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 Un problème de polarité | ft. Victor Hyëu

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Jil
~ Lyrienn ~ Niveau 40 000 ~

~ Lyrienn ~ Niveau 40 000 ~
◈ Parchemins usagés : 498
◈ YinYanisé(e) le : 23/07/2014
◈ Activité : Prof de Botanique, Puff-Puff Gueurle (Équipe C), Patronne de la Tendre Miche
Jil
Sam 05 Sep 2015, 00:32

Jil dansait. D’une certaine façon. Aurait-on donné à quelqu’un la possibilité d’assister à la scène qu’il se serait précipité pour chasser cette bête que la jeune femme semblait vouloir chasser en agitant les bras et les jambes. Mais il n’y avait personne à des lieues, et c’était bel et bien sensé être une danse. Ses talons courts claquaient sur les pavés humides, crevaient parfois la surface d’une flaque d’eau en aspergeant les alentours, tant et si bien que son pantalon – une paire de jambières moulantes en cuir élastique – était complètement trempé. Elle portait un pull bouffant, bleu électrique, qui n’allait pas tarder à connaitre le même sort, si l’on en croyait les nuages noirs qui avançaient à grande vitesse dans sa direction. Malgré tout cela, ses cheveux en bataille, le cliquètement de ses bracelets s’entrechoquant, ses bas qu’elle n’entendait pas craquer et qui pourtant ne s’en privaient pas, son sac qui hésitait un peu plus à chaque seconde à renverser son contenu sur le sol ; malgré tout cela, Jil s’en fichait. Son esprit était tout à cet état d’euphorie qu’elle était la seule à connaitre. Elle dansait, virevoltait, braillait les paroles d’une chanson qu’elle avait entendu le soir précédent. Il en fallait peu pour faire sourire la jeune femme, en général elle riait aux éclats à la moindre blague, et cela même si elle ne la comprenait pas, et les compliments lui mettaient le rouge aux joues en moins de temps qu’il en fallait pour dire « Jil ». Alors lorsque ce garçon, Mark, lui avait demandé s’ils pouvaient se revoir, elle avait sagement aligné tous ces états l’un après l’autre.

Voici comment ça s’était passé : Mark donc, charmant éphèbe d’une trentaine d’années, aux ailes de charbon et aux motivations claires pour tout le monde si ce n’est pour Jil, s’était avancé vers elle, deux verres à la main, et après en avoir posé un devant l’Élémentale en la gratifiant d’un sourire charmeur, lui avait conté à quel point ses cheveux et ses yeux réchauffaient d’avantage son cœur que la lueur de n’importe quel âtre embrasé. Sur le coup, la rousse avait pris une seconde de réflexion, vérifié d’un coup d’œil qu’il n’était pas en train de parler à quelqu’un d’autre, puis avait successivement ri, rougi, éclaté de rire, rougi à nouveau, avant de blêmir, de clignoter et de disparaitre dans un grésillement bleuté. Le bellâtre avait dû cligner des yeux plusieurs fois, avant de la voir reparaitre par la porte à battant de la taverne dans laquelle ils se trouvaient. Elle était trempée, et ses cheveux fumaient légèrement. L’air de rien, elle revient s’asseoir à sa place, posa son menton dans sa main, et hocha vigoureusement la tête. « Oui. Bien sûr. Pas de problème. C’est d’accord. Tout à fait. ». L’autre la regarda un instant, interloqué, comme s’il essayait de former une phrase, avant de lacher : « Je n’ai pas posé de question. ». Elle tiqua légèrement, et un arc électrique couru de la base de son cou à l’une de ses mèches hérissées.

Et c’est ainsi que la soirée avait continué, à grand renfort de rires adolescents et d’alcool. Voilà maintenant une heure qu’elle avait quitté le bar pour prendre la route qui la ramènerait à Avalon, et qu’elle gigotait, ravie. Tout ce qui comptait, c’était que quelqu’un ait pris le temps de lui parler plus de quelques secondes, et qu’il n’avait pas fui en soupirant. Oh, elle avait eu peur qu’il le fasse, au début de leur conversation, mais non. Elle leva le poing vers le ciel ; c’était surement grâce à son sex-appeal, ou quelque chose comme ça ! Du bout du doigt, en continuant de sauter sporadiquement d’un pavé à l’autre, elle tritura l’une de ses mèches rebelles, persuadée que celles-ci n’y était pas pour rien non plus. Son cœur battait presque aussi vite que ses pensées. Elle allait ainsi, guillerette, lorsque l’averse débuta. Il ne s’agissait pas d’une petite pluie de début de printemps ; non, c’était une mousson vigoureuse qui apportait une tempête de gouttes d’eau grosses comme le pouce. En quelques secondes, elle était plus trempée que si elle avait piqué une tête dans la Rivière Éternité. Le froid la saisit comme une gifle, et elle s’immobilisa, pour jeter un œil autour d’elle. Avec un petit cri, digne de la plus famélique des biches, elle courut s’abriter sous un saule. Elle était d’ores et déjà trempée, et attendre-là ne faisait qu’accentuer l’engourdissement de ses membres, mais elle n’osait plus retourner sous la pluie.

Sans prévenir, comme il était d’usage avec la jeune femme, elle se mit à songer à nouveau à ce Mark, et à douter. Et si… Et si c’était un coup monté ? Une blague ? Ça ne serait pas la première fois. Déjà lorsqu’elle était jeune, cette garce de Joyce avait séduit un garçon et l’avait convaincu de lui faire une « blague ». De la même manière, il était venu lui parler, ne s’était pas enfui en la voyant angoisser un peu, et deux heures plus tard, elle s’était retrouvée à moitié nue, la tête plein de rêves de princes charmant, à attendre que son nouveau petit ami revienne avec de nouvelles couvertures. Mais il n’était pas revenu. Ou plutôt si, il était revenu, avec une douzaine d’amis, dont Joyce. Jil n’avait jamais compris ce qui pouvait pousser quelqu’un à faire preuve d’autant de méchanceté. Ses yeux s’assombrirent un peu. Oui, c’était surement ce qui s’était passé encore une fois. Si elle se rendait au rendez-vous, ils seraient là, pour se moquer d’elle. De grosses gouttes s’accumulèrent au coin de ses yeux, qui n’étaient pas de la pluie. La pauvre Jil ne connaissait pas le mot qui s’adaptait le mieux à cette situation, mais tout dans son être criait au désespoir, à l’injustice. Le bout de ses doigts s’éclaira de décharges lumineuses, puis de long arcs électriques parcoururent sa peau jusqu’à la recouvrir presque entièrement. Elle se désintégra et un instant, flotta dans l’air comme une odeur de sel. L’impulsion jaillit de goutte en goutte, et elle réapparu un peu plus loin sur le sentier, de nombreuses traces de brulures zébrant son fameux pull bleu. Elle cligna des yeux, et s’ébroua, en claquant des dents. « Ou alors il est gentil. ». Lorsqu’elle se fit la réflexion à voix haute, cela semblait bien plus probable, et elle s’en voulu de s’être laissée allée. Oui, il n’y avait pas à s’inquiéter. Son sempiternel sourire revint à la charge, et elle commença à courir. Il s’agissait de ne pas attraper un rhume ! Inconsciemment, elle renifla. Elle songea qu’il était amusant de voir que sous la pluie, tout semblait différent. Ce chemin, par exemple, ne ressemblait mais alors pas du tout à celui qui menait à Avalon. Sans se poser plus de question, elle continua sa course sous le rideau grisâtre de pluie qui l’empêchait de voir, dans son dos, les lueurs des remparts de la capitale Déchue.


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Erza Taiji Stark
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Sam 05 Sep 2015, 03:26

Les Faes étaient joueuses et ça tombait bien car je l'étais tout autant. Cela faisait plusieurs fois que je me rendais à la cascade cristalline pour m'amuser avec elles. Malicieuses, elles m'avaient déjà joué plus d'un tour mais je ne m'en formalisais pas. La plupart du temps, l'une d'elle, de sa petite apparence, montait sur ma tête et s'accrochait à mes poils alors qu'une autre, grandissant pour l'occasion, me lançait une balle que j'allais récupérer à la hâte pour le plus grand bonheur de ma cavalière. Néanmoins, parfois, l'une des créatures, avide de faire une farce à sa congénère, lançait la balle dans l'eau de la rivière. Quand j'étais dans cet état de jeu, je n'avais que faire de certaines considérations. Il n'y avait qu'une chose qui m'importait : la balle. Où qu'elle aille, je me devais de la suivre immédiatement. Alors je plongeais dans l'eau sans aucune hésitation, mouillant la petite créature qui se tenait sur moi. Et lorsque je remontais à la surface, les rires moqueurs des autres accueillaient celle qui avait pris un bain forcé. Alors, elles se chamaillaient, invitant dans leur querelle la nature qu'elles faisaient vivre. L'une d'elle se prenait un coup de fougère, l'autre trébuchait sur une racine vivante. C'était tout un spectacle. J'avais le droit à une mine boudeuse mais je m'en remettais, le forfait bien vite oublié. « Erk ! Bleuet ! Ne fais pas pipi sur cette fleur ! Elle ne t'a rien fait ! » s'exclama soudainement une Fae, horrifiée. Je la fixai un moment, la patte en l'air avant de la faire de nouveau toucher le sol. Ces bonnes femmes avaient des considérations que je n'avais pas. Pour moi, il était naturel d'arroser les massifs pour y laisser ma trace et pour pouvoir retrouver mon chemin plus facilement. Et puis, pourquoi m'appelaient-elle bleuet ? Ce nom sonnait à mon oreille comme typiquement féminin. Enfin... j'étais bien heureux de trouver des compagnes de jeu, elles pouvaient bien m'appeler comme elles voulaient en échange du temps qu'elles m'accordaient. L'intéressée commanda à une partie de l'eau de la rivière de se diriger vers la plante afin de la rincer. Mouais... il faudrait que je recommence dans tous les cas. « De toute façon, il commence à se faire tard. Les fleurs vont bientôt finir de se fermer. » dit une Fae qui était bien plus sage que les autres. « Nous te remercions d'être revenu. Peut-être pourra-t-on se retrouver d'ici quelques jours ? Nous serions heureuse de t'accueillir de nouveau, si tu arrêtes d'uriner sur les plantes bien sûr. ». Elle sourit. Il était temps pour moi de partir.

Sur le chemin, je décidai de m'arrêter pour piquer un roupillon. C'était une mauvaise idée mais je ne le savais pas encore. Inconscient de ce que me réservait la météo, je me couchai par terre, plaçant ma gueule sur ma patte. Ma vie était somme toute simple mais satisfaisante. Je pensai à mes parents qui étaient partis sur les terres d'émeraude le temps que la situation à Dhitys se calme. J'espérai que tout allait bien pour eux.

Une goûte de pluie tomba sur ma truffe. Ma tête se redressa en même temps que mes yeux s'ouvraient sur un ciel noir et couvert. Cette goûte n'était que l'annonciatrice de la grande chute et, bientôt, le ciel fut rempli d'eau. Ce n'était pas juste une averse, du moins, je ne croyais pas. Il fallait vite que je trouve  un endroit où me réfugier. En pleine nature, comme ça, il était rare de trouver une habitation. Je me relevai et pris un chemin au hasard, y reniflant l'odeur des hommes. J'étais un animal imposant, tout blanc, je n'avais pas peur d'être seul la nuit mais j'avais horreur de la pluie. Si j'avais dû l'endurer pour garder quelque chose ou quelqu'un, je ne dis pas, mais là, c'était différent. Je devais trouver une maison dans laquelle on accepterait de me loger. Souvent, les enfants s'attendrissaient en me voyant et c'était un plus pour moi qui n'avait pas de réel foyer. Je n'avais pas encore trouvé la personne qu'il me faudrait. La truffe au sol, l'odeur de pluie et de terre mouillée remplaça bien vite les autres pistes. C'était plus délicat de s'y retrouver. M'arrêtant de trottiner, je levais la tête pour apercevoir au loin quelque chose. C'était une femme. Vite, je me dirigeai vers elle avant de pousser un couinement, de m'asseoir sur mon arrière train et de pencher la tête sur le côté. « Wouaf ! ». Après cette déclaration, ma langue se mit à pendre mollement alors que ma respiration produisait un petit nuage de fumée autour de ma gueule. Je le sentais, cette femme allait me recueillir.

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Jil
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Jil
Mar 15 Sep 2015, 01:12

Lorsque la demi-heure normalement nécéssaire pour rentrer chez elle fut écoulée, et qu’elle ne voyait toujours pas l’ombre d’un rempart, Jil commença à paniquer. Ce n’était pas la première fois qu’elle se perdait, mais il pleuvait, elle était toujours sous le coup d’un ascenseur émotionnel particulièrement capricieux. Le froid, la colère et la peur venaient presque à bout de son éternel sourire ; en résultait un visage où larmes et pluie se confondaient, tantôt pétri de souffrance et pourtant affublé d’un sourire tremblotant. Le coin de ses lèvres tiquait régulièrement, et plusieurs fois déjà, elle avait dû déployer d’incroyables efforts pour ravaler la boule qui lui prenait la gorge. À plusieurs centaines de mètres aux alentours, on n’entendait rien sinon le bruit blanc de la pluie qui fouettait les feuilles, et le souffle du vent qui agitait les arbres ; si quelqu’un s’était trouvé un peu plus près de l’Élémentale, il aurait perçu, ténu, son pas trainant, hésitant, et ses reniflements réguliers. La vérité c’est qu’elle avait essayé plusieurs fois de déclencher ce qu’elle appelait un « Beugh », une retranscription assez fidèle de l’onomatopée qu’elle produisait lorsque cela lui arrivait. Lorsqu’elle entrait dans cet état, simple charge électrique dans l’air, le monde extérieur et ses préoccupations n’avaient plus d’importance. Ce qu’elle voyait comme une maladie incurable avait soudainement des airs de panacée. Elle savait également que ses semblables pouvaient traverser de grandes distances simplement en claquant des doigts, comme un éclair fendant le ciel ; mais elle n’avait jamais réussi à le déclencher consciemment. Pour la trentième fois, elle serra les poings et se concentra, jusqu’à ce que son visage tourne au rouge et qu’une veine batte à sa tempe : sans résultat. La rousse soupira, repoussa une mèche collée à son front, et continua à trainer ses bottes dans la boue.

Ce n’est qu’une dizaine de minutes plus tard que le décor morne et sombre s’écarta pour laisser naitre une tâche blanche au milieu de la route. Jil l’observa un instant, cligna plusieurs fois des yeux pour la chasser, mais elle était toujours là. Elle fronça les sourcils ; la forme approchait, et elle était trop fatiguée pour réfléchir. Elle eut l’impression d’avoir à peine finit d’y penser que la forme blanche vint s’arrêter devant elle. De l’avant-bras, elle essuya l’eau qui lui coulait dans les yeux, et découvrir le gros chien qui lui faisait face. Il était blanc comme neige - même son pelage semblait refuser de ternir sous la pluie – et aussi attendrissant que massif. Ils se considérèrent un instant et l’animal lâcha un couinement pathétique qui fit instantanément remonter la boule dans la gorge de Jil. Elle poussa un petit cri désolé en écho, et après quelques secondes de réflexion, enleva son pull, retira sa chemise et l’attacha en chaperon à la tête du chien. C’était une protection bien dérisoire, et elle était désormais à moitié nue sous son haut, frigorifiée, mais elle n’aurait pas toléré plus longtemps que la pauvre bête prenne encore l’eau. Elle s’accroupit à côté du chien, et posa sa main derrière sa tête, en grattant doucement la fourrure entre ses oreilles. « Pauvre bichounou… T’as l’air tout triste toi aussi. Comme… Comme… ». Sa voix se brisa et elle laissa échapper un sanglot étranglé. Elle renifla et pris l’animal dans ses bras, comme elle l’aurait fait avec un autre humain. Elle souffla plusieurs fois et continua : « On va se trouver un abri. Allez, viens ! ». Du revers de la main, elle s’essuya les yeux, et se força à afficher un sourire bravache. Elle commença à courir, et se retourna pour s’assurer que le chien la suivait.

A bout de souffle, Jil s’arrêta finalement sous l’avant-toit d’une cabane de chasseur. Ils avaient dû quitter la route, en voyant la construction un peu plus loin dans la forêt, mais au moins ils étaient enfin à l’abri. Elle s’appuya contre le mur, haletant bruyamment, et tâcha de reprendre son souffle. Alors qu’elle courait, elle s’était interdit de prendre une pause ; pas pour elle, mais parce que pour une fois elle pouvait faire quelque chose pour quelqu’un, et même si c’était un chien, elle n’avait pas l’intention de rater. Alors elle avait couru. Elle se laissa glisser sur ses genoux sur le bois de la véranda, et caressa machinalement l’échine de l’animal, de la nuque à la base de la queue. C’était aussi relaxant pour elle que pour lui. Quelques minutes plus tard, elle se redressa et toqua à la porte, sans vraiment attendre de réponse. Tout était fermé, et aucune lumière ne filtrait des volets. Après un certain temps, elle regarda tout autour d’elle et actionna la poignée. Ce n’était pas fermé. La cabane était de taille modeste, et contenait le strict minimum : une table, deux chaises, une cheminée et une commode. Elle fit entrer le chien, le suivit et ferma la porte derrière eux. Le bruit de la pluie fut instantanément atténué, et un poids s’enleva soudainement de ses épaules. L’Élémentale alla poser trois buches dans l’âtre et se démena une autre dizaine de minutes pour y mettre le feu. Enfin elle put soupirer et s’affaler dans une chaise. Elle glissa un coup d’œil vers le chien, puis haussa les épaules, avant d’enlever ses vêtements, à l’exception de sa culotte, la rare qui n’avait pas été détrempée par la pluie. Elle alla les étendre sur la deuxième chaise, devant la cheminée, et fit de même avec la chemise-chaperon de l’animal. Puis s’approcha également, fit signe à son nouveau compagnon, et alla se lover devant le feu, la tête posée sur son ventre chaud. Malgré toute sa fatigue, elle n’arrivait pas à trouver le sommeil. Elle pensait à Mark, à Joyce, à toutes ces personnes qui l’avaient toujours rabrouée. Le chien, lui, ne se moquait pas d’elle, au moins.


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Mer 16 Sep 2015, 16:38

Ma langue passa sur ma truffe alors que la demoiselle était en train de m'enlacer. Une fraction de secondes plus tard, ma gueule était de nouveau entrouverte, de la fumée en sortant à cause de l'écart de température entre l'extérieur et l'intérieur de mon corps. Je n'avais pas vraiment les mêmes notions d'étrangeté que les hommes normaux. Moi, du moment qu'on me faisait des câlins, tout m'allait, même l'excentricité de cette femme qui semblait aussi bien passer du rire aux larmes que du coq à l'âne. Pour le moment, je ne disais rien. J'étais à présent un chien à pull. Qui aurait fait la même chose pour moi ? Peu de gens sans doute. Ne savait-elle pas que le morceau de tissu lui était plus utile à elle qu'à moi, qui avait un pelage naturellement fourni et chaud ? J'aurai bien voulu lui dire mais, dans mon état, cela ne servait à rien : j'aurai produit un simple aboiement incompréhensible pour elle. Et puis, si la présence d'un chien l'apaisait, peut-être n'en serait-il pas de même de celle d'un humain. En vérité, je n'en savais rien. Je me posais rarement des questions aussi profondes. Tout ce qui m'intéressait dans la vie ne tenait qu'à cinq mots : dormir, manger, boire, uriner sur les plantes pour marquer mon territoire et jouer à la balle. En attendant, elle et moi étions dans le même bateau. Quand elle parla de trouver un abri, j’acquiesçai d'un aboiement avant de la suivre, me hâtant sans pour autant aller trop vite. Si je passais devant, je risquais de la perdre. A la course, il ne faisait aucun doute que j'étais le meilleur des deux, mais je n'étais pas quelqu'un de particulièrement compétitif, pas du tout même. Tout ce qui m'importait était le bien-être d'autrui. Aussi, quand je jouais avec des enfants, je faisais attention de ne pas les brusquer et à ne pas me faire surprendre par leurs gestes parfois nerveux. Je les laissais même me grimper dessus de temps en temps. Quoi qu'il en soit, il m'apparut bien vite que cette fille pourrait être une figure d'attachement pour moi ou, dans des termes plus simples : un maître. Je ne la connaissais pas encore très bien mais le fait qu'elle se retourne de temps en temps pour vérifier que j'étais toujours là me fit chaud au cœur, autant que la pluie s'occupait de me tremper de la tête aux pieds.

Lorsque nous arrivâmes devant la cabane de chasseur, je me mis à penser que si le propriétaire était là, il nous chasserait très probablement. Un comble en quelque sorte. Je n'aimais pas les chasseurs et leur mentalité d'arriérés. S'ils ne pouvaient se servir des chiens pour les aider à attraper le gibier, alors ils n'étaient rien pour eux. De plus, il fallait voir la vie de ceux qui avaient choisi de lier leur existence à celle d'un chasseur : enfermés dans un chenil la plupart du temps, forcés  de courir après une proie pour satisfaire l'ego de ces hommes qui récoltaient tout le mérite d'un combat qu'ils n'avaient pas mené. Ce n'était vraiment pas pour moi, moi qui aspirai à la paix, à un environnement familial, à protéger plutôt qu'à attaquer. Avançant doucement vers la jeune femme, je finis par m'asseoir à côté d'elle, me laissant caresser volontiers. Si j'avais été un chat, j'aurai certainement ronronné mais, puisque j'étais un chien, je fis ce que tout bon chien aurait fait : remuer la papatte d'un geste frénétique, espérant qu'elle continue encore de longues minutes.

Heureusement pour nous, il s'avéra que l'habitant des lieux n'était pas là. Aboyant un bon coup pour être sûr de ce fait, je finis par m'ébrouer avant de rentrer. J'étais certain que ma compagne d'infortune n'aurait pas aimé que je fasse ça à l'intérieur. Ce n'était pas très grand mais je m'en contenterai le temps que la pluie cesse. J'étais un chien de montagne, j'avais besoin d'espace mais j'étais plutôt conciliant. De toute façon, j'avais déjà décidé qu'il vaudrait mieux que j'avoue à cette femme la vérité sur mon cas. Il fallait juste que je trouve le bon moment. Me couchant par terre tout en réfléchissant à la chose, elle finit par se déshabiller. Désappointé, me sentant un tantinet voyeur, je mis l'une de mes pattes sur mes yeux avant de produire une sorte de couinement qui ne l'empêcha pas d'avancer vers moi et de s'installer sur mon ventre. Je me mis à remuer la queue. J'étais content de toute cette attention. Seulement... mon côté « homme » était un peu dérangé par tout ça. Ma langue passa de nouveau sur ma truffe.

« Hum... ». J'étais humain à présent. La mutation n'avait pas été complète, si bien que mes cheveux étaient restés aussi blancs que mes poils et puis, chose important, j'étais nu. Ça, ça ne me dérangeait pas, j'avais l'habitude, mais elle, sans doute que non. Avant qu'elle ne dise quoi que ce soit, je passai une main sur sa bouche afin de l'empêcher de parler. Puis, je dis à toute vitesse. « Bonsoir, je ne vous veux aucun mal, merci d'avoir trouvé un abri pour la nuit. ». Puis, d'un geste lent, je lâchai sa mâchoire.
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Jil
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Jil
Mar 22 Sep 2015, 04:42

L’Élémentale en était à compter son soixante-sixième Wëltpuff lorsque ses paupières se décidèrent enfin à s’alourdir. Passé ce cap, elle savait qu’il lui suffisait de penser à un joli paysage, et le reste suivrait. Elle visualisa donc un petit coin de paradis, au creux d’une vallée et à l’ombre d’un feuillu millénaire ; les pieds dérivant dans l’eau glacée d’un ruisseau, et la tête couchée sur un tapis confortable d’herbe grasse. Pendant une seconde, elle sentit que le rêve débutait, elle voyait déjà de grandes colonnes de ruminants à laine danser en descendant un versant de la colline Ouest. Puis elle sursauta, et repris pied dans la vrai monde. Elle grommela quelque chose d’inintelligible et retourna à sa vallée, une fois, deux fois, et à chaque fois, un sursaut désagréable venait l’arracher à son univers onirique. Ce faisant elle tendait à demeurer dans un entre-deux mondes, trop fatiguée et perdue pour comprendre la réalité, et toutefois incapable de se donner entièrement au rêve. Aussi lorsque la fourrure sous sa joue muta lentement en peau humaine, elle n’y prêta pas la moindre attention. Elle leva vaguement les yeux quand son compagnon vint plaquer une main chaude et douce contre sa bouche, et cligna faiblement des paupières lorsqu’il s’adressa à elle de façon parfaitement intelligible. Quelque part dans son cerveau, quelques neurones furent arrachés à l’hémisphère gauche en grognant, pour aller décoder ces quelques mots et en informer la patronne. Une longue seconde plus tard, le message était parti, mais ses synapses dissidentes étaient retournées au rêve avant de prévenir leur mère du caractère gênant de la situation. Jil sourit donc timidement, et lui confia très bas, comme si elle était sur le point de sombrer : « C’est pas grave, boubichou. Et puis t’es vachement sexy. Fait dodo maintenant. ». Sur ces paroles pleines de bon sens, elle se cala un peu mieux contre la poitrine du chien désormais bien moins poilu, et s’endormit.

Son rêve débuta comme convenu, là où elle l’avait laissé un peu plus tôt. Les Wëltpuffs semblaient venir des cieux en descendant un escalier invisible, puisqu’ils ne touchaient pas le sol, et dansaient en levant successivement leurs pattes arrière, tout en soulevant de leurs pattes avant la laine qui leur ceinturait l’abdomen. En résultait une chorégraphie grotesque que Jil se mit à applaudir à pleines mains, en riant de tout son soûl. Lorsqu’ils furent finalement sur elle, les ruminants décrivirent plusieurs cercles dont elle était le point central, s’approchant ou se reculant en fonction du tempo de leur danse. La rousse, émerveillée, se releva et alla toucher l’un d’entre eux, mais au contact de sa paume, il explosa, comme tous ses congénères, en un millier de confettis multicolores, qui retombèrent en plusieurs petits tas. Elle laissa poindre un petit cri apeuré, mais avant qu’elle ait pu reculer, les morceaux de papier se rassemblèrent pour former une immense forme humanoïde, qui mua en un visage monstrueux, capable de cacher le soleil. Le faciès géant était celui d’une créature au crâne creux et qui avait troqué ses dents pour des centaines de tentacules qui s’agitaient sans but, comme doué d’une volonté propre. Jil eut une grimace de dégout, et soudain, rapide comme l’éclair, l’un des tentacules s’abaissa pour la gifler violemment. Au moment où sa tête pivotait sous l’impact, un cri perça l’air, empreint de méchanceté : « Abrutie ! ». L’Élémentale cria, courut dans la direction opposée, mais le visage se replaça instantanément face à elle, et un nouveau tentacule claqua : « Bizarre ! ». Cette fois-ci, elle eut à peine le temps de se remettre de la gifle qu’un autre jaillit : « Débile ! ». Puis une tornade de coups s’abattit sur sa carcasse voutée : « Étrange ! Imbécile ! Lente ! Agaçante ! Moche ! Stupide ! ». Jil sanglotait, mais rien ne semblait vouloir arrêter ces agresseurs, dont les mots cinglaient plus que les coups ; quand soudainement un grondement lointain se fit entendre, comme un coup de tonnerre, qui se rapprocha d’instant en instant, jusqu’à être sur elle. Le ciel se couvrit de nuages noirs barrés d’éclairs, et le vent se leva, si fort et si brutal qu’on entendit bientôt plus rien des insultes qui lui pleuvaient dessus. La tempête détruisit le visage qui s’éparpilla de nouveau, et Jil se retrouva bientôt au cœur d’un orage tel qu’elle n’en avait jamais vue. Elle pleurait encore, le visage et le corps zébré de lacérations écarlates. Elle chercha un abri des yeux, quand elle aperçut au sommet de la colline deux géants de pierres. Ils étaient loin, mais elle les reconnu immédiatement. À droite, Joyce, son ennemie jurée, et à gauche, Marc. La première avait toujours l’apparence d’une adolescente, comme la dernière fois qu’elle l’avait vue, quatre-vingts ans auparavant ; le second portait la tenue élégante qu’il avait à la taverne. Ils la considérèrent un instant, puis elle les vit s’approcher l’un de l’autre, s’enlacer puis s’embrasser avec passion. Elle cria, mais le vent emporta ses cris. Elle pleura, mais la pluie dilua ses pleurs. La jeune femme se roula en boule, les bras autour des genoux, ses paupières fermées, comme si sa vie en dépendait. Un moment passa, et elle sentit contre son bras le contact soyeux d’une fourrure. Lorsqu’elle jeta un œil inquiet, elle vit un gros chien blanc. Celui-ci semblait sourire, la langue pendue, et le regard plein de vie. Sans savoir pourquoi, elle lui sourit également, et instantanément, il sembla grandir. Elle tomba en arrière, alors qu’il prenait désormais la taille d’un ours, puis d’un dragon, d’un géant, d’un titan et d’une montagne. D’un revers de patte, il pulvérisa les géants de pierre. D’un cri, il couvrit le tonnerre. D’un coup de mâchoire, il déchira le ciel noir. Un instant plus tard, tout était fini. Jil garda les yeux fermés encore un instant, et quand elle les rouvrit, ils flottaient dans le vide. Tout autour d’eux, des étoiles de différentes tailles, de différentes couleurs, mais partout où son regard se portait, des lueurs scintillantes. Le chien était là, lui aussi, mais il avait repris sa taille normale. Elle lui sourit à nouveau, rit doucement, et le chien se mit sur ses pattes arrières, avant de se changer en homme, un garçon séduisant et bien bâti, aux longs cheveux. Elle le détailla un instant, sans rien dire, et ses yeux le détaillèrent de haut en bas. Elle fixa un instant son entre-jambe avant de rougir violemment et de détourner les yeux. Son cœur venait de s’emballer ; pourtant elle inspira de nouveau et se retourna, mais il n’y avait plus personne. Elle tourna sur elle-même, et une immense vague la faucha, l’envoya rouler dans le ressac.

Puis Jil cria, et se réveilla, en sueur.


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Mar 22 Sep 2015, 19:34

Quelle vie de chien. J'étais là, sur le dos, cette femme blottie contre moi, à regarder le plafond d'un air perplexe. Elle n'avait rien calculé, ou avait fait semblant de ne rien voir. J'hésitai entre ces deux options pour tout avouer. Comment avait-elle pu rester si calme ? Généralement, quand je me changeais en homme, les gens autour de moi hurlaient ou étaient étonnés. Il y avait aussi toujours un moment gênant pendant lequel je m'efforçais toujours de trouver de quoi cacher mes parties. Une fois, une femme avait voulu me sauter dessus, trouvant la situation très excitante. Pour moi, ça ne l'était pas et j'avais fui en courant le plus loin possible de cette folle. Malgré tout, dans chacune de mes aventures où j'étais passé d'animal à homme, il y avait eu une réaction de mon interlocuteur. Là... je me retrouvais sans voix. Finalement, je baissai les yeux vers la femme endormie, passant l'une de mes mains dans ses cheveux encore mouillés pour les caresser doucement. Elle était étrange mais peut-être que le sommeil avait eu raison d'elle au point qu'elle n'ait pas vraiment compris ce qu'il était en train de se passer. « Que devrais-je faire... » murmurai-je doucement, comme si je m'adressais au feu qui crépitait à côté de nous. Je commençais à bien l'aimer et même si j'avais trouvé judicieux de lui avouer la vérité plus tôt, il y avait aussi une autre option qui s'offrait à moi : rester chien à jamais en sa présence. Même si je la voyais nue, elle n'en serait jamais gênée puisque personne ne ressens ce genre de sentiment vis à vis d'un animal. C'est pas grave de se déshabiller ou de pleurer devant un chien ; Par contre, devant un homme, c'est déjà une autre paire de manches. D'un autre côté, ce ne serait pas vraiment honnête... « Raa... ». Qui se fichait de l'honnêteté ? Elle pourrait sans doute devenir ma maîtresse. Elle devait bien habiter quelque part non ? Je n'avais pas d'endroit fixe où aller. Généralement je vadrouillais de maison en maison sans la moindre idée de l'accueil qui me serait fait. Parfois je me retrouvais à devoir fuir pour ne pas me faire battre, d'autres fois j'arrivais à avoir un toit et à manger, mais tout ceci était loin de me satisfaire. J'étais un chien de berger, j'avais besoin de protéger quelqu'un ou quelque chose, d'être entouré et d'avoir un certain confort, des habitudes, un cadre. Vadrouiller ce n'était pas bien marrant. Après, le soucis, c'est que je n'étais pas sûr qu'elle veuille m'adopter. Il faudrait que je lui fasse comprendre mes désirs sans parler, ce qui ne serait pas facile. J'avais l'intention de la suivre de toute façon, de lui faire les yeux doux, mais est-ce que cela suffirait ?

Du bout des doigts, je finis par attraper une bûche que je mis dans le foyer. Comme elle dormait depuis un bon moment et que le feu périssait petit à petit, j'avais pris l'initiative de faire au moins ça pour elle. Je n'arrivais pas à dormir avec cette femme collée à moi, à moitié nue. Elle s'était agrippée comme un chat à la branche d'un arbre et je n'avais pas le cœur à la virer. Finalement, je repris une apparence de chien, le sol n'étant pas des plus confortables. Avec mon pelage, tout me paraissait moins dur, plus doux. Même le carrelage n'aurait pu m'empêcher de dormir, à moitié cependant. C'était rare que je dorme profondément. Il aurait fallu un endroit dans lequel j'étais certain de me réveiller sain et sauf pour cela. Je ne l'avais pas encore trouvé. Fermant les yeux, je me mis à penser à des choses et à d'autres. Cela faisait un bout de temps que je n'avais pas vu Malice, la petite fille qui jouait souvent avec moi à la balle. Elle aurait pu devenir ma maîtresse dans d'autres circonstances. Malheureusement, ce n'était pas possible. Je cherchais quelqu'un à protéger. Peut-être que ce serait cette femme aux cheveux roux ? Et puis, rien n'empêcherait Malice de se faire adopter, elle aussi...

Finalement, au bout d'un certain temps, l'endormie se réveilla dans une cri. Elle avait bougé plusieurs fois durant son sommeil mais je ne pouvais rien faire pour la calmer. La regardant de mes yeux de chien, je finis par aboyer et par tirer la langue pour respirer, avant de reposer ma tête par terre, levant les pattes en l'air pour montrer que je voulais me faire câliner. Je n'avais aucune idée de l'heure qu'il était. L'aube semblait se lever mais elle était encore bien timide. La pluie s'était arrêtée. Je ne savais pas quoi faire pour la soutenir. J'avais deviné assez facilement qu'elle avait fait un cauchemar mais, en fait ce n'était rien face à ce que nous allions vivre d'ici peu. Car, aujourd'hui, c'était jour de chasse.
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Jil
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Jil
Sam 26 Sep 2015, 06:52

Il est des choses dans ce monde auxquelles l’adjectif « désordonné » peut convenir. Le port de Sceptelinôst, les dédales du Cœur Bleu, le circuit des chemins des Montagnes de l’Edelweiss ; mais s’il fallait ne garder qu’une seule et unique chose, un seul exemple qui illustrerait à lui seul ce concept, on choisirait certainement les coiffures matinales de Jil l’excitée, au nom imprononçable. D’après feu son père, c’était héréditaire. De son vivant, sa mère était capable de briser des brosses simplement en tentant de se peigner au sortir du lit. Dans le cas de Jil, cela se traduisait par une aberration gravitationnelle. Il suffisait qu’elle secoue la tête pour que ses mèches flamboyantes crépitent et s’irisent d’un millier de petits arcs électriques orangés. Pour celui qui se trouvait à proximité, ce pouvait être impressionnant, voire dangereux. Pour Jil, c’était surtout pratique pour trouver sa bougie le matin lorsque les volets étaient fermés. Heureusement pour le chien contre lequel elle était blottie, elle s’était relevée très vite, dans un sursaut brusque. Ses cheveux se hérissèrent et un grésillement désagréable se fit entendre ; l’instant d’après, une lueur surnaturelle éclairait l’âtre où rougeoyaient encore quelques braises. L’Élémentale ouvrit de grands yeux fatigués, bredouilla une phrase intelligible. En langue commune, ça ne voulait pas dire grand-chose ; mais dans l’antique dialecte des Hommes-Lézard, race disparue du cadran Nord-Est du Désert, cela signifiait littéralement : « Dix-sept saucisses fourrées au porc. ». Il n’y avait toutefois aucun Homme-Lézard à proximité, et la phrase disparut dans un glapissement aigu. Jil mit quelques secondes avant de se souvenir où elle était, comment elle était arrivée là, et la flopée de questions habituelles que l’on se pose lorsqu’on se réveille dans une cabane au fond de la foret, quasiment nue et allongée sur un chien-loup. « Hein ? Que – qui… Ha… Haaaaa -gzt- ». Et comme un refrain maintes fois répété, elle scintilla, un bourdonnement sourd se fit entendre, et elle disparut dans éclair de lumière. Une seconde plus tard, elle réapparut de nouveau, à genoux sur la table. Sa poitrine généreuse rebondit une seconde de plus, tandis qu’elle fixait le vide, la bouche entrouverte. Puis ses paupières battirent très lentement, et elle reprit : « … aaah ! De… de quoi… Non, je sais plus là. ». Elle se gratta la tête, bailla, souffla distraitement dans sa main pour sentir son haleine, et grimaça. Puis elle avisa le chien, et sans trop savoir pourquoi, cacha ses seins avec son avant-bras. « Ah vi. C’est vrai. Un chien. Ça va pouchounou ? Bien dormi ? ».

L’animal en question l’observait, langue pendue et avec ce qui ressemblait à un sourire. Elle se demanda si c’était une illusion liée aux babines retroussées, ou si tous les chiens du monde passaient leur temps à se moquer des humains. Ne trouvant pas de réponse immédiate à sa question, elle descendit de la table, alla enfiler sa chemise, et en profita au passage pour câliner son nouveau compagnon. « On y va ? Ici ça pue, et puis si le monsieur qui habite ici revient, on va se faire gronder. Et moi j’aime pas me faire gronder. Toi non plus t’aime pas te faire gronder, hein choupinou ? Non t’aime pas ça. Hein t’aime pas ça, hum ?! ». Tout en parlant, elle le gratouilla sous la mâchoire. « Bon. Ce qu’on fait, c’est qu’on va chez moi. Chez moi à Avalon, là où j’aurais dû aller hier soir, mais où je suis pas allé parce que je me suis perdue sur le chemin et que c’est là qu’on s’est rencontré et qu’on s’est réfugié… ». Elle fit une pause et inspira profondément, à bout de souffle. C’est pour ça qu’elle essayait d’éviter les longues phrases, d’ordinaire. « Dooonc. Je sais pas exactement pourquoi je te parle, vu que t’es un chien et que tu comprends pas, tout ça… Mais bon, c’est vrai que d’habitude je parle… Euh… Toute seule… Voilà… Et du coup, c’est vachement bien que tu sois là ! Tu vois, ça faire genre on se parle, et tout. BREF. Habille-toi… Non, habille-toi pas, c’est débile. Moi je m’habille par contre, parce que je suis pas sûr que tout le monde ai envie de me voir à poil, contrairement à toi. Encore que… Avalon… Enfin ils sont assez… Voilà. Allez zou. J’arrête de parler, et on s’active, choupoupette. ». Elle posa son front contre celui de l’animal, laissa leur regards se croiser et un moment s’écoula, sans qu’elle n’arrive à se convaincre d’aller s’habiller. Finalement, elle soupira et alla chercher son pantalon et son pull.

Lorsqu’elle eut enfilé le tout, elle passa sa main dans ses cheveux ; le seul moyen de leur redonner une forme quelconque. Puis elle chercha son sac, une dizaine de minutes, en grommelant à tout va, avant de le trouver accroché derrière une chaise, à l’entrée de la cabane. Avant de partir, elle tourna sur elle-même, chercha des yeux ce qu’elle aurait pu avoir oublié, et acquiesça en silence. Puis elle fit un signe au chien : « Allez Bibouchou ! On plie bagage, et on va chez moi ! ». Mais elle s’arrêta devant la porte, et pivota. « Enfin… Enfin en fait, j’en sais rien. Peut-être que dès que je vais ouvrir, tu vas te barrer. Ce qui est normal, hein. Pas de souci, j’imagine que t’as une copine, des petits chiots, tout ça… ». Du bout du pied, la rousse lissa le tapis d’entrée ; et ajouta, un peu plus bas : « J’aimerais bien que tu restes avec moi en fait. Peut-être pas pour toujours, hein… Encore que si t’as envie, moi ya pas de souci ! Mais bon… ». Elle marqua une pause et se tritura les mains. « … Je parle à un chien. Bon, allez. ». Les gonds grincèrent, et la porte s’ouvrit sur un homme de grande stature, au teint rougeaud et à l’haleine chargée. Jil le dévisagea un instant, puis sourit innocemment : « Vous désirez ? ». La seconde d’après, elle recevait quelques hectolitres de postillons alcoolisés, un chapelet d’insultes imagées, et le chasseur dégainait un hachoir large comme sa tête, et lui colla sous la gorge. Elle déglutit avec difficulté. « Oh. Bichou ? ».


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Jeu 01 Oct 2015, 23:06

Je ne m'attendais certainement pas à ce que la jeune femme ait des réveils si... si... En fait il n'y avait pas vraiment de mots pour décrire ce qui se déroulait sous mes yeux. Sa tignasse était étrange et il me sembla qu'elle aurait pu tuer quelqu'un rien qu'en l'effleurant de cette chevelure indomptable. Je préférai donc ne pas bouger, cachant mes yeux avec ma patte quand elle réapparut plus loin, sur la table, dans une position à la limite de la décence. Je trouvais ça un peu malhonnête de la contempler si elle ne savait pas la vérité. D'un autre côté... j'avais essayé de la lui faire comprendre la veille. Elle ne semblait pas prête à se rendre compte de ce que j'étais vraiment et, de toute façon, j'avais déjà pris la décision de ne rien lui révéler. Pour répondre à sa question, j'émis un « Wouaf ! » motivé en remuant la queue avant de reprendre ma position favorite, c'est à dire tête tournée vers un point, la langue pendue. Je me demandais si toutes les femmes sentaient leur haleine en se réveillant. Peut-être avait-elle un homme dans sa vie ? J'en doutais un peu puisque, la veille, elle semblait bien triste, mais rien ne prouvait que ça avait un rapport avec ses amours. A vrai dire, je n'étais pas certain de vouloir d'une maîtresse qui serait plus obnubilée par son mari que par moi. Je voulais quelqu'un de disponible avec qui jouer. Cependant, d'un autre côté, s'ils faisaient des enfants, ça pourrait aussi me convenir. Les enfants étaient joueurs et infatigables...

Je sortis de mes pensées quand la jeune femme rousse s'adressa à moi. Je ne savais toujours pas comment elle s'appelait mais si je restais avec elle suffisamment longtemps, j'allais finir par entendre quelqu'un s'adresser à elle par son prénom. C'était toujours comme ça que j'arrivais à en savoir plus sur ceux que je côtoyais. J'étais incroyablement content qu'elle fasse attention à moi cela dit. Les gens étaient un peu niais dans leur façon de parler aux animaux mais je n'avais pas le cœur de la contredire ou de rester à la fixer sans réagir. A ses questions et commentaires, je me mis à remuer la queue, passant plusieurs fois ma langue sur ma truffe tout en la fixant, glapissant légèrement comme si je me sentais soudainement concerné. Et puis, les grattouilles sous le menton, il n'y avait que cela de vrai. Je fus d'autant plus ravi quand elle m'appris qu'on allait chez elle. Bonne nouvelle ! Si elle voulait m'amener dans sa maison, c'est qu'elle s'était attachée à moi quelque part. On se comprenait un peu, malgré notre différence d'anatomie. Moi je cherchais quelqu'un à protéger qui prendrait soin de moi également et elle devait sans doute chercher quelqu'un qui l'accompagnerait et ne l'abandonnerait jamais. Je pouvais facilement répondre à l'annonce ! J'étais qualifié pour ça ! Avalon me semblait une bonne destination. Après, restait à voir si j'aurai de quoi courir sur place. « Wouaf wouaf ! ». J'étais tout fou et tout content. Elle continuait à parler sans s'arrêter et je la soutenais en aboyant et en remuant la queue. Quand elle commença à m'expliquer qu'elle ne savait pas pourquoi elle parlait à un chien, je finis par pencher la tête sur le côté. Elle était étrange de façon globale, cela dit, beaucoup de gens me tapaient la causette en croyant dur comme fer que je ne les comprenais pas. Moi ça m'allait, je gardais leurs secrets et ils me donnaient à manger : un échange de bons procédés louables en quelque sorte.

Les yeux dans les yeux, je me demandai un instant si elle n'avait pas actuellement une absence. Quelle drôle de femme quand même... Mais elle semblait gentille dans le fond. Je l'aimais bien, même si elle était un peu excentrique. Je la préférai d'ailleurs habillée, ayant plus de facilités à me concentrer sur ce qui nous entourait et la situation. Une femme nue dans la même pièce que moi était toujours une épreuve. J'étais un homme après tout. Quoi que... les chiennes aussi me faisaient de l'effet. En gros, je pouvais contenter plus de monde ! Prêt à partir, je me levai d'un bon, me dirigeant vers la porte jusqu'à ce qu'elle s'arrête pour me parler de choses sérieuses. Elle s'emmêlait un peu les pinceaux mais de ce que je comprenais, tout m'allait parfaitement. Je finis par m'asseoir pour attendre qu'elle finisse, sachant parfaitement que je ne prendrais pas la poudre d'escampette. C'était amusant de savoir qu'elle en doutait. Peut-être pourrai-je même lui faire une petite farce ? Je n'eus malheureusement pas le temps de mettre mes pensées à l’œuvre qu'un homme qui puait l'alcool à plein nez entra dans la pièce. Plus ivre, cela ne devait pas exister. J'étais sensible aux odeurs et la sienne me déplut tout de suite. Je me mis à le fixer, attendant la suite, suite qui ne me plut pas du tout non plus. « Grrrr... » commençais-je comme pour rappeler que j'étais ici. Je n'aimais pas qu'il parle comme ça à ma peut-être future maîtresse. Elle semblait avoir peur et je n'étais pas fier non plus mais je voulais la tirer de ce mauvais pas. Comme il semblait de plus en plus violent, je finis par bondir pour lui sauter dessus. J'étais un gros chien, bien lourd, et je n'eus pas trop de mal à le faire tomber. Seulement, son chien attendait dehors et dès qu'il vit la situation, lui-aussi me sauta dessus.
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Jil
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Jil
Lun 19 Oct 2015, 17:38

Dès que les deux chiens s’aperçurent, un autre combat s’engagea à l’extérieur de la cabane, opposant les deux animaux. En voyant l’espèce de lévrier rachitique mener la vie dure à son nouvel ami, la rousse vit rouge. « Ah non ! Hors de question ! T’approche pas, espèce de moche ! ». Elle ponctua sa phrase par un petit de rage, et sortit à son tour, en marchant par inadvertance sur l’entrejambe de l’homme à terre. Déséquilibrée par le sol mou qui semblait se dérober sous ses pieds, elle baissa la tête, étonnée, et tâcha de garder son équilibre en déplaçant son pied, qui alla cette fois écraser la main du chasseur. Elle entendit distinctement le bruit des petits os se rompant, et elle grimaça, tandis que les aboiements se perdaient sous les cris affolés et enivrés de l’infortuné. Mais puisqu’il n’est rien qui sache détourner l’élémentale de son objectif, elle profita de l’élan octroyé par le déséquilibre pour foncer sur la masse de poils tourbillonnants, et décocha un grand coup de pied dans l’arrière-train du chien de chasse. Il couina, claqua des mâchoires dans le vide, mais les arcs lumineux qui commençaient à affluer sur les mains et le visage de la jeune femme le dissuadèrent finalement d’emmener plus loin l’affrontement. La queue entre les jambes, il évita soigneusement le grand chien blanc, et fila jusqu’à la cabane, en sautant gracilement au-dessus de son maitre. Celui-ci gémissait et jurai d’une voix nettement plus aiguë qu’auparavant ; et Jil en profita pour remuer le doigt, les sourcils froncés. « C’est bien fait, d’abord ! Vous aviez qu’à pas me crier dessus ! ». Il fit mine de se relever, la main portée sur le pommeau d’une large machette encore dans son fourreau, et elle n’attendit pas son reste. Elle fit un signe au chien : « Viens, euh… Faut que je trouve un nom, d’ailleurs… Parce qu’à force, choupoupou, choupinou, chapipou, pouchachou, pochichachou, poichichou, ipouchapachipachapapichoupoupou, on s’y perd. Je vais peut-être garder le dernier, j’aime bien. On file ! ». Et de continuer, une fois sur la route, entre deux halètements bruyants : « Encore que ça soit – haa – un peu long – haa – on va voir, de toute façon – haa – en général, je me souviens pas des noms – pff ».

La course continua ainsi sur une demi-lieue, avant qu’elle ne décide de se retourner pour vérifier qu’ils n’étaient plus suivis ; ce qui était naturellement le cas depuis très longtemps, puisque le chasseur n’avait pas eu le courage de se relever complètement pour les suivre. L’échappée s’acheva dans un crissement de gravier, et elle se pencha en avant, les mains sur les genoux, exténuée. Le temps qu’elle retrouve sa respiration, elle entreprit de faire plusieurs gestes de la main au chien blanc, qui, pour la plupart, n’avaient aucune signification dans aucune nation. Elle lui montra du bout du doigt les remparts d’Avalon, leva le pouce, agita simultanément son index et son majeur, tira la langue et gonfla les joues, serra le poing et l’ouvrit vers le haut, tapa dans sa paume deux fois, y dessina un cercle avec son index, accrocha ses deux auriculaires ensemble, fit mine de se serrer la main droite avec la gauche ; puis elle croisa les deux mains, les fit battre en rythme, agita l’index de droite à gauche, désigna sa poitrine du pouce, tira à nouveau la langue, et posa la tranche de sa main à intervalle régulier sur son bras opposé en remontant du poignet au coude. Quand elle eut terminé son spectacle, et qu’elle fut de nouveau en état de parler, elle articula difficilement : « D’accord ? Maintenant si t’es pas d’accord ou que ça t’embête, tu me dis et on trouve un autre arrangement, mais c’est vrai qu’à la base, je fais plutôt comme ça. Ça fait de l’exercice tu vois ! Je sais pas si vous, les chiens… Oh, sûrement, hein. Et du coup, ça nous fait passer par l’entrée Est. ». Elle inspira et expira plusieurs fois bruyamment et lui sourit, avant de reprendre la route, plus calmement cette fois, en direction des remparts.

Elle parla pendant une grande partie du trajet, lui narrant son histoire avec force détails inutiles et interruptions incongrues, depuis la découverte de son élément, jusqu’à leur rencontre, en passant par son travail d’institutrice, et de « ses bouchounons trop choupis ». Étonnamment, elle était particulièrement satisfaite de pouvoir partager ainsi son expérience ; la plupart de ses interlocuteurs humains abandonnaient passée la description de sa joie quand elle avait appris qu’elle était liée à la foudre. Ce passage en particulier était en effet dense, et elle usait de tant de superlatif qu’elle imposait presque l’usage d’un dictionnaire des synonymes. Mais puisque le chien ne tentait jamais de l’interrompre ou de s’échapper en prétextant d’avoir du lait sur le feu, elle s’en donnait à cœur-joie. Elle lui parla du décès de son père, alors qu’elle-même était née éternelle, sans vraiment savoir pourquoi. Ce fut peut-être le seul épisode de sa vie qu’elle narrait sans s’interrompre elle-même pour évoquer la consistance de la gelée de groseille ou l’importance d’avoir des ongles de pieds coupés suffisamment courts. Et elle parla tant et si bien qu’elle ne vit pas le temps passer. Quelques deux heures et demie plus tard, ils étaient au pied de la muraille. Elle fit un signe aux gardes, qui la reconnurent immédiatement, en faisant mine de regarder au loin, crispés. L’entrée dans Avalon se faisait nécessairement par les Quartiers Simples lorsqu’on ne possédait pas d’ailes, et elle lui expliqua, cette fois sans user du langage des signes, qu’elle habitait dans un appartement des Quartiers du Centre. Il leur restait donc un peu plus d’une heure avant d’arriver chez elle, et beaucoup de marches à monter. Elle mit à profit ce temps pour lui expliquer ce qui s’était passé la nuit dernière, et s’étonna elle-même en constatant qu’après la rencontre avec le chien blanc, elle avait manifestement déjà fait le deuil d’une relation qui n’avait pas commencé. Parler de Joyce ne lui semblait désormais pas si terrible, et elle la décrivit – en plus de la garce qu’elle était – comme une jeune femme qui de toute manière « n’était pas très marrante ».

Dans la rue, les passants la regardaient avec de gros yeux, et pour ceux qui l’avaient déjà croisé, avec un air désabusé. Mais Jil, elle, n’y prêtait pas attention et continuait de parler au gros chien, jusqu’à ce qu’ils arrivent ensemble devant une petite maison coquette, décorée de nombreuses jardinières d’où dépassaient toutes sortes de fleurs, semblant avoir été plantés sans le moindre souci d’organisation. Elle fouilla dans son sac une bonne minute, avant d’en sortir son trousseau de clef, et hésita une minute supplémentaire sur laquelle choisir, mais elle finit par ouvrir la porte. Elle laissa entrer le chien, referma derrière elle, et jeta sac et pull sur une chaise à proximité. « Et voilà ! C’est chez moi ! ». L’élémentale avait dit ça avec fierté palpable, et en écartant largement les bras. « C’est pas super grand, mais j’ai une chambre, ma cuisine à moi, une salle d’eau, et même un bureau, mais je m’en sers surtout pour ranger plein de trucs, en fait. ». La petite maison était effectivement constituée de quatre pièces, ainsi que d’un réduit où elle entassait tout le nécessaire pour l’entretien de ses fleurs et de son domicile. La cuisine et le bureau étaient au rez-de-chaussée, et un escalier escarpé menait au premier étage, où se trouvait le réduit, la salle d’eau et la plus grande pièce, la chambre. « Par contre, là tout-de-suite, j’ai rien pour te faire un lit. Donc tu dormiras avec moi. Enfin si t’as envie. Si t’as pas envie tu dormiras pas avec moi. Et puis on ira te trouver un grand coussin, je crois qu’il y a une animalerie pas trop loin. Cela dit on peut y aller aujourd’hui aussi. Ou demain. Non, aujourd’hui. Ouais. ». Elle remua la bouche de gauche à droite, se perdit dans ses songes un instant, et lui sourit largement. « Tu veux que je te fasse visiter ?! ».


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Ven 23 Oct 2015, 06:19

J'expirai bruyamment, enfin débarrassé du chien de chasse. Cette femme n'y était pas allée de main morte mais cela me faisait une belle jambe. J'étais plus gros mais mon adversaire était habile, entraîné à chasser et, plus que tout, féroce. Cela dit, il me sembla qu'il n'était pas prêt à réellement protéger son maître comme je l'étais. Qu'importe que le vent hurle et que la marée s'écrase, j'aurai sauvé Jil au péril de ma vie parce qu'elle était gentille avec moi. C'était ma maîtresse à présent, et personne ne nous séparerait. Je trouvais ma pensée un peu utopique. Parfois, les gens pensaient pouvoir adopter un animal mais, finalement, préféraient l'abandonner. Peut-être que ce serait son cas ? Après quelques jours, elle s'apercevrait que j'étais trop gros, trop encombrant, trop bruyant, et elle me jetterait dehors. Mes yeux fixèrent un instant son visage. Non, je n'avais pas le droit de penser ça d'elle. Par contre, je devrais sans doute éclaircir un peu quelques points, comme ces éclairs qui semblaient vivre en elle. Ma compréhension du monde était assez basique et bien que je connaisse la race des Elémentals, je n'étais pas sûr d'en comprendre toutes les nuances. Elle avait le don de m'attendrir un peu... par son comportement, s'entend. Elle ressemblait à une enfant qui aurait grandi trop vite. J'allais la protéger. Cela dit, je refusais de m'appeler Ipouchapachipachapapichoupoupou. Si elle prenait une telle décision, je devrais me débrouiller pour lui faire comprendre que c'était un gros non de ma part, en grognant par exemple. Il y avait plusieurs moyens de communiquer avec les hommes de toute façon. En attendant, je la suivis. Inutile de rester là à attendre que le chasseur retrouve ses esprits. Quoi que... de la manière dont elle lui avait écrasé les testicules, j'imaginais qu'il aurait du mal à s'en remettre pour un petit moment.

Courant au côté de Jil, je me dis qu'elle en faisait sans doute un peu trop. Cela dit, je n'essayai pas de lui barrer la route. J'aimais courir, plus que tout. Sentir le vent dans mes poils avait quelques choses de merveilleux. C'était un peu ça la liberté finalement. Le problème c'est que j'avais souvent chaud après un effort et quand la jeune femme finit par s'arrêter, ma langue pendait comme si son objectif avait été de toucher le sol. Fort heureusement, voilà que ma maîtresse se mit à faire une danse étrange. Je me dis que c'était une sorte de rituel et je m'assis sur les fesses, passant plusieurs fois ma langue sur ma truffe comme pour montrer que je l'encourageais. Les hommes avaient d'étranges coutumes parfois mais j'étais assez mal placé pour parler. Mon bonheur à moi, c'était d'uriner sur les massifs. Si le sien c'était de gesticuler, alors tant mieux ! Je ne compris rien à la phrase qui succéda au rituel mais je me dis que, de toute façon, j'allais la suivre quand même. Fidèle, je l'écoutais parler de tout et de rien, apprenant des choses plutôt étranges, parfois drôles, parfois moins drôles. Les gens regardaient Jil dans la rue mais, moi, je n'y prêtais pas trop attention. On m'avait toujours dit que les Déchus étaient des gens bizarres, qui accumulaient des richesses ou avaient beaucoup d'orgueil, sans parler de ceux qui se reproduisaient à même les murs, à la vue de tous, disait-on. Je n'étais sûr de rien mais bon, qu'elle vive dans une telle cité m'étonnait. La ville était pourtant magnifique, et très grande. J'espérai pour Jil qu'elle ne sortait pas tous les jours de la capitale et, surtout, qu'elle avait d'autres moyens de locomotion que ses pieds.

Enfin chez elle, je regardai la maison. J'avais repéré des massifs à l'entrée sur lesquels je pourrai m'arrêter en cas de nécessité. Il fallait bien que je marque mon territoire de toute façon... Quand la jeune femme s'écria, je marquai le coup en appuyant ses mots d'un « Wouaf ! » enjoué. Elle était amusante à s'embrouiller. Dire qu'elle était institutrice... les enfants devaient bien s'amuser avec elle. « Wouaf Wouaf ! » refis-je comme pour montrer mon approbation quant au fait de visiter l'endroit. Néanmoins, son idée de dormir avec elle provoquait déjà chez moi un certain malaise. Pourtant, entre un chien et sa maîtresse, cela se faisait. Le soucis c'est que je n'étais pas vraiment qu'un animal. Le problème que nous avions eu dans la nuit se reposerait forcément. Il fallait que je me prépare psychologiquement à la voir déambuler nue,  se laver en chantonnant et tout un tas de choses qu'un homme normal n'aurait pas été autorisé à voir. D'ailleurs, même si son récit me faisait penser qu'elle n'avait sans doute pas de petit ami pour le moment, dans le futur, je n'étais pas à l'abri d'assister à quelques... ébats. Je penchai la tête sur le côté, priant pour que ça arrive le plus tard possible. Après je pensais que je pourrai peut-être... enfin... peut-être que je pourrai essayer de lui parler quand elle serait sortie, sous mon apparence d'homme. Si je ne pouvais pas lui dire qui j'étais vraiment, rien ne m'interdisait d'avoir une sorte de double vie... histoire de m'assurer de son bien-être quand je ne pourrai être à ses côtés. Peut-être que je ne devrais pas... ou peut-être que si. Je finis par mettre ça de côté, remuant la queue comme pour dire que j'étais prêt à faire le tour du propriétaire.
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Jil
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Jil
Mer 04 Nov 2015, 01:50


« Alors ? T’en pense quoi ? C’est joli, quand même, hein ? ». Les mains sur les hanches, Jil avait troqué sa tenue désormais défraichie pour une salopette délavée découpée à mi-cuisse et un haut moulant. Pieds nus, les cheveux attachés à la hâte en un chignon lâche, elle avait laissé la porte d’entrée ouverte en allant se changer, pour que son nouveau compagnon aille découvrir les alentours. Comme prévu, le gros chien emplissait sans problème le peu d’espace que son jardin avait à offrir, et elle l’avait regardé quelques instant, accoudée à la fenêtre, avant de se rendre compte qu’elle noyait ses fleurs sous le flot continu de l’arrosoir qu’elle tenait dans la main. La Jardinière en question protestait en grinçant sous le poids de la terre alourdie par l’eau. L’Élémentale grimaça ; elle allait encore devoir racheter quelques plants chez le fleuriste, et il allait encore se moquer d’elle et de sa « main verte ». Tant pis pour lui, il n’avait qu’à venir arroser lui-même, s’il n’était pas content ! Elle ponctua son commentaire intérieur d’une moue enfantine. Le soleil était encore haut dans le ciel lorsqu’elle tendit la tête par la fenêtre, aussi elle se fit force et alla enfiler une paire de ballerines. L’animalerie n’était pas loin, et ça lui ferais une occasion de montrer une autre partie de la ville à… Il fallait vraiment lui trouver un nom. Ce n’était pas idées qui manquaient, mais elle avait envie de faire les choses bien. D’habitude, elle se contentait de prendre les choses comme elles venaient, de les gérer le plus vite possible afin de s’en débarrasser ; mais ce chien était différent. Elle voulait que ça se passe bien. Jil quitta la masure, referma derrière elle et gratta l’arrière du crâne de l’imposant animal, avant de lui montrer la direction des Halles des Géants.

Une dizaine de minutes plus tard, ils atteignaient le centre de la ville, la colonne vertébrale de son activité économique. Les Halles étaient installées sur une rue qui remontait du sol aux Quartiers des Sommets en s’enroulant autour d’un axe central. Les boutiques les plus chères et les plus jolies étaient installées directement dans l’axe ; les autres se partageaient les innombrables devantures qui lui faisaient face. Quant aux moins fortunés, ils trouvaient toujours un coin de pavé où poser une couverture et un chapeau pour réaliser leurs transactions. L’animalerie était installée dans les étages supérieurs, et elle occupait un quart du tronc métallique à cet endroit. Sans attendre, la rousse poussa la porte à battant, et faillit s’étouffer en inspirant à plein poumon les odeurs mêlées de neuf, de litière et de déjection en tout genre. Après quelques secondes d’adaptation nécessaires pour se faire à l’obscurité qui régnait dans l’endroit, elle cligna des yeux et commença à déambuler sans but, en jetant un œil à droite et à gauche. En murmurant, elle se baissa vers le gros chien : « Je t’avoue que j’y connais pas grand-chose, donc si tu voulais bien être gentil et choisir toi-même un jouet qui te plait, tu me sauverais la vie. ». Quelque part, elle était fermement convaincue que cet animal comprenait ce qu’elle lui disait. Elle le laissa donc un instant, le temps d’aller investiguer du côté des coussins de sol. Comme pour toute chose, il y en avait pour tous les gouts, et surtout les plus extravagants. En vitrine et posé sur des étagères en verre, de somptueux oreillers en Soie, rembourrés de plumes enchantées, brodé de fils d’argents ; au fond, des sacs de toile fourrés avec un peu de paille. Jil n’avait pas l’intention de tomber aussi bas, mais les prix qu’elle voyait s’afficher à côté des premiers lui donnaient des vertiges. Heureusement pour elle, dans une cagette au centre de l’allée, on proposait à des prix raisonnables d’acheter un coussin en laine de Wëltpuff, suffisamment grand pour accueillir son nouveau compagnon. En s’approchant, elle fit la moue, constatant que chaque oreiller était déjà brodé d’un nom. « Médor », « Toutou », « Wilfried », « Jun », aucun qui ne lui plaisait vraiment. Puis elle eut une idée, et un arc électrique remonta sa colonne vertébrale jusqu’au sommet de son crâne. Elle fit volte-face, courut dans le magasin et arracha le chien à sa contemplation des jouets, en le soulevant comme un sac de grain. Sans cérémonie, elle l’emmena jusqu’à la caisse de coussins, et le posa devant, en le regardant, impatiente. Puis elle sentit qu’une explication était de rigueur. « Oh ! Euh… C’est des coussins ! Avec des noms ! Comme ça tu choisis ton nom ! Puisqu’il est sur le couss- ALLEZ CHOISIS. ».


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Sam 14 Nov 2015, 04:11

J'étais sorti dans le jardin. C'était assez petit mais il y avait suffisamment d'espace pour se rouler dans l'herbe et courir, éventuellement, après une balle. C'était tout ce qu'il me fallait, du moins, pour l'instant. Il faudrait que je me débrouille pour sortir de là me dégourdir les pattes. Je ne savais pas trop si Jil avait prévu de me promener souvent mais ce n'était pas vraiment un problème. Il me suffisait de prendre ma forme humaine et de partir à l'aventure, en prenant garde d'être toujours là quand elle reviendrait de ses occupations quotidiennes. Les humains vivaient souvent sur des cycles. Petit déjeuner à telle heure, travail à telle heure, etc. Il me faudrait quelques jours pour comprendre la logique de son temps mais une fois que ce serait fait, j'aurai plus de liberté.  Pour l'instant, je n'avais qu'à profiter. Aussi, je me mis à lever la patte sur quelques plantes, me frottai contre d'autres et me roulai dans l'herbe. Ce jardin aurait bientôt mon odeur et tous les chiens du quartier sauraient qu'il s'agissait de mon territoire. Si les Hommes pouvaient le savoir également, cela m'arrangerait beaucoup. En attendant, si quelqu'un venait ici avec de mauvaises intentions, je me ferai un plaisir de lui rappeler une règle qui serait irréfragable : ici, habitait Jil, ma maîtresse, et quiconque s'en prendrait à elle aurait à faire à moi. D'ailleurs, lorsque celle-ci m'appela, j'étais sur le dos, la gueule grande ouverte, la langue qui pendouillait mollement sur mon palet. La tête en bas, je la regardai alors un instant avant de me remettre sur mon ventre. C'est vrai que c'était joli. Un brin d'herbe vint se poser sur mon nez et je me mis à éternuer frénétiquement jusqu'à ce qu'il s'en aille tout seul. Je compris alors que c'était l'heure de la promenade. Totalement fou à l'idée de découvrir l'endroit où se trouvait la maison plus en détail ou à l'idée de sortir tout court, je me mis à suivre la rouquine, regardant sa salopette que j'évaluais un moment. C'était amusant. Cette femme était  une sorte d'enfant en réalité. Tant mieux, les femmes qui se prenaient trop au sérieux avaient tendance à m'ennuyer. D'ailleurs, la plupart d'entre elles n'approchaient pas les chiens comme moi de peur que je file leurs bas ou que je les salisse. Ce qu'il ne fallait pas entendre parfois...

Dans la rue, je me mis à remuer la queue pour montrer que j'étais content. Je regardai autour de moi, voyant un vieux monsieur qui faisait la manche. Jil étant partie un peu devant, je me mis sur mes deux pattes arrières, marchant un peu comme ça, ce qui eut l'intérêt d'attirer les passants qui pensèrent que j'appartenais à cet homme. Ils donnèrent quelques pièces. Ce que le monde pouvait être compliqué. Les individus donnaient parce qu'ils pensaient à moi, à mon entretien, parce que j'étais un animal qui marchait sur ses deux pattes arrières. Ils ne donnaient pas pour cet homme. C'était triste quelque part. Fixant l'individu, je remuai la queue un moment avant de filer. Ceux de mon espèce prenaient soin des leurs. Si Jil habitait ici, qu'elle était ma maîtresse, alors cette ville devenait, quelque part, la mienne. Rattrapant la rousse, je me mis à marcher dans ses pas, regardant ses petites ballerines battre le sol en rythme. Ce rythme nous conduisit à l'animalerie où il fallait que je choisisse un jouet. C'était délicat. Les humains pensaient souvent que les babioles qui faisaient du bruit nous plaisaient, à nous les chiens. Seulement, je trouvais qu'il n'y avait rien de plus insupportable. Le couinement m'irritait les oreilles. J'avais les tympans sensibles alors je préférai les objets silencieux. Quant à ceux qui avaient des formes étranges, je n'en raffolais pas non plus. Regardant une étagère sur laquelle se trouvaient ce qui me semblait être des représentations de Souverains à croquer, je restai perplexe. Je n'avais pas envie de manger la reine des Vampires ou celle des Elfes. Drôles de sucreries... Finalement, je me dis que le plus simple serait de faire apparaître l'une de mes balles, ce que je fis. Ça, c'était une valeur sûre. J'eus juste le temps de la prendre dans ma bouche que je me sentis soulevé bien malgré moi. Ne disant rien en sentant le parfum de Jil, je fus étonné par sa force. Réalisait-elle que je pesais quatre-vingt kilos ? Elle risquait de se faire mal au dos. Seulement, cela ne semblait pas lui importer des masses. A présent devant une pile de coussins, je devais faire un choix. Posant la balle aux pieds de l'Elémental, je me concentrai. Je devais choisir un nom. Bien sûr, je pariai qu'il n'y avait pas Victor. Posant les deux pattes avant sur la cagette, je me mis à chercher au moyen de ma truffe dans la pile. Au bout de quelques minutes, j'étais complètement sous les coussins, les regardant tous tout en écartant ceux qui ne me plaisaient pas. Hors de question que je m'appelle Toutou. Puis, mon attention se porta sur un où il y avait marqué « Thor ». Si je ne pouvais pas prendre mon nom d'origine, au moins que ça y ressemble un peu. Le prenant entre mes dents, je finis par émettre un « Wouaf » étouffé mais décisif, remuant la queue comme un fou.
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Jil
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Jil
Jeu 12 Mai 2016, 01:23

« Thor ? ». L'Élémentale prit le coussin, le fit tourner dans un sens, puis dans l'autre, comme si les lettres brodées dessus allaient magiquement s'arranger différemment. Ce ne fut pas le cas, et elle prononça de nouveau le nom, avec plus d'entrain : « Thor ! Ça me plais ! Et puis tu l'as choisi, c'est le principal ! ». Elle posa ses yeux verts sur le gros chien, lui trouvant instantanément un air de « Thor », effectivement. Le nom lui allait à merveille. De manière sceller cette décision, elle se mit à genoux et enlaça son compagnon, le coussin toujours dans ses mains, pressants ainsi les deux contre elle avec une force qu'elle ne contrôlait pas toujours. Pressée de trouver un endroit où installer le nouveau lit de Thor, elle l’entraîna jusqu'au vendeur, qui flânait devant la vitrine, les yeux perdus dans le vague. « Salut ! On veut prendre ça, s'il vous plaît ! ». Et dans le même mouvement, elle lâcha l'imposant édredon sur le comptoir, renversant plusieurs pots à crayons dans le processus, sans sembler vraiment s'en rendre compte. Le commerçant observa d'un air désolé les débris de sa tasse sur le sol, mais considérant qu'il s'agissait là d'un des rares clients qu'il aurait dans la journée, ou même dans la semaine, il s'abstint de tout commentaire. À la place, il nota quelque chose sur un calepin, et énonça d'une voix monocorde : « Trente pièces d'argent, je vous prie... ». Jil lui offrit son plus beau sourire, et tira de sa ceinture une bourse de cuir à l'aspect désespérément vide. À l'intérieur, des boutons de chemisier, une bille en verre « mignonne comme tout », deux radis et quelques malheureuses pièces. Du bout des doigts, elle tira une pièce vaguement argentée, et la tendit par dessus le coussin. L'homme tiqua, remua les lèvres comme pour lâcher un commentaire désobligeant, mais quand il redressa ses lunettes, il remarqua la teinte si particulière de la pièce. Ce n'était pas de l'argent, mais du mithril. Soit dix pièces de platine, soit cent pièces d'or, soit mille pièces d'argent. Comment est-ce que cette… femme était entrée en possession de ce genre de monnaie ? C'était davantage les riches marchands qui se les échangeaient par douzaines. Il soupira, et tira le tiroir de sa caisse. Personne ne payait jamais avec des pièces de mithril. Ni des pièces de platine d'ailleurs. Et il ne voyait que très rarement la couleur de l'or. C'était un sentiment étrange que de devoir échanger un rond de métal unique contre un petit sac de toile de quatre-vingt dix-sept pièces d'or. Ça ne sembla pourtant pas déranger la rousse, il se saisit du sac, du coussin, et qui sur un dernier sourire, quitta la boutique en sifflotant.

L'Élémentale avançait presque à l'aveugle, tenant dans ses bras l'énorme coussin qui entravait sa vision, le sac de pièces accroché à l'arrière de son pantalon, passé sous sa ceinture. À chaque nouveau pas, elle manquait de percuter un inconnu, et chaque mouvement de hanche produisait un bruit de ferraille que seul un sourd n'aurait pas remarqué. Après quelques minutes, elle sentit quelqu'un poser sa main sur son fessier, et elle glapit en faisant un bond de côté. « Aah ! ». Mais l'importun ne semblait pas vouloir continuer de la peloter ; en vérité, elle le vit filer à toute allure, un sac à la main. En plissant les yeux, il lui sembla reconnaître ce sac de toile, cette forme, ce bruit de pièces quand il le secouait. Elle posa également la paume sur son arrière-train, attestant ainsi effectivement de ses courbes, mais constatant l'absence de ses économies. Estomaquée, il lui fallu quelques secondes pour réagir : « Hé… Hé ! Au voleur ! Chopez-le ! ». Jil commença à courir, le coussin toujours devant elle, obligeant les passants à s'écarter pour ne pas être projetés contre les murs. Tournant la tête, elle cria à l'intention de Thor : « Rattrape-le Thor ! Mords lui les fesses ! ». Puis elle reporta son attention sur le malandrin qui louvoyait au milieu de la foule avec bien plus d'aisance qu'elle. En le voyant s'éloigner, elle grogna et soudain, disparut pour réapparaître un peu plus en avant, un peu plus en hauteur, chutant de quelques centimètres en hurlant. Elle se rattrapa tant bien que mal, et continua de courir, envoyant valser une petite fille qui passait par là dans le bac d'une fontaine. « Aaa - gzt – ah ! Désolée ! YA-HA ! En avant – gzt ». Plus tard, la gamine irait raconter à ses amies comment une dame rousse avait traversé la rue en se téléportant à droite et à gauche, armée d'un grand polochon et suivie par un chien massif à l'allure de loup, et au pelage immaculé ; tristement pour elle, personne ne la croirait.


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Ven 08 Juil 2016, 21:27

Les câlins de ma maîtresse me remplissaient de joie et de fierté. J'avais bien choisi mon coussin. Aussi, je ne doutais pas vraiment de moi puisque c'était le seul prénom qui se rapprochait de mon véritable. Si elle ne l'avait pas aimé, j'aurai sans doute légèrement boudé. Cependant, puisqu'elle semblait l'apprécier, ma queue s'agita de droite à gauche. J'avais envie de lui lécher le visage mais je réussis à me retenir. Pendant qu'elle payait, je fis quelques pas avant de trouver que ma queue était un objet de jeu particulièrement distrayant. Commençant à tourner sur moi-même dans l'espoir de l'attraper, je ne m'arrêtai que lorsque Jil eut fini. La langue pendante à cause de l'exercice plutôt fastidieux – surtout que je n'avais pas réussi une seule fois à l'avoir – je suivis la jeune femme dans la rue. Je la trouvais mignonne avec mon gros coussin dans les bras. Néanmoins, je me demandais comment elle arrivait à voir où elle mettait les pieds. Je doutais qu'elle y parvienne, d'où les grands écarts que faisaient les individus pour l'éviter. Si eux ne le faisaient pas, elle ne le ferait pas non plus, ça paraissait clair. Mais bon, je me fichais bien de tout ceci. La gueule vers le haut, je montrais ma fierté. J'avais à présent un nom et un coussin, de quoi me certifier que j'avais bel et bien ma place chez ma maîtresse. Elle semblait ravie et, donc, ne point penser à m'abandonner. J'étais sûr que j'allais pouvoir construire quelque chose de solide avec elle. Bon, restait le soucis de ma véritable nature qui, j'en étais certain, était un peu problématique. Lui dire ou non ? « Hmpf. ». Je venais de tousser, une substance un peu mouillée sortant de ma truffe sous le coup de l'éternuement. Ça voulait sans doute dire non. Ma queue, qui jusqu'ici était restée en berne, se mit de nouveau à frétiller vigoureusement.

Dans mes pensées, je ne remarquai que trop tard que Jil s'était faite voler sa bourse. Si, en tant que chien, je n'avais pas vraiment besoin d'argent, elle, en tant que femme, en avait besoin. Je ne savais pas ce qu'il y avait dans son petit sac à pièces mais, dans tous les cas, je ne devais pas laisser ce voleur s'en tirer comme ça. Je mis un peu de temps à me lancer, mon poids étant un gros soucis quand je souhaitais courir. Néanmoins, j'étais certain de pouvoir rattraper le malfrat sans trop de difficultés. L'Élémental, elle, par contre, ne semblait pas bien s'en sortir. Je m'arrêtai un instant pour voir si la gamine qu'elle avait envoyé dans la fontaine était vivante. Elle bougeait, c'était bon signe. Puis, je repris ma course. L'individu était réellement habile, ce qui lui donnait un avantage sur Jil et moi. Cependant, les gens s'écartaient sur mon passage, ce qui facilitait ma tache. La bouche ouverte, ma langue sortait du côté droit, comme si le vent avait décidé de l'emporter avec lui à l'opposé de la direction dans laquelle j'allais. Cela ne faisait que quelques jours que je me trouvais avec la jeune femme et le nombre  de péripéties que j'avais vécu à ses côtés étaient de loin supérieur à toutes celles de mon existence. Les choses, pourtant, n'étaient pas pour me déplaire. Je ne m'ennuyais pas ainsi.

Arrivant sur le sale voleur, je bondis sur lui en me hissant sur mes deux pattes arrières afin de retomber sur son dos. La tactique fonctionna. J'étais lourd et parvins assez facilement à le coincer sous moi en me couchant sur lui. Son cuir chevelu à quelques centimètres de ma gueule, je vins fouiller du côté de son oreille pour le sentir, laissant une trace humide sur mon passage. « Wouaf ! » fis-je proche de son canal auditif pour lui faire comprendre que c'était moi le patron. « Grrrrrr ». Il fallait toujours en rajouter avec les Hommes. Les animaux, d'instinct, savaient qui était le plus puissant, le plus fort. Ils choisissaient ou non de s'y frotter, certes, mais ils sentaient la grandeur. Les humains, eux, avaient cette forme d'orgueil, ce petit côté égocentrique qui les poussait à croire qu'ils étaient les plus forts. Sauf que, dans mon monde, ça ne fonctionnait pas ainsi. J'étais plus imposant que lui et il n'avait pas intérêt à se débattre, sinon j'allais le croquer sans ménagement. On ne volait pas ma maîtresse. Aussi, j'espérai sincèrement qu'elle allait le livrer à la garde d'Avalon.
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Un problème de polarité | ft. Victor Hyëu

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