La démone trimait dur pour se faire reconnaître à sa juste valeur parmi les siens. La constante nécessité d'obéir aux requêtes de son émissaire afin de faire bonne impression. Le meilleur moyen de s'assurer de rester dans le royaume où elle se trouve plutôt que servir d'offrande à l'oeil. Catriona n'avait aucune hésitation à ce montrer cruelle lorsque nécessaire, un moyen plus que satisfait pour laisser parler cette douce colère qui ne demande qu'à s'exprimer. Le renforcement vient avec le labeur et la démone comptait bien parvenir à ses fins pour se voir attribuer la chance d'une sélection pour le Jīvana. Ses journées n'avaient rien de paisible mais tel était le prix à payer pour se démarquer. Mais pour l'heure, c'était jour de congé, une permission de sortie de l'Enfer pour aller s'amuser un peu à travers le monde et se détendre avant de retourner au royaume. Catriona n'avait pas tardé à prendre la route vers les terres arides afin d'y trouver un établissement y servant de l'alcool. Ce genre d'endroit où une rixe est facilement prévisible et permettrait sans le moindre de doute une dose de défoulement et de cruauté, tout pour lui plaire.

La brunette s'arrêta devant une taverne, jugeant l'allure défraîchi des lieux puis le chaos des voix et des rires qui en émanaient au beau milieu de l'après-midi, Sans aucun doute des habitués qui tourneraient la tête à son arrivée tandis qu'elle était une parfaite inconnue de l'endroit. Ainsi, sourire en coin, elle passait la porte pour s'avancer d'un pas confiant vers le bar pour y prendre place. Vêtue d'un pantalon foncé dont le matériel semblait fait de cuir, une lame attachée sur le côté de sa cuisse, un haut qui la couvrait des épaules jusqu'au dessus du nombril laissait paraître son ventre plat. Une fine cape sur ses épaules pour se couvrir du vent qu'il y avait dehors dont elle avait rabattu la capuche en entrant. Tissu dont elle défit l'attache à son cou pour la poser sur le tabouret à côté d'elle pour ne pas être gêner dans ses mouvements. Le tavernier terminait d'essuyer un verre lorsqu'il se retourna pour prendre sa commande.
- Qu'est-ce que j'vous sers ?
- Une pinte de votre meilleure bière je vous prie.
- Oui m'zelle.
La boisson ne tarda pas à se retrouver devant la démone qui en savourait aussitôt une longue gorgée après avoir déposée quelques pièces sur le comptoir. Rien de mieux pour se détendre dans l'attente d'une petite altercation. Elle avait envie de laisser aller ses pulsions, de prendre des risques et de corrompre quelques âmes à se défouler. Nombreux semblaient déjà dans un état propice où il ne faudrait qu'une étincelle pour mettre le feu aux poudres. Catriona écoutait les conversations, y cherchant quelconque informations qui pourrait être intéressante à utiliser pour provoquer la colère chez l'un ou l'autre. Tout les moyens sont bons pour parvenir à ses fins, il suffisait d'attendre le moment idéal pour lancer les flèches.

Un soupir las s'échappa de ses lèvres, le regard posé sur sa pinte vide dont le contenu ne l'avait pas aidé à soigner son cœur lourd. Le chevalier grogna, scrutant discrètement la pièce salie de ses yeux ambrés.  Il s'était installé quelques heures auparavant au fond de la salle, près de l'entrée des cuisines dont les odeurs alléchantes aiguisait son appétit. Il n'avait pas mangé autre chose que du pain et du fromage depuis plusieurs jours. Les escales passables étaient rares ici, et les bêtes comestibles à chasser l'étaient encore plus. Dans l'ensemble, les personnes présentes ici ne lui inspiraient aucune confiance : des voleurs, des mercenaires, beaucoup de démons à cause de la proximité avec l'Enfer... Le proxénète qui gérait l'établissement malsain avait déjà essayé deux fois de lui envoyer ses filles. Après ses refus froids et polis, c'était maintenant des garçons qu'il voyait arriver vers sa table. Heureusement personne ne lui cherchait des noises. Sa gueule cassée, ses deux haches posées sur la table et le monstre carnassier assis à côté de son bras lui évitaient de se faire remarquer et lui permettait de s'accorder avec le reste de la clique. Il était certainement le chevalier le moins scintillant et clinquant de l'empire. Les armoiries de l'Ordre brodées sur son veston jaune étaient soigneusement dissimulées par une cape de laine pourpre et une armure en cuir surmontée de métal. La prudence était de mise sur les Terres Arides et il était suffisamment intelligent pour savoir que seul, il valait mieux rester dans l'anonymat et ne pas ressembler à un ange innocent.

Le lynx mordilla sa lèvre avec le bout de ses canines et donna distraitement un morceau de saucisson à Carnage, qui ne manqua pas d'essayer d'embarquer le doigt de son maître avec le morceau de viande offerte. "Tsss. Pas les dents ! Je te l'ai déjà dit un millier de fois." siffla Itak, les yeux plissés. Il n'était pas ici pour l'Ordre d'Hébé mais pour retrouver les traces de Jiang-Li. L'unique membre restant de sa famille avait disparu depuis bien trop longtemps pour être retrouvé, mais les idiots comme Itak ne se décourageaient pas facilement. Ne résistant plus à l'effluve de ragoût épicé qui lui arrivait dans les narines, le guerrier déménagea pour s'installer au bar. Carnage avait mangé tout le saucisson et l'alcool lui creusait l'estomac. Aussi peu recommandable qu'était cette taverne, les plats étaient chauds et bons et il ne savait pas quand est-ce-qu'il aurait de nouveau l'occasion de manger sous un toit. Perché sur son épaule droite, le chat géant semblait guetter l'arrivée de possible nourriture à travers son œil à moitié crevé. "Eh tavernier... Z'aurez pas vu cet abruti par ici ?" L'image recouverte de marques de pliures et d'usure dépeignait les traits fins et hautains de son grand-frère. Comme l'homme lui répondit par la négative, il en profita pour poser de nouveau la question à la jeune femme qui se trouvait au comptoir à côté de lui. "Hmph. Et vous ?" Elle ne semblait pas faire parti des habitués, mais peut-être avec de la chance... "Une assiette s'vous'plé. Et la p'tite sœur !" Lorsque les gens lui répondaient non quand il montrait l'image, cela le mettait de mauvaise humeur. Il paya son repas avec deux pièces d'or et utilisa le couteau qu'on lui servi pour nettoyer les détritus accrochés à sa hache. "V'nez d'loin pour avoir soif comme ça ?" demanda-t-il distraitement, ayant définitivement déduit qu'il parlait à une autre voyageuse.