L’elfe ondulait au milieu des arbres poussant délicatement les branches sur son chemin, ses pas silencieux et l’obscurité ambiante le rendait quasiment invisible pour des yeux extérieurs. Gorfollïn évitait les flaques présente au pied des feuillus, le bruit de ses bottes dans l’eau risquait de trahir leur présence et le sylphe ne voulait pas aggraver sa situation. Jetant un coup d’œil rapide derrière lui il s’aperçu que sa compagne ne le suivait pas, s’arrêtant l’elfe lâcha un long soupir. Pourquoi Araya l’obsédait autant ? Lui-même se le demandait bien qu’intérieurement la réponse se profilait brillante au fond de son être, cette jeune femme l’avait hypnotisé depuis leur rencontre dans cette auberge. Le sylphe espérait que la jeune femme s’ouvre plus à lui mais il savait au fond de lui-même qu’Araya ne le considérerait jamais comme un ami. Elle refusait tout contact avec lui, ses précédentes rencontres avec les gens de son peuple n’avaient pas du bien se passer tout comme lui avec les vampires. La main de l’elfe se posa instinctivement sur son épaule, sa cicatrice réveilla la douleur qu’il avait ressentie à l’époque. Ressurgissant du passé le vampire le narguait de ses mains pleines de sang, sa marque figé à jamais sur sa victime. Au milieu des bois l’elfe sentait monter en lui le même sentiment d’impuissance qu’à l’époque, arriverait-il à arrêter la jeune femme si sa soif de sang devenait trop forte ? Regardant lentement sa main ensanglantée Gorfollïn maudit sa faiblesse, bien sur un combat avec Araya le conduirait à sa perte, physiquement et mentalement la jeune femme le surpassait, l’elfe mettrait sa vie en jeu pour elle sans aucun doute ni remord, la seule question qui triturait son esprit pris enfin forme dans sa bouche.

« -Mais pourquoi alors que tu viens juste de la rencontrer ? Serait-elle plus qu’une amie à tes yeux ? »

Un détail le sortit de sa torpeur, face à lui adossé à un arbre un être abject l’observait. De la même taille que l’elfe, ses yeux rougis par la lune, le visage de Kerr se posait sur lui. Le vampire était tel que dans ses souvenirs, ses haillons qui lui servaient de vêtements toujours tachés de sang, la bouche et les mains entièrement recouvertes d’hémoglobines. La goule ne le laisserait donc jamais en paix avec lui-même ? Gorfollïn regarda le ventre de Kerr encore marqué de la trace de sa lame, du sang s’en écoulait encore. Depuis son combat avec le vampire et la mort qui s’en était écoulé le sylphe avait des visions de son ancien adversaire, un fantôme du passé poursuivant le gagnant à jamais maudit. L’elfe n’en avait jamais parlé à personne, chose facile puisqu’il ne connaissait aucun individu mais Aiden son plus fidèle ami ne savait rien de ses visions.
Accompagné par son ami imaginaire au milieu de la forêt l’elfe se mit à songer à ses désirs perdu, tout ce qu’il avait abandonné depuis son exil, ses frères, Elbereth, le reste de son clan, le chemin qu’avait suivit sa vie l’avait il rendu meilleur ? Ses convictions et beaux discours envers Araya tous cela n’avait de sens, l’elfe était trop faible voila tout ; Un regard vers Kerr confirma ses dires, le sylphe n’arrivait pas à chasser ce démon qui empoisonnait sa vie et ses songes. Gorfollïn devait devenir plus fort, pour lui, pour Araya et pour chasser définitivement ce parasite de son esprit. Un crissement de feuille lui fit quitter sa torpeur, lentement il reprit son chemin rattrapé par Araya, levant sa main il passa à travers Kerr qui disparu une nouvelle fois.

Le bruit de la cascade se rapprochait doucement, les gouttes de pluie commençaient à faiblir et la brise qui s’était levé dans la nuit diminuée peu à peu. Araya et lui n’avait pas échangé un mot, de toute façon que pouvait-il lui dire de plus ? L’elfe devait faire le point, évaluer calmement la situation lorsque le moment s’y prêterait, le danger des cascades capté maintenant toute son attention. Débouchant au sommet de la cascade ils eurent une vue sublime sur les pics rocheux des montagnes voisines, la lune perçait doucement les nuages orageux éclairant faiblement la position où ils se trouvaient. Araya s’approcha du bord du précipice, regardant un sourire aux lèvres le gouffre qui s’étendait sous ses pieds. Profitant de l’inattention de sa maîtresse Kayto prit place au côté de Gorfollïn, le félin parla d’Araya, de sa réaction envers lui, rassurant à la fois l’elfe et le faisant douter sur ses propos. Jamais Gorfollïn ne lui avait reproché son comportement la jeune femme avait mal comprit ses intentions, la langue levé pour répondre au félin celui le quitta pour aller s’installer au côté de sa maîtresse. Décidément ces deux la formaient un bien étrange duo, profitant de l’instant l’elfe regarda à son tour le gouffre qui s’ouvrait à lui. La cascade s’écoulait dans une gorge étroite sur le plateau ou ils étaient pour se déverser ensuite en un énorme torrent sous leurs pieds. L’érosion de l’eau avait creusé la roche formant une cuvette de plus de cinquante mètre de haut, la cascade devait être sublime vu d’en bas. L’elfe se surpris à penser qu’un un saut de leur position serait fatal, les rochers dissimulés sous l’eau avait du faucher la vie de nombreux impétueux venu effectuer un saut de l’ange. Gorfollïn reprit sa position, examinant les bords de la gorge cherchant du bout des doigts des traces d’empreinte ou n’importe quoi qui pourrait expliquer le mystère des cascades. Araya dit quelque chose mais l’elfe n’entendit rien avec le vrombissement de l’eau, à mesure qu’il avançait Gorfollïn sentait ses le bout de ses doigts s’endormir. Se relevant il examina l’étrange phénomène, ses avant bras commençaient à perdre leur dextérité, sa vision se déformée petit à petit. L’elfe se concentra, il comprit qu’un flot de magie les entourait tous les trois, regardant Araya il s’aperçut que la jeune femme avait succombé au sort. Les paupières du sylphe devenaient de plus en plus lourde, ils devaient réagir ou s’en était fini d’eux.

« -Kayto debout » Hurla l’elfe

L’animal esquissa un geste mais ne parvint pas à se lever, un cri d’oiseau sortit Gorfollïn de sa léthargie. Regardant de ses yeux fatigués l’elfe vit le moineau posé sur une branche en dehors de l’aplomb rocheux de la cascade, la forêt semblait le protéger de cet assaut invisible. Une zone avait été définie pour les piéger, assez large pour les empêcher de s’échapper. Gorfollïn regarda Araya, la sortir de ce piège allait être compliqué mais pas insurmontable, regardant Kayto l’elfe jura, le félin serait impossible à soulever. Une feuille soulevée par le vent alla se poser à leurs côtés avant de disparaitre dans une autre brise, chutant dans le torrent de la cascade. L’elfe eut une idée, rassemblant ses forces il s’élança en courant vers ses deux compagnons, près d’eux Gorfollïn se jeta dans le lie de l’eau attrapant au passage Araya par la taille et Kayto par sa crinière, la force du courant les amena tous les trois dans l’eau.
Dans un râle l’elfe ramena Araya contre lui, ne prêtant pas attention à ses dires ou ses gestes, tout n’était plus qu’eau et fatigue, avant de se rendre comptent ils chutaient tous les trois du torrent.

Une chute de cinquante mètres les attendaient…

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Après être entrée dans l’eau, Araya ouvrit brusquement les yeux, le sort semblant perdre de son contrôle sur elle. Elle ouvrit la bouche, essayant de respirer, ne sachant pas où elle se trouvait, débutant un début de panique. Elle avala de l’eau, et finit enfin par comprendre. Elle essaya de repousser ce qui la bloquait, mais elle arrivait à peine à bouger à cause du courant. Les événements reprenaient petit à petit place dans son esprit, trouvant un semblant de suite logique, pourtant elle ne s’y attarda pas. Elle n’avait pas le temps pour ça. Ils fonçaient droit vers la cascade, et allaient tomber tête la première, se brisant le crâne sur l’étendue d’eau qui serait aussi dur que la terre. Ils devaient se rediriger immédiatement. Mais, à peine eut-elle pensée à ça, que son dos percuta violement un rocher, vidant le peu d’air qu’elle avait encore dans les poumons. Essayant de rester consciente, elle mit de côté la douleur, et chercha à s’accrocher à quelque chose. Elle réussit à trouver un rocher qui soutint leur poids. Immédiatement, leur corps bascula de l’autre côté, leur pied se retrouvant en direction de la cascade. Elle n’eut pas le temps de lâcher, que le courant tira brutalement sur son bras, et elle eut l’impression qu’il allait s’arracher. Sa main glissa et ils furent éjecter de la cascade, tombant dans le vide. Pendant leur chute, Araya ne cessait de se répéter. Je survivrais. A tout prix. Tant qu’ils ne touchaient pas les rochers, ils pourraient survivre.

Avant de percuter la surface de l’eau, Araya prit une profonde inspiration. Le choc puissant la déstabilisa, et manqua de la faire tourner de l’œil, mais elle tint bon. Par pur instinct, elle battit des jambes pour chercher à remonter, mais les tourbillons de la cascade l’entrainèrent un peu plus profond, jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus distinguer le haut du bas, et qu’elle eut l’impression que sa vision devenait sombre. Puis les paroles de son père lui revinrent en mémoire. Des paroles pour lui apprendre à survivre. Elle ne devait pas remonter, mais plonger ! A peine consciente, elle sentit quelque chose non loin de sa main. Elle tendit la main, et sentit le tissu. Espérant que cela soit Gorfollïn, elle saisit ce qu’elle sentait, et plongea, essayant de l’attirer avec elle. Une fois qu’elle arrêta de sentir la pression de la cascade, elle se mit à nager à l’horizontale, tirant toujours le tissu. Malgré tout, elle finit par le lâcher, essayant d’accélérer. Elle commençait déjà à manquer d’air. Désespérer, la Vampire essaya de remonter lorsqu’elle pensa être assez loin du courant générer par la cascade, mais elle avait beau battre des pieds, elle n’avait pas l’impression de que la surface se rapprochait. Elle ne pouvait que se servir d’un bras, et la douleur dans son dos ne l’aidait pas. Des points noirs commencèrent à apparaitre devant ses yeux, et elle devait se retenir tout juste de se retenir de respirer. Comprenant que le poids de ses vêtements l’attirait de plus en plus, elle sortit l’une de ses lames cachées, et déchira le nœud de sa cape, qui coula. Ce poids en moins, elle réussit à remonter à la surface. En manqua d’air, elle essaya de respirer, alors que son corps faisait l’inverse pour cracher l’eau dans ses poumons. Elle se maintenait difficilement à flot, mais ce n’était pas important. Elle chercha Kayto et l’Elfe du regard, mais ne trouva que le tigre qui s’en était sorti.

« Va chercher Gorfollïn ! s’exclama-t-elle. Et ne discute pas! le coupa-t-elle immédiatement »

Comprenant que ce n’était pas négociable, il finit par abdiquer. Si elle avait eu du mal à remonter à cause de sa cape, alors lui avec son armure, il ne pourrait pas s’en sortir, même si elle semblait plus légère que certaine.

L’animal s’enfonça dans l’eau, ses pattes puissantes le projetant avec force et rapidité. Il repéra l’Elfe, et s’approcha de lui. Une fois à ses côtés, il referma ses mâchoires sur les bracelets de cuirs à ses bras. Il serra plus ou moins fort, ne souhaitant pas le blesser. Il battit des pattes, et remonta à la surface, trainant l’Elfe avec lui. Heureusement que le félin était un bon nageur, et tirer Gorfollïn n’était pas grand-chose contrairement à certains de ses proies bien plus lourde. Une fois la tête hors de l’eau, il lâcha l’Elfe, et passa sa tête sous son bras pour qu’il puisse s’appuyer sur lui et ne pas couler à nouveau. En même temps, il chercha la jeune femme du regard, et vit qu’elle nageait déjà jusqu’à la rive. Elle n’avait pas pu les attendre, trop faible pour se maintenir hors de l’eau pendant longtemps à cause de poids de son épée, et de la faiblesse de ses muscles.

Araya fit quelques pas en dehors de l’eau, puis ses jambes la lâchèrent, tombant sur ses genoux. Son souffle était court, et elle toussait encore un peu. Elle tourna la tête vers l’Elfe et Kayto qui se dirigeait vers elle.

« Ca va vous deux ? demanda-t-elle, ses yeux passant de l’un à l’autre »

Le tigre hocha positivement la tête, puis dit en grognant légèrement. *Même si j’aurais préféré éviter que ce dingue nous balance d’une falaise* Il semblait de mauvaise humeur avec ça. Sa remarque fit apparaître un léger sourire amusé chez Araya. Elle voulut répliquer, mais la douleur de son dos et son bras se réveilla brutalement. Elle se plia en deux, tenant son bras contre elle. Prenant quelques profondes inspirations, elle essaya de refouler la douleur, et tourna la tête vers le félin.

« Regarde mon dos, et dit-moi si je saigne »

Elle se redressa en grimaçant, passa son bras valide derrière elle, et souleva l’arrière de son haut, dévoilant ses nombreuses cicatrices. Elle y était habituée maintenant, bien que mentalement elle en souffre encore beaucoup, mais la plus marquante devait être sûrement les trois chiffres à la suite, marqués au fer rouge, au niveau de son rein gauche : quatre, cinq et deux. Malgré les mois passés, elle était encore très maigre, ses côtes et sa colonne vertébrale étant encore assez marqué malgré le fait qu’elle ait reprit du poids. Dans sa geôle, elle était sûrement descendu en dessous de la barre des quarante kilos, et ses muscles peinaient à se reformer.

*Tu n’as rien* Dit l’animal, comme si de rien était. Elle laissa donc retomber le tissu trempé. Bon, déjà elle ne s’était pas ouverte, elle ne se viderait pas de son sang, mais elle continuait d’avoir mal, et avait du mal à bouger. Et son épaule droite n’était pas dans un meilleur état. Elle serra les dents, agacer par sa faiblesse, même si être forte ou non n’aurait pas énormément influencé dans cette situation. Araya finit par tourner la tête vers l’Elfe.

« Un peu rude le sauvetage mais… Merci, lui dit-elle »

Elle semblait avoir eu un peu de mal à le dire. Peut-être parce qu’elle détestait dépendre de quelqu’un. Malgré tout, elle lui était reconnaissante. En tout cas, elle avait été surprise par son propre comportement. Elle avait demandé à Kayto d’aller le chercher, comme si elle s’inquiétait pour lui. Peut-être parce qu’elle l’appréciait plus qu’elle ne voulait l’admettre. Secouant la tête pour chasser cette idée farfelue de son esprit, elle chercha à se remettre debout malgré son dos douloureux, et son bras qu’elle gardait contre elle, mais la douleur se fit plus forte et elle retomba à genoux. C’est à ce moment qu’elle entendit les rires cristallins résonner dans l’air.

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