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 Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine

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Edvard Agren
~ Eversha ~ Niveau I ~

~ Eversha ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 11
◈ YinYanisé(e) le : 04/05/2024
◈ Activité : Étudiant à Basphel (Craie)
Edvard Agren
Dim 12 Mai 2024, 10:25

Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine 15jp
Image par yandidesigns
Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau


La matinée tirait à sa fin, et le soleil atteint son zénith tout d'un bond. Ceux qui étaient attentifs à ces phénomènes pouvaient même ressentir l'or perçant des rayons arrivés à maturité pour la journée. Edvard, bien sûr, y était attentif ; la merveilleuse régularité du soleil qui se levait, puis se couchait, chaque jour et chaque nuit, créant un bal respectueux et poli avec la Lune, le maintenait en état d’émerveillement. Il admirait de même le gazouillement des oiseaux lève-tôt célébrant la lumière revenue, tout comme le grave frémissement des créatures nocturnes, que l’on percevait uniquement du fait du silence des bruyants êtres partis se reposer. Bien sûr certains philosophes maintenaient que ces mouvements astraux, que beaucoup tenaient pour éternels, pouvaient ne pas l’être nécessairement, et qu’il ne faudrait pas s’étonner si un jour nul éclat rosé ne succédait à la noirceur de la nuit. Pourtant, chaque matin, ces théories étaient mises à mal lorsque, glorieux, resplendissant, l’orbe de feu céleste surgissait du Levant, avec la tranquille lenteur de celui qui se sait maître de son espace.

« Ça va pas beaucoup t’aider, de penser à autre chose », se tança-t-il en son for intérieur. D’un naturel qui le portait fortement à l’évitement, Ed avait beaucoup de mal à se concentrer sur les choses difficiles qui relevaient de sa responsabilité, préférant de beaucoup occuper son esprit par des activités ou des pensées qui n’avaient rien à voir avec le problème qui se présentait à lui. En l’occurrence, le besoin de se procurer des affaires scolaires essentielles occupait la place du problème le plus pressant pour lui. Le souvenir des remontrances agacées de son professeur de défense magique restait aigu dans sa mémoire, et il savait qu’il devait se procurer le grimoire avant le prochain cours, c’est-à-dire aujourd’hui dernier carat. De plus, il lui manquait de l’encre, et une nouvelle plume ne ferait pas de mal non plus. Il n’était pas mauvais élève ; au contraire, il se pensait relativement capable dans les diverses matières qui constituaient son curriculum, et, surtout, il était très désireux d’apprendre et de parfaire ses connaissances, tant théoriques que pratiques. Seulement, son changement de situation était encore récent et il ne se souvenait pas toujours de tout ce qu’il lui fallait, chose à laquelle il tentait maintenant de remédier.

Cela, en soi, n’aurait pas dû poser de grandes difficultés ; cependant il n’était arrivé à Basphel que quelques semaines auparavant, et l’île avec son immense cité, bien différente de tout ce quoi il avait pu être habitué auparavant, l’intimidait encore grandement. C’est pourquoi il se trouvait en cette fin de matinée à observer le ciel bleu vibrant, debout devant le perron du dortoir des étudiants de la Craie. Tout autour s’étendaient les grands et imposants bâtiments qui constituaient les lieux de vie des centaines d’étudiant de cette école renommée. La lumière jouait sur les façades d’albâtre que recouvrait en partie un lierre sauvage qui semblait les parer d’une rivière d’émeraudes que surmontait la rousseur des tuiles. Devant lui, le sillon des rues devenait autant une promesse de lieux nouveaux à explorer que la menace d’un ruissellement de passants, une foule au sein de laquelle il devrait évoluer, et des individus auxquels il devrait parler.

Il ne savait pas quelle direction prendre, et redoutait devoir adresser la parole à des inconnues pour trouver son chemin. Paralysé par l’inaction, il ne parvenait même pas à jouir pleinement de cette journée autrement libre de toute obligation. Le visage défait, ne sachant pas par quelle corne prendre le taureau, il se souvint que dans sa sacoche se trouvait un petit livret relié qui lui avait été remis à son arrivée sur l’île et qui contenait quelques indications sur la géographie de la ville. Il se mit à le feuilleter, espérant sans y croire que cette lecture lui donnerait une indication providentielle, et la possibilité de n’avoir pas besoin de recourir à autant de conversations. Lorsqu’il entendit des pas derrière lui, il se racla la gorge et se concentra particulièrement sur son feuillet afin de n’avoir pas à croiser un regard sans que cela ne soit vu comme gênant. Du moins, il espérait que ça ne le soit pas - ce plan fort élaboré fut cependant instantanément battu en brèche lorsque ses mains crispées n'eurent pas le temps de rattraper la bandoulière de sa sacoche qui glissa, encore ouverte, de son épaule jusqu'au sol.

716 mots



Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine Dkem

Seulement la chouette, au loin depuis la tour
De lierre consumée, à la Lune se plaint
De ceux qui, errant près de son secret séjour,
À son règne isolé se rendent importuns

Thomas Gray, Elegy Written in a Country Churchyard
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Aubépine Percefeuille
~ Magicien ~ Niveau I ~

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◈ YinYanisé(e) le : 23/04/2023
◈ Activité : Étudiante à Basphel
Aubépine Percefeuille
Jeu 16 Mai 2024, 15:28


illustration par @smolmushroomm
Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau
Edvard & Aubépine

« ...Encore un Eversha ?! C’est pas vrai, ça va en faire combien à l’école, maintenant ? » Au détour d’un couloir, le genou posé au sol, Aubépine faisait mine de s’affairer sur les nœuds de sa chaussure droite. Évidement, aucune de ses paires de souliers ne comportait de lacets, en réalité ; ils avaient cette mystérieuse tendance à se défaire et à se glisser sous ses pieds pour la faire trébucher. De loin, sa posture faisait malgré tout illusion  - elle en avait en tout cas la conviction. L’air aussi concentré que si elle bataillait avec un nœud marin des plus complexes, elle avait dégagé ses oreilles de son épaisse chevelure verte et les braquait en direction des voix enjouées et nasillardes qui allaient en s’approchant. « Basphel est en train de devenir une vraie ménagerie. Tu crois que c’est quoi, cette fois ? Un chat ou un chien ? » « J’sais pas, mais celui-là doit être le dernier de la portée ou un avorton pour arriver si tard. On lance les paris ? Une chance sur deux. » « Hmm… il vient de la Craie, alors ça doit être un gentil toutou. » « Ou un gros pacha ! » Dans des éclats de rires et des froissements de jupes, elles tournèrent à l’angle avant de se taire subitement en apercevant la silhouette courbée d’Aubépine. Échangeant quelques coups d’œils gênés, elles pressèrent aussitôt le pas, ne laissant dans leur sillage que des chuchotements inintelligibles mais visiblement réprobateurs.
La jeune fille se releva en soufflant à cause de l’effort, un sourire triomphant sur les lèvres. Voilà une information qui lui serait utile. Depuis que les Evershas s’étaient mis à affluer à l’école et qu’elle s’était en conséquence intéressée de plus près à cette race, elle cherchait à en approcher un de près. D’accord, ce n’était pas une race maléfique à proprement parler… mais certains devaient bien l’être un peu, non ? Lorsqu’on luttait sans cesse contre des pulsions sanguinaires, on devait bien cultiver quelques sombres tourments… L’idée de s’accoquiner avec une créature mi-homme mi-bête était tentante. Il fallait juste espérer que son Totem corresponde à un animal un peu plus dangereux que les chatons et les chiots qu’elle avait croisés à l’école jusque là. Aubépine avait décidé de croire que c’était le cas. Et pourquoi pas, après tout ?

Sa décision prise, l’étudiante partit tranquillement en direction du dortoir des étudiants de son département. Elle n’y dormait plus depuis qu’elle avait été placée en colocation mais connaissait le chemin par cœur. Dès qu’elles furent dehors, Philomène sortit la tête du sac à dos ouvert de la petite Magicienne et, ouvrant grand ses ailes, se laissa happer par la brise. Les rayons du soleil lui firent cligner des yeux ; il était bien tard pour l’animal nocturne.
« Bon, vu que c’est un nouveau, ou une nouvelle, mieux vaut que je fasse une bonne première impression, tu ne penses pas ? Qu’est-ce que tu penses de ça...» Elle toussa dans son poing fermé, s’efforçant de prendre une expression sérieuse. « Eh, c’est toi le p’tit nouveau, non ? L’Eversha de la Craie ? Moi, c’est Aubépine, future Sorcière. Je t’avise de garder ça pour toi, par contre, si tu veux pas d’ennuis… Phil ? »  L’oiseau battait paresseusement des ailes, silencieux. « Est-ce qu’après ça je lui fais un clin d’œil amusé ou est-ce que je me contente d’un regard noir ? Je veux lui montrer que je suis une dure, mais pas jusqu’à le faire fuir non plus... »  soupira la jeune fille. Ses introductions étaient souvent catastrophiques. Pas dans le sens où elle se retrouvait à perdre ses mots ou à souffrir d’un accès de timidité ; au contraire, son enthousiasme à créer du lien avait tendance à causer chutes, accidents magiques et diverses brûlures et blessures.

Malgré l’indifférence du hibou, Aubépine débordait de confiance en elle. C’est en sifflotant une vieille comptine magicienne qu’elle arriva au bâtiment dans lequel elle avait passé tant de nuits à son arrivée ici. Un sentiment de nostalgie lui réchauffa le cœur. « Bon. »  Fronçant les sourcils derrière ses lunettes rondes, elle embrassa les alentours d’un regard scrutateur. « Il ne faut pas espérer tomber sur lui, ou elle, dès aujourd’hui, mais…  »  Un fracas juste à sa gauche interrompit ses réflexions. Avisant la sacoche et son contenu déversé par terre, elle porta ses mains à la bouche, affolée. « Saperlipopette, je suis désolée ! Attends, je vais t’aider à ranger ça... »  Sans regarder la victime de ce qu’elle croyait être sa propre maladresse, elle se jeta au sol et se mit à amasser les objets qui avaient chutés, les époussetant vigoureusement au passage. Elle attrapa l’encrier qui avait roulé un peu plus loin. « Hm, il est presque vide, tu devrais... »  Sa phrase resta en suspens. Elle venait de lever le nez sur l’adolescent. Grand, mince, chevelure blanc en pagaille : Aubépine était formelle. Elle ne l’avait jamais vu. Son air perdu confirmait ses soupçons. Il devait se trouver juste à côté elle lorsqu'elle s'était arrêtée sur le seuil du bâtiment ; elle ne l’avait même pas remarquée. Le pointant du doigt, des étincelles dans ses prunelles vertes, la petite Magicienne s’exclama : « Toi ! Tu es le nouveau ! »  
Philomène s’était posée et sautilla jusqu’aux pieds du garçon. Ses yeux perçants le dévisageaient avec curiosité. Elle poussa un hululement flûté et interrogateur.

908 mots


Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine Ziy3

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Edvard Agren
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Edvard Agren
Dim 19 Mai 2024, 11:32

Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine 15jp
Image par yandidesigns
Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau


« Mais quel idiot, mais quel débile ! » Là fut sa première pensée lorsque son sac embrassa le sol et répandit tout son contenu sur le pavé parfaitement régulier du perron. « C’est vraiment rare de trouver un con comme ça quand même », se lamenta-t-il. Lui qui avait prévu de ne pas se faire remarquer, voilà qu’il devenait d’un coup d’un seul l’imbécile le plus visible de tout le quartier. Et pour illustration, le bruit de pas qu’il avait entendu juste une seconde auparavant se changea immédiatement en une voix qui s’adressait directement à lui, l’obligeant bien par là à relever les yeux et à fixer la source de cette interaction inopinée.

Ladite source s’avéra être une adolescente. C’est en tout cas ce que l’on aurait pu croire au premier abord, mais Ed se rendit bien vite compte que ce qui apparaissait comme étant une fille ne pouvait en réalité n’en avoir que la forme. Il s’agissait en réalité d’une tempête verte, un tourbillon émeraude vivant et bouillonnant dont la vitesse des paroles et de réaction le laissait d’ores et déjà pantois. Il n’eut même pas le temps de suivre ses propos très clairement, car elle passa d’une idée à l’autre à la vitesse de l’éclair, et il resta interdit lorsqu’elle commença à le dévisager d’un air surpris, avant de lui demander s’il était nouveau ici. Son encrier était toujours dans sa main.

Éberlué par cette soudaine et verte apparition, il resta là à cligner des yeux jusqu’à ce que son cerveau recommence à fonctionner plus ou moins normalement. La question le laissait perplexe et un peu nerveux, intimidé : si elle l’appelait ainsi, c’est qu’elle-même n’appartenait pas à la classe dans laquelle elle le rangeait dès à présent. Elle devait donc être une élève plus ancienne que lui ; elle ne semblait pas très âgée, mais il savait bien que les apparences pouvaient très bien être trompeuses et tout le monde ne reflétait pas forcément son âge, surtout les êtres à la magie très puissante (et il avait eu l’occasion d’en croiser plusieurs depuis son arrivée) : peut-être faisait-elle partie de cette catégorie. Il baissa les yeux.

« Euh, oui, je crois ? » Il ne savait pas trop quoi répondre. « Bonjour… ? Uhm tu me cherchais moi ? »

Il lui semblait s’empêtrer dans chacun de ses propos, et en avoir conscience n’aidait pas tant que se haïssait pour cette incapacité chronique à se comporter de façon normale avec d’autres individus. Évidemment, sa connaissance de l’île et de la cité restait à un niveau médiocre, et bien qu’on lui eût expliqué le fonctionnement de l’université dans les grandes lignes, il avait été tellement impressionné par le paysage qui se dévoilait devant lui dans la nacelle qu’il était fort possible que certains détails lui aient échappé. Peut-être y avait-il des personnes attitrées pour aider les nouveaux à s’acclimater ? Elle portait l’uniforme extrêmement reconnaissable de l’école. Il était donc exclu qu’elle ne soit pas elle-même élève, et il pouvait imaginer que Basphel préférât jumeler des pairs entre eux. De plus, comment pouvait-on expliquer autrement la fascination et l’excitation très apparentes qu’elle montrait à l’avoir croisé ? Personne d’autre, jusque-là, n’avait réellement fait attention à lui. Il devait donc y avoir une raison.

« Euh… tu tombes bien, je suis… »

Il s’interrompit : à l’instant où il s’était décidé à parler plus amplement, un petit hibou avait fait son entrée, jusqu’à arriver à ses pieds. Son attention changea de cible immédiatement, et sa timidité sembla s’évanouir alors que son intérêt se reporta sur l’oiseau. Il s’agenouilla et passa doucement un doigt sur sa tête emplumée, qui le regardait fixement. Ce regard, seulement, il ne le craignait pas : mieux, il le comprenait parfaitement, ou il lui semblait du moins le comprendre. C’était lui-même cet animal, c’était, il le ressentait, une partie de son être. Quelque chose en lui se mit à frémir doucement, comme si une force au fond de lui-même s’était imperceptiblement réveillée. Cette force, il la connaissait. Il espérait simplement que cela n’irait pas plus loin : il n’avait aucune envie d’être amené à se transformer, l’expérience étant non seulement douloureuse, mais au milieu de ce contexte urbain entouré d’autres étudiants, également très gênante. Encore plus devant cette élève qu’il trouvait assez impressionnante. Oh comme il aurait aimé pouvoir répondre à ce hululement intrigué qui l’avait accueilli ! Comme il aurait voulu lui faire comprendre qu’il était l’un des siens, et qu’ils étaient presque semblables ! Par ce geste, et par son regard, il avait tenté de transmettre ce message et de palier à l’incapacité de communiquer verbalement.

Edvard se demanda bien s’il était heureux ou non de la situation. Certes, la présence du volatile l’avait un peu calmé, mais également mystifié : il n’arrivait pas à croire à une telle coïncidence, et pensait y voir là une sorte de signe. Venu de Phoebe, peut-être ? Il aurait bien voulu pouvoir en parler à quelqu’un. De plus, l’aide potentielle que pouvait lui apporter la jeune fille lui serait bien utile. Il était cependant peu flexible et les choses ne se passaient déjà pas comme il l’avait envisagé. Il calcula cependant qu’il y avait le potentiel pour ne discuter qu’avec un seul inconnu au lieu de plusieurs, et il voulait en savoir plus sur cette opportune manifestation.

« Ça tombe bien si tu es là pour m’aider… Je suis un peu perdu… Tu saurais pas où acheter des grimoires par hasard ? »

Comme toujours, ses paroles reflétaient les conclusions de ses réflexions, et non le processus qui y avait mené. Pris d’un nouvel accès d’anxiété, et regrettant immédiatement avoir été aussi direct (car rien ne le couvrait autant de honte que se montrer impoli), tentant au maximum d'éviter de montrer les frissons qui provenaient toujours de son moi animal, il tendit un bras raide et crispé afin d’initier de lui serrer la main .

« Sympa ton hibou. »

Mais quel idiot.

997 mots



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Aubépine Percefeuille
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Aubépine Percefeuille
Lun 27 Mai 2024, 20:14


illustration par @smolmushroomm
Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau
Edvard & Aubépine

L'occasion était trop belle, Aubépine l’attrapa donc au vol sans aucun remords. « Mais oui ! Tout à fait ! J’ai été désignée pour t’accueillir et t’aider à prendre tes marques ! » affirma-t-elle avec entrain en finissant d’enfourner dans la besace ce qu’elle tenait dans la main. Après s’être assurée qu’il ne restait plus rien au sol, elle se releva, suffisamment lentement pour ne pas risquer de trébucher - et de ruiner plus encore l’image que devait se faire d’elle le nouveau dont elle venait de faire traîner les effets personnels dans la poussière. La plupart du temps, les victimes de ses maladresses cherchaient à s’enfuir avant qu’elle ne cherche à réparer ses bêtises ; c’était rafraîchissant de tomber sur quelqu’un qui n’avait pas encore eu vent de sa réputation.
« Basphel peut être un vrai labyrinthe, n’est-ce pas ? La plupart des nouveaux arrivants se font guider par un membre de leur famille ou un ami étudiant ici. » Elle jeta un coup d’œil au plan que tenait le garçon. S’il devait se résoudre à utiliser ce bout de papier, c’est qu’il était seul. Parfait. « C’est plus coton quand on ne connaît personne. Je suis passée par là, étant la première Magicienne de ma famille a être admise dans cette prestigieuse école. » fanfaronna-t-elle, passant sous silence le fait qu’elle avait dû supplier ses parents pour l’y inscrire. Ses premières semaines à Basphel avaient réellement été difficiles, ; si elle n’avait pas été accompagnée de Philomène, elle les aurait sans doute passées à l’infirmerie à force de se casser la figure dans les escaliers. Heureusement, elle était aujourd’hui plus à l’aise avec la configuration des lieux, même si il lui arrivait encore de se perdre dans les couloirs.

Ce n’est que trop tard qu’elle réalisa que le garçon s’était penché pour caresser le hibou. Sa mise en garde resta coincée dans sa gorge et elle constata, éberluée, que non seulement Phil ne se dérobait pas à son contact, mais qu’elle semblait même l’apprécier. Son Familier était revêche et peu sociable ; elle ne laissait pas n’importe qui l’approcher et encore moins la toucher. Ceux qui s’y essayaient - trompés par l’air inoffensif que lui prêtaient sa petite taille et son plumage duveteux - se faisaient souvent repousser à coups de becs vengeurs.
Et voilà que son bougon de hibou frottait allégrement sa tête contre la main d’un inconnu. La petite Magicienne se retrouva silencieuse pendant quelques instants, songeuse. Était-il possible qu’ils se connaissent déjà ? Non, impossible. Si Philomène avait quelques centaines d’années à son compteur, l’adolescent ne semblait pas être beaucoup plus vieux qu’elle, et l’oiseau l’avait accompagnée partout depuis son plus jeune âge.
Peut-être que les Evershas avaient tout simplement le contact facile avec les animaux. Un doute germa dans son esprit. Philomène avait fait le premier pas… et si c’était parce qu’elle voyait le garçon comme une proie ? Le volatile se nourrissait majoritairement d’insectes mais elle ne boudait pas son plaisir si un petit rongeur lui tombait entre les serres. Aubépine avisa la touffe de cheveux blancs sous elle, soupçonneuse. C’est vrai que le garçon ne payait pas de mine. Même Marie-Jane lui avait fait plus forte impression – et on pouvait difficilement qualifier la Lyrienne de personne charismatique. Tout comme elle, il était à peine plus épais qu’une feuille de papier, dont il tenait sa carnation. Décidément, Basphel avait fait un drôle de choix en l’envoyant dans le même département que ces deux-là.
Les réflexions de la petite Magicienne la menaient à une conclusion qui ne lui plaisait guère : l’animal Totem du nouveau devait être celui de la souris. Pas très sanguinaire, comme créature...

Aussi tremblante était-elle, la main tendue de l’adolescent pulvérisa à elle seule les réserves d’Aubépine. Animal Totem minable ou pas, c’était un Eversha, un être magique plus fascinant que les Mages Blancs qu’elle avait côtoyés toutes sa vie. Et, aussi apeuré pouvait-il être, il semblait prêt à lui accorder sa confiance.
Arborant un grand sourire ravi, Aubépine attrapa sa main entre les siennes et la serra avec vigueur. « Compte sur moi, petit. » Il n’était certainement pas plus jeune qu’elle et la dépassait d’une tête. Et alors ? « Je m’appelle Aubépine, au fait. Aubépine Percefeuille. Et elle, c’est Philomène, mon Familier Gardien. Fais attention, quand même, elle est un peu lunatique. » L’oiseau lui décocha un regard assassin que la jeune fille ignora avec superbe. Elle ne pouvait quand même pas la laisser croquer son nouveau petit protégé.  

En lui lâchant le poignet, elle réalisa qu’elle tenait toujours son sac, la sangle comprimés entre ses doigts. Il ressemblait à une pâtisserie boursouflée ; elle y avait fourré les fournitures scolaires sans vraiment faire attention à ce qu’elle faisait. Après le lui avoir rendu, elle se frotta le menton.
« Des grimoires, hein ? En cas d’urgence, tu peux peut-être en emprunter un à la bibliothèque, mais franchement, je ne te le conseille pas. Certains écrivent n’importe quoi dans la marge, quand il ne manque pas carrément des pages. Je ne vois qu’une solution... » Elle marqua un temps, hésitante. Elle sentait qu’elle était sur le point de faire une proposition qu’elle allait regretter. Comme si elle lisait dans ses pensées, Philomène rejoint son épaule d’un battement d’ailes et y enfonça profondément ses talons pour l’inciter à poursuivre. « Aïe, euh !…bon, très bien. Allons directement à Basphel-village. Ils y vendent tout ce dont un élève a besoin. Ce sera aussi l’occasion pour toi de racheter de l’encre ! Le souci, c’est que ça fait une trotte à pied... » grimaça-t-elle. Pourquoi tout était si loin dans cette fichue école ?! « Si tu n’as rien d’autre à faire, on peut y aller tout de suite. Oh, je peux écrire un mot à tes professeurs si nécessaire ! Tu pourras me poster des questions sur le chemin et je te dirais tout ce qu’il y a à savoir pour survivre ici. » Un poil dramatique, mais de quoi faire son petit effet.

1006 mots


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Edvard Agren
Mer 12 Juin 2024, 16:56

Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine 15jp
Image par yandidesigns
Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau


Au moins avait-elle l’air sympa ! Il émanait d’elle une sorte de jovialité chaotique, ainsi qu’une assurance qui l’émerveillait autant qu’elle l’intimidait. Il lui semblait quand même avoir eu énormément de chance sur ce coup-là : alors même qu’il lui fallait prendre son courage à deux mains et deux serres pour oser demander de l’aide à des inconnus, voilà que quelqu’un se portait volontaire et lui enlevait tous ces soucis d’un seul coup. La nature était quand même bien faite, de temps en temps. En plus, elle avait été bien gentille de l’aider à rassembler toutes ses affaires éparpillées du fait de sa propre maladresse, elle n’était pas obligée du tout à le faire. Heureusement, d’un côté, que ses réserves d’encre soient épuisées : cela aurait causé plus de dégâts et il aurait été bien embêté si elle s’était tachée par sa faute.

Il ne comprenait cependant pas tout ce qu’elle disait, et pas seulement parce qu’elle parlait à toute vitesse, enchaînant les idées et opinions. Il était impressionné par ce qu’elle lui racontait de son parcours pour arriver jusqu’ici, qui semblait être passionnant, mais ce n’était pas très spécifique, magicienne : tout le monde autour de lui était magicien, il ne connaissait personne qui n’utilisât pas la magie. Ses parents étaient magiciens, tout comme le reste de la tribu en réalité. Ah, mais bien sûr, il avait un jour entendu un adulte parler d’individus fort différents, même si cela avait été évoqué plus comme une race mythique qu’autre chose…

« Oh, ta famille est Humaine ? Ça doit être difficile de vivre avec des non-magiciens, non ? Pour se comprendre je veux dire. »

Il essayait tant bien que mal d’engager la conversation, de faire preuve de plus de bonne volonté et d’amabilité qu’il ne lui était coutumier. Pas facile d'aller contre ses instincts surtout lorsque ceux-ci sont aussi puissants, prévalents, et influencés par une bête qui est non seulement solitaire, mais aussi particulièrement nocturne. Par cela-même, la description peu reluisante de l’oiseau qu’en fit la jeune verte le laissa interdit. Bien sûr, connaître les hiboux de manière aussi intime lui permettait d’en retirer une compréhension telle qu’aucune autre personne ne partageant pas sa condition ne saurait envisager. Certes, il n’arrivait pas encore à se contrôler, quoiqu’il sût par ses aînés que cette condition, avec un peu de travail, ne saurait persister bien longtemps ; mais même sans cette capacité, le simple fait d’être chouette, même sans le vouloir, permettait une vision et une perspective qui n’avaient rien à voir avec les prunelles perçant la nuit ou le cou capable de tourner à cent quatre-vingts degrés. De ce fait, il ne comprenait pas bien en quoi la dénommée Philomène pouvait être « lunatique » : elle lui avait semblé parfaitement normale lors de leur brève interaction.

« Hum… Enchanté, moi c’est Edvard. Agren. Ed. » Il déglutit, se rendant compte qu’il bafouillait. « C’est vraiment bien que tu sois là et que tu connaisses tout ! J’ai vraiment besoin de ces livres, ce n’est pas un problème de marcher ! On peut y aller maintenant si tu me guides ? »

Elle avait l’air de vraiment bien s’y connaître et même de se donner beaucoup de mal pour remplir sa mission de guide et d’initiatrice de nouveaux : il avait peine à imaginer un nouveau plus exigeant que lui qui se retrouvait immédiatement dans la mouise et avait besoin de se déplacer jusqu’à l’autre bout de l’île pour s’en sortir. De ce fait, il avait laissé passer son commentaire un peu condescendant. De toute façon, il n’aurait jamais eu le courage de rétorquer, même s’il ne s’était pas senti aussi redevable. De toute façon, il y avait du vrai dans ce qu’elle disait : sa prestance, son air sûre d’elle et son apparente connaissance intime du dédale de l’île basphélienne lui donnait une aura très impressionnante à ses yeux.

Ainsi, le périple jusqu’à Basphel-village (ainsi qu’elle l’avait nommé) commença. À dire vrai, Ed ne se sentait toujours pas particulièrement à l’aise. Il ne connaissait pas cette fille, et la totalité de ses neurones (peu nombreuses, à l’évidence) étaient entièrement occupées à trouver un sujet de conversation. Il était conscient malgré tous ses défauts que la situation devenait de plus en plus gênante à mesure que les secondes s’écoulaient sans qu’une parole ne soit échangée entre eux. Sa nervosité et son besoin de ne pas passer totalement pour un moins que rien battaient contre ses tempes avec l’intensité d’un lourd tambour de hêtre sur lequel les lances rougeoyantes volatiles du grand feu projetaient leur lueur.

Il s’aperçut qu’il laissait son esprit vagabonder pour éviter d’avoir à penser à son inconfort, ce qui, il le savait, ne l’aiderait pas sur le long-terme.

Son expérience préalable des relations inter-individus l’avait laissé mal équipé pour comprendre exactement ce qu’il se passait, et la meilleure façon d’y réagir. Il pouvait sentir qu’il se trouvait une certaine tension entre les deux alors qu’ils marchaient côte à côte, mais il ne pouvait pas exactement mettre le doigt sur sa nature ; il aurait voulu se comporter de façon plus amicale, plus familière, mais c’était comme si une barrière l’en empêchait. Outre qu’ils se connussent à peine, il avait quelque peu l’impression de se trouver devant quelqu’un de supérieur à lui. Son évidente ancienneté au sein de cette institution, révélée par sa qualité de marraine de nouveaux ainsi que sa connaissance évidente des recoins de Basphel lui donnaient une aura à laquelle il n'était pas insensible. C'était en effet une cause majeure de son anxiété. En même temps, cependant, il ne pouvait se cacher le fait que cette tension dépassait ce sentiment d’infériorité.

Il y avait peut-être, en lui, quelque chose qui touchait à de l’admiration. Admiration pour cette fille qui semblait avoir la tête sur les épaules, prenant ses responsabilités au sérieux. Admiration pour quelqu’un qui semblait ne pas se soucier terriblement du regard d’autrui. Admiration pour quelqu’un qui avait visiblement gagné la confiance d’un hibou. Du haut d’à peine seize ans, il peinait à mettre à jour toutes ces pensées et ces sentiments qu’il ressentait tout d’un coup. La tension n’était pas seulement humiliante et désagréable, mais aussi un peu plaisante, et il pensait qu’elle aussi devait partager au moins en partie l’atmosphère un brin tendue, ce qui l’aidait à se sentir moins minable. Il était trop timide cependant pour tenter de la scruter et de s’apercevoir de l’étendue et de la véracité de cette constatation. De fait, n’étant sûr de rien, il lui semblait tour à tour que ce ressenti était partagé, et qu’elle était trop élevée pour avoir cela en commun avec lui. Le chemin se mit à s’infléchir en une petite montée, requérant un peu plus d’efforts qu’auparavant. Il s’aperçut qu’il la regardait du coin de l’œil pour s’assurer qu’elle s’en débrouillait bien, tendant parfois la main pour qu’elle puisse éventuellement s’y appuyer. Une fois même, elle trébucha sur quelque caillou : il l’attrapa par le bras afin qu’elle se rétablisse, et fit ce geste presque avec ardeur. Lorsqu’ils arrivèrent en haut de la pente, la vision des quelques habitations au-devant d’eux lui sembla heureuse. Il aurait voulu qu’elle lui parlât d’elle. Parfois, leurs coudes se touchaient brièvement au rythme de leurs pas.

Il décida, tant bien que mal, à alléger son malaise en parlant de choses banales et positives. « Tu connais bien l’île du coup ? » trouva-t-il à dire. « Tout y est très différent d'ailleurs ».

Il n’en eut que le temps néanmoins, car après une longue marche, le lieu-dit se découvrit à eux, et il eut à admirer plusieurs ruelles cernées de part et d’autre de boutiques diverses et variées. Il voyait des couleurs en tous sens, et même de loin les vitrines semblaient regorger d’objets particuliers et intrigants. Il avait hâte de se mêler à l’activité de cette bourgade, mais perdu à nouveau, n'osait s'y engager sans sa guide.

1333 mots



Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine Dkem

Seulement la chouette, au loin depuis la tour
De lierre consumée, à la Lune se plaint
De ceux qui, errant près de son secret séjour,
À son règne isolé se rendent importuns

Thomas Gray, Elegy Written in a Country Churchyard
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http://lesterresdesympan.forumactif.com/t40486-edvard-agren
Aubépine Percefeuille
~ Magicien ~ Niveau I ~

~ Magicien ~ Niveau I ~
◈ Parchemins usagés : 134
◈ YinYanisé(e) le : 23/04/2023
◈ Activité : Étudiante à Basphel
Aubépine Percefeuille
Mar 06 Aoû 2024, 00:19


illustration par @smolmushroomm
Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau
Edvard & Aubépine

Aubépine décocha un coup d’œil amusé à l’adolescent. « Oh, non, non, tout le monde dans ma famille est Magicien. C’est juste qu’en général, les Mages Blancs sont envoyés aux Palais de Coelya… et chez les Percefeuille, c’est encore plus vrai. Mais, soyons honnêtes, se retrouver exclusivement entre personnes de la même race, c’est d’un barbant, non ? » Un sourire entendu retroussait le coin de sa bouche. De ce qu’elle en savait, les Evershas étaient eux aussi des spécialistes de l’entre-soi. L’adolescent devait avoir ses raisons pour avoir été envoyé ici malgré tout, et elle comptait bien finir par les découvrir. « C’est pour ça que j’ai bataillé pour pouvoir étudier ici. Cette école permet de côtoyer toutes sortes de personnes et de sortir des sentiers battus. »

Ravi de l’intérêt et de la déférence dont faisaient preuve le nouveau à son égard, Aubépine sourit plus largement. Elle était à l’évidence très convaincante dans son rôle de guide et d’élève modèle. Il fallait cependant qu’ils prennent le large avant qu’un professeur ou un autre élève ne brise l’illusion par une parole malheureuse ou un froncement de sourcils éloquent.
« Eh bien, en route, Ed ! » lança-t-elle avant de le devancer d’une démarche assurée. Depuis qu’elle utilisait les semelles du funambule*, marcher était devenue une activité bien moins risquée qu’auparavant. Elle ne se lassait pas de compter les pas qu’elle parvenait à faire avant de trébucher ou de perdre l’équilibre.
C’est d’ailleurs ce à quoi elle s’adonna dès le début de leur petite expédition, oubliant complètement la présence du garçon à ses côtés. L’ennui qui l’avait envahi à l’idée de devoir crapahuter jusqu’à Basphel Village s’était évanoui et elle était désormais enthousiaste devant la perspective de tester les limites de l’artéfact.
Quatre-vingt quatre, quatre-vingt cinq, quatre-vingt six… ses lèvres formaient en silence le décompte miraculeux de ses chaussures foulant le sol sans buter contre quoi que ce soit. Le pavement lisse laissa bientôt la place à un sentier plus inégal qui faisait parfois surgir une brique brisée ou un monticule de terre ou d’herbe touffue. Ses pieds contournaient les obstacles ou les surmontaient vaillamment sans que son équilibre n’en soit impacté. Pour une fois dans sa vie, Aubépine se sentait légère. C’était une sensation grisante qui lui rappelait Boraür. Elle aurait remercié son bienfaiteur cent fois si elle avait pu savoir qui il était. Hélas, elle avait été bien incapable de déchiffrer l’écriture sur le carton qui accompagnait le présent.

Le caillou qui se jeta sous sa chaussure dans un crissement strident la ramena à la réalité. « Saperlipopette ! » Confuse, elle dévisagea le jeune homme dégingandé qui la tenait fermement par le bras et clignait des yeux d’un air inquiet. La petite Magicienne manqua de se frapper le front. Quelle tête de linotte ! Ed ! Sa visite guidée ! Les conseils avisés qu’elle comptait lui prodiguer et qui la baptiseraient à jamais dans son esprit comme une source de savoir et de sagesse vers laquelle se tourner durant toute sa scolarité ! Non seulement elle n’avait pas pipé mot de tout le trajet, mais elle avait failli l’entraîner dans sa deuxième maladresse depuis leur rencontre ; et étant donné leurs gabarits respectifs, ça aurait été littéral. Aubépine se redressa gauchement et posa un regard nouveau, appréciateur, sur le garçon. Il était plus fort qu’il n’en avait l’air. « Merci, Ed. C’est sacrément pentu, par ici, hein ? Dis-le moi si tu as besoin de faire une pause. » En réalité, c’est elle qui commençait à être essoufflée. Elle espéra qu’il n’avait pas senti la sueur qui lui formait des auréoles sous les aisselles. Son endurance s’était légèrement améliorée depuis qu’elle avait commencé à étudier à Basphel, mais ce n’était toujours pas son point fort. Sans attendre sa réponse, l’adolescente ralentit le pas. Sous sa longue jupe, la peau nue de ses cuisses lui cuisait, à l’endroit où elles se frottaient entre elles à chaque pas. Heureusement, la ligne hérissée de Basphel Village se découpait à l’horizon.

Philomène les dépassa dans un froissement de plumes pour aller se percher sur l’arbre qui étendait ses longues branches courbées comme une arche de bienvenue à l’entrée du village. Ses yeux perçants étaient fixés sur le jeune homme. Aubépine sentit une pointe de jalousie lui chatouiller la poitrine. Normalement, à cette heure-ci, le volatile se serait rendormi depuis belle lurette, bien au chaud dans son sac à dos. Qu’est-ce qu’elle trouvait de si fascinant chez l’Eversha ? La jeune fille tendit le doigt devant le nez d’Ed pour lui présenter quelques-uns des bâtiments au loin, et tandis qu’il tournait la tête pour les regarder, elle observa attentivement son profil. La plupart des Evershas avait des caractéristiques en commun avec leur Animal Totem. Aubépine soupçonnait Edvard d’être une souris ; elle s’attendait presque à surprendre la ligne d’une moustache courir le long de sa joue, ou le renflement sous les lèvres d’une paire d’incisives plus longues que la normale. Non seulement le faciès du jeune homme ne comportait rien de tout ça, mais il la dépassait d’une tête. S’était-elle trompée ? Peut-être était-il un furet ou un loir albinos. Comment expliquer le comportement de Phil, sinon ?

Comme s’il se trouvait ragaillardi par les doutes de la Magicienne, le nouveau se décida enfin à parler. « Oh, oui, je la connais comme ma poche ! » mentit-elle. En réalité, elle passait plus de temps à la bibliothèque et dans sa chambre qu’à arpenter les alentours de l’école. Ses études lui prenaient un temps fou. Elle allait surenchérir en lui promettant de lui montrer les meilleurs passages secrets de la bourgade, quand le garçon lui sauva la mise en enchaînant sur un sujet beaucoup plus intéressant. « Ailleurs ? » Les yeux verts de la jeune fille se mirent à pétiller. Elle se figea, espérant qu’il développe. Ce ne fut pas le cas. Quoi de surprenant ? L’étudiant de la Craie était resté quasiment muet pendant tout le trajet. Heureusement, l’adolescente savait parler pour deux. « Oui, Basphel est un vrai petit monde à part. Je viens de Vervallée, et je n’avais jamais eu l’occasion de voyager, à cause de mes parents... ronchonna-t-elle avec un brin d’amertume. C’est dépaysant, et ça ne cesse jamais vraiment de l’être, parce que même si c’est petit, toutes les races et tous les modes de vie sont représentés à leur façon. Un véritable patchwork de civilisations et de cultures ! N’est-ce pas fascinant ? »

Un sifflement aiguë fendit l’air, l’interrompant au milieu de sa tirade. Le hibou avait sauté de son abri végétal pour atterrir sur le couvre-chef de la Magicienne. Cette dernière leva les yeux au ciel mais ne releva pas l’impolitesse de son Familier. « Enfin, bref, nous voilà arrivés ! Reste bien près de moi si tu ne veux pas te perdre ! » Sans ménagement, elle attrapa le poignet de son protégé et le mena à sa suite. Malgré le pas guilleret de la jeune fille, ils allaient suffisamment lentement pour que le garçon puisse découvrir les lieux à sa guise. Contrairement à ce que son nom pouvait laisser penser, Basphel Village était majoritairement composé de rues commerciales. Les boutiques se chevauchaient les unes les autres, accaparant autant d’espace qu’elles le pouvaient, ce qui donnait parfois lieu à une architecture absurde et peu esthétique.
Aubépine traîna Edvard à travers les ruelles encombrées jusqu’à un magasin qui, de l’extérieur, ne payait pas de mine. Son toit biscornu manquait de tuiles et sa cheminée étroite et tordue ne crachotait de la fumée que par intermittence. La porte baillait, légèrement entrouverte. La Magicienne se saisit de la poignée en forme de coquille d’escargot et entra dans un tintement de cloches.

L’intérieur était plus spacieux qu’on aurait pu le croire avant de passer le seuil. La tapisserie était presque invisible derrière les étagères pleines à craquer d’ouvrages et de fournitures ; il régnait dans la pièce une odeur de renfermé, de vieux papiers et d’encre fraîche. Aubépine s’en emplit les poumons en souriant. C’était le genre de parfum qui la faisait se sentir chez elle.
« Bienvenue… oh, c’est toi, Aubépine. » La voix, grave et lasse, avait fusé de derrière un comptoir en pin massif surchargé de babioles. Son propriétaire, un homme grand au teint gris, était tellement immobile qu’on aurait pu penser qu’il faisait partie du décor. « Qu’est-ce qu’il te faut, cette fois ? » demanda-t-il en se grattant lentement la barbe, achevant de briser l’illusion. Aubépine rougit brusquement. À force d’égarer ou de briser ses affaires, elle avait fini par se faire connaître de quelques commerçants. « Non, non, je n’ai besoin de rien ! » Ce n’était pas tout à fait vrai, mais elle ne voulait pas qu’Ed apprenne à quel point elle était une gaffeuse. Andouille, tu aurais dû l’emmener ailleurs, pesta-t-elle en son for intérieur. Elle posa une main sur l’épaule de son protégé. « Aujourd’hui, on est là pour mon nouvel ami. Je lui montre un peu les alentours. » Elle toussota, autant pour se donner une contenance que pour chasser la poussière qui saturait l’air et s’était frayée un chemin dans sa gorge. « Bon, pour commencer, il faut que tu te recharges en encre. Il y en a de toutes sortes ici. De toutes les couleurs, bien sûr, mais aussi des encres enchantées, du genre qui brille dans le noir, devient invisible aux yeux des indiscrets, transforme les pattes de mouche en calligraphie impeccable… personnellement, quand j’ai quelques sous de côté, je prends un ou deux flacons de celle qui sèche instantanément. Très pratique pour éviter les bavures ! » Tout en parlant, elle s’était emparé des flacons et les manipulait sous l’œil impavide du vendeur. L’une des raisons pour lesquelles elle aimait cet endroit, c’est qu’on était pas sans cesse sur son dos sous prétexte qu’elle laissait parfois des objets lui glisser entre les doigts. « Alors, Ed ? Tu as fait ton choix ? »

1662 mots

*Les semelles du funambule:


Au fond de l'inconnu pour trouver du nouveau | Aubépine Ziy3

"Ivy" par cho
"Witch and Owl" par tono
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