Patati et patata
Jämiel & Grendel

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« Et patati et patata, encore en train de bavarder en se dorant la pilule ? » Le pétunia hoqueta de stupeur lorsque je frôlai ses pétales en voletant sous elle. J'aimais bien prendre les fleurs par surprise, juste pour leur rendre la monnaie de leur pièce à être d'épouvantables emmerdeuses. À la surface, elles étaient délicates, fragiles et bien élevées. En Enfer, c'était une autre histoire. On pouvait trouver les mêmes fleurs d'un monde à l'autre, sans doute grâce aux allers et retours des Démons quand ils empruntaient les portails, mais leur caractère étaient comme le jour à la nuit. Irritables, irascibles, malpolies, et surtout dangereuses, je les adorais. Je bichonnais particulièrement celles dans le jardin de Kitoe, mais j'aimais bien aussi rendre visite aux espèces sauvages qui poussaient ça et là, au gré de mes promenades, comme là. Je m'étais éloignée du village après une dispute virulente avec Ortie sur le sujet de la sortie des poubelles.

« Oh c'est toi, Grendel ! Toujours en vie ? » J'attrapai un pétale que je pinçai entre mes doigts. « Tu ferais mieux d'avoir l'air heureuse que je le sois si tu veux pas que j'envahisse ta tige de pucerons. Tu auras de vilaines tâches après, tu seras laide comme tout. » « Comme toi, tu veux dire ? » rétorqua la fleur du tac au tac. J'explosai de rire et la relâchai. « Ok, elle est bonne. T'as besoin de quelque chose tant que je passe dans le coin ? » « Un peu de potins du monde réel serait pas de refus. À peu près rien de véritablement croustillant ne s'est produit ici depuis les Jeux de Sahōdara, et c'était il y a des dizaines d'ères auparavant ! » « T'exagères pas un peu ? Je parie que t'étais encore un bourgeon il y a deux mois. » « C'est des détails ça, Grendel chérie. Le temps passe différemment pour moi. Mais raconte-moi plutôt, qu'as-tu de nouveau à me raconter ? Comment va Kitoe ? J'ai eu des échos des bégonias comme quoi elle serait devenue aussi grosse que sa maison et qu'elle ne peut plus rentrer chez elle, c'est vrai ?! » « N'importe quoi. Elle garde la forme ! Je pense que c'est pour bientôt, en tout cas, car son caractère ne fait qu'empirer. On a tous hâte qu'elle accouche, et elle la première, ce sera un soulagement pour tout le monde. Je me demande quelle horreur va sortir d'un bide aussi énorme. » « Ça pourra jamais être aussi laid que toi. » Je fis la grimace. « J'ai horreur du comique de répétition, Pétunia, c'est à chier. » « C'est toi qui est à chier ! » « Non c'est toi ! » « Misérable petite Fae, tu mérites de pourrir ici à jamais. » s'indigna le pétunia en frissonnant de la tige. « Je suis plus heureuse ici qu'ailleurs. » m'esclaffai-je. « Tu verrais Basphel, ma pauvre, ri-di-cule. Y a toute une flopée de morpions, tous habillés pareil, bruyants comme tout. Un énorme troupeau de péteux qu'ont jamais eu de vrais problèmes dans leur vie. Voilà ce que c'est. Heureusement qu'il y a Jezz, il est rigolo. » « Jezz ? » « Ouais. Un Démon. » « Ah, c'est pour ça. Et - OH PAR LES TRIPES DE L'OEIL ! » J'avais aussi sursauté au bruit de branchages cassés. Je fis un tour sur moi-même et me plaçai face au buisson, armée de ma lame miniaturisée. « Qui est là ? Montrez-vous ! Je suis armée, et Pétunia peut se transformer en dragon ! Les mains en l'air si vous voulez pas que je vous fasse un second trou au cul ! »

Message I | 612 mots

Patati et patata
Jämiel & Grendel

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La vilaine figure blanche comme un cul poudré de Magicienne envahit l'intégralité de mon champ de vision comme dans un cauchemar. Par expérience, je braquai mon attention sur ses mains et surtout sa bouche et le nombre de dents qui s'y cachaient. C'était pas aujourd'hui qu'un de ces cornus allait bouffer de la paillette, ça non, ou j'allais lui trouer tout ce qui était trouable dans la cavité putride qui devait lui servir de bouche. Menaçante, je levai plus haut mon cure-dent, prête à en faire bon usage. Ceux qui sous-estimaient mon arme n'avaient jamais eu une écharde plantée dans le pif et ça se voyait. « Personne t'a d'mandé ton avis face-de-craie. » vociférai-je. Qu'est-ce qu'ils y connaissaient, tous, aux Faes ? Rien du tout, du vent, de l'illusion. Certains ne croyaient même pas en nous. « J't'en foutrais de la délicatesse moi, t'as cru que j'allais te parfumer à l'orchidée et te souhaiter une bonne journée peut-être ? Il est malade lui. Il en a l'air en tout cas, on dirait qu'il va se dégobiller dessus. T'as quoi mon mignon, t'as frotté ton nez trop près du portillon de ta mère ? » La pétunia gloussa, ravie de ce petit spectacle imprévu pour la sortir de son ennui. « Et puis quoi ? C'est qui Pétunia ? Non mais tu l'entends, Pétunia ? C'est qui Pétunia ? » répétai-je, la voix aigue. Je m'esclaffai. « D'après toi, petit malin ? Une Magicienne ? T'en as déjà vu traîner par ici ? Sauf dans tes vieux rêves lubriques peut-être. » Je secouai la tête et me tournai vers la mon amie aux pétales dressés pour ne pas perdre une miette de la scène. « J'en peux plus de ces idiots de Démons qui sont bêtes comme leurs pieds. Parfois c'est drôle, mais d'autres jours, ça me donne des aigreurs d'estomac. »

La figure du Démon se tordit soudain en une vilaine grimace toute coincée. « T'as quoi, t'es constipé ? » Inquiète, je voletai un peu en arrière. Des Démons porteurs des pires virus, j'en avais déjà vu. Certains cultivaient une hygiène qui séduisait toutes les bactéries sans exception, comme mon petit crasseux de Jezz. « T'as choppé une saloperie trop grosse pour toi ? Si tu me tousses dessus, je te préviens, je te redécore la face avec ton sang, au moins y aura un peu de couleur. » « Oh oui ! Oh oui ! Fais ça ! » s'enthousiasma Pétunia. Si elle avait pu frapper dans ses mains, elle l'aurait fait. Je me disais certains jours que ça devait être la pire des choses d'être une fleur. Et sans nous, elles crevaient. Quelle vie. « Hé, tu t'appelles comment ? Moi c'est Grendel, pas enchantée de te rencontrer. »

Message II | 478 mots

Patati et patata
Jämiel & Grendel

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« Tore Valen ? » Ça ne me disait rien, encore un inconnu au bataillon. L'Enfer en était truffé. Il fallait bien que les plus forts aient des trucs à se mettre sous la dent, et cela comprenait leurs propres congénères. Le cannibalisme était monnaie courante par ici. Si on voulait faire dans l'originalité, il valait mieux être végétarien, ou impotent, ces choses que les nuls étaient souvent.

« Je rêve ou tu viens d'me donner un ordre, Tore du cul ? il m'a prise pour sa copine ? » J'adressai cette dernière remarque à Pétunia avec un ricanement. « Ou son esclave peut-être ? Et ça me menace en plus ! C'est un monde, ça ! » Je bougonnai avec hargne, juste pour le sport. Une de mes activités favorites était de participer à des concours d'insultes et pas une seconde, je ne le pris au sérieux. Personne ne se conduisait de façon aimable ici, et les menaces étaient une façon de communiquer comme une autre. Les actes pouvaient suivre les mots, mais je ne me sentais nullement en danger.

« C'est Ānanda ici. » Qu'il ne le sache pas était curieux. Venait-il de se téléporter ici depuis l'autre monde par accident ? Ou s'était-il cogné la tête sur un rocher et avait perdu la mémoire ? Ça expliquait sa tête de constipé prêt à rendre son dernier repas. « Autrement dit, t'es bien tombé pour t'amuser, même si t'as pas la tronche de quelqu'un qui aime ça. » Encore autrement dit, il avait l'air aussi chiant qu'un Ange, ce qui pouvait devenir source de divertissement dans ce Royaume.

« Ça te r'garde pas. Mêle-toi de ton propre jardin. » D'un coup d'ailes, je me mis à sa hauteur. Les bras croisés, j'en profitais pour le considérer un peu mieux. Malgré son teint cireux, il avait une certaine présence. Avec des efforts, il pouvait arriver à quelque chose. « En tout cas, si t'aimes butiner, c'est ton dard qui va être content, il y a à boire et à manger ici, pour tous les vices et les gabarits, tu trouveras bien terreau à ton pied ! Qu'est-ce que tu aimes ? Je peux te filer des conseils, je connais bien le coin. Y a bien quelqu'un qui voudra bien s'occuper de toi. Tu peux aussi te prostituer, si t'as besoin de fric. Là encore j'ai mon petit réseau, je peux te conduire aux bonnes personnes. Tu cherches quoi, exactement ? »

Message III | 420 mots