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Latone
~ Orisha ~ Niveau I ~

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Latone
Ven 31 Juil 2020, 00:42




Léto sourit. Le Bicorne souffla du museau. Les Réprouvés lui servaient un défi intéressant, une sorte d'échauffement avant de passer au plat de résistance. Bien évidemment, en tant que guerrière émérite, elle était davantage intéressée par les duels amicaux, dont elle se fera un plaisir d'y participer allégrement. Malgré tout, s'essayer au rodéo titillait sa curiosité. Elle avait entendu dire que même Erza avait du mal à dompter ce genre de bestiole. La Chamane pencha la tête sur le côté, sans quitter des yeux la bête qui la fixait avec une colère aussi palpable que les formes d'Aylimr. L'Île Maudite s'avérait point radine en monstruosités de toutes formes et de toutes tailles ; surtout depuis que Devaraj s'était expérimenté à un singulier élevage. Malgré tout, les monstres n'intéressaient guère la Souriante, elle préférait davantage se mesurer à la force d'un Homme. Souw dans l'âme, affronter ses Némésis lui paraissait plus gratifiant. Elle laissait volontiers la chasse primitive aux Mior. Le peuple des Zaahin la faisait s'aventurer sur des sentiers bien étranges : ce n'était pas si mal de quitter sa zone de confort de temps en temps.

Encouragée par les adeptes d'Edmund'Faasnu, la Chamane s'approcha de la bête qu'on calmait un tant soit peu pour lui ouvrir la voie jusqu'à son dos. D'emblée, Léto fut impressionnée par la résistance du Bicorne ! Étant donné sa propre masse musculaire, elle faisait généralement l'impasse sur les montures. Elle n'était assurée de rester en selle qu'à dos de mammouth ou de grands dragons. Certes, le Bicorne se présentait plus imposant qu'un simple cheval, mais cela n'enleva en rien ses honneurs. Les Dyadiques n'attendirent aucunement son aval pour lancer les hostilités, Léto s'agrippa aussitôt au garrot lorsque l'animal reçut sa fessée sur la croupe. Il bougeait dans tous les sens, s'énivrant dans un jeu de sabots où le moindre malchanceux ravalerait l'entièreté de sa denture s'il se présentait sur son passage. La Chamane sut que ce ne serait pas une bonne idée de rester droite étant donné son agitation, alors elle se coucha sur lui, plus en avant, afin de lui faire subir plus encore son poids. La bête redoublait de férocité et tenta de la faucher contre un arbre sur le chemin, sous la clameur et l'hilarité des Réprouvés. Se refusant de blesser l'animal malgré lui, Léto se laissa glisser à terre pour éviter le choc et admit sa défaite. On l'applaudit et se moqua à la fois, typiquement Réprouvé. Elle reprit son souffle en guise de contrecoup de l'adrénaline, ce n'était fichtrement pas simple de maîtriser ces Bicornes.


" On m'a promis des duels ! " Réclama-t-elle au même moment où on l'aida à se relever. Elle était impatiente.

Sur le ring, Léto se montra assez étonnée. Les Réprouvés de Stenfek semblaient avoir une approche différente de la compétition, cela la changeait de l'arène de Lumnaar'Yuvon, ou encore du peu qu'elle ait vu de Gona'Halv ; elle devrait passer plus de temps là-bas d'ailleurs, rien que pour enrichir ses connaissances et son expérience. Quoi qu'il en soit, même si la brutalité gardait une place significative, il semblait avoir moins de sauvageries. Ici, on se battait à mains nues ou avec des armes factices. Toujours aussi étonnant. Mais pas moins un obstacle pour la guerrière qui s'apprêtait à en découdre.

L'un des combattants avait grandement insisté pour passer le premier. De ses dires, il fut témoin de sa Coupe des Nations à Bouton d'Or, l'un de ceux qui scandèrent son nom lorsque le Faas'Bahlok fut décapité par ses soins et sa passion. Il avait beaucoup ri à sa déclaration d'amour pour leur Reine, à croire que les folles pullulaient un peu partout, même en dehors de Stenfek. Quoi qu'il en soit, le Réprouvé souhaitait, depuis, se mesurer à la fameuse Chamane. À mains nues pour cette fois. Il voulait sentir sa force, effleurer sa sueur, peut-être bien, avec l'aval des Zaahin, la chevaucher dans un coin plus loin. Elle était diablement impressionnante.


" Alok yu na throu ! (Lève-toi et combats !) " Répéta-t-il en écho à l'épreuve de Léto, ceci arracha un charmant sourire de sa part.

" Alok yu na throu. " Imita-t-elle avec un accent plutôt maladroit. Le Zul'dov, ce n'était pas encore dans ses gênes.

L'arbitre volontaire signa le début des hostilités et le Réprouvé se jeta sur elle, prêt à l'agripper. Léto lui colla son poing dans le thorax et il recracha toute son ardeur avant de se tordre de douleurs à terre. Trop d'ouverture, trop de précipitation. Ce fut un jeu d'enfant pour la Chamane, même trop enfantin. Elle exigea immédiatement un autre duel.

Ce fut une femme qui se présenta pour la suite. D'un coup d'œil, Léto savait qu'elle devrait bien s'amuser avec elle. Ses muscles saillants et sa tenue laissèrent penser à une native de Bouton d'Or, sûrement toute l'énergie dépensée dans les activités agricoles l'avait renforcée. La Réprouvée souhaita se battre avec une arme, ce à quoi Léto céda naturellement. Son adversaire choisit une sorte de long bâton bien solide, tandis que prit un ensemble épée plus bouclier. Il fallait dire qu'elle ne maîtrisait pas totalement les techniques défensives, surtout qu'on lui avait offert un bouclier. Ce serait l'occasion de confirmer ses quelques notions. La Réprouvée fit tournoyer son bâton autour d'elle avec une aisance monstrueuse. Après cette "danse", elle fit un geste de la main pour inviter la Chamane à s'adonner au duel. Au moins, elle amusait la galerie ou cherchait à impressionner son adversaire du moment. Léto ne se laissa pas abattre et frappa le manche de l'épée en bois contre le bouclier, deux fois de suite, en guise de réponse.

Les deux guerrières se jaugèrent pour le début. La Bipolaire se déplaçait vite le long du cercle de combat, une main ferme sur son arme et l'autre en avant. Son jeu de jambes était contrôlé, la blonde ne se confrontait donc pas à n'importe quelle péquenaude. Pour sa part, une position classique de bouclier bien avant et épée en arrière, tout en gardant une distance sécuritaire avec l'autre. Impatients, les spectateurs les enjoignirent à juste se foutre sur la tronche. Léto pensait que ce serait justement le sang bouillonnant de Lumnaar'Yuvon qui céderait en premier, pourtant la Réprouvée continuait de la narguer. Tant pis, la Hǫfðingi ne chercha pas à alléger le mystère et se contenta de charger avec son bouclier. L'adversaire esquiva sur le côté, tant en frappant sur le bois de l'écu. Léto put ainsi évaluer sa force et ajuster son assaut. La Réprouvée l'attaqua par derrière, en direction de ses jambes. La Chamane ne fut pas assez rapide pour contrer le coup et annihila la douleur pour parer la seconde attaque avec son épée. Elle se retourna pleinement et vit arriver l'estoc en pleine face. Par réflexe, Léto releva le bouclier plus haut et encaissa l'attaque. La Souriante ne laissa pas filer cette occasion et poussa avec la protection pour ébranler son agressivité. Elle esquissa un pas en avant afin de frapper l'épée contre le bâton, puis poussa avec son pied pour se propulser en avant lui faire goûter le flanc du bouclier. La Réprouvée entreprit alors une roulade afin d'esquiver parfaitement le coup. Léto se retourna vers elle alors qu'elle se releva.


" Bien essayé ! " La Sùlfr aurait dû s'en douter : le peuple des Deux Rives connaissait bien ce genre de tactiques.

La Chamane se remit en garde, tout comme l'autre guerrière. Puisque la ruse ne fonctionnait pas, Léto opta pour une charge pure et simple. Les deux battantes s'échangèrent les coups – sans arriver à se toucher – dans un ballet de fracas. À force de se perdre dans cette furie mutuelle, elles pourraient finir par produire du feu. Les témoins de ce splendide duel hurlèrent comme des damnés, certains semblaient être prêts à vouloir retourner à l'Odon Do Dur. Par un coup bien placé, la duelliste parvint à désarmer Léto, son épée valdinguant plus loin. La Chamane ne se laissa pas pour autant abattre et prit le bouclier d'une main, s'en servant à présent pour frapper. La Reine prit le dessus par la force des choses et, d'une attaque bien efficace, elle détruisit en deux le bâton avec son égide, la faisant renverser au passage. La Sùlfr souleva le bouclier bien au-dessus de sa tête en ultime menace, ce qui signa sa victoire.

Avec ce combat, la Chamane se sentait suffisamment échauffer pour repartir en guerre. En plus, la perdante avait à peine eu le temps de quitter le ring qu'un autre balourd se présentât. Décidemment, ils allaient se succéder à cette allure et Léto pourrait bien diviser la population de Stenfek par deux ! Le Réprouvé – encore – semblait plonger dans le vice démoniaque, cela se voyait dans son regard. Il voulait la buter ou la baiser, difficile à dire. En tout cas, il était aussi grand qu'elle, si ce n'était plus. Cela motiva la Sùlfr à laisser cet individu plonger dans sa frénésie. Il ne se contentait guère des modalités et chercha simplement à lui fracasser la tête contre le sol. Léto évita son coup de poing et sut, avec la pression exercée, qu'il rivaliserait bien avec elle sur ce domaine. Toutefois, la force ne faisait pas tout. Elle était bien placée pour le savoir.

Féline, Léto put se glisser entre ses attaques pour le frapper à son tour. Il ne semblait pas broncher à chacun de ses assauts, ce qui en soi n'était qu'illusion. La Hǫfðingi connaissait beaucoup trop bien la souffrance pour ne pas la capter. Parfois, ses propres esquives rataient, il cognait fort et juste. Le sang coulait de ses lèvres, c'en était que plus palpitant. Plus il réussissait à l'atteindre, plus elle redoublait d'effort pour fatiguer ses muscles. Abdomen, thorax, gueule, couilles, tout y passait pour qu'il abandonnât enfin son stoïcisme. Lorsqu'elle vit dessiner l'occasion d'asséner le coup de grâce, Léto insuffla le reste de sa Force dans ce poing et embrassa sa joue ainsi. Le colosse valsa jusqu'à la rambarde où il s'embourba jusqu'à glisser de l'autre côté. Les doigts de la victorieuse semblaient fumer tant ils la brûlaient. Elle souffla enfin ; ce n'étaient pas si mal ces combats !


" Edmund'Faasnu ! Bravo ! L'applaudit l'un des Réprouvés, encore plus fort que les autres. La Chamane vit une pile de gens, natifs comme étrangers, voulant aussi échanger poings et pieds avec elle ; néanmoins, l'heure était pour elle de s'adonner à d'autres activités. Peut-être plus tard, un autre jour. Edmund'Faasnu. Insista la personne en s'approchant d'elle, lorsqu'elle s'éloigna suffisamment de l'agitation des combats. Tu es respectée parmi notre peuple, admirée pour ton courage et ton implication auprès de… Il mesura ses propos, on ne savait point, à vrai dire, si Léto se battait davantage pour eux ou pour une unique idole. Ton avis compte pour nous, pourrais-tu discourir sur l'estrade ? " Il semblait désespéré. Un habitant de Stenfek qui suivait avec attention l'évolution du débat.

Léto ne répondit pas tout de suite, ses yeux s'égarant sur le sol, pensive. Il était vrai qu'elle avait expressément encourager des Chamans à s'aventurer ici. D'une part pour satisfaire la curiosité des tribus nomades – notamment Aylimr et Mior – puis d'autre part pour endurcir leurs jeunes Chamans sur territoire étranger. Il lui semblait avoir vu un jeune garçon faire des siennes d'ailleurs, elle aurait bien aimé en savoir plus. Toutefois, Léto ne se présentait pas ici en tant que Reine des Chamans, mais en tant qu'amie du peuple Réprouvé. Oui, la question de l'indépendance soulevait moultes discussions et inquiétudes. De toute manière, les Chamans ne se positionneraient pas. Mais elle, en tant qu'individue choisie pour la Coupe des Nations, choisie pour l'Odon Do Dur, choisie pour transporter sa passion jusqu'en ces terres, elle pouvait être légitime. Les Ætheri devraient la guider, les consulter ne serait pas de refus tant cette histoire la dépassait…

Était-ce ainsi ? Serait-ce son châtiment pour toujours ? Léto était une Élue et ses Ætheri ne faisaient absolument rien pour la prémunir de ce dissident. Ils persistaient dans leur mutisme alors que la nature même des Zaahin la troublait autant qu'elle l'intriguait. Le Silence demeurait une chimère dans l'exercice de ses fonctions. À moins qu'il représentât le signe ultime, celui qui lui donnait toutes les cartes en main ? Ils devraient le savoir pourtant : Léto n'agirait pas en tant que Hǫfðingi, les Chamans se contrefichaient de la politique externe. Le parallèle avec son peuple ne serait qu'impromptue. Les tribus étaient aussi indépendantes qu'unies sous le joug des Ætheri. Est-ce que les Réprouvés pouvaient en dire autant ? La Sùlfr pourrait se rappeler d'Aylimr, qui cherchait à coloniser la Terre d'Edel avec sa fameuse capitale, sa pyramide où trônait – elle devait vraiment vérifier cette rumeur – un bain d'or à son sommet. Atthirari n'était pas Aylimr. Rien ne garantissait qu'il se comportera comme elle. S'il cherchait la paix par la scission, soit, il devra en payer les conséquences. Alors, au final, ce devait être sûrement ce que penserait Edmund'Faasnu.

Le bois de l'estrade craqua, plus qu'il ne le devrait. Son arrivée ne laissa personne indifférent, tant elle rayonnait de prestance. Une main sur la hanche, l'autre sur le fourreau, ses yeux bicolores fixèrent l'assemblée qui, très intriguée, s'agglutinait sous son regard. Les Esprits d'anciens Réprouvés, aussi, flottaient un peu partout dans la foule afin d'écouter son discours.


" En tant qu'Edmund'Faasnu, voici mon avis. Une longue pause s'ensuivit : elle n'en avait fichtrement aucune idée. Le Silence ne l'aidait pas à se calibrer avec ses propres réflexions. Alors, perdu pour perdu, elle laissa le hasard pur et dur porter ses mots. Apprenez à vivre ensemble, comme toute communauté qui se respecte. Sinon, vous serez simplement… dévorés. Il vaut mieux que ce soit les vôtres qui abrègent vos souffrances plutôt qu'être renversé par vos ennemis. Une pensée fugace la traversa : elle renverserait bien Erza, mais pas pour les mêmes raisons. Je ne laisserai pas mon propre enfant battre des ailes si je sais qu'il sera incapable de voler. Et vous, Stenfek, à partir du moment où Bouton d'Or n'aura plus de compte à vous rendre, vous serez seuls et vous mourrez. Atthirari possédait des plans, elle le savait. Rien ne l'obligeait pourtant à le soutenir à l'heure actuelle. Cet homme l'intéressait, pour être devenu le symbole de l'indépendance aussi rapidement. En outre, un égal de la Reine. Acharnez-vous à trouver des accords entre vous, avant de vous tourner vers votre potentiel trépas. Skol (Santé) ! "


2555 mots ~
+6 contre l'indépendance (Charisme 50 + Participante Odon Do Dur)
Candidate pour Thogii'Kendov (~ 1311 mots)
La partie "invisible" est sous Silence



By Jil ♪
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Kaahl Paiberym
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Kaahl Paiberym
Ven 31 Juil 2020, 16:30



La tête penchée en arrière, j’essayais de me détendre, en me laissant porté par les caresses du Déchu. Pourtant, tout ceci déplaisait à mon côté angélique. Je ravalais mes râles. Je voulais rester stoïque parce que je ressentais une forme de honte. Je pensais à Laëth et à sa réaction si elle en venait à savoir que d’autres lèvres que les siennes parcouraient ma peau. Et Adam était un Déchu. Il faisait ça avec tout le monde. Je serrai les dents, les veines sur mes tempes gonflant sous le coup d’une colère soudaine. Je baissai les yeux vers lui, furieux. « Arrête ça. Tu me dégoûtes ! » Un rictus déforma mes lèvres. « C’est de ta faute si elle va souffrir ! Je te déteste. Je veux que tu meures ! » lui envoyai-je, suivi de quelques insultes en Réprouvé qui ne firent qu'accentuer mon aveuglement. Lorsque je me rendis compte des conséquences de mes actes, je lui avais envoyé deux coups de poing, le dernier moins puissant que le premier. Je pris violemment mon front dans ma main. J’avais envie de pleurer. Je me sentais mal et me rendais compte que placer la Couronne du Milieu sur ma tête pour nos ébats n’était pas une bonne idée. Il l’avait souhaité mais ma propre instabilité m’agrippait par vague. J’étais incapable de me défaire de mes pensées. Je l’aimais puis le haïssais tout en l'aimant plus que tout. Je l’aimais à le vouloir mort. Je l’aimais jusqu’à avoir envie de le frapper pour ancrer ma peau dans la sienne, pour qu’il gardât des marques de mon amour et que le monde s’en aperçût. Je voulais l’enchaîner afin de pouvoir le caresser à jamais et qu’il ne me quittât pas. Pourtant, cet amour me dérangeait car il entrait en contradiction avec d’autres sentiments que je nourrissais à l’égard de quelqu’un d’autre. Lorsque le Bien devenait plus fort que le Mal, je me rendais compte de la souffrance qui résulterait de cette situation. J’étais égoïste parce que j’aurais voulu que cela durât pour l’éternité. Mes amours étaient purs mais ma façon de les vivre était cerclée de vices. Je ne répondis pas à son commentaire. Il avait raison, je méritais qu’il me frappât. J’en avais presque envie, pour me punir, pour… tout.

Je fus tiré de mes ruminations par sa poigne dans mes cheveux. Mes yeux rencontrèrent les siens. Ça me tira à flot. Mon état n’était même pas la faute de Lux in Tenebris. Je ne savais pas ce qu’il me prenait mais depuis quelques temps, je tombais dans une agonie de plus en plus prononcée et les mots de la femme que j’avais torturée sur Lagherta ne cessaient de me revenir. « Ils te changeront si tu ne les vénères pas. Et tu perdras. Tu perdras tout ce en quoi tu crois, tout ce que tu chéris, tu perdras ta détermination, ta chaleur et ton âme sera plongée dans des tourments inenvisageable pour ton esprit étriqué. Tu es déjà perdu. Ils t’ont maudit au moment même où tu as tué sur cet… » Elle n’avait pas eu le temps de terminer. « D’accord. » soufflai-je, en reprenant une position plus confortable. J'expirai un coup, laissant sa main me caresser. « J’ai trouvé ça dommage que tu ne sois pas avec moi quand je l’ai lue parce que… » Sa langue me coupa net dans mes explications. Bordel.


« C’est bien. Ça veut dire qu'ils te font confiance. » répondis-je tranquillement, en le fixant. Mon état s’était légèrement stabilisé, ce qui me permettait de réfléchir plus aisément. Pour le moment, les effets de la Couronne ne semblaient pas se faire ressentir. J’étais un Réprouvé. Je ne ressentais ni vertige, ni nausée, ni rien de cet ordre. Mon corps était peut-être en train de s’habituer à l’utilisation de ces artefacts. « Et ça te préoccupe ? » Il m’amusait. Il était capable de le faire. Plus le temps passait et plus j’avais l’impression qu’il avait peur de décevoir et que c’était, en grande partie, la raison pour laquelle il ne tentait presque rien. Néanmoins, il changeait. Je souris, pris d’une vague amoureuse que j’essayai de stopper. Elle était trop violente, à m’en rendre émotif plus que nécessaire. Mes sentiments devenaient problématiques et ma magie était en berne. Elle était là mais je n’avais juste pas envie de l’utiliser. Peut-être était-ce là l’effet de la Couronne ? « Je suis sûr que tu pourrais raconter n’importe quoi, tout en finissant par donner ton avis, que les gens suivraient sans broncher. » Il ne s’en rendait pas compte ou, du moins, le prenait avec beaucoup de désintérêt et de légèreté, mais il dégageait quelque chose qu'il était difficile d'ignorer. Il m’envoûtait presque. Il devenait dangereux, en possession d’une force qu’il ignorait lui-même avoir. Il était trop… Je ris doucement. Paradoxalement, il semblait presque trop pur. N’importe quel Sorcier se serait empressé d’utiliser ces atouts pour arriver à ses fins. Lui se contentait d’exister et de s’acclimater. Il contournait les obstacles sans les briser. Il prévenait avant de sévir.  

Quand il changea de sujet, je fis claquer ma langue contre mon palais. « Oui, elle va venir. » Je n’avais rien dit à Laëth concernant ma présence à Stenfek. « Aussi. J’ai mis quelques spécialistes sur ce phénomène, pour essayer de le comprendre. C’est assez inattendu, comme le sang qui s’est répandu soudainement partout. » Sauf que pour ce dernier phénomène, j’avais une réponse. Les Esprits étaient bavards. Le Parasite qui me suivait par le passé avait cessé de le faire ou il restait silencieux, je l’ignorais. Depuis, d’autres venaient me tourner autour. Je ne les voyais pas mais j’entendais leurs dires. « En tout cas, c’est une bonne nouvelle pour les Réprouvés qu’ils puissent se reproduire de nouveau. » Ma position sur la question était floue. J’étais partagé. Je le serais de plus en plus. Peut-être était-ce ça, le Chaos ? Placer à la tête des Mages Noirs un homme incapable de déterminer avec précision quelle voie choisir. J’avais peur de bifurquer, de m’enfoncer sur un chemin avant de faire demi-tour pour en emprunter un autre. Le Chaos était un état de confusion généralisée en plus de revêtir le visage de la destruction, de la ruine et du désordre. Celui qui régnait de plus en plus dans mon esprit s’abattrait inévitablement sur l’extérieur. Je souris, sentant la partie démoniaque de mon être se réveiller à ce constat.

Je sortis de mes pensées à sa question. Mon sourire s’agrandit. Je me levai de table après avoir essuyé mes lèvres et me dirigeai vers lui. Ma main se referma sur le dossier de la chaise et je la tirai en arrière. L’une de mes jambes passa au-dessus de lui. Je ne m’assis pas sur ses genoux et me contentai de le regarder de haut. « Essaye. »  


« Raa ! » finis-je par lâcher, en mordant la poussière sous l’œil semblant moqueur du Bicorne. Sale bête. J’avais tenu longtemps, sous les acclamations d’une foule toujours plus nombreuse. Si chaque Réprouvé avait combattu lors d’Odon do Dur, certains s’étaient plus illustrés que d’autres. J’en faisais partie. Les étrangers étaient également surveillés de près, surveillés et respectés par le peuple des Bipolaires. C’était rare. Me concernant, quoi que je fisse, mon prénom était sujet à quelques plaisanteries. J’avais fini par m’y accoutumer. Depuis que j’étais à Stenfek, l’on me reconnaissait sans peine et mon regard clair suffisait à faire taire les Bipolaires. Ils étaient moins téméraires dans la cité qu’à Lumnaar’Yuvon. L’inconscience de ces derniers était légendaire mais elle n’était pas à remettre en cause. Bouton d’Or fonctionnait comme une ruche. Il suffisait à un étranger de frapper légèrement dedans pour mourir sous les assauts de tous. J’avais entendu dire que l’Edmund’Faasnu était présente. Elle ne passait pas inaperçue et avait une tendance de plus en plus marquée à se tenir dans les mêmes lieux et places que moi. J’allais finir par lui demander si elle ne me surveillait pas, par hasard. La question ne pourrait être prise que comme de l’humour. Lorsqu’on pouvait communiquer avec les Esprits, il devenait inutile de suivre qui que ce fût. Elle et moi avions quelques projets communs.

Alors que je me relevais, mes yeux tombèrent sur la silhouette de Laëth. Elle était de dos mais je la reconnus sans peine. Elle s’éloignait de l’endroit où je me trouvais. Je souris et lui emboîtai le pas discrètement. Je voulais être sûr qu’elle fût seule. J’étudiai un peu les rues, les allées et la position des habitations. Certaines comportaient une cour commune, séparée de la route par une arche. Je fis apparaître le bracelet qu’elle m’avait offert à mon poignet, tout en continuant de marcher, en regardant ici et là, comme n’importe quel individu se promenant dans les rues en pleines festivités. De temps en temps, mes yeux se posaient sur son haut émeraude et descendaient sur ses fesses. Le Réprouvé était peut-être légèrement moins à cheval sur le respect. Je ne le connaissais pas encore très bien.

Quand le moment fut le bon, mes pas se firent plus rapides. Je la rejoignis, lui pris la main rapidement et l’entraînai à l’abri des regards indiscrets, dans un renfoncement en pierres, sous une arche. Je la fis toucher le mur et la regardai. J’étais plus grand et totalement différent. Je montai mon poignet à la hauteur de ses yeux afin qu’elle prît connaissance du bracelet. « C’est moi. » lui chuchotai-je. Mon autre main avait rejoint sa taille. Je me courbai pour que nos deux visages fussent face à face. « Tu viens défendre l’indépendance au nom des Anges ? » demandai-je. Je me questionnais sur ses motivations. En tant qu’ancienne enfant de Lumnaar’Yuvon, je l’aurais plutôt vue faire l’inverse. Cependant, je ne savais pas ce qu’elle s’apprêtait à faire. Tout ce que je savais c’est que j’avais envie de l’embrasser. Mon pouce trouva un chemin jusqu’à son menton que je remontai légèrement. « Embrasse-moi. » lui dis-je. « S’il te plaît. » ajoutai-je. Il fallait être poli dans la vie, sous peine de se prendre un coup de genou mal placé.

Lorsqu’elle l’eut fait, je souris contre sa bouche. « Un peu trop je crois… » murmurai-je, pour répondre à sa tirade sur ma ressemblance avec un Réprouvé. Elle avait raison. Ma main s’était peut-être légèrement faufilée là où il ne fallait pas. « La diplomatie, hein ? » la questionnai-je, l’air de rien. Je savais que personne ne nous observait, pas là où nous étions placés. Il aurait fallu que quelqu’un souhaitât entrer dans l’une des maisons présentes dans la cour ou en sortir pour qu’il tombât nez-à-nez avec nous. « Dis m’en plus, ça m’intéresse. » Pas du tout, pas tout de suite en tout cas. Je voulais juste la retenir contre moi le temps que mes doigts trouvent un rythme adéquat, un rythme qui la satisferait.


Avec force, je pris appui sur mes plantes de pieds. Mon corps se propulsa à vive allure contre celui de mon adversaire. Mes bras entourèrent sa taille et je calai son ventre contre l’une de mes épaules pour le renverser. Ça marcha parfaitement. Quelques minutes plus tard, j’avais gagné le duel. Ma main se tendit en direction du perdant, afin de l’aider à se redresser. Je n’étais pas dupe. S’il essayait de me tromper en profitant de ma gentillesse pour me ramener au sol, j’allais lui faire avaler ses dents une à une. Je transpirais. « Une bière ? » me proposa-t-il, à bout de souffle. « Allez. » répondis-je, en attrapant mon haut. Je le posai sur mes épaules et sortis de la zone de combat pour rejoindre, avec lui, une taverne en extérieur. Nous nous assîmes sur une table après avoir commandé. La conversation en Zul’Dov me posait encore quelques difficultés mais j’avais pris soin de justifier mes lacunes. Je n’étais pas familier avec tous les mots, même si j’apprenais vite. « Alors, t’es pour ou contre l’indépendance ? » « Difficile à dire. Je n’ai pas d’avis vraiment tranché. » « Ce qui est souvent tranchée, chez ceux qui n’ont pas d’avis, c'est leur tête. » dit-il en me lançant un regard carnassier. « Transpercée des deux côtés, c’est ça ? » « Ouais. » Les agents diplomatiques sorciers avaient fait leur travail. J’avais été écouter leurs discours. Je n’aurais pas aimé être à leur place. Stenfek et Lumnaar’Yuvon n’avaient pas grand-chose en commun mais leur haine pour les Mages Noirs persistait malgré le temps qui passait. C’était un risque conséquent pour moi de me promener en territoire ennemi. Je le prenais parce que j’étais le seul à pouvoir ôter la Couronne du Milieu de ma tête. Je n’étais plus un Sorcier. J’étais un Réprouvé. « Tu devrais y réfléchir et aller dire ce que tu penses. » Ou m’abstenir, pour éviter d’aller potentiellement à l’encontre de mes propres directives. En tant qu’Empereur Noir, bien sûr que j’étais convaincu qu’une séparation serait préférable, pour mes intérêts personnels. En tant que Magicien, la pensée était à peu près la même. Si les Mages Blancs aidaient les Bipolaires durant la transition, ça me permettrait d’agir sur celle-ci. Néanmoins, le Réprouvé en moi n’était pas forcément convaincu. J’étais partagé par ses idées contraires. Pourtant, j’avais conscience que ce serait la solution la plus adéquate. Je ne pouvais, en effet, pas passer mon temps à Lumnaar’Yuvon et je n’arriverais probablement pas à expliquer mes absences à chaque fois, des absences longues. Alors que si j’arrivais à travailler sur cette scission en tant que Kaaz’Zin, je pourrais également faire en sorte d’être envoyé à Stenfek par les Mages Blancs. Ne me resterait plus qu’à gérer le trône noir. J’avais mal joué mes cartes. Il aurait mieux valu que je reprisse l’apparence de Kaahl pour Odon do Dur. À présent que mon identité réprouvée était célèbre, je ne pouvais plus m’en défaire si simplement, à moins de provoquer un faux assassinat. Cette erreur stratégique était regrettable, non mortelle mais délicate à gérer.

Finalement, je me déplaçai jusqu’à l’estrade. Le Réprouvé qui m’habitait n’était pas bavard. Il préférait l’action. La bière, néanmoins, déliait les langues et encourageait les cœurs. « Depuis toujours, le peuple des Réprouvés est un peuple fier. Nous avons connu des moments plus difficiles que d’autres, surtout à cause de ces putains de Sorciers. » dis-je, en pointant de la main mes propres agents diplomatiques. Mes paroles furent suivies du déchainement de la foule qui les hua sans vergogne. « Mais, franchement, après avoir vécu la destruction de Lumnaar’Yuvon, qui nourrissait déjà tout le monde à l’époque et y avoir survécu, je pense que l’indépendance de la capitale n’est rien à côté. Le peuple survivra quoi qu’il se passe parce que nous sommes forts. Nous avons dans notre code génétique le meilleur des Anges et le meilleur des Démons. Si vous avez envie de vous barrer, allez-y. De toute façon, à Lumnaar’Yuvon, on en a marre de voir votre gueule. » ajoutai-je, avec un sourire carnassier mais des yeux rieurs. Je plaisantais. « Mais bon, tout le monde sait qu’on va devoir se supporter encore longtemps. On vit dans le même coin. » Je fixai la foule. « On connait tous la force du travail et on ne pourra jamais se renier mutuellement totalement. Il arrivera bien un moment où il faudra s’unir pour botter le cul des Goleds ou un moment où ces connards… » Je repointai les Sorciers. « … penseront qu’ils peuvent nous envahir encore. Ce jour-là, on prendra nos fourches et on les leur plantera dans l’estomac. Ce jour-là, on prendra nos marteaux et on leur écrasera leur crâne de serpents. » Mes lèvres se retroussèrent afin de menacer les Mages Noirs. « En attendant, séparons-nous mais séparons-nous bien ! Veillons à pouvoir toujours croiser le fer ensemble ! Veillons à pouvoir toujours combattre nos ennemis ensemble ! Et, surtout, veillons à pouvoir encore nous enivrer, baiser et prier les Zaahin ensemble ! En plus, on dit que les femmes de Keizaal sont presque aussi belles que celles de Lumnaar’Yuvon. Je ne demande qu'à voir mais si les frontières se ferment, je ne pourrais jamais vérifier la légende. » Je ris. Je repris le dernier mot de l’Edmund’Faasnu, en descendant, ma choppe à la main. « Skol ! »  

2678 mots
Pour l'indépendance. Charisme 42 (+5), Réprouvé (+2) et Odon do Dur (+1) = 8 points

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Siruu Belhades
~ Sorcier ~ Niveau III ~

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Siruu Belhades
Ven 31 Juil 2020, 16:48


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Thogii


Siruu n’avait pas visité Stenfek depuis bien trop longtemps. Initialement, il ne comptait pas réitérer l’expérience : son dernier séjour en ces lieux n’avait pas été particulièrement agréable et, plus encore, il était assez occupé avec les chamans. Cependant, il fallait se montrer raisonnable : l’événement politique en question était d’une envergure immense, et ne se reproduirait pas. Surtout, le sorcier s’en voulait de ne pas avoir pu couvrir le couronnement d’Elias au travers d’un article ; Zélie avait préféré déléguer cette tâche à d’autres journalistes. L’opportunité ne se présenterait pas dix fois : s’il voulait gagner la confiance de son agente, c’était le moment où jamais.

Alors, c’est accompagné de chamans Aylimr que le journaliste était venu sur place. Il avait appris à s’habiller selon leurs coutumes et, dans une moindre mesure, à parler leur langue. Ce dernier point lui posait encore un certain nombre de difficultés, mais il était nécessaire de maîtriser l’Oddelegy. Fort heureusement, le langage commun était privilégié en dehors d’Awaku No Hi. Il ne fallait bien évidemment pas dévoiler la race. Aujourd’hui, ils étaient du Spectre de la Dame. Que seraient-ils dans une semaine ? Peut-être personne. Car oui, parfois ils se dérobaient aux questions, ou laissaient sous-entendre qu’ils étaient de simples insulaires venus de loin. Des humains exotiques, mais inoffensifs. S’ils étaient en dehors des villes et que l’absence de Ma’Ahid pouvait être remarquée, alors aux yeux du monde ils devenaient sorciers ou encore déchus. Malheureusement, la teinte des sorts magiciens était trop révélatrice pour que ce peuple-là fasse une bonne couverture.

Grâce aux esprits, ils étaient généralement au fait de chaque embargo, de chaque accord commercial, de chaque traitement de faveur entre nations. Ils changeaient leur identité en fonction de ces facteurs, pour obtenir les avantages qui leur convenaient. Si un étranger — comme ces fouines d’orishas — semblait suspecter quelque chose, son identité et sa description physique étaient passées à un Nyam qui se chargerait d’enfouir chaque souvenir compromettant. Tous les mensonges et subterfuges étaient bons, pour aider la race à commercer. Siruu constatait avec une pointe de surprise que les peuples maléfiques n’avaient pas le monopole de la ruse. Il était trop souvent parti du principe que les ondins et les alfars étaient les seules races capables de mettre au point des machinations égalant celles des sorciers. Pécher par orgueil avait été si facile et, désormais, sa vision du monde s’effritait.

Un homme vêtu élégamment venait de rentrer sur le toit où Siruu s’était installé. La vue du bâtiment était imprenable : Stenfek avait une architecture décousue, mais raffinée, si bien qu’il serait difficile de confondre ses panoramas avec ceux d’une autre ville. « Que notes-tu dans ton journal ? » C’était Livio Castelli, officiellement. En vérité, son nom était… quoi, déjà ? Soa’Blablabla’Ao ? Wom’Machinbidule’Yo ? Sans surprise, le sorcier avait quelques difficultés avec les Hiwa d’autrui. Les retenir était une chose, mais savoir quel nom correspondait à quel individu se trouvait être une tâche bien plus ardue qu’il ne l’aurait imaginé. « Je résume le discours de l’alfar. »« Celui qui a passé cinq minutes à parler des nœuds de cheveux pour conclure que l’union n’était pas toujours bénéfique et que la séparation était meilleure ? » Le sorcier acquiesça lentement. « Il avait de très beaux cheveux, ceci dit. » Assez d’éloquence permettait d’oublier le manque de pertinence du discours, dans une certaine mesure.

Siruu se levait, délaissant son carnet. Il ne savait pas quel article tirer des informations recueillies jusqu’ici. Les conseils capillaires mêlés aux commentaires politiques ne formaient pas un mélange homogène. « Crois-tu que toutes les malédictions finiront par prendre fin ? » Livio — puisque c’est ainsi que nous l’appellerons — orientait la conversation sans trop de délicatesse. Il savait influencer autrui, mais ne mentait pas aux autres chamans. « Tu penses à la Málaferli, n’est-ce pas ? »« Entre autres. » Le journaliste prit le temps de réfléchir. La question était légitime, en effet. Cependant, une seule occurrence ne suffirait pas à prouver que Sympan accordait réellement sa clémence. Il était même difficile de savoir s’il existait encore. Certains avaient senti sa présence au moment de sa Renaissance, et Delta avait parlé en son nom. Toutefois, à l’heure actuelle, l’Unique demeurait inaccessible. Ou alors…

« Le Lien Divin. Est-ce qu’il vous permet d’avoir des signes pointant en cette direction ? Est-ce que quelqu’un chez les chamans a jamais eu la moindre connexion pouvant être associée à Sympan ? » Livio sourit. « Oui, il nous envoie des lettres tous les mois pour nous donner des nouvelles du royaume divin. Il fait quelques fautes d’orthographe, mais c’est un chic type. » Son sarcasme était peu subtil, mais il préférait être compris. Cependant, il sentait que Siruu souhaitait une réponse honnête, et était disposé à lui fournir le peu d’informations qu’il avait en sa possession. « Rien n’est impossible, mais même si c’était le cas… à qui parlerait-il en dehors du Maître des Esprits ? Enfin, il y a peut-être l’Oracle, mais… eh bien, c’est Kaori, donc on n’aura pas de certitudes. Parfois, je me dis qu’elle est trop démente et cryptique pour mener à bien son travail. » Malheureusement, Livio savait aussi que c’était inévitable. Le corps d’un mortel ne pouvait supporter autant de signes et de visions sans perdre la raison. Un Oracle sans maladie mentale, c’était comme un déchu sans péché. Quelles étaient les perspectives d’évolutions, dans ces circonstances ? L’Aylimr porta soudainement son regard sur l’horizon. L’avenir de leur race serait certainement intéressant.

« Je vois. C’est surprenant, de voir que Sympan commence par accorder son pardon aux Réprouvés sans plus d’explications… » Ils n’étaient pourtant pas bien plus ouverts aux vrais cultes qu’il y a cinquante ans. Ce peuple peu civilisé ne saurait faire de progrès, tant que le fardeau qu’est Bouton d’Or resterait présent. Il lui semblait improbable de voir Stenfek survivre seule, mais cela aiderait certainement le progrès des habitants de cette ville. Ils seraient aussi sans doute plus enclins à négocier avec les sorciers — avec certaines réserves —. De toute façon, au vu de leur minable force agricole, ils seraient contraints de faire importer leurs ressources. « Les voies des aetheri sont impénétrables, parfois. Peut-être que ça a un lien avec les indépendantistes, ou les souverains. » Siruu acquiesçait lentement. Ces derniers mois, il avait dû apprendre à encaisser une sorte de famine intellectuelle. Beaucoup de ses questions ne trouvaient pas leur réponse, ou étaient éludées par ceux qui pouvaient lui en donner. Il commençait à accepter que, malgré ses années d’expérience, sa connaissance demeurait limitée. Le monde des esprits s’était ouvert à lui. L’on aurait pu croire qu’il n’amènerait que de nouvelles possibilités, et que la seule difficulté serait la quantité d’informations à digérer. Malheureusement, la vérité était bien moins optimiste. Désormais, lorsqu’il cherchait à mener le moindre raisonnement, le journaliste se retrouvait dans la désagréable position d’un funambule marchant au-dessus d’un océan de doute. Il devait se contraindre à avoir foi en ses hypothèses, pour ne pas tomber dans l’incertitude.

« Tiens, d’ailleurs… les sorciers n’ont toujours pas trouvé de solution, pour la Narcirra ? »« Non, mais ils font des efforts en ce sens. J’ai pris part à une expédition, à ce sujet. On a failli mourir plusieurs fois, mais on a récupéré des spécimens de serpents. Malheureusement, c’était avant tout pour le profit personnel de quelques-uns, et je ne sais pas comment avancent leurs recherches. Valera Morguis a connu une explosion entre temps, donc ils sont peut-être morts. » Il pouvait librement parler de la cité secrète des mages noirs : les chamans étaient au courant dès la pose des premières pierres. « Tu penses que Sympan vous accordera son pardon ? Sans vouloir t’offenser… ton peuple est l’antagoniste de tout ce qu’il représente, en théorie. Je ne sais pas s’il favoriserait vraiment les magiciens, mais en tout cas, il n’a aucune raison d’aider une race qui prône la destruction. » Livio n’avait pas tort. Pour contrer cette idée désagréable, Siruu se plaisait à penser que si l’Unique avait souhaité faire disparaître les siens, ce serait chose faite à l’heure actuelle.

« Quoi qu’il en soit, je doute que la Narcirra disparaisse. Je suppose que, si le pardon a été accordé, c’est peut-être parce les Réprouvés n’auraient pas pu tenir éternellement, à ne pouvoir produire des leurs qu’en guerroyant. Les sorciers… nous sommes impactés par l’épidémie, mais nous ne mourrons pas tous. » Quand la maladie venait d’apparaître et faisait des ravages, certains l’avaient pensé. Ils prédisaient la lente et douloureuse extinction de leur peuple, en conséquence de la victoire de Sympan. Pourtant, à l’heure actuelle, les mages noirs cohabitaient avec la Narcirra. Ils comparaient froidement cette année aux précédentes, dans le but de prévoir l’évolution de la courbe de morts. Les premières pertes avaient fait scandale, mais il s’agissait maintenant d’une cause de décès commune, que l’on n’envisageait plus que comme un ajout aux statistiques. La population la plus pauvre était aussi la plus impactée, et les quartiers modestes s’étaient vidés au fil des années. Si un étranger comprenant l’Obien Syliath s’amusait à lire les journaux d’Amestris, il constaterait que l’histoire de cette contagion n’était plus utilisée pour tirer des larmes. Ces faits étaient donnés placidement, en introduction. Les rédacteurs ne s’attardaient pas sur les cadavres empilés et les tragédies familiales. Ils enchaînaient directement sur un paragraphe expliquant que les prix enflaient près du centre-ville, mais que les opportunités d’achats dans les quartiers dangereux se multipliaient.

« Tu sais ce que je pense ? » Livio avait allumé son calumet, et fumait paisiblement. Les chamans avaient tendance à ne pas pouvoir survivre une journée sans pipe. « La Narcirra continuera de tuer une partie d’entre vous, mais vous saurez limiter les pertes. Mais avant ça, parce que vous aimez bien foutre le bordel, vous allez trouver un moyen de rendre la maladie contagieuse pour les autres races. » Siruu ne put s’empêcher de glousser. C’était ridicule, mais il devait bien avouer que ce genre de plans était certainement dans les cordes de son peuple. Les magiciens étant très similaires aux sorciers, ils seraient sans doute les premières victimes d’une éventuelle expansion de la Narcirra. Toutefois, les mages noirs étaient du genre à voir grand, et mettraient tous les moyens en œuvre pour que le fléau s’étende à chaque race. « J’espère pour vous que ça n’arrivera pas. Je vois mal quelqu’un supporter simultanément la Málaferli et la Narcirra. »

1720 mots. J'ai pris l'image d'Orion. +2 pour les aetheri hé hé Pas de vote.
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Ven 31 Juil 2020, 21:59




Thogii


Les nouvelles commençèrent à se faire entendre dans les terres arides. La malédiction des Réprouvés était levée, et des incidences diplomatiques pourraient donc arriver. Les paroles du Monarque démoniaque se firent entendre un peu partout parmis la race afin de donner une opportunité à certains Madiga de progresser et tenter leurs chances ailleurs. "Autant se faire déchiqueter là-bas, que ce soit ici ou ailleurs ça ne changera pas grand chose." rigolaient les quelques démons mineurs entourants Mephisto, prêts à remporter le défi proposait par Aodh. Autant dire que Mephisto  n'était pas du genre à suivre les dires de la populace ou les moeurs de ses concurrents, mais étrangement il faisait parti de ceux-là,qui allaient hasardeusement tenter le coup. Le Saraini jetta un oeil suspicieux à l'apparence du démon.


"Hm Vous êtes sûr de tenter le coup, subalterne?" me demanda Argulth, un général démoniaque qui devait examiner les démons qui se rendaient là-bas, ou devrais-je dire éviter que des gros bras se rendent là-bas pour enfoncer l'écharde là où il faut pas..

"Il me semble que le Monarque démoniaque parlait de diplomatie.." osa le Madiga.

"Bon allez,..." déclare t'il avant de mettre mon nom sur le papier,avant de rajouter:
"Bah autant le laisser aller là-bas, ce ne sera pas si différent que de le jetter en Enfer.."

A vrai dire, il n'y avait rien à dire sur le parti démoniaque, les règles ou la diplomatie de ces derniers n'étaient pas plus compliqués que celles dans le monde sauvage. Et les Réprouvés avaient un peu de ça dans le sang. Alors pourquoi pas aller faire une petite visite chez ses confrères? Peut être qu'il pourrait y apprendre quelque chose.


Le voyage fut assez rapide. Grace aux portails démoniaques méticuleusement cachés dans le monde. Il put accéder avec un petit mot de ses Supérieurs aux terres d'Emeraude.Cependant, le plus dur fut de traverser la frontière des terres car la Magie de Sympan interdisait tout individu mal intentionné d'y pénétrer. Le Madiga s'en doutait que ça n'allait pas être forcément facile de rejoindre le continent naturel. Ce ne fut cependant pas le cas de la plupart des faibles démons voulant rejoindre Stenfek. Ayant oubliés de s'informer, ils furent incinérés en chair et en os par un feu venant de nulle part. Un magistral piège mise en place par leurs Supérieurs pour directement réexpédier en Enfer ses propres bâtards. Quelle ironie.. Ce ne fut pas le cas de Mephisto, parce qu'il avait bien médité avant de s'y rejoindre et de prier ce maudit Sympan pour lui assurer qu'il n'était pas mal intentionné, enfin quand même un peu quoi..

Les terres d'Emeraude. Son nom caractérisait bien son environnement. Presque tous, si l'on puisse dire, cristallisait l'endroit,verdures, entre les terrains plats paradisiaques et les forêts denses et foisonnantes de créatures et plantes exotiques, rien ne laissait indifférent ses visiteurs d'outre monde. Enfin pas trop Mephisto, qui préférait tout de même ses terres maudites et arrides. Mais il put tout de même trouver son bonheur, un tas de Perle Grise poussait dans ce merveilleux bosquet. A ce moment là, il était aux anges. Cette drogue rare qui ne se trouvait nulle part ailleurs était devant lui. Il pourrait peut-être plus tard en utiliser ses bénéfices dans ses projets.

Une fois arrivé à Stenfek,on pouvait comprendre pourquoi Sympan protégait ses terres.Couleures miroitantes et tours de glace et de marbre, la ville de verre elle-même réflétait la beauté de son pays. Une ville possédant des constructions défiants toutes les lois de la volonté, dès lors que l'on souhaite se rendre en haut d'un de ces bâtiments de marbre et de verre.

"Bienvenue à Stenfek" lui disait une voix familière. "Af salut à toi mon amie Réprouvée, content de te revoir!" mentais je.

"Alors qu'est ce qui t'amènes, ici?" me demanda t'elle.

"Je suis venu te rendre visite." lui dis je en souriant poliment.

"Ca j'en doute fort mon pauvre camarade!" me répond elle en se moquant. Avant de clamer de joie: "C'est presque la fête dans les environs. Le peuple, enfin libéré de la malédiction, va pouvoir se relancer!"

"C'est à peu près pareil chez nous. Après un tel génocide,c'est une nouvelle perspective pour notre race qui s'éclaire. On vit des moments pas si différents." concédais je.


Elle avait l'air joyeuse, comme la plupart de ses habitants contents que le mal disparaisse. Cela l'intriguait. N'est il pas au contraire comme eux? Content que le mal soit fait, pour assurer son propre bonheur? Les Réprouvés possédaient deux ailes, l'une pour le bien et l'autre pour le mal. Selon lui, il faut savoir trancher et savoir son camp. On ne peut pas être aussi bon que mauvais. Une idée lui vint alors. Peut-être que derrière les choses ce sont des êtres finalement mauvais? Dans tous les cas, c'était son point de vue démoniaque. Les mots peuvent se prêter à confusion,c'est le pouvoir de la parole. Peut-être qu'en les interrogant et en mettant le doute, il pourrait alors juger le coeur d'un réprouvé et en apprendre plus sur eux, ou pas. De toute façon, il n'avait pas assez de pouvoir pour changer ou influencer quoi que ce soit. Il serait alors préférable d'observer et de profiter des évènements locals.

La réprouvée l'invita ainsi dans sa demeure pour discuter un peu.

"Bah du coup, ça va être bruyant le soir dans les prochains jours." m'amusais je.

"Surement. Qui sait? Peut-être que les démons font des miracles au lit?" me fit elle avec un cin d'oeil.

"Faute d'avoir essayé." me moquais-je aussitot. Avant de ravaler ma salive en voyant la colère s'exprimait sur son visage.

"Enfin peut-être parce qu'il n'y a pas de miracle chez les démons.." rajoutais je afin d'éviter une galère dans le coin..

Voyant son teint reprendre des couleurs, Mephisto soupira de soulagement.
"C'est que ça peut s'énerver vite une réprouvée"

"Bon ben, en tout cas je suis intrigué de voir le choix que feront les Réprouvés. Seront-ils séduits par l'indépendance au risque d'avoir une guerre sous les bras? Ou décideront-ils de rester dépendants avec Lumnaar'Yuvon et éviter ainsi des complications diplomatiques?"
m'interrogais je. Et surtout si tout cela finira dans la paix ou le sang, ou sinon dans la neutralité. Mais les Réprouvés sont des êtres indiscernables et peuvent facilement prendre l'apparence démoniaque aussi bien que leurs apparences angéliques ils peuvent facilement choisir aussi bien la guerre que la paix. Une race qui lui paraissait ainsi bien mystérieuse.

"Nous verrons bien ce qui en sortira. Mais nous les Réprouvés avons nos principes. Nous vivons le jour le jour et la la nuit." trancha Saphira avant de boire une gorgée d'hydromel.

"Vos choix seront aussi influencés par tous ses bourgs d'étrangers. Peut-être que finalement derrière on essayera de vous .." commençais je avant de me taire,préférant ne pas baisser son estime de soi.

"De nous? Nous sommes pas simplement des moutons de panurge. Nos choix et décisions peuvent aussi bien nous obligés à porter les armes qu'à tendre la main et faire la paix." me répondait t'elle.

"Non,te connaissant je pense que vous êtes des êtres imprévisibles. Ca doit être ça qui fait la force et la survie de votre race." souriais je.

"AHah t'essayerais de me flatter?" s'amusa t' elle, pour changer de sujet.

Elle avait peut-être trop bu d'hydromel.. "Non,non rien rien.." dis-je, en terminant ainsi la discussion.


*************************************************************************


Dans les rues, différentes activités se produisaient, entre les débats et les discours, l'ambiance générale semblait plutôt correcte,à l'exception de quelques malchanceux ayant provoqués des réprouvés de mauvaise humeur. On ne peut avoir que de la pitié pour ces infortunés..

D'autre part, concernant la diplomatie, le démon pouvait comprendre que Aodh Baran cherchait à relancer la race après un tel génocide,probablement sur des nouvelles bases diplomatiques. Cependant, Méphisto est un démon radical. Il ne tolérait guère les agissements de son Monarque. Selon lui, les démons ne sont pas des Alfars et ils sont pas là pour,même si c'est intelligent et rusé, diplomatiser et user de stratégies foireuses. Et d'ailleurs il aimait et appréciait bien les Réprouvés. Pourquoi les induire à faire la guerre? C'était inutile. Du sang démoniaque coulait dans leurs veines.. Ils étaient le peuple probablement le moins dangereux pour les démons et d'ailleurs ils étaient trop imprévisibles. Et de plus, au contraire, s'ils dépendaient affreusement de Lumnaar'Yuvon, le monarque aurait dû proposer de partager ses ressources ainsi afin d'avoir la confiance de ces derniers. Et peut-être pour après en profiter pour les corrompre. Une armée de réprouvés déchus, ça aurait été drole..

Suivant tout de même les consignes qui lui ont été donnés, le Madiga joignit un groupe de Réprouvés tout en clamant haut et fort l'indépendance du peuple. Si c'était ce que pronait le peuple, à quoi bon essayé de les convaincre?

"La malédiction est levé! Pensons à l'avenir de nos fils et de nos filles!! Reconstruisons le peuple et l'avenir des Réprouvés et montrons au monde nos principes et la fierté de notre peuple!!" clamaient le groupe en n'arrêtant pas de parcourir les rues tandis que les gens les rejoignaient.

"Et oui, jusqu'où mènerait ces principes?" pensa Mephisto. Se laisser influençer par les pensées des étrangers était un concept complètement inconcevable pour les démons. Voila ce qui le différait des réprouvés. Ces derniers pouvaient changer soudainement leurs façons de penser. Un peuple ouvert au monde qui n'avait pas vraiment de camp. Un peuple plus indépendantiste que soumis aux idées d'autruis.

Enfin,après avoir maraudé et ainsi écouté les discours juteux de personnes importantes, il rejoignit finalement,épuisé, son amie Saphira.

"Alors c'était bien? Viens allons nous amuser." me déclare aussitôt sa camarade, visiblement de nature joyeuse. "Comment pouvait-elle être aussi changeante après avoir massacré un pauvre incognito ne la trouvant pas ainsi jolie?" m'insurgeais je.

La suivant, elle me montra de son doigt un petit pâturage pour Bicornes où certains profitaient des étrangers pour se fair un peu d'argent.

"Bon ben ça à l'air marrant, t'es sûre que ces machins sont innofensifs?" déclarais je dubitatif.

"Quoi? Un démon a peur d'un troupeau de moutons?"

"Non non, bien sûr que non.." répondais je avant de me contraindre du contraire en voyant une sirène se faire propulser dans les environs,ayant tenté l'impossible.

"Bon dieu. J'ai failli avaler un poisson !" s'insurgea Mephisto.

Ce ne fut pas meilleur au tour de Mephisto. Il avait à peine fait un pas dans l'enceinte que la créature, sentant sa mauvaise fortune, lui avait fonçé dessus. Il a fallu arrêter la tournée, l'organisateur jugeant que ça aurait pu mal tourner et que la créature aurait pu au moins lui embrocher les deux bras..

Sa camarade pouffant de rire. "C'était pas mieux que la sirène!"

"On verra quand ce sera ton tour!
" répondais je, renfrogné.

Bref pour conclure, que finalement c'était la journée des Réprouvés. "Une journée de gloire" me maugréais je, en la voyant gérer la Bicorne plus facilement que moi..

"Bah ce n'était qu'une arnaque!" essayais je de me convaincre sur le chemin du retour.

"Taurais du voir ta tête muahah!!" rigola t'elle.

La journée se terminait ainsi tranquillement sur cette bonne humeur.Tout ce qu'il pourrait dire traitant de  son opinon, c'était que les Réprouvés était une race libre qui cherchait quotidiennement la frontière entre le bien et le mal,tout en profitant des bons moments et des mauvais moments de la vie. Une race qui paraissaint finalement plus intelligente que rustique, en cherchant la vraie signification de l'existence à travers les épreuves que la vie lui donnait. Mais à quoi bon ? Finiraient ils par faire un choix? Ou est-ce tout simplement que la vie n'a pas vraiment valable de l'être et qu'il faudrait se laisser berçer par les profits qu'elle pourrait apportée? Pour connaître la réponse, il faudrait se fier et se limiter aux croyances de ce peuple et étudier la vie de ces mystérieux Zaahin, que pronait fièrement la race. La croyance est-elle le berceau des illusions ,un moyen de se convaincre d'atteindre l'innacessible ou quelque chose auquel on ne peut mettre les mots et d'inévitable? Peut-être qu'il aura sa réponse dans l'avenir et dans les complications à venir de ce peuple.  


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Ven 31 Juil 2020, 23:09


Thogii



Léandra / HeianLe rire moqueur de Dastan sonnait comme l’écho de mon échec. Revenir bredouille auprès du génie m’était insupportable. J’avais laissé une opportunité à cet odieux personnage de me rabaisser et je savais qu’il ne manquerait pas de la saisir. Mon regard d’or se tourna vers la fontaine où la silhouette de l’homme se tenait quelques heures auparavant. A sa place, des enfants réprouvés luttaient sous les yeux bienveillants de leurs parents. Je jalousais ce peuple délivré de la bienséance ; ils exprimaient leurs émotions sans chercher à les dissimuler. Je songeai un instant que si j’avais été un bipolaire, l’Iblis serait probablement allongé au sol, le corps tuméfié. Cette idée m’arracha un sourire malgré moi. Je le dissipai avant de porter de nouveau mon attention vers mon précepteur.

« T’as pas bientôt fini de te foutre de moi ?! »

Il m’énervait trop facilement. Il fallait que j’apprennes à me détacher de son comportement délétère. C’était mon passeur après tout ; malheureusement, nous allions passer beaucoup de temps ensemble. Les moqueries s’estompèrent peu à peu. Ses yeux pétillants de malice se posèrent sur moi. Il avait toujours ce même sourire carnassier aux lèvres.

« Je t’avais bien dit que c’était au-delà de tes capacités. Tu n’es encore qu’un tout petit génie insignifiant. T’as pas gagné ta glace dans la Cour des Grands ! » me lança-t-il sur un ton amusé soulignant ses airs supérieurs.

Je sentis la colère frémir. Les mots étaient autant de blessures que sa langue acérée m’assénait. La magie bouillonnait en moi à la recherche d’un exutoire sans trouver de victime. Je regrettai que nous ne fûmes pas au sein du Monde des Rêves ; là-bas, le paysage aurait répondu à ma rage, me libérant de ce poids accablant. L’entité face à moi était bien trop puissante pour que je pusse me permettre de lui nuire.  Ce fut mes paroles qui fusèrent pour libérer mon ire.

«  Je ne suis que le reflet de l’incompétence de mon mentor. Qu’avez-vous fait jusqu’à présent ? Me critiquer ? Me faire courir après l’impossible ? Peut-être que si vous arrêtiez de faire de la rétention d’informations, si vous étiez meilleur pédagogue, je réussirai vos épreuves. Mais bon, il a fallu que je tombe sur le plus incapable de tous… Alors évidemment, je me débrouille comme je peux avec ce que j’ai… »

L’effet fût immédiat. Le garçon me lança un regard noir. Sciemment ou non, il révéla son aura qui me terrifia aussitôt. Il était puissant, beaucoup plus que ce que je m’étais imaginé. J’étais un vulgaire rongeur face à un prédateur expérimenté. Je ne pus retenir le tressaillement qui se propagea dans tout mon corps. Je reculai d’un pas, me retenant de justesse de fuir.

« Comment ose-tu sale petit… »

Il fit un pas en avant. Ses sourcils froncés accentuaient la terreur que m’inspirait ses traits. Je me figeai sur place, attendant une sentence qui ne vint pas. Il s’arrêta soudainement, la tête positionnée à quelques centimètres de la mienne.

« Si c’est vraiment ce que tu crois, alors prouve le, commença-t-il sur un air de défi.

— Et comment ?

— Ta cible sera Drahl Urubéus, l’un des novices qui accompagne la délégation de Magiciens. C’est un rat de bibliothèque qui n’a que faire de la situation politique actuelle. Il n’a fait le chemin que pour parcourir les ouvrages de la Grande Bibliothèque de Stenfek. Il réside à l’Auberge du Ciel Ombrageux.

— Et que dois-je faire exactement ?

— Le piéger, évidemment, m’indiqua-t-il sèchement

— Je me doute bien, repris-je. Je voulais savoir quel châtiment lui réserver.

— Je veux que tu lui ôtes la vue. Définitivement.

— La vue ? m’étonnai-je. Pourquoi lui faire subir une telle punition ?

— Cela ne te regarde pas, Djinn.

— Bien… Je m’en occupe.

— C’est bon, tu as suffisamment d’informations ? Où m’accuseras-tu à nouveau de ton insuccès ? »

Je ne répondis pas à cette attaque. Je me glorifiai d’avoir réussi à le piquer profondément dans son ego.

« Enfin, de toute façon, même avec toutes les informations du monde, tu échoueras. Tu n’es pas prêt ; tu n’es qu’un pauvre bouffon dont les aptitudes frôlent le ridicule. Jamais tu ne…. »

Je ne l’écoutai plus. J’étais déjà parti. SéparateurJe m’enfonçai dans le dédale de rues qui menait à ma destination. Les passants affluaient en masse, bloquant les routes qui débouchaient sur la place principale. Ils discouraient en petits groupes dans un brouhaha assourdissant. Mes oreilles captèrent des bribes de discussion, reconstituant les arguments pour ou contre la scission des Réprouvés. Personnellement, je n’en avais que faire. Dans les deux cas, la nation bipolaire resterait fragilisée par cet événement. Les cités continueraient à se vouer une haine viscérale, au plus grand bonheur des autres races qui pourraient en tirer bénéfices. Je me serai fait une joie de palabrer sur les avantages ou les inconvénients d’une telle union – tant d’un point de vue diplomatique que stratégique – pour le compte de l’un ou de l’autre. Cependant, sans corps matériel, l’illusion ne serait pas suffisamment réaliste. Je m’éloignai de la foule pour emprunter des chemins détournés.

Le soleil était encore haut dans le ciel lorsque je pénétrai la bibliothèque. L’atmosphère était froide et silencieuse. Je m’avançai sur le sol de marbre blanc. Autour de moi, de hautes étagères tapissaient les murs de l’immense salle ovale, grimpant jusqu’à leur sommet. La lumière extérieure filtrait à travers le majestueux dôme de verre qui se poursuivait vers les pièces adjacentes. Je m’émerveillai devant ce décor stupéfiant, ode à la connaissance. Je m’approchai de la table centrale sur laquelle le plan des lieux était représenté. Les milliers de livres de la bâtisse étaient organisés selon des thématiques précises, reprises dans le schéma. La stèle permettait également de les retirer magiquement – sans avoir à se perdre dans une recherche fastidieuse. Durant un bref instant, je fus surpris qu’un tel artefact fût aux mains des réprouvés. Je ne m’attardai pas sur la question et rejoignis la salle d’étude, située un peu plus loin sur ma droite.

Les meubles formaient une série d’îlots investis par des érudits peu intéressés par les événements extérieurs. Ils étaient nombreux à s’être réfugiés à l’abri de ces murs pour échapper au capharnaüm envahissant les rues de la cité. Ces savants délaissaient la géopolitique, préférant se plonger corps et âmes dans d’autres domaines. Mes yeux scrutèrent la pièce à la recherche d’un jeune magicien. Je n’avais pas d’informations quant à l’aspect de ce Drahl Urubéus. A vrai dire, je n’avais pas pensé à poser la question ; je changeai bien trop souvent d’apparence moi-même pour m’attarder sur ce détail. Mon regard s’arrêta successivement sur trois silhouettes coincées entre l’adolescence et l’âge adulte. Le plus proche était assis auprès d’un homme plus vieux dont le teint livide ne laissait aucun doute quant à son appartenance. Le deuxième, assis plus loin, possédait une musculature bien trop imposante pour un magicien avide de lecture. Finalement, je me dirigeai vers le dernier. C’était un garçon chétif aux yeux verts et à la chevelure d’or. Il se dissimulait derrière un livre bien plus grands que sa petite tête ronde. Malgré sa jeunesse – il ne devait pas avoir plus de treize ans – il était plongé dans un traité conséquent soulevant la question de l’origine de la Magie. Le petit ne releva même pas la tête lorsque je me plaçai à sa gauche.

« Bonjour, lançai-je à voix basse

—Chut ! » se contenta-t-il de répondre sans lever les yeux du texte.

Sa réponse me déstabilisa quelque peu. Je me décalai davantage dans son champ de vision, cherchant son attention. En vain. Lorsque je passai la main devant son visage, il la chassa comme si ce n’était une vulgaire mouche. Je savais que je ne tirerai rien de cet individu dans l’enceinte de ces murs. Je décidai de me retirer et d’attendre qu’il soit contraint de rentrer à l’auberge.

Les heures se succédèrent avec lenteur. Je patientais assis sur les marches, écoutant l’écho des discours qui arrivait parfois jusqu’à moi. Les voix se répondaient les unes aux autres ; les arguments s’affrontaient dans une bataille inutile. Nulle solution n’était meilleure que l’autre. Dans les deux cas, les insatisfactions étaient bien trop importantes pour les deux parties. Je me demandais d’ailleurs pourquoi Stenfek laissait le soin à ses futurs ennemis de choisir leur destin. S’agissait-il là d’une manœuvre habile ou d’une folie insensée ? L’avenir nous le dirait bien assez tôt.

Léandra / ShalendraLa cloche sonna huit coups. Les doctes sortirent bien malgré eux de leur cocon. Je me relevai, prêt à rejoindre ma cible. Mon apparence se modela en une jeune femme naïve – je préférai qu’il ne soit pas en mesure de faire le lien avec le jeune homme qui avait cherché à l’interrompre durant ses recherches. Il me fallait des accessoires pour être à même de l’approcher plus facilement. La magie se plia à ma volonté pour parachever l’illusion. La sacoche à ma ceinture débordait d’ouvrages anciens aux titres à moitié effacés. J’en attrapai un dans les mains pour faire mine de le lire. Lorsque j’aperçus l’apprenti, je me dirigeai vers lui, la tête baissée sur ma lecture.

« Attention ! » m’avertit la voix fluette du gamin.

Je relevai à peine le visage pour l’apercevoir devant moi, les yeux fermés dans l’attente d’un choc qui ne viendrait pas. Mon corps se déforma sous le sien pour le laisser traverser. Je fis volte-face pour l’accueillir.

« Ça va ? »

Le petit se retourna vers moi, interloqué.

« Qu’est-ce qu’il s’est passé ?

— Oh ça ? je pointai mon corps altéré par son passage. Ne vous inquiétez pas, cela va rapidement devenir normal »

De désagréables picotements me parcoururent alors que la magie recomposait mon enveloppe charnelle. Le magicien semblait intrigué par le processus.

« Qui êtes-vous ?

— Je suis Shalendra, pour vous servir. Et vous êtes ?

— Je suis Drahl Urubéus. Ma question va peut-être vous sembler impolie mais… qu’êtes-vous ?

— Je suis une Génie, un être de pure magie, indiquai-je en m’inclinant avec déférence. J’imagine que vous avez déjà entendu parler de nous ?

— Oui » avoua-t-il timidement.

Malgré ses efforts, il ne pouvait s’empêcher de me dévisager.

« Vous devez sans doute savoir qu’il m’est possible de réaliser vos vœux – dans la limite du raisonnable bien entendu. Peut-être auriez-vous quelques formulations à me faire ? »
Il était trop hésitant pour ne pas avoir été mis en garde par un quelconque mentor. Je maudissais cet être qui me rendait la tâche plus ardue. Le jeune se dandinait sur ses deux pieds, cherchant une échappatoire à ma proposition.  

« Oh je vois à votre air que vous avez dû entendre de bien tristes histoires à propos des miens. Je m’excuse que vous ayez une si mauvaise opinion de nous… Peut-être puis-je vous proposer ceci : au vu de mes faibles capacités, je n’ai pas besoin de vous imposer de contrepartie. Faites vos souhaits librement, je n’aurai besoin de rien en retour. Qu’avez-vous à y perdre ? »

Un sourire plein de sympathie suffit à convaincre le mioche de ma bonne foi.

« Vous pourriez améliorer ma magie ?

—Si c’est ce que vous désirez, je peux vous l’accorder librement. Il vous suffit de tenir cet objet. »

Je sortis ma dague de son fourreau et la tendis au garnement. Il l’examina un long moment avant d’enfin se décider à la saisir.

« Par cet acte, vous devenez mon nouveau Maître. Selon les préceptes de la magie qui nous unit, je vous accorderai trois souhaits – pas un de plus. Je me plierai à vos moindres désirs, je réaliserai toutes vos volontés.
Votre bonheur sera mon salut.

— Très bien, commença-t-il d’un air hésitant, mon premier vœu sera que vous ne me mentiez pas. Je souhaite que vous soyez sincère. »

Je déglutis difficilement. Dastan avait peut-être raison. Je n’étais probablement pas prête pour ce genre de Rêveur. Sous un masque jovial, je cachai mon irritation. Ce sale gosse avait trouvé une dérobade à mes artifices. Je claquai des doigts. La magie s’immisça entre nous et raffermit le lien. Je sentis l’impact de son souhait sur mes pensées. Je l’aurai. Je ne pouvais pas échouer à nouveau.

« Votre premier vœu a été exaucé. Comment puis-je vous combler, maître ? »

L’enfant ne réfléchit pas pour son second souhait.

« Je veux être capable de maîtriser toutes les formes de magie.

— Si tel est votre desiderata, qu’il en soit ainsi »

Ce souhait était trop puissant pour moi. Mais la faille de sa formulation me permettait de l’exaucer malgré tout. Être capable de ne signifiait pas qu’il devait être en mesure de le faire immédiatement. Il y arriverait, je m’y engageai par ce contrat. Mais cela lui demanderai des efforts et du travail ; beaucoup de travail. Le claquement de doigt suffit à activer la magie du lien. Elle l’enveloppa de sa douce chaleur avant de se dissiper peu à peu.

« Je ne sens rien de différent, constata l’apprenti

— Evidemment, la différence n’est pas toujours palpable, expliquai-je, mais je peux vous assurer que votre désir a été entendu.

— Bien, je te crois. De toute façon, tu ne peux pas me duper.

— Je trouve cela dommage que vous ayez eu à sacrifier un vœu pour vous en assurer.

— Peut-être, mais c’est plus sûr ainsi. Hum… Que souhaitez à présent…

— Si vous le permettez, j’ai une idée de souhait qui pourrait sans doute vous procurer entière satisfaction.

— Et quel serait-il ?

— Eh bien, je crois comprendre que vous êtes un passionné de lecture, lâchai-je en désignant les livres qui dépassaient de sa besace. Je devais donc passer de nombreuses heures à cette activité. Que diriez-vous si je pouvais réduire votre temps de lecture ? Vous n’auriez plus à passer de longues heures penché sur un bouquin à l’étudier. Vous gagneriez un temps précieux pour d’autres activités – ou pour continuer à apprendre ? Qu’en pensez-vous ? »

Le garçon se réfugia dans ses pensées Il réfléchit un certain temps à ma proposition, analysant brièvement l’offre que je lui proposai. Il finit par sourire et hocher la tête.

« Très bien. Ce souhait me convient. Je veux que tu le réalises. »

Il venait de tomber dans le panneau. Un sourire de victoire passa sur les traits de mon visage d’ingénue. Avant qu’il n’ait l’occasion de réagir, mes doigts claquèrent. Par ce simple geste, je venais de lui ôter la vue.

« Mes yeux ! hurla-t-il. Qu’avez-vous fait ?!

— Tu aurais dû écouter plus attentivement ton professeur, gamin. Tu pensais vraiment pouvoir te jouer de moi ? Tu as eu tort de me défier.

— Mais comment ? Tu ne pouvais pas mentir ! s’indigna-t-il

— Je n’ai pas menti. Ton temps de lecture a été réduit, à néant. Le poids des mots est plus dévastateur que le mensonge. Sur ce, je vous laisse à cette méditation. »

Je récupérai la dague sans aucune douceur et abandonna le garnement à ses tristes pensées. Derrière moi, je l’entendais prononcer des mots de guérison. Il s’acharnait à soigner ce sens que je lui avais volé. Le visage illuminé par la satisfaction, je tournai à l’angle de la ruelle. J’imaginais déjà la tête de Dastan quand je perçus les cris et les sanglots de l’avorton. Je haussai les épaules et poursuivis ma route.
Séparateur« Montres ! Démons ! Je me vengerai ! Par Suris, je te retrouverai et je t’exterminerai ! Toi et toute ta race ! »
Lorsqu’il proféra ces menaces, je n’étais pourtant déjà plus là.


2582 mots - Merci pour le RP <3
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Mancinia Leenhardt
~ Humain ~ Niveau IV ~

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Mancinia Leenhardt
Ven 31 Juil 2020, 23:45


Illustration - Yuhong Ding
Thogii

Mancinia était la suivante sur la liste de passage, ayant suivi avec un certain intérêt l'avis des représentants des autres nations, voire de Réprouvés désireux d'exposer leur avis sur la situation actuelle de leur race. Seulement, son esprit restait accaparé par les récentes nouvelles des autres territoires Humains. Elles avaient été rapides et avaient visiblement secouées une partie des habitants de sa Cité, qui voyait un de ses grands guerriers s'éteindre. Bien qu'il eut prit possession de Muharkel en l'honneur de la Reine Scylla, Clovis avait créer son propre Royaume sur le long terme, mais désormais, il était tombé dans les bras d'Ezechyel. Si elle conservait en mémoire un homme puissant qui ne rechignant pas au travail lors de la conquête du territoire d'Alaithiad, la situation de l'île sur laquelle il régnait déplaisait grandement à l'Humaine. Si elle demeurait assez distante des propos généraux à l'encontre de l'ancien Kaal, elle ne pouvait que vouloir un avenir moins étriqué à ce lieu guerrier. Séparé des autres Cités, les moeurs évoluant dans un esprit strict au point de bannir des coutumes ancestrales. C'était sans mentionner leur rupture totale avec les Anges ... Ses dents ne cessaient de grincer devant ce constat. Venaient-ils tous de la même race ? Était-ce que que les Réprouvés ressentaient à l'égard des uns et des autres ? Sans doute aurait-elle dû être à même de comprendre, mais dans un sens, elle voyait en cet éloignement une séparation qui ne cesserait de causer des dommages. On sourit, doucement. En tant que représentante de sa race, elle n'avait pas le choix.

Je suis Mancinia Leenhardt.

Ayant bien trop de titres à émettre, elle choisi de ne pas endormir son auditoire en l'assommant de ces derniers, dont ils se moquaient certainement.

Je représente également les Humains et, comme l'a si bien dit mon homologue, Del Haftavân Eraël, les Humains sont d'avis de préserver la stabilité dans le déchirement. Les Réprouvés sont à un tournant de leur Histoire et, comme deux membres d'une Famille qui se séparent, ils doivent se dire au revoir aujourd'hui dans le but de préserver leur cohésion de l'avenir. Évidemment, nous soutiendront les Réprouvés quel que soit leur décision ...

Malgré les mots sortants de sa bouche, Mancinia était contre l'indépendance. C'était une erreur. Elle était convaincue que de nombreux représentants voulait amoindrir les territoires disloqués, c'était des opportunités économiques et stratégiques à saisir. Ce n'était pas la peine de se leurrer. Bien qu'étant un peuple de guerriers émérites, cela ne manquerait pas de donner l'impression d'une apparente faiblesse. Ils avaient beau parler de l'avenir, que se passerait-il si les tensions amenaient une nouvelle haine à l'encontre de leurs propres frères et soeurs ? Une rivalité fraternelle, cela pouvait se régler à coup de pieds au cul. Une rivalité entre deux Royaumes ... Sa langue claquait contre son palais avec discrétion, avant de reprendre sur l'importance d'un départ en douceur. Sérieusement ? La décision de la Reine Scylla durant le Rexhnou ne lui avait jamais convenu et elle ne pouvait être neutre en ces lieux, malgré son apparente docilité, elle avait envie de leur hurler de rester uni. Reste à ta place, murmurait sa voix intérieure. Sortir des sentiers ne l'avait pas aider. Oui, mais se séparer ? Quoi de plus dangereux sur le long terme que cette décision absurde ? Nombreux avaient été les Humains, depuis son Éveil, à s'exprimer pour montrer son point de vue, de cette protection nécessaire devant des ennemis qui conspiraient à leur perte. Et maintenant ? Qui craignaient-ils ? Les Démons étaient réduits à l'état de rien ... Les Aetheri ayant violemment balancer leur pied dans la gueule de ces exterminateurs en leur envoyant leur pire fléau sous les trais d'Elias Salvatore.

Cet acte lui avait sans doute valu son titre d'Empereur Noir et il était sans doute l'être le plus dangereux de cette ère, remplaçant sans aucune difficulté des noms abominables comme Zane Azmog ou Vanille Deslyce, qui semblait s'être assagie. Les Sorciers ne devaient certainement pas s'intéresser à eux dans l'immédiat et les Vampires ... restaient assez discrets. C'était maintenant que les Humains devaient se montrer unis et non ... dispersés. Un Roi, même tué, pouvait être remplacer. La situation de Muharkel le prouvait, alors qu'elle était cette mascarade ? Si les choses allaient bien maintenant, car la cohésion existait, qu'en serait-il dans quelques années, ou décennies ? Devait-elle laisser une race risquant une guerre interne à ses héritiers ? Ou bien était-elle seulement paranoïaque ? Peut-être un peu de tout. Son sourire était amer alors qu'elle parlait de l'avenir d'une race qui l'écoutait en bougeant la tête de temps à autre pour approuver et désapprouver ses dires. Mancinia essayait de rester concentrer sur Neah, présent dans la foule. Il semblait minuscule dans cette marée de personnages énormes, mais elle ne pouvait que le voir avec sa chevelure rousse. Il avait un charisme écrasant et une aura militaire presque effrayante. En s'inclinant respectueusement, elle s'en allât de l'estrade lorsque son discours fût clos.

Son sourire s'élargit lorsqu'elle distinguât l'ornement sur l'oreille de son Gardien, cadeau réalisé de sa main. Ce dernier était de plus en plus souvent mis en place et ravissait ses yeux tant il lui allait bien. En bas de l'estrade, l'Humaine croisait une Réprouvée enceinte qui la toisait de haut. Ce n'était pas son Ma'Ahid qui était la cause de ce dédain, seulement sa nature d'étrangère. Mancinia eu un regard à son encontre et un sourire. Elle était consciente de la bonne nouvelle. Un Réprouvé était né. S'il advenait que Sympan accordait son Pardon aux peuples l'ayant trahi, alors ... elle serait en mesure de donner des héritiers angéliques à Neah, n'est-ce pas ? Cette idée l'enchantait ... autant qu'elle la tétanisait. Intérieurement, deux contraires se déchirait. Un sourire aux lèvres, elle vint près de son Ange qui était resté en compagnie des siens. Il n'aimait pas les Réprouvés. Elle avait dû commettre un acte de mutilation contre lui, tellement ce rejet était viscéral. Sa Protégée en connaissait la raison. Ses souvenirs en ces lieux étaient mortels, comme les siens sur les terres de Lumnaar'Yuvon. Des lieux sublimes aux souvenirs tortueux. Elle ne détestait pas les Réprouvés d'être ... des Réprouvés. Mais elle aurait voulu ... Non. Ce n'était pas le moment d'en discuter. A l'avenir, sans doute ...

1050 mots
Pour l'indépendance de Stenfek : +5 [Charisme - 45 = 5 points]


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Mancinia Leenhardt
Ven 31 Juil 2020, 23:57


Illustration - Vrihedd
Thogii

Depuis le début de la matinée, quelque chose n'allait pas. Un détail. Quelque chose sur lequel on ne parvenait pas à mettre le petit doigt et qui ne cessait de s'immiscer dans vos idées. Une chose était certaine ... Neah ne voulait pas être ici. On l'avait envoyé avec la délégation uniquement dans un acte de bonne volonté, surtout en tant que participant involontaire de Los Worr Do Dur. Si on lui aurait demandé son avis au préalable, il n'y aurait certainement pas prit part à ce combat. Certainement pas pour cette sous-race dont la malédiction de ne plus avoir d'héritiers avait été une bonne chose, à ses yeux ... Désormais, ils avaient le droit de se reproduire et, pire que tout, mettait la natalité des Anges dans la balance. Dans une précarité terrible, en la tirant vers le néant. Ce constat le rendait amer. Il ne trouvait pas cela Juste. Il n'était d'ailleurs pas à sa place ici. Il ne voulait pas. Il observait le discours engagé et inspirant de sa Protégée, mais le Gardien ressentait ses hésitations quant à ses propres paroles. Sa présence apaisait ses tourments et lui permettait de ne pas être morose continuellement. Mancinia avait même eu des tentatives d'approches pour le convaincre que sa participation à cette Guerre du Pardon ... permettrait le Pardon des Anges.

Messager des Cieux.

Et certains le pensaient visiblement, quoi qu'il advienne. Cette idée était la seule chose qui lui permettait de tenir sans laisser la morosité le dominer, probablement. Le Soldat lui souriait aimablement, ce surnom lui venait des expéditions de récupération des prisonniers de la Terre Blanche. On lui prêtait des dons incompréhensibles, car celle-ci avait conduit à la récupération du Sud avec l'intervention des Sorciers ... et maintenant, ce combat qui devait, potentiellement, amener le regard bienveillant de Sympan sur eux. Peut-être. Il pouvait tout aussi bien leur arracher le coeur, à nouveau. Que ce soit réel ou un mensonge, si cela permettait de nourrir les Espoirs de son peuple, alors ... Neah l'acceptait.

... Oui ?

Son regard était dur, contraignant le Soldat à baisser les yeux.

Veuillez me pardonner, Capitaine Katzuta. Souhaitez-vous prendre la parole ?

Une tentative de l'encourager à suivre les pas de sa Protégée, lui qui ne souhaitait guère apporter son avis.

Non. Je pense que nos représentants diplomatiques sont plus à même de le faire.

Les Belegad lui avait, étrangement, donner une très bonne impression. Seulement, si Stenfek désirait se libérer de la domination qu'incarnait Bouton d'Or, eh bien ... Que cette maudite cité le fasse au lieu de réaliser ce spectacle ridicule.

Votre discours était très inspirant, Matasif Leenhardt.
Je vous remercie.

L'Humaine était venue à leur rencontre dans le but de passer un peu de temps en sa compagnie, des moments rares. Il se promettait ... de prendre un congé avant leur installation définitive, de lui accorder du temps. Plus de temps encore. Elle mis sa main sur son épaule, comprenant son anxiété sans même qu'il ne l'énumère. Ce geste eu tôt fait d'encourager les regards et les sourires attendris des autres membres de la délégation. Ils n'étaient pas des Liés communs ... C'était délicat, aux yeux du Capitaine, d'essayer de faire comprendre avec des mots ce qu'il ressentait. Cela rendait sans doute quelques événements plus simples que de ne rien dire et de seulement ... ressentir. Il prit une longue respiration en se remémorant sa dernière venue dans cette Cité. Est-ce qu'il avait eu le loisir de la voir si paisible au milieu d'une guerre ? Le ciel était déchiré dans un combat qui avait embrasé la ville. La Recrue d'alors avait abattus ses ennemis, sans se soucier de leur race. Démons ou Réprouvés, peu importait. Il avait d'ailleurs échappé à la mort plusieurs fois. Au milieu de la rue, marquant un temps d'arrêt en observant les environs, il eu un sursaut de souvenir bien plus net. Ironiquement, c'était ici, quelque part, au milieu des ruines, qu'il avait rencontrer Isiode et Isley Yüerell. Il avait vu Zane Azmog de loin, se déchaînant contre les soldats angéliques. Il avait vu ... Trop de choses. Et à l'époque ... Il ne savait rien. Ce n'était même pas un combattant complet. Désormais, les choses étaient différentes.

Kendov do Silus.

Cet appel émanait de derrière lui, se retournant pour observer une arène surélevé, l'Ange comprit la demande du Réprouvé qui l'observait regardant, un sourire aux lèvres et un regard féroce.

D'accord.
... Capitaine ?

Sans donner de réponse, il engageait son pas vers le lieu des duels, en étant débarrassé du haut de son uniforme et de ses armes, laissées aux bons soins de Mancinia.

Sans armes ? demanda le Réprouvé.
Mes poings parlent mieux.

Son adversaire se redressait, libérant son précédent concurrent de son emprise tout en renversant sa tête sur le côté, craquant son cou. Visiblement, le Réprouvé avait très envie de tâter des coups de la Canine Blanche. On le disait horrible avec ses adversaires, sans la moindre pitié. Aucun des deux ne se ferait de cadeaux, surtout que pour être Capitaine de la Troupe de Boadicēa, le corps à corps restait le domaine de Neah. Ce qu'il voulait réellement c'était noyer ses souvenirs dans le sang et le sable, ayant des comptes à régler avec sa conscience en ces lieux, ce serait l'occasion rêvée. Cette arène improvisée restait assez accidenté, comme un reflet de la réalité du terrain, mais cela ne serait peut-être pas son plus grand obstacle. Combattre un Réprouvé avec un unique oeil, ne serait pas aisé, car si un Démon monopolisait la vision avec sa Forme Démoniaque, le Bicolore restait d'une stature normale. Jamais il ne ploierait le genou pour autant, aussi, l'assaut lui paru moins surprenant qu'escompté. Les attaques de son adversaire étaient plutôt lentes, ses assauts n'étaient pas contraignants à éviter. Toutefois, l'expérience l'amenait à maintenir un certain niveau de vigilance. Un seul coup de sa part serait assez violent pour l'envoyer au tapis, malgré son agilité déplorable. Et les coups tordus, ses adversaires connaissaient aussi ...

Combien de temps durait cet échange d'esquives et de coups dans le vide ? Aucune idée. On aurait presque dit une danse répété depuis plusieurs semaines. C'était plaisant. Tandis que son adversaire s'élançait dans sa direction, Neah eu un mouvement sur le côté et tendait le bras, le Reprouvé ne comprit pas tout de suite et eu ses membres supérieurs paralysés sous son corps. Est-ce qu'il venait de perdre contre ce petit Ange de rien du tout ? Oui, totalement. Il l'avait même renverser sur le sol dans trop de peine, coupant son souffle. Personne ne devait sous-estimer Yüerell. La Compagnie lui avait tout apprit ... et il ne pouvait que l'honorer au mieux.

Un autre volontaire ?

Un sourire naquit sur ses traits, loin d'être méprisant. Les Réprouvés restaient de grands guerriers, on ne pouvait rien leur enlever de cet essence et de ce respect de leurs adversaires. Son regard croisait celui de Mancinia, qui l'encourageait. En fait ... C'était agréable de se battre pour quelqu'un.

1170 mots


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Evénement | Priam, Laëth & Dastan


RP précédent : Le Grand Fessetival de la Charité.


L’alcool coulait à flots, des feux crépitaient çà et là et les rires craquelaient le cours des conversations. Dastan courait entre les tables avec d’autres enfants, transportés par la joie communicative de leurs aînés. C’était un soir de fête. La malédiction qui pesait sur les Ailes Bicolores avait été levée : ils pouvaient à nouveau enfanter des Bipolaires. Des naissances inespérées – quoique toujours rares – avaient été constatées. Le rouquin se moquait bien des implications. Il festoyait comme les autres, avide de célébrer le renouveau apporté par l’Odon do Dur. La bataille lui avait laissé le goût d’un rêve. Loin d’être effrayé par sa mort factice, il fanfaronnait dès qu’on lui parlait des événements. Comme ses semblables, il avait été choisi par les Zaahin ! Il valait autant que n’importe qui ! Peut-être entretenaient-ils même de grands desseins à son égard ? Ils avaient pu mesurer sa détermination et sa bravoure ! Il avait combattu vaillamment en leur honneur et il avait trépassé dignement !

C’était faux. Il avait péri écrasé par l’énorme pied d’un Goled, mais il relatait peu souvent cette version. Il en inventait des dizaines, toutes plus improbables les unes que les autres. Personne ne le croyait, sauf les plus crédules – des enfants de son âge, ou plus jeunes que lui, qui posaient sur sa silhouette de grands yeux admiratifs. Quelques-uns s’étaient énervés de ses mensonges, mais la plupart les avait accueillis avec un sourire amusé et attendri. Il n’était qu'un gamin trop enjoué, qui ne connaissait rien des vicissitudes de la vie. Son comportement prêtait plus à sourire qu’à s’agacer. Les adultes y voyaient des rêves sans fondement, des fantaisies enfantines, et peut-être, par instant, une flamme vive qu’il fallait entretenir pour faire de lui le digne descendant des guerriers.

Vrael gardait un bras autour des épaules d’Asha, souriant. Il était heureux pour son peuple. La levée de la malédiction était source de soulagement et d’extase. Toutefois, une ombre habitait son cœur. Face à la découverte, sa compagne avait fait bonne figure aussi, cependant, il avait vu le remords et la déception creuser ses prunelles. S’ils avaient attendu plus longtemps, ils auraient pu avoir des Réprouvés de leur sang. Priam et Laëth seraient nés avec les ailes du Bien et du Mal – eux, ou d’autres enfants, selon le bon vouloir des Héros. Néanmoins, ils n’avaient pas patienté, et les Zaahin n’avaient pas mené leur bataille plus tôt. De leurs unions étaient nés deux Anges ; une traîtresse à sa patrie et un pleutre qui n’osait plus rejoindre son peuple.

Le Manichéen tourna la tête et effleura l’oreille de son amante du bout des lèvres. Son nez se perdit dans les nattes qui partaient de ses tempes. Elles avaient l’odeur du blé et de la terre. Ils étaient assis sur un banc, près d’amis. « Je vais chercher de la charcuterie. » dit-il en la relâchant et en se levant. « Je viens avec toi. » Elle le suivit. Les tranches de bicorne séchées exhalaient un fumet appétissant. Ils s’en servirent. Vrael regarda Dastan passer en courant. « Il a l’air inépuisable. » - « C’est l’excitation. Il va s’écrouler de fatigue dès qu’elle retombera. » Elle s’approcha, dans son dos, colla son corps au sien et l’enlaça. « J’en connais d’autres comme ça. » - « Ah oui ? » Il sourit. Il sentit sa main glisser de son torse jusqu’à son entrejambe. « Hum. » Il posa sa paume sur ses doigts. « Tu veux que je te fasse un petit Réprouvé ? » - « Pour me retrouver avec un putain d’Ange dans le ventre ? Non merci. » Elle serra sa poigne, ce qui le fit grimacer et grogner de douleur. « Je veux plus d’enfants mais ça n’empêche pas de baiser. » Elle le relâcha pour le contourner et lui faire face. « On n’est peut-être pas une bonne combinaison. Deux tentatives, deux échecs. » Il repoussa une mèche de cheveux de sa femme derrière son lobe. « Jamais deux sans trois, non ? » - « Hum. » Ses mains s’ancrèrent à sa taille et il l’attira à lui. « Moi je trouve qu’on fonctionne plutôt bien, ensemble. » L’homme se pencha et saisit ses lèvres, tout en la poussant loin des tables. Il entendit quelqu’un les héler et quelques remarques graveleuses – qui les firent tous deux sourire ou glousser. Ils ignorèrent tout ce qui aurait pu les interrompre et se détachèrent pour échapper aux lieux des festivités. Le couple trouva le couvert de l’ombre d’une grange, à l’abri de la lumière des astres. Vrael plaqua Asha face contre le mur. Son bassin épousa le sien, et lorsqu’il l’eut dévêtue, il fit bien plus encore.



« Priam ? » Laëth venait d’entrer dans l’écurie. Elle s’avança, dans sa tenue d’entraînement. Dès la fin de celui-ci, elle s’était précipitée jusqu’ici. Son cœur tambourinait comme un cerfeuil trop à l’étroit dans son étable, avec la folie de celui qui veut s’enfuir. « Tu as entendu la nouvelle ? » Son aîné n’était pas devant elle. Il s’occupait de l’un de ses chevaux, ce bel étalon aux ailes givrées – Nyellë. « Quoi ? » - « La tante de Jenna a accouché d’un Réprouvé... » Priam se figea, puis sortit du box. Dans l’allée, il dévisagea sa cadette. Le trouble criblait ses rétines. « D’un Réprouvé ? » - « Oui, une fille, avec une aile blanche et une aile noire… Ce n’est pas la seule, apparemment. Les gens racontent que c’est la résultante d’Odon do Dur. » Ils se scrutèrent en silence. Le poids de la nouvelle leur coupait presque le souffle. « Je… C’est… » Quelque chose trembla ; un mouvement dans l’air, doux et mélancolique, sans provenance, sans consistance, sans existence autre que l’écho qu’il propageait dans leur esprit. Un murmure invisible, la tétanie de la surprise.

Sa cadette fondit sur lui et se jeta dans ses bras. Il la serra contre lui. Ils savaient ce que cette nouvelle représentait pour leur peuple d’origine. Ils savaient, parce qu’ils étaient ces déceptions, ces déchets, ces déjections dont personne ne voulait. Comme les Bipolaires, ils avaient été éduqués pour vivre avec le désir de voir ce jour advenir. Néanmoins, cela avait toujours semblé trop utopique. La réalité qui venait les frapper bouleversait leurs certitudes. Elle leur donnait envie de s’insurger contre les injustices natales qu’ils avaient subies. Elle diffusait un sentiment d’accablement profond. Ce qu’elle disait, c’était qu’ils auraient pu être des Réprouvés, ils auraient pu ne pas essuyer toutes ces remarques et tous ces coups, ils auraient pu ne pas avoir à choisir, et s’épanouir là-bas, entre les tournesols orientés vers le soleil. Laëth aurait pu ne jamais voir dans les yeux de ses parents le dégoût qu’elle leur inspirait ; Priam aurait pu valoir autant qu’un Manichéen sans fournir le double d’efforts. Elle n’aurait pas eu besoin d’ériger des semblants de barrières branlantes pour survivre à leur brutalité ; il n’aurait pas eu besoin de se teindre une aile pour ressembler à ceux qu’il admirait. Le brun enfouit son nez dans les cheveux de sa sœur. Ses yeux le piquaient plus que les ongles qu’elle enfonçait dans son dos. « Ça… ça laisse de l’espoir pour toutes les autres races. Les Anges y compris… » Elle ne dit rien. Elle repensa à ce que Kaahl lui avait révélé, dans la maison de poupées. La tempe contre son torse, elle inspira. « Peut-être. » Sans le savoir, ils songèrent tous les deux à Za et à l’enfant qu’elle portait. Qu’il fût de Priam ou non, il serait peut-être un Bipolaire.



« Mine de rien, il y a du progrès ! Cette fois, tu n’es pas tombée dans le tas de fumier. » Laëth replaça derrière son oreille une mèche de cheveux rebellée par l’attitude du bicorne, qui l’avait éjectée de son dos quelques secondes plus tôt. « Gnagnagna. Tu verras, un jour, je dompterai une de ces bestioles. » - « Ben tiens, j’ai hâte de voir ça. Ça promet de belles chutes. » Un sourire amusé étira les lèvres de Priam. Ils étaient sur place depuis quelques jours et logeaient dans la maison qu’il avait reçue à la suite d’Odon do Dur. Replonger dans l’ambiance réprouvée les galvanisait, bien qu’ils s’apprêtassent à délivrer un discours qui irait à l’encontre de leurs convictions. C’était un exercice, comme celui de résister aux coups de dos solides de la bête à cornes. « Je te ferai grimper dessus aussi, que je rigole un peu. » La brune épousseta délicatement son pantalon. « C’est qu’elle est devenue précieuse à force de traîner avec des emplumés. » - « Roh, ta gueule. » sourit-elle en lui mettant sa main dans la figure comme pour la cacher et l’éloigner d’elle. Il lui colla un grand coup de langue dans la paume. « Ahhh, Priam ! T’es dégueulasse ! » Il éclata de rire, tandis qu’elle s’essuyait sur sa chemise.

La fratrie parcourut les rues. De temps à autre, ils s’arrêtaient pour déguster quelques mets au goût de l’enfance, puis repartaient profiter des festivités. « Est-ce que le Fus’Naakar’Lus prévoit d’aller se battre, comme l’Edmund Faasnu ? » Un sourire taquin courbait ses lèvres. « Faut bien que tes entraînements servent à quelque chose. » poursuivit-elle sur le ton de l’espièglerie. « Mouais, on verra. D’abord, il faut que j’aille voir le type dont m’a parlé Nalim. » - « Ah, oui… » Il regarda autour d’eux. « Je ferai mieux d’y aller maintenant, d’ailleurs. On se rejoint aux combats ? » Elle acquiesça. « À tout à l’heure. » Elle lui colla un baiser sur la joue, puis chacun tourna les talons.

L’Ange marchait d’un pas tranquille lorsqu’elle se sentit brutalement tirée sur le côté. La surprise l’empêcha de crier, même quand son dos se retrouva appuyé contre un mur. Son cœur s’emballa et un couteau se matérialisa immédiatement dans sa main. Comme l’inconnu levait le bras pour lui présenter un bracelet qu’elle connaissait bien, l’étonnement ponctua ses rétines. Un soupir de soulagement lui échappa, et l’arme disparut. Elle portait aussi la bague qu’il lui avait offerte. « Ça va pas bien ? Tu m’as fait peur. » Elle le dévisagea, curieuse. Il était plus imposant qu’en temps normal. Si son aura ne manquait jamais de faire effet, la corpulence de cette apparence avivait ses artifices. Il ressemblait à un Réprouvé, et elle se demanda pourquoi il avait fait ce choix et s’il allait représenter les Magiciens ainsi. Vraisemblablement pas. Dans tous les cas, le voir sous d’autres traits que ceux dont elle avait l’habitude la troublait, sans qu’elle sût dire de quelle façon. Seule l’expression de son regard demeurait inchangée. « Oui. » Ce qui devait sans doute sembler étrange à tous ceux qui avaient connaissance de ses origines. « C’est surtout pour Priam. Pour la diplomatie. » Elle hésita un peu, cependant, puisqu’il était l’un des premiers concernés, elle pouvait bien le lui dire. Elle s’apprêtait à le faire mais s’interrompit, étonnée. Après une seconde d’hésitation, elle l’embêta : « Ne reste pas trop longtemps ici, tu commences à ressembler à un Réprouvé. » Amusée, elle sourit. Elle regarda de chaque côté de la petite cour, avant d’approcher son visage pour sceller ses lèvres aux siennes. Elle glissa un bras dans son dos et nicha sa main libre dans le creux de sa nuque afin de se rapprocher de son corps. Il suffisait d’un regard pour qu’il l’enivrât : le toucher était encore bien pire. Il gommait toutes les frêles barrières de rationalité qu’elle pouvait avoir en sa présence. Toutes ses réticences, tous ses doutes et toutes ses peurs s’évanouissaient en volutes illisibles.

Une rougeur teinta légèrement ses joues quand elle sentit sa main parcourir sa peau, tant due à la surprise suscitée par son comportement que par l’idée qu’il était, d’après les mœurs angéliques, déplacé. Cependant, elle ne chercha pas à se soustraire à son contact – sans doute parce que les codes réprouvés étaient trop profondément ancrés dans sa chair. Au contraire, sa bouche se fit plus pressante, d’abord sur ses lèvres, puis dans son cou. Ses dents se refermèrent doucement sur son épiderme. Son souffle se brisa contre celui-ci. « Son mentor a jugé que ce serait... » Elle déglutit, sa tête se renversant vers l’arrière. « Un bon exercice. » murmura-t-elle. Sous l’étreinte d’un désir qui ne faisait que grandir, ses doigts se crispèrent dans son dos. Dans une griffure avide, ils descendirent sur ses fesses, jusqu’à se faufiler dans son pantalon pour entourer l’objet de son plaisir, et trouver les mouvements qui le feraient frémir. Ses lèvres reconquirent les siennes tandis que ses jambes faiblissaient sous ses assauts, avec pour preuves de sa fébrilité les gémissements qu’elle s’efforçait de retenir. C’était difficile.

Le souffle court, Laëth se blottit contre lui. Elle avait conscience qu’ils ne resteraient pas ensemble et qu’il l’avait attirée ici pour voler quelques instants au cours de leurs journées. « Ça fait bizarre de ne pas enlacer le même corps que d’habitude. » susurra-t-elle dans un sourire. Pourtant, cela ne lui avait pas semblé si étrange que ce à quoi elle avait pu s’attendre. Peut-être parce qu’elle savait que c’était lui, et qu’elle s’y sentait plus intimement connectée que par la vue et les apparences ? « Si tu restes un peu à Stenfek, passe me voir, d’accord ? On ne va pas partir tout de suite, avec Priam. » Comme elle relevait la tête, elle sonda ses yeux glacés. Au cas où, elle lui donna leur adresse, puis l’embrassa une dernière fois. Après s’être assurée d’apparaître aussi présentable qu’avant leur échange, elle quitta l’abri de la cour.



« Ça pue ! » s’exclama Dastan. Asha lui colla une tape derrière la tête. « Aïeuh ! » - « Tais-toi. » - « Mais ça pue vraiment ! Ils puent, les gens de Stenfek ! » - « Chut ! » Le gamin croisa les bras et emprunta un air boudeur. Il gardait le nez froncé, parce que d’après ses narines, l’odeur qui régnait était véritablement pestilentielle. Tous ses repères olfactifs s’étaient écroulés. Il n’y avait ni la senteur de la terre, ni celle du fumier, ni celle des bêtes, du blé, des feux, de la sueur ou de tout autre élément indissociable de Lumnaar’Yuvon. Le parfum de la ville ne convenait pas à son sens habitué à celui de la campagne. Il soupira. Vrael marchait juste devant eux, droit et fier. Ses deux parents portaient leur tenue agricole et leurs armes. Ils étaient là pour il ne savait trop quoi et, bien que ça n’impliquât pas de combat, les deux Réprouvés s’étaient parés de leurs atours guerriers. La mentalité rustre et primaire des péquenauds, diraient sans doute les habitants de Stenfek. « Pourquoi on était obligés de venir ? Je comprends même pas pourquoi Erza vient ici… ça pue, et c’est moche. » Il renifla avec mépris. « Encore une remarque et je t’empale sur un Bicorne. » La voix de sa mère avait claqué de façon si sévère qu’il se tut. « Mes doigts me disent que c’est toi que je devrais empaler pour que tu te détendes, Asha. » Le brun s’était tourné vers eux et souriait malicieusement à sa compagne. Elle grogna, comme elle le faisait souvent lorsqu’il la contrariait et la réjouissait à la fois. Elle était d’une humeur exécrable depuis qu’ils avaient mis les pieds dans la cité.

Hazaan les avait envoyés, eux et d’autres gens de Lumnaar’Yuvon, pour assister et participer aux discussions relatives à l’indépendance de la capitale. C’était le sujet de vifs débats au sein du peuple, raison pour laquelle ils avaient décidé de s’ouvrir en faisant appel à l’avis des autres races. Dastan observait tout avec un regard à mi-chemin entre la curiosité, la méfiance et l’écœurement. Il jugeait, aussi bien qu’une certaine Sorcière qu’il n’avait pourtant jamais croisée – le jugement était peut-être compris dans le gène de la rousseur. Ils étaient déjà là depuis plusieurs jours et le Kiir’Sahqon avait pu entendre plusieurs discours. Un berger avait raconté une histoire sur des loups et des moutons à laquelle il n’avait rien compris, un éphèbe avait palabré sur sa chevelure, une Ange avait défendu cet imbécile d’Atthirari, une Réprouvée avait traité les gens de Keizaal de gros cons, et désormais, c’était une adolescente détestablement enjouée qui piaillait pour l’unité. Dastan, bras croisés, dévisageait la rouquine avec dédain. Il ne comprenait pas pourquoi on avait invité des étrangers à s’exprimer. Bien qu’il n’y connût rien, il était certain que les affaires réprouvées ne les regardaient pas. Leur présence lui hérissait les poils et lui donnait envie de les frapper à grands coups de hache. Le garçon qui succéda à l’adolescente ne valait guère mieux. Il parlait un langage que personne ne comprenait : le rouquin décrocha dès les premières phrases. Il bâilla bruyamment et se détourna de l’estrade.

Son odorat le guida jusqu’à un étal chargé de charcuterie. Il en prit beaucoup trop pour un enfant de son gabarit et s’attela à une dégustation aussi bruyante que joyeuse. Son assiette à la main, il se balada entre les animations. Songeant finalement qu’il risquait une réprimande s’il s’éloignait trop longtemps, il rejoignit ses parents en trottinant. Ils étaient toujours devant la tribune. Le jeune Réprouvé allait gaiement leur proposer de la charcuterie lorsqu’il repéra leurs visages crispés d’une myriade d’émotions entremêlées. Encore un débile qui devait faire un discours plus débile que lui-même ! Il leva le nez, sur la pointe des pieds. Un homme et une femme faisaient face à la foule. Il avait de courts cheveux bruns, une chemise grise bouffante et un pantalon noir. Son allure était franche et assez peu engageante – elle rappelait vaguement celle des gens de Lumnaar’Yuvon, avec plus de légèreté et de douceur. Elle portait un haut ample couleur émeraude et un pantalon gris ceignait sa taille. Ses longues mèches frémissaient sous la brise. Elle avait un air à la fois sérieux et mélancolique, en écho aux plis soucieux, presque peinés, qui barraient le front de l’homme. Quelque chose, dans leur physionomie, provoqua chez Dastan une sensation de déjà-vu. Il regarda à nouveau ses parents, et devant leur air attentif, monta sur une caisse depuis laquelle il prêta l’oreille.



La boule au ventre, Priam évitait de perdre son regard sur l’assemblée. Il croisa celui de sa sœur, qui lui sourit doucement. À l’instar d’autres Anges, ils avaient été envoyés à Stenfek pour mettre en avant la position des Anges concernant l’indépendance de la capitale. Afin de garantir la paix, ils étaient pour la scission. C’était le discours officiel. Officieusement, Nalim lui avait expliqué qu’il était plus stratégique, pour les Ailes Blanches, de voir Keizaal se séparer du reste. Si Lumnaar’Yuvon refusait obstinément de s’engager diplomatiquement envers les Immaculés, la cité serait peut-être plus conciliante. Considérant, entre autres, que des Anges continuaient à naître de l’union des Réprouvés et qu’il s’agissait d’une ville pivot au cœur des Terres d’Émeraude, continuer à l’écarter des plans angéliques était une perte dommageable. Pourtant, les opinions personnelles des deux Belegad différaient. Comme leurs parents, ils étaient opposés à l’indépendance. Ils auraient pu défendre cette ligne politique, à leurs risques et périls. Compte tenu des réputations qu’ils avaient déjà sur le dos et de l’importance grandissante qu’ils prenaient, ils ne pouvaient néanmoins plus s’autoriser ce genre de libertés. Le mentor de Priam l’avait encouragé en prétextant qu’en diplomatie, il devrait parfois défendre des positions qu’il ne partageait pas du tout.

Laëth, de son côté, était montée sur la tribune pour deux raisons. Soutenir son frère et apprendre à jouer la comédie – sur scène, on n’était jamais tout à fait soi-même. Elle manquait de filtres. Le mensonge la fuyait comme la vérité des autres l’esquivait. Pourtant, elle en savait trop pour se révéler incapable de masquer ses connaissances ou de les travestir pour que l’éclat du vrai ne transparût pas. C’était une question de survie, pour elle, pour Kaahl, pour le lien puissant qui l’attachait à son aîné. Elle inspira et se rapprocha de lui, jusqu’à glisser ses doigts entre les siens. Elle le sentait tendu. Ils n’avaient jamais fait de discours. Sur Omi’Ake, Priam avait pris la parole face à un groupe de soldats, mais il y avait été poussé par le feu de l’action. Il s’en était à peine rendu compte. « Eave. Priam et Laëth Belegad, Kendov do Silus, représentants angéliques. » commença-t-elle. Ce n’était pas le seul titre qui leur incombait, désormais, mais ce serait sans doute le plus utile dans cette configuration – celui qui les sauverait d’attaques de quolibets et de légumes. Les Guerriers du Pardon suscitaient le respect et la reconnaissance des Bipolaires, d’où qu’ils vinssent. « Si nous nous présentons à vous aujourd’hui, c’est parce que notre peuple nous envoie, sur l’invitation du vôtre, et parce que malgré les tensions qui ont cours entre nos deux nations… » Elle hésita, frémit, se redressa. Son aîné serra ses doigts autour des siens. « Les enfants de Réprouvés ne sont pas ce qui séparent les Manichéens des Immaculés, mais le pont qui les relie. » intervint-il devant l’absence incontrôlée de sa sœur et malgré sa propre appréhension. C’était ce qu’il défendait auprès de Nalim, et ce qu’il défendrait toujours. « C’est pour cette raison, aussi, que notre intervention est pertinente. » Laëth parut se reprendre. Elle secoua doucement la tête et poursuivit : « Nous sommes nés à Lumnar’Yuvon et, même si nous ne sommes pas restés, nous connaissons les troubles qui agitent le peuple réprouvé. » Elle se tut, craignant une salve d’injures, des « tahrodiis » virulents, mais rien d’autre ne trancha l’air que le brouhaha ambiant de la capitale. Ils savaient ce qu’ils devaient dire. Ils se l’étaient répétés, plusieurs fois, au cœur de la maison nouvellement acquise par son frère au sein de la capitale.

« Durant toute notre enfance et notre adolescence, nous avons vécu en opposition avec Keizaal et dans la détestation de celle-ci et ses habitants. Nous savons les différends qui opposent ces deux cités. » - « Nous les avons expérimentés au quotidien, à travers des discours négatifs à l’encontre de la capitale, à travers des insultes en rapport avec la cité ou ses habitants, à travers les pratiques, même. » enchaîna Priam, visiblement plus serein. Le plus difficile, c’était de décrocher les premiers mots. Il eut un sourire vague. « On ne se rendait jamais à Keizaal, par exemple, alors que nous allions régulièrement à Gein’Draakul et à Gona’Halv et que nous avons de la famille ou des connaissances à chaque endroit. » Son père avait des parents proches dans la capitale. Ils avaient coupé les ponts depuis longtemps. « Les différences entre Keizaal et Lumnaar’Yuvon sont celles qui suscitent le plus de virulence, au contraire des divergences qui peuvent exister avec les autres territoires. Des modes de vie diamétralement opposés divisent les habitants de ces deux lieux. À une toute autre échelle, ils scindent aussi des familles ou des amitiés. À Lumnaar’Yuvon, il n’y a pas de tolérance pour celui qui part pour Keizaal, alors même qu’il demeure au sein d’une unique nation. » De l’avis des deux Belegad, ce n’était pas vrai. Ils n’avaient que les gènes en commun. Pour le reste, un gouffre les séparait. « Nos grands-parents paternels ont eu beaucoup d’enfants, dont certains ont choisi la voie de Keizaal. Ce choix a conduit à la rupture de la plupart des liens familiaux et amicaux qu’ils avaient à Lumnaar’Yuvon ; et le temps passant, ils n’ont jamais été restaurés. Ce changement de lieu de vie, d’habitudes et de perspectives a toujours été perçu, dans ma famille, et dans bien d’autres, comme un crachat jeté au visage des ancêtres et des terres. » Ceux qui s’acclimataient à un changement d’environnement faisaient des efforts conséquents, presqu’autant que ceux qu’il avait dû fournir pour s’intégrer à la société angélique, et perdaient tout autant. La loyauté, l’amour pour sa terre et la fierté étaient des valeurs trop fondamentales pour qu’il n’y eût aucun risque à les trahir. « Même aux Jardins de Jhēn, cette animosité entre Keizaal et Lumnaar’Yuvon se ressent. » L’Ailée pensa à Jenna. Les deux jeunes femmes ne s’étaient pas tout de suite bien entendues. Elles avaient passé plusieurs semaines à se dévisager et à se tester. « Les enfants des deux territoires se jaugent et se défient. Cependant, la plupart parvient à surpasser la méfiance et le mépris qu’inspire l’autre. » Un sourire, entre la désillusion et l’amertume, courut sur ses lèvres. « Vous me rétorquerez que c’est sans doute le caractère angélique. » Elle pressa la main de Priam. « Je pense que ça aide, oui, mais que ça ne fait pas tout. Je pense aussi que chacun d’entre vous détient cette part en lui et qu’elle peut se manifester comme elle se manifeste chez les Ailes Blanches. » Elle l’avait vue à l’œuvre. Les étreintes et les encouragements de ses parents étaient des souvenirs aussi suaves que ceux de leurs coups et de leurs insultes étaient douloureux. « Gona’Halv fonctionne très bien alors qu’elle reçoit des Réprouvés de tous horizons ; Gein’Draakul aussi. Ces enfants des Deux Rives ont décidé de vivre-ensemble, et c’est ce qui est le plus important. Notre père a décidé de ne plus entretenir de lien avec les membres de sa famille présents à Keizaal. Peu importe les raisons ou les pressions qui l’y ont poussé, peu importe de savoir si elles sont justes ou non. C’est son choix. Vous n’êtes pas définis par vos similitudes et vos différences, mais par les choix que vous faites : et c’est de cela que doit découler la décision relative à Keizaal, d’un choix conscient. »

Son aîné s’avança un peu. « Le peuple réprouvé n’est pas dans une impasse, mais à un tournant décisif de son existence. À titre personnel, je ne pense pas que la situation actuelle soit tenable plus longuement. Si nous sommes réunis ici, c’est parce qu’un changement se profile, dans la lignée de ceux que les Zaahin ont entamés. La route empruntée reconfigurera bien des choses et en définira tout autant pour l’avenir. Je ne suis, toutefois, pas extrêmement soucieux à ce sujet : les Zaahin veillent sur un peuple fort, persévérant et, n’en déplaise à des races qui croient détenir le monopole du savoir et de la science, intelligent, d’une façon qu’ils ne comprennent peut-être pas. » Il sourit, moqueur. Les concernés se sentiraient visés, s’ils ne péchaient pas par orgueil. « Il a toujours su relever les défis qui s’imposaient à lui et rebondir derrière chaque chute. Le sort de Keizaal n’est qu’une épreuve supplémentaire. Comme l’a dit ma sœur, il ne s’agit pas de se laisser emporter par des passions ou de sombrer dans la rage d’une bataille, mais de prendre une décision en pleine connaissance de cause et à force de discussions. » Il croyait fermement qu’un dialogue pourrait conduire les deux cités à coopérer ; bien qu’elles se détestassent, elles étaient attachés l’une à l’autre. « Une union plus poussée ne paraît pas invraisemblable. Les Réprouvés sont attachés à leur territoire ; la terre est l’un des fondements de leur culture, un socle commun sur lequel repose toute leur civilisation. Voir une partie s’en détacher reviendrait quasiment à l’amputation d’un membre. Cependant, une telle réconciliation requerrait des concessions, des deux côtés. » Il s’arrêta. Ses iris dorés coururent sur l’assemblée. « Il faudrait que Lumnaar’Yuvon et Keizaal soient prêtes à accéder aux demandes de l’une et de l’autre afin d’élaborer un compromis. Gein’Draakul et Gona’Halv pourraient guider des discussions qui iraient dans ce sens. D’autres médiateurs pourraient être trouvés parmi les races alliées. » Il songeait aux Déchus mais ne les évoqua pas ; c’eût peut-être été de mauvais goût venant d’un émissaire angélique, étant donné les relations diplomatiques tendues qui persistaient aussi avec ce peuple. « Cependant, une séparation paraît plus réaliste. Keizaal semble avoir déjà choisi l’homme qui sera à sa tête, continue à s’ouvrir au monde et à se sophistiquer, quand Lumnaar’Yuvon clôt toujours plus ses frontières, protège ses terres et profite de sa paix. » Le parfum doré des champs chatouilla ses narines, comme s’il s’y trouvait. « Les deux territoires sont campés sur leur position, et c’est une escalade de tensions qui a lieu depuis longtemps, désormais. Plus que les modes de vie, ce sont désormais les mentalités qui s’entrechoquent. À quand le tour des armes ? » Il sonda la foule sans véritablement regarder les individus présents – leurs expressions le déconcentraient tant qu’elles auraient pu briser le charme qui pesaient sur les deux orateurs improvisés. « La Conciliation bute parfois sur la réalité, et pour se poursuivre, elle doit tenir éloignés les irréconciliables. » Un silence flotta.

« Cela dit, la Dovahkiin ne peut pas purement et simplement accepter l’indépendance sans garanties ou contreparties, au risque de paraître faible ou mauvaise stratège ; et en l’état actuel des choses, rien ni personne n’est en mesure de faire fi de son autorité. » La préservation de la paix avait un prix. « En outre, une scission apaiserait sans doute les tensions, mais ses conséquences ne doivent pas être oubliées. Keizaal est un pôle intellectuel et politique ; elle n’a pas de ressources propres exploitées. Il n’y a rien à commercer sinon du savoir, et chacun conviendra qu’on ne remplit pas des ventres à coups de dictionnaires. Dans le cas d’une séparation, ses dirigeants et ses habitants devront mettre à profit leurs talents pour construire une économie. Ce n’est pas infaisable, surtout en utilisant la magie, mais c’est un dur labeur. De la même façon, Lumnaar’Yuvon n’a pas de réel corps diplomatique, ni d’archives ou d’instances politiques. J’ai conscience que ce territoire n’aura probablement jamais vocation à se transformer en pôle gouvernemental, mais si Keizaal s’en va, il faudra sans doute reconfigurer le rôle de l’une des cités pour y inclure les fonctions diplomatiques et politiques. » Un sourire apaisa la courbe de ses lèvres tandis qu’il accordait un regard à Laëth, qui ne l’avait presque pas quitté des yeux. Ils avaient convenu qu’il mènerait la majorité de l’argumentation. C’était lui, le diplomate en devenir, pas elle. « De nouveaux défis pour les Réprouvés. » ajouta-t-elle, si doucement qu’il fut probablement le seul à l’entendre. Il acquiesça, puis porta à nouveau son regard au-delà de la tribune. « Vous êtes un peuple de combattants émérites, mais vous avez assez souffert des guerres. Vous venez à peine de récupérer les droits que la dernière vous a volés. Pourquoi se lancer dans de nouvelles querelles quand des négociations pourraient aboutir au même résultat ? Si la paix entre vous n’est tenable qu’avec un mur que rien ne saurait franchir, alors construisez-le. » Il plaidait la fin d’une époque, la fin d’un système, la fin de ce qu’il avait toujours connu. Il battait en brèche ses préjugés et les doctrines familiales pour défendre les intérêts d’un peuple qu’il avait adopté, par défaut. Cela faisait-il de lui un traître ? Il pinça les lèvres, avant de reprendre : « Construisez-le ensemble ; Lumnaar’Yuvon, Keizaal, Gein’Draakul et Gona’Halv. » Sans préavis, une pensée le heurta. « Ce n’est pas en tirant un trait sur l’histoire que l’on peut avancer. La prendre avec soi, en tirer les leçons et porter dessus un regard tranquille vaut mieux que cent batailles inefficaces contre les démons du passé. » Il ne songeait pas à lui. Il n’avait jamais abandonné ce qui l’avait construit. C’était sa cadette qui avait tout voulu brûler. Il sentit ses ongles pénétrer la chair du dos de sa main. « Ce n’est pas en coupant parfaitement les liens entre Keizaal et Lumnaar’Yuvon et en s’ignorant que le peuple réprouvé progressera, au contraire. Éloignez-vous, mais restez unis face à l’adversité, comme vous l’avez toujours été. Rappelez-vous ce qui fait de vous des Réprouvés, plutôt que ce qui fait de vous des gens de Lumnaar’Yuvon, de Keizaal, de Gein’Draakul ou de Gona’Halv. Sachez laisser une porte de communication. Ce n’est pas en demeurant sourd et muet que l’on chante les plus belles épopées. »

Contre toute attente, une petite boule de boucles rousses et d’ailes rouges chuta à moitié aux pieds des deux Immaculés. Elle se défit pour se relever : le visage cramoisi de colère d’un gamin d’une dizaine d’années frappa leurs rétines. Aussitôt debout, il cria : « Vous racontez n’importe quoi ! Putain d’Anges ! » Quelques éclats de rire crépitèrent dans l’assemblée, jusqu’à ce qu’une poigne ferme ne vînt entourer le bras de l’enfant pour le soulever de l’estrade. Ils reconnurent aussitôt l’homme qui empêchait le Kiir’Sahqon de faire preuve de plus d’impolitesse. C’était Vrael. Son regard croisa celui de ses deux aînés, ébahis. « Descendez de là. » grogna-t-il en Zul’Dov, assez discrètement pour que la foule ne l’entendît pas. Priam tenta de garder la face ; Laëth se décomposa. Après avoir salué l’auditoire, ils quittèrent l’estrade. Le ventre en vrac, le cœur en folie, l’esprit en fusion. Ils virent Asha. Leurs deux parents étaient présents. Ils étaient là, et entre eux, une expression agressive accrochée au visage, un enfant.




Message unique – 5525 mots
(Oui je vais me cacher, adieu.)

Notes : 1013 mots de discours (Priam). 6 points pour l'indépendance (3 pour Laëth, 3 pour Priam ; que le charisme, parce que le fait de représenter les Anges annule la participation à l'Odon do Dur).




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