’air et elle plaça son pied droit en arrière. En silence, elle compta jusqu’à trois et d’un mouvement de pivot, elle envoya sa botte dans la tempe du Déchu. Il s’effondra.
Le souffle court, Kitoe considéra le corps inanimé du Déchu. Elle tremblait sous l’effet de l’adrénaline, serrait et desserrait des poings pour évacuer la tension. Elle aurait adoré y aller plus fort, tellement fort que son crâne aurait explosé et aurait repeint toute la pièce. Avec une batte ou un marteau, ça aurait été aussi simple que d’éclater une bouteille de verre. Toki s’était agenouillée par terre. Elle s’était penchée, le dos de la main près des narines du brun. Kitoe remarqua qu’elle tremblait elle aussi. L’imitation était troublante, au point que le Reflet imitait l’effet de ces souvenirs qu’elle n’avait pas vécus.
-Pas mort. Articula le double avec une pointe de regret.
Kitoe acquiesça avec la même amertume. Elle déglutit, puis expira tout l’air de ses poumons dans un soupir de soulagement. Même si le plan lui avait paru moins… difficile lorsqu’elles l’avaient élaboré ensemble, il se déroulait à merveille.
-Tu penses que je l’ai frappé assez fort ?
Sa gorge était tellement nouée qu’elle lui faisait mal. Elle avait parlé avec une voix grave, feignant d’être parfaitement calme même si elles n’avaient aucun secret l’une pour l’autre.
-J’en sais rien.
Le Déchu ne devait pas se réveiller avant plusieurs heures au moins. Il ne devait pas non-plus mourir, ni ici, ni aujourd’hui. Pas avant de longues semaines, peut-être même des mois.
Ses épaules semblèrent se délester de longues heures de tension. Elle avait attendu toute la journée dans ce bâtiment, qu’elles n’avaient acheté que pour y emmener Zack, tandis que Kitoe s’occupait de celui-ci à la capitale. Mais l’originale n’avait pas grand-chose à faire des états d’âme de son double. Le temps avait été long pour tout le monde et elle aurait préféré dormir dans ce taudis plutôt que dans le lit du Luxurieux. Le fait d’y repenser lui donna envie de vomir. Elle ne se souvenait pas de la nuit dernière, mais elle savait qu’il s’était passé d’horribles choses. Elle massa sa nuque quelques secondes.
-Il faut qu’on se barre d’ici.
D’un coup de pied, la Démone poussa le corps de l’inconscient pour le placer sur le dos, puis se baissa pour passer ses mains sous ses épaules et le soulever. La précipitation de mon modèle interloqua Toki.
-On a l’autre… copie de moi au cul.
-Qui ça ? Toki jaugea son modèle. Weena ? Ou un autre Reflet ?
-Weena. Elle va nous ramener les forces de l’ordre, c’est sûr.
-Qu’est-ce que t’as fait là-bas ?
Kitoe ne répondit rien. Elle se fit la réflexion qu’elle aurait dû bouffer la trouble-fête plutôt que de la laisser s’enfuir. Mais dans la détresse, elle avait fait n’importe quoi et manqué de mettre à mal les machinations qu’elles avaient toutes les deux mis en place pendant des mois. Toki soupira. Elles échangèrent un regard entendu : de toute évidence, cette fouteuse d’emmerdes devait disparaître. Cependant, c’était un problème pour plus tard. Toki récupéra les pieds de l’inconscient en étouffant un juron. Zack n’était pas très grand mais pesait un âne mort.
-Ça va pas le faire.
-Toki, tu...
-Repose. Repose.
Le Reflet lâcha les jambes sans délicatesse. Elle fit quelques pas en rond. Elle ne les voyait pas trimballer un corps de la sorte jusqu’aux portes de l’Enfer et plus loin encore. Non seulement c’était lourd, mais c’était aussi suspect et particulièrement incommodant. De tous les détails qu’elles avaient travaillés jusqu’ici, elles n’avaient pas pensé à celui-là.
-Ça va pas le faire. Répéta-t-elle.
Les deux femmes réfléchirent, les mains calées sur les hanches, comme de chiens de faïence de part et d’autre de leur victime.
-Tourne-toi. On va le mettre sur ton dos.
Kitoe s’exécuta et posa un genou à terre. Tant bien que mal, sa comparse tracta les bras de l’homme par-dessus ses épaules, puis ramena ses jambes, de sorte à ce que la Démone put les attraper. Cette dernière se remit sur pieds. Toki lui asséna une claque sur les fesses.
-Hé !
-Quoi ? Pour une fois que c’est toi la mule, je te tape la croupe.
La Démone grommela et se mit en marche. Une fois à l’extérieur, son Reflet referma la porte du bâtiment. Elle balança les clefs dans un buisson plus loin. Aujourd’hui, Zack avait vu la lumière du jour pour la dernière fois de son existence. En Enfer, le seul soleil qu’il serait autorisé à voir serait la torche accrochée au mur de sa geôle.
:![[Q] Du steak pour l'éternité He1i](https://www.zupimages.net/up/20/30/he1i.bmp)
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