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 [Q] Deuxième mouvement : moderato | Solo

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Min Shào
~ Orine ~ Niveau II ~

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◈ Parchemins usagés : 292
◈ YinYanisé(e) le : 25/03/2022
◈ Âme(s) Soeur(s) : Elle m'attend quelque part.
Min Shào
Ven 27 Jan 2023, 14:54


Deuxième mouvement : moderato
Après le RP La graine du complot

Wao entre dans la salle de Bal. Son manteau en lin est trempé par la pluie typique de Drosera, mais d'un coup de brosse magique, le serviteur à l'entrée lui retire toute humidité. *Les Alfars anticipent vraiment toutes les situations... tante Mei serait admirative*, se dit-il en songeant à la tante maniaque de Min. L'Orine comprend qu'il arrive dans une soirée guindée : les invités, malgré leur masque, exhibent sans retenue leurs plus précieux bijoux. Il entend des personnes s'appeler par leur nom à voix haute, comme si leurs masques ne cachaient rien. Il se sent soudain comme pris au piège. Il pensait arriver comme un convive comme les autres, mais tout le monde va vite le reconnaître. Les Bénies des Arts ne passent pas inaperçues dans ce quartier. « Reste près de moi et tout ira bien », le rassure Rubèn. Mais le trémolo de sa voix trahit sa propre inquiétude.

Ces derniers jours, le fils de son Aisuru potentiel est devenu paranoïaque. L'investigation dont il rêvait de percer le secret, certainement plus par ambition personnelle que par conviction, s'est retournée contre lui. Il a fait arrêter le cocher de nombreuses fois sur le chemin pour écouter les bruits autour d'eux ou vérifier qu'ils n'étaient pas suivis. Il est en train de perdre la raison, et il entraîne l'Orine dans son trépas. Wao s'est juré que cette soirée serait la dernière faveur qu'il lui accorderait. Ensuite, il ne voudrait plus entendre parler de cette dangereuse affaire. Quelqu'un a du sang sur les mains, et Wao ne veut pas se trouver en travers de sa route. Encore moins pour servir les intérêts d'un ado trop ambitieux pour son propre bien. Il a accepté de venir à ce bal masqué avant ce fiasco. Il tiendra sa parole et rien de plus. Ensuite, il donnera le carnet d'enquête à son père. Wao n'accepte plus d'être tiré d'un côté et de l'autre par la famille Lièn comme une marionnette. C'est éreintant.

 « Je ferai ce qu'il me chante, et si je veux m'éloigner de toi, tu ne m'en empêcheras point. » Wao ponctue ses mots par un regard sombre qui perce à travers son masque à plumes de cygne. Il n'est pas en colère, mais reste ferme. Alors qu'il avance dans le couloir sombre, une faible musique perçant le bout, un visage apparaît soudain dans la pénombre. Il revoit encore l'expression de détresse de cette domestique. Elle le guette dans la nuit et la pénombre, pour revenir le rappeler de son méfait. Son regard cherche la lumière pour éclipser ce mauvais souvenir. A sa gauche, Rubèn est trop surpris de sa réponse froide pour répliquer. Il dissimule son émotion sous le masque d'oni que Wao lui a prêté.

Les deux convives marchent en silence sur le tapis en velours. Devant eux, le serviteur les guide, puis s'arrête devant un rideau. Il se retourne vers eux et s'incline, avant de soulever l'épais tissu. La musique se renforce soudain. Mais à la surprise de Wao, la salle n'est pas très illuminée, si bien qu'il n'en distingue pas les contours avant d'y entrer. Wao s'incline à son tour devant le serviteur. Rubèn lui assène une frappe discrète dans les côtes, lui rappelant les règles d'étiquette Alfare. Puis, il le dirige vers la gauche, où un buffet rassemble quelques convives. Wao se laisse entraîner, mais il ne regarde plus du tout en face de lui : il est subjugué par la décoration de la salle. Des bougies trônent sur des chandeliers tout autour de la salle, mais leur lumière est tremblotante, comme si un vent invisible les mettait à rude épreuve. Les fenêtres ont été cachées par des rideaux de velours, qui entourent toute la salle. En haut, des Alfars discutent, un verre à la main, sur un balcon qui surplombe la piste de danse. Et au centre, une vingtaine de convives s'animent au rythme de la musique.

« Ce Bal est organisé en l'honneur du concerto d'Offachman. Vous reconnaissez certainement l'ambiance qui fait écho à la Danse Macabre que nous avions écoutée au concert », lui glisse Rubèn en arrivant au buffet. « Oh... » Wao n'y fait pas attention : au lieu de fixer le balcon, son plonge sur ses pieds. Une fumée magique à l'éclat verdâtre recouvre tout le rez-de-chaussée sur un mètre. Wao ne voit qu'à hauteur de ses genoux. Il règne dans le Bal une atmosphère lugubre. Comme un enterrement où les esprits danseraient au-dessus de la tombe d'un cadavre encore frais, afin de célébrer l'arrivée d'un Alfar dans leurs rangs. L'ambiance le ramène à son enfance : à Onikareni, une troupe appelée Alouine montait son camp chaque année, et elle incluait une maison hantée enfouie sous une tente. Un frisson familier lui parcourt l'échine. Il jette un regard inquiet vers les fenêtres recouvertes, le privant de la lueur du crépuscule et le rendant vulnérable. Vingt ans plus tard, il craint toujours autant les ténèbres.

« Avez-vous peur du noir ? » Soudain, une voix le tire de ses observations. Wao se rend compte que Rubèn, qui lui intimait pourtant de le suivre, est parti de l'autre côté du buffet sans faire attention à lui. A la place, une grande femme se tient devant lui, un masque noir et doré cachant son visage. Il prend la forme d'une tête de corbeau, dont le bec surplombe son nez. Il aperçoit la ligne ronde de son menton et l'éclat rouge de son regard à travers le costume. Son buste est relevé et sa posture est droite, à la manière d'une danseuse. Mais c'est son regard qui subjugue Wao. Le rouge de ses pupilles envahit son champ de vision. Il ne voit plus qu'eux. L'image de cette dame est instantanément gravée dans sa rétine. Il est pris par l'envie de la peindre pour immortaliser sa beauté. « Je... euh... » Wao en a perdu ses mots.

Sa bouche reste ouverte, en suspens, comme s'il s'apprêtait à dire autre chose, mais aucun son n'en sort. L'inconnue sourit, visiblement ravie de l'effet qu'elle porte sur sa personne. « Vous avez raison. Un bel homme tel que vous pourrait être emporté par des créatures de la nuit, faites attention. » Un autre sourire énigmatique s'étire sur le coin de sa lèvre, mais son regard reste sérieux. Ses cheveux roux s'embrasent contre l'éclat des flammes des bougies alors qu'elle se tourne vers le buffet. Ils tombent comme des vagues de lave sur sa poitrine, et rebondissent quand elle se redresse, un verre à la main. « J'ai entendu dire que l'alcool chassait la peur. Tenez. »

*

Wao prend le verre machinalement, alors qu'il ne boit jamais d'alcool, et le porte à ses lèvres. Juste avant que le liquide ne touche ses lèvres, un soubresaut de raison lui permet de redresser la coupe de tentation pour l'éloigner de lui. Le geste béni lui fait retrouver ses sens. Soudain, la musique lui paraît plus vive. « Je... pardonnez-moi, je m'égare. Mon inquiétude est-elle si visible que cela ? Même sous ce masque ? » Lui demande-t-il en effectuant une arabesque avec sa main. Les yeux de la rousse, qui se sont attardés sur son verre, se replongent dans ses yeux. Aussitôt, le monde redevient flou autour de lui. Sa concentration se recentre sur elle. « Ce n'est pas cela, non... vous n'êtes pas si facile à lire. Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. » Cette dernière repose son verre sans le boire. « N'avez-vous pas peur du noir depuis votre tendre enfance ? »

L'éclat de sa surprise perce dans le regard de Wao. Cette dernière penche la tête sur le côté, comme pour étudier la réaction de son interlocuteur. Une mer rouge s'échoue sur sa joue de sable. Wao admire le mouvement de ses cheveux et perd le fil de la conversation, une fois de plus. Il ne dit rien pour la relancer. « J'ai visé juste, n'est-ce pas ? Vous seriez étonné de connaître l'étendue de mes pouvoirs... mais pas ce soir. Pas ici », poursuit-elle de sa voix douce. Une promesse de lendemain. C'est tout ce qu'il voulait. Elle a créé le besoin et l'a étanché aussi vite. Quels pigments pourraient faire honneur à sa chevelure ? Quelque chose à partir de safran, peut-être... serait-ce assez ? « Pourriez-vous... m'accorder cette danse ? » Wao tend son bras. Il a trouvé le courage grâce à la musique évanescente, qui laissera place à une nouvelle mélodie, mais s'immobilise à mi-chemin. Il est retenu par une peur irrationnelle : celle de souiller la peau de la rouge avec la sienne.

La distance est finalement écourtée par la rouge. Elle fait un pas vers lui et glisse sa main dans la sienne. Wao sursaute ; sa peau est froide comme celle d'un cadavre. Il est pris au dépourvu, mais n'esquisse aucun mouvement de recul. Etrangement, sa froideur ajoute à son charme envoûtant. La musique s'est arrêtée et l'orchestre amorce déjà la suivante, sur un tempo plus lent. « Suivez-moi », lui murmure Wao. Il a complètement oublié l'objectif premier de sa venue au bal. Seule sa satisfaction à elle importe. Il ajuste sa posture en même temps que sa cavalière. Le torse bombé, le bras soulevé au niveau de son épaule, il pose son autre bras dans le creux de sa hanche et amorce ses premiers pas sur le rythme de la musique. Son regard s'échappe vers ses cheveux ondulés. Alors que le couple tourne sur la piste, effectuant des pas typiques de la danse Alfar, il admire les mouvements graciles de ses cheveux sous ses impulsions. La tension dans son bras égale la sienne, nouant une connexion parfaite entre eux.

Soudain, Wao sent une douce impulsion dans sa main. La rouge lui intime de changer de pas pour la faire pivoter. Il s'exécute et la regarde tourner sur elle-même comme une ballerine. Elle termine son tour devant lui, sans le moindre déséquilibre. Sa grace ajoute à sa beauté. L'Orine ignore si ses mouvements sont embellis parce qu'il est subjugué par sa beauté ou si elle est juste une très bonne danseuse. Son jugement se noie dans un océan d'adoration. Il a l'impression que ce sentiment était déjà présent en lui, enfoui quelque part, et qu'il a surgi, réveillé dans toute sa splendeur par cette femme. La musique se termine à peine quelques secondes après son début, selon la perception de Wao. Il a perdu toute notion de temporalité. Quand les dernières notes résonnent dans la grande salle, la fumée à leurs pieds se teinte de rouge et remonte jusqu'à leur buste.

Puis, Wao sent ses pieds quitter le sol. Tous les danseurs sont soulevés par une force invisible. Les Alfars autour de lui ne semblent pas surpris : ils terminent leur danse dans un penché et posent, immobiles, pour les spectateurs curieux sur les côtés de la piste. Puis, la sensation de lévitation prend fin. Wao et sa cavalière se reposent sur le parquet. Son cœur s'est soulevé grâce à la sensation d'élévation, marquant le grand final. Pourtant, le couple ne quitte pas la piste. Wao fouille le regard de la cavalière à travers son masque et comprend qu'elle accepte de danser encore avec lui. Une chaleur se répand dans son corps, ravi d'avoir enchanté sa cavalière, et il réfléchit à le prochaine danse. Mais quelqu'un vient interrompre leur idylle : la voix de Rubèn s'immisce soudain dans son esprit. Wao ne peut s'empêcher de lever les yeux au ciel. *J'ai repéré l'écrivain dont je te parlais ! Passons à l'exécution de notre plan.* Le ton de Rubèn est autoritaire. Wao comprend que s'il l'ignore, l'Alfar ne se gênera pas pour venir interrompre sa danse, d'une manière ou d'une autre.

La rouge a remarqué son changement de comportement et s'est approchée de lui, tanguant discrètement d'un côté et de l'autre au rythme de la musique. « Que se passe-t-il ? » Lui murmure-t-elle. Wao plonge ses yeux dans les siens. *Elle est si proche... et qu'est-ce qu'elle sent bon.* Wao est dérouté et perd le fil de ses pensées. « Voulez-vous que nous sortions de la piste ? » L'Orine hoche simplement la tête et l'entraîne dans la direction de Rubèn. « Pardonnez-moi, je dois aller voir quelqu'un. » Un soupçon de déception traverse son regard, mais ce n'est rien comparé à celle de Wao. « Je vous remercie pour... enfin... merci, vous m'avez ravi. » L'Orine s'incline et, pris d'audace, appose ses lèvres sur le poignet de sa cavalière. Son cœur chavire quand la main froide de la rouge quitte la sienne. Elle s'éloigne, un sourire énigmatique ayant fleuri sous son masque. Rubèn s'approche de lui, ne jetant pas le moindre regard à son ancienne cavalière. Wao comprend que le fils de son promis est encore obnubilé par son travail. L'écrivain dont il parle est un artiste reclus, qui n'assiste que rarement à des événements sociaux. Rubèn veut en profiter pour obtenir un entretien, lui permettant de se racheter dans sa rédaction –et Wao doit jouer le catalyseur de la rencontre. Il soupire et cherche l'écrivain du regard.
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Dim 05 Fév 2023, 11:43



  Wao avance sur le côté de la piste. L'orchestre a commencé un air rapide ; la fumée s'est élevée un peu plus, gardant une teinte rouge comme le sang. Le macabre prend une nouvelle allure. Les danseurs se mêlent à des illusions de squelettes articulés. Certains Alfars dansent malicieusement autour d'eux. Mais Rubèn, près de la piste, ne s'amuse pas : il ne quitte pas Wao des yeux, observant attentivement son approche de l'écrivain. L'agacement revient obscurcir l'expression de l'Orine. Le manque de gratitude de Rubèn lui donne l'impression d'être traité comme un larbin. Fort heureusement, l'écrivain est seul. Il est près de l'escalier, son regard passant furtivement d'un côté à l'autre de la salle. Il repère très vite Wao, qui s'avance tout droit vers lui. L'Orine hésite à avancer. Pourquoi continue-t-il à obéir au fils de son promis ? En soi, ils ne devraient même pas être là. Wao sait pertinemment que Rubèn a menti à sa mère. Il est mis à pied par sa rédaction et n'est pas censé aller jouer au journaliste en herbe dans des soirées où, en plus, il pourrait tomber sur ses collègues.

Mais alors qu'il s'est perdu dans ses pensées, s'étant immobilisé et regardant vaguement la piste, un mouvement sur le côté attire son attention. Wao reconnaît l'écrivain, qui s'est approché à son tour.  « Êtes-vous si timide ? » Lui demande-t-il, employant un ton espiègle. Wao hésite à aborder le sujet de l'entretien. Son esprit est encore partiellement occupé par la rouge, qu'il a perdue de vue.  « J'attendais simplement votre consentement, sans vous déranger. Cela s'appelle la politesse », réplique-t-il en fouillant les recoins de la salle en recherche d'un éclat de feu. L'Alfar pouffe à côté de lui. Wao l'observe et se rend compte que son interlocuteur semble à peu près sympathique. Ce ne sera peut-être pas une corvée, finalement. Mais alors qu'il s'apprête à lui répondre, s'étant rapproché un peu plus de l'Orine, un cri éclate du côté du buffet. Wao suit le regard de l'artiste, qui fixe un endroit en plissant le nez, comme dérangé par une mauvaise odeur, et se retourne. Il frémit : à quelques mètres d'eux, Rubèn vient de tomber aux pieds de sa mère, qui n'a pas pris la peine de mettre un masque. A l'entrée, la personne chargée de l'accueil des invités semble désemparé. Il s'est immobilisé derrière l'intruse, l'air interdit.

« Je vous conseille de venir avec moi », lui glisse l'écrivain. Il épingle son tissu et le fait doucement reculer de quelques mètres. Wao le regarde, partagé entre l'envie de le suivre et le devoir de rejoindre la femme d'Eöl. « Un parfum de colère a été lâché par-là bas. Ça risque de faire des étincelles. »  Wao affiche un air inquiet. Comment ça, un parfum ? Pourquoi ? Par qui ? L'effet est, en tous cas, immédiat ; certains Alfars s'écartent de quelques pas et d'autres sirotent leur boisson en dévorant l'amorce du conflit des yeux. Rubèn se tient la joue ; Wao comprend que sa mère lui a asséné une baffe si forte qu'elle lui a décollé son masque. Il n'entend pas ce qu'ils se murmurent, mais l'animosité croît à chaque mot. Ils sont en train de faire une scène. Rubèn se lève d'un coup sec et tente de lui retourner sa baffe. Wao entend des exclamations de surprise s'élever dans la foule. Ça ne peut qu'être l'effet du parfum. Sa mère stoppe net son geste de violence et lui tord le bras. « Rentrons maintenant. Tout de suite. » Elle le tire par l'oreille et certains étouffent des rires sur leur passage.

« Ils me fatiguent », murmure Wao. L'Orine fait un pas en avant, dicté par son devoir. Il ne peut rester ici seul... mais soudain, la mère de Rubèn se retourne. Ses yeux se plongent dans les siens. Quelque chose dans son regard le retient. Il ressent sa jalousie percer à travers ses yeux noirs. Son cœur est aussi glacé que son âme. Et, soudain, Wao est pris par une envie de s'échapper. Il s'arrête et se retourne vers l'écrivain, mais il a disparu. Il remarque sa silhouette disparaître en haut de l'escalier. Il s'est déjà lassé de lui... Wao se retourne vers l'entrée. Les deux Alfars sont partis. Il est seul. L'Orine est à la fois grisée et inquiète. Une bataille fait rage dans son esprit. Il ne sait pas combien de temps il réfléchit, mais la musique se termine. Pour marquer un nouveau final, la fumée s'élève une nouvelle fois, encore plus haut. Soudain, elle obscurcit toute la vision de Wao Sur la piste, les danseurs s'élèvent jusqu'à la hauteur du balcon. Certains effectuent des figures. Il aperçoit vaguement les danseurs, mais les contours de leur silhouette se perd dans la fumée rougeâtre.

« Venez avec moi. » Une voix douce qu'il reconnaîtrait entre mille chante à son oreille. Sa muse est revenue. Elle lui prend la main ; cette fois, c'est elle qui mène la danse. Wao la suit à travers la fumée. Il ne voit pas où elle l'emporte, mais il se fiche complètement de la destination. Le vert de sa robe se mêle au rouge de la fumée. Le tissu forme des volutes autour de la brume macabre au rythme de ses pas pressés. Wao aperçoit des fantômes d'invités passer près d'eux. Ils apparaissent sous forme de masses puis s'évanouissent comme des spectres à la lumière du jour. Et soudain, la brume se dissipe. Un mur apparaît. La rouge ouvre une porte et la température chute. Elle l'a amenée dehors. Quand il passe le pas de la grande porte, Wao inspire une grande bouffée d'air. Il se sent libre et léger. Un sourire étire son visage et son cœur s'accélère. A côté de lui, la rouge se retourne et le regarde. Son sourire répond au sien, emplissant Wao d'une douce chaleur.

*

« Respirez. » Wao obéit. Ses poumons s'emplissent de l'air frais nocturne.  La rouge a retiré son masque et Wao fait de même. Il détaille son magnifique visage pendant quelques secondes, éclairé par les éclats sélénites. Ses traits paraissent étonnamment juvéniles, contrastant avec la maturité qui émane de son aura. L'étrange danseuse pose délicatement sa main contre son torse. Son corps et son esprit sont apaisés. « L'air de la forêt a des vertus régénératrices. » L'Orine se tourne vers les ombres qui ondulent au vent. Il ferme les yeux et pose sa main pardessus la sienne. C'est un geste non-prémédité, initié malgré lui. Il rouvre ses paupières et découvre un demi-sourire. « Pardonnez-moi, mes manières sont incorrectes. » Il s'apprête à retirer sa main, mais une pression froide l'en empêche : sa cavalière a stoppé son mouvement avec son autre main. « Ne vous excusez pas. Je ne m'en formaliserai pas. »

Wao lui adresse un sourire avec une chaleur qu'il a rarement démontrée à Drosera. Les choses semblent si simples avec elle. Une voix lui intime d'abattre ses barrières. Ce sentiment est si libérateur. Wao inspire une nouvelle fois. Les deux cavaliers se regardent en silence, appréciant le moment dans sa plénitude. « Vous avez des mains de pianiste. » Elle prend l'une de ses mains et détaille ses doigts du bout de ses ongles. Sa peau froide couplée à l'air frais le font frissonner. Il reprend possession de sa main et lui sourit, comme pour s'excuser une nouvelle fois. « Je prends des cours... » répondit-il humblement, touché.

Elle le fascine un peu plus à chaque mot prononcé. C'est comme si elle le connaissait depuis toujours. Il ignore encore à quel point il a raison. « Vous connaissez les orgues ? » La rouge remarque qu'il commence à avoir froid.  « Allons marcher. » Le duo descendit les marches jusqu'au jardin du bâtiment. C'est un jardin typiquement Alfar : il n'y a pas d'ordre visible. Et pourtant, dans les allées, Wao sent qu'il a été façonné par une main humaine. Les arbres ne sont pas taillés. Des mauvaises herbes tapissent les cailloux qui ont autrefois dessiné un chemin de promenade. C'est un chaos contrôlé. « Non, je ne crois pas. Qu'est-ce que c'est ? »

A mesure que le duo s'éloigne du bâtiment, le cœur de Wao s'allège. Pour un instant, ses angoisses s'envolent. Il se sent léger, libre, et en même temps, en sécurité aux côtés de l'inconnue. Soudain, une vérité le frappe : ils ne se sont même pas présentés. C'est la première fois qu'il oublie ainsi le protocole. « C'est un instrument fort singulier. Il est formé de plusieurs claviers et d'un large pédalier. C'est bien plus complexe que le piano, mais le son est inoubliable. En appuyant sur une touche, la corde libère de l'air dans un tuyau. C'est ainsi que la note résonne. » Wao est intrigué. Il a ralenti le pas et réfléchit. « Quelle ingénuité ! Je me demande à quoi ça ressemble... » la rouge hoche la tête. Dans la nuit, ses yeux brillent d'un éclat qui lui rappelle celui des félins. Dans cette configuration, elle lui paraît à moitié humaine, à moitié sauvage. C'est étrangement en décalage avec son comportement.

« Une mélodie d'orgue peut créer un morceau à elle seule. Il est possible de faire une formule de contrepoints rigoureux avec vos deux mains et vos deux pieds. Le son est incomparable à n'importe quel autre cuivre ou instrument à vent... c'est indescriptible. » La passion déborde de ses lèvres.  « Vous devriez venir écouter un jour. Cela se joue dans des temples, pour leur acoustique. » Une flamme d'enfant brille dans les yeux de Wao. Il s'imagine le son que cela pourrait représenter. « J'en serai ravi... Madame...? » Elle semble soudainement frappée de la même constatation que lui une minute plus tôt. « Par la Lune ! ...où ai-je donc la tête, ce soir ? Vous me rendez toute chose. » Le cœur de Wao s'envole. Néanmoins, il ne s'autorise pas à relever la flatterie. C'est un terrain dangereux sur lequel il ne s'aventurera pas.  « Eleanor de la Bruie. » Wao cligne des yeux. Ce nom fait écho à un coin enfoui de son esprit. Quelque part... mais il ne parvient pas à mettre le doigt dessus. Elle est peut-être célèbre. « Eleanor... je suis très heureux de faire votre connaissance ce soir. » Il s'incline et lui adresse un sourire entier.  

« Je me nomme Wao Ming, d'Onikareni. » Il hésite à prononcer sa seconde phrase. Pourquoi ? Pourquoi devrait-il se sentir interdit ? Il doit lutter contre cette pulsion d'une origine inconnue. « Je suis une Orine promise à Eöl Lièn, de Drosera. » Une ombre passe dans le regard de la rouge. Il ne sait plus s'il l'invente ou non. Il est pris d'effroi à l'idée que leur entretien pourrait se terminer ainsi. Et c'est ce qu'il se produit finalement. « Promis ? ...cela signifie que vous comptez vous Lier à lui, mais pas encore... comme des fiançailles ? » Il hoche la tête, détournant le regard. Pourquoi est-ce si difficile ? « C'est bien cela. » Son souvenir de leur premier baiser lui revient à l'esprit. Il l'emplit de nostalgie. « Que se passe-t-il, Wao ? Votre vie ici ne se déroule pas comme vous le vouliez ? »

Wao serre les dents. Il n'arrive pas à mentir, mais résiste à l'envie de dire du mal de son Aisuru à une inconnue.  « ...était-ce cet Alfar qui a été mis dehors par sa mère dans le scandale de tout à l'heure ? » Wao secoue la tête. Elle remarque son trouble et s'immobilise. « Je ne vous forcerai pas à vous plonger dans vos peines. » Elle sort quelque chose de son corset et lui pose dans le creux de la main.  « Ce moment passé avec vous a été délicieux. » Il se retourne vivement vers elle et la retient du regard. Mais sa décision est déjà prise. « Si l'envie vous prends de venir m'écouter jouer, humez cette fleur. Elle vous y transportera avec aise. » Ses derniers mots ont été murmurés près de lui, scellant comme une promesse secrète. Elle ne lui laisse pas le temps de répondre. Elle lui saisit le menton et le relève vers elle, le forçant à la regarder droit dans les yeux. Wao s'y perd. Sa conscience lui échappe. « Au revoir, Wao Ming. » Elle recule et disparaît dans l'ombre telle une chimère.

Mots: +2000
FIN
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